Le conflit au Soudan augmente le nombre de déplacés bloqués à la frontière entre la Libye et la Tunisie

Les tensions montent dans la ville portuaire de Sfax, en Tunisie, où les habitants réclament l'expulsion de ceux qui arrivent des points chauds de l'Afrique (Photo, Reuters).
Les tensions montent dans la ville portuaire de Sfax, en Tunisie, où les habitants réclament l'expulsion de ceux qui arrivent des points chauds de l'Afrique (Photo, Reuters).
Short Url
Publié le Lundi 17 juillet 2023

Le conflit au Soudan augmente le nombre de déplacés bloqués à la frontière entre la Libye et la Tunisie

  • Pour tenter d'atteindre l'Europe, de nombreux réfugiés soudanais ont gagné le nord-ouest de la Libye et de la Tunisie
  • Cependant, l'UE offre à la Tunisie des incitations financières pour qu'elle devienne une gardienne de l'immigration en provenance d'Afrique du Nord

JUBA : Plusieurs centaines de migrants africains et de demandeurs d'asile, dont des enfants, sont bloqués dans une zone tampon isolée et militarisée à la frontière entre la Tunisie et la Libye, où ils se voient refuser toute assistance ou protection juridique.

Dans ce paysage aride, une crise humanitaire se développe rapidement, car ces personnes, fuyant la violence et la persécution dans leur pays d'origine, notamment le Soudan, se sont retrouvées piégées, incapables d'entrer en Libye ou de retourner en Tunisie.

Des vidéos mises en ligne ces derniers jours montrent des centaines d'adultes et d'enfants bloqués sans accès à la nourriture, à l'eau, à un abri ou à une assistance médicale, les agences de l'ONU s'étant vu refuser l'accès au site pour distribuer de l'aide.

De nombreux migrants ont été appréhendés lors de descentes de police dans la ville portuaire de Sfax, au sud-est de la capitale Tunis, et transportés par la garde nationale et l'armée sur une distance de 300 kilomètres jusqu'à Ben Gardane, avant d'être conduits à la frontière avec la Libye.

Depuis plusieurs mois, les tensions montaient à Sfax, les habitants réclamant l'expulsion des personnes arrivant des zones de conflit du continent africain, ce qui a donné lieu à une série d'agressions et d'affrontements entre la population locale et ces nouveaux arrivants.

Selon les Nations unies, outre les plus de 2,2 millions de personnes déplacées à l'intérieur du Soudan, près de 700 000 autres ont fui vers les pays voisins. Pour tenter d'atteindre l'Europe, certaines d'entre elles se sont dirigées vers le nord-ouest de la Libye et de la Tunisie.

«Je suis venu en Tunisie en quête de sécurité, mais au lieu de cela, je me suis retrouvé confronté à la violence et à l'hostilité», a déclaré à Arab News Mohammed Ahmad Yaqoub, un Soudanais de 25 ans qui s'est échappé de Sfax peu avant le début des rafles.

Rescapé du conflit du Darfour, Yaqoub a entrepris un voyage périlleux l'année dernière, car il était persécuté dans sa région natale d'Al-Fashir par des milices locales qui, selon lui, ont tué des membres de sa famille.

ds
Alors que le conflit au Soudan entre dans son troisième mois, il a déplacé près de 2,2 millions de personnes. Pour essayer de rejoindre l'Europe, des milliers d'autres ont pris le chemin de la Libye et de la Tunisie (Photo, AFP).

Fuyant les horreurs du Soudan, il a traversé le Tchad, avant de se retrouver pris au piège de l'instabilité qui règne en Libye, où il dit avoir été enlevé par un groupe armé local. Avec l'aide d'un ami, Yaqoub dit avoir été sauvé de la captivité.

Proche de l'Europe, la Tunisie est devenue sa prochaine destination. Cependant, l'accueil a été loin d'être chaleureux. Au lieu de trouver un refuge et un soutien, Yaqoub et de nombreux autres Soudanais déplacés ont dû faire face à la menace constante d'une expulsion.

Il affirme n'avoir reçu jusqu'à présent aucune aide de la part des agences d'aide internationale et dort désormais dans la rue, devant le bureau des Nations unies à Tunis.

Madibo Ismail, un ressortissant soudanais de 22 ans, s'est lui aussi retrouvé coincé en Tunisie après avoir fui les horreurs de la guerre. Rêvant d'une vie meilleure en Europe, il attend une occasion propice pour traverser la mer sournoise en bateau, malgré les risques connus.

Le stress psychologique d'Ismail est évident. Il a perdu le contact avec sa famille peu après le début des violences au Soudan entre les forces armées soudanaises et les forces paramilitaires de soutien rapide, le 15 avril.

Bien que l'incertitude le ronge chaque jour, il a déclaré à Arab News que son aspiration à la sécurité et à un avenir meilleur alimentait sa détermination à aller de l'avant.

Nadia Abderrahmane, 29 ans, originaire de Nyala, dans le sud du Darfour, est une autre Soudanaise qui a rejoint la Tunisie.

Les craintes d’Abderrahmane se sont accrues ces dernières semaines lorsque des rumeurs ont commencé à circuler selon lesquelles les autorités tunisiennes vont renvoyer de force les migrants vers les frontières instables de la Libye et de l'Algérie.

Ayant jusqu'à présent évité d'être prise dans l'un des raids, Abderrahmane s'accroche à l'espoir, déclarant à Arab News qu'elle prie pour «trouver un passage sûr vers un avenir plus radieux».

EN CHIFFRES

* Plus de 2,2 millions de personnes ont été forcées de quitter leur foyer depuis le 15 avril au Soudan.

* 528 000 personnes ont cherché refuge dans les pays voisins.

* 25 millions de personnes ont besoin d'une aide humanitaire.

 

Avec l'intensification du conflit au Soudan, en particulier au Darfour et dans la capitale Khartoum, les Nations unies et d'autres agences d'aide ont appelé à une intervention internationale concertée pour faire face à l'aggravation de la situation humanitaire et à l'afflux de personnes déplacées.

Alors que la communauté internationale est confrontée aux défis complexes posés par les migrations, les experts estiment qu'il est essentiel de répondre aux besoins spécifiques et aux vulnérabilités des Soudanais déplacés.

«Les souffrances endurées par ces personnes, particulièrement les femmes et les enfants, appellent une intervention urgente pour leur fournir la protection et le soutien dont elles ont désespérément besoin», a déclaré Imen Ben Mohammed, ancienne parlementaire tunisienne, à Arab News.

«La migration à travers la Tunisie vers l'Europe a toujours été présente, à la fois légalement et illégalement», a-t-elle indiqué, attribuant la récente montée des tensions intercommunautaires aux discours anti-migrants prononcés par les autorités tunisiennes.

LE CONFLIT SOUDANAIS: LES DATES CLÉS

11 avril 2019 : Un coup d'État militaire renverse le dictateur Omar al-Bachir à la suite d'un long soulèvement populaire.

17 août 2019 : Le Conseil militaire au pouvoir et l'alliance civile de l'opposition signent un accord constitutionnel.

3 octobre 2020 :  L’Accord de paix de Juba a été signé entre le gouvernement de transition et l'alliance des groupes armés.

8 février 2021 : Le Premier ministre, Abdallah Hamdok, annonce un nouveau Conseil des ministres comprenant sept anciens chefs rebelles.

25 octobre 2021 :  Le général Abdel Fattah al-Burhan dissout le gouvernement, arrête Hamdok et prend le pouvoir.

21 novembre 2021 :  Après des mois de manifestations de masse en faveur de la démocratie, Hamdok est rétabli dans ses fonctions mais démissionne deux mois plus tard.

25 octobre 2022 : Des milliers de personnes descendent dans la rue pour réclamer un gouvernement civil.

5 décembre 2022 :  Signature d'un accord-cadre politique entre les dirigeants civils et les militaires pour lancer une transition politique de deux ans.

Le 15 avril 2023 : Des combats éclatent entre les forces d'Al-Burhan et les forces de soutien rapide dirigées par le général Mohammed Hamdan Dagalo.

«Bien que nous ayons eu quelques problèmes auparavant, il n'y a jamais eu de vague importante de racisme ou d'agression envers les migrants jusqu'à ces derniers temps», a précisé Ben Mohammed.

Elle a appelé la communauté internationale à fournir de la nourriture, de l'eau, des abris et une aide médicale aux migrants bloqués à la frontière. Elle a également souligné la nécessité de pousser la Tunisie à respecter les lois internationales en matière de droits de l'homme.

«Le silence et l'absence de condamnation de la part de la communauté internationale sont vraiment décevants», a-t-elle ajouté.

Des experts sur la question migratoire dans la région ont accusé les politiciens tunisiens de faire des personnes déplacées des boucs émissaires pour détourner l'attention de leur gestion de l'économie du pays.

ds
Un drapeau national soudanais est attaché à une mitrailleuse de soldats des forces de soutien rapide qui attendent l'arrivée du lieutenant-général Dagalo (Photo, Reuters).

«Nous avons déjà vu des migrants et des réfugiés rester bloqués dans la même région, dans des conditions similaires», a déclaré à Arab News le Dr Franck Duvell, chercheur principal à l'université allemande d'Osnabrück, à propos de la crise frontalière libyenne en cours.

«S'attaquer aux causes profondes de la migration, telles que l'absence de progrès dans le processus démocratique et le déclin économique, peut contribuer à atténuer le problème», a-t-il signalé.

Il en va de même pour les gouvernements européens, qui se sont efforcés d'endiguer le flux de migrants risquant le périlleux voyage en mer jusqu'à leurs côtes méridionales.

«Une approche globale qui s'attaque aux causes profondes de la migration doit garantir les droits de l'homme et offrir des opportunités économiques durables», a ajouté Duvell.

Les analystes locaux suggèrent que la communauté internationale a été lente à critiquer les expulsions parce que ces actions sont largement conformes à la politique de l'UE en matière de migration.

«Le récent accord sur la migration entre l'Europe et la Tunisie, qui se concentre sur le contrôle de la migration et la police, démontre le soutien de l'UE aux autorités tunisiennes dans la prévention de la migration vers l'Europe», a déclaré Fadil Aliriza, fondateur et rédacteur en chef de Meshkal News, basé en Tunisie, à Arab News.

Le mois dernier, Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, a proposé un «programme de partenariat» avec le gouvernement tunisien, quelques jours seulement après la publication d'un projet de réformes européennes en matière de migration visant à expulser les demandeurs d'asile et les migrants vers des pays comme la Tunisie.

Von der Leyen a proposé un programme d'aide économique de 900 millions d'euros pour la Tunisie, ainsi qu'une aide budgétaire immédiate de 150 millions d'euros. En outre, 105 millions d'euros seraient consacrés à la gestion des frontières et aux activités de lutte contre la contrebande, soulignant le rôle potentiel de la Tunisie en tant que gardienne des migrations de l'Afrique du Nord vers l'Europe.

ds
Un migrant blessé qui a fui les violences à Sfax vers la zone tampon militarisée entre la Tunisie et la Libye, se repose après avoir été transporté en bus avec d'autres vers un abri temporaire dans un internat à Ben Guedane, le 12 juillet 2023 (Photo, AFP).

La proposition européenne est liée à un accord de prêt avec le Fonds monétaire international, qui pourrait aider la Tunisie à sortir de sa crise économique paralysante. Toutefois, les autorités tunisiennes se sont montrées réticentes à accepter les conditions de l'accord avec le FMI, qui exigent des réformes impopulaires.

Aliriza a déclaré que tant que les gouvernements ne s'attaqueraient pas aux causes profondes des migrations massives et n'œuvreraient pas au respect des droits de l'homme, les déplacements, les abus et les dangereuses traversées maritimes vers l'Europe se poursuivront.

«D'autres facteurs, tels que le changement climatique et le refus de délivrer des visas, contribuent à l'augmentation du nombre de personnes qui tentent des voyages périlleux vers l'Europe», a clarifié Aliriza, soulignant la nécessité d'établir des voies de migration sûres et légales.

Pour Yaqoub, l'hostilité des autorités et la négligence de la communauté internationale n'ont fait qu'aggraver sa situation, comme pour de nombreux autres réfugiés fuyant les conflits et confrontés à des abus sur la route.

«La situation n'a fait qu'empirer, nous laissant dans un état de désespoir et d'incertitude», a-t-il soutenu.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Le président libanais juge le monopole des armes à l'Etat "nécessaire et inévitable"

le président libanais Joseph Aoun s'adressant à la nation à la veille de la fête de l'indépendance dans un discours télévisé depuis le quartier général du commandement du secteur sud du Litani de l'armée libanaise à Tyr, le 21 novembre 2025. (AFP)
le président libanais Joseph Aoun s'adressant à la nation à la veille de la fête de l'indépendance dans un discours télévisé depuis le quartier général du commandement du secteur sud du Litani de l'armée libanaise à Tyr, le 21 novembre 2025. (AFP)
Short Url
  • Le président libanais Joseph Aoun affirme que le monopole des armes par l’État est “nécessaire et inévitable”, alors que l’armée prévoit de démanteler la présence militaire du Hezbollah au sud du Liban conformément au cessez-le-feu
  • Ce message intervient dans un contexte de fortes pressions américaines, de frappes israéliennes récurrentes et d’appels libanais à un soutien et un encadrement international pour sécuriser la mise en œuvre de ces engagements

BEYROUTH: Le président libanais Joseph Aoun, sous forte pression des Etats-Unis pour désarmer le Hezbollah, a jugé dans un discours prononcé vendredi dans le sud du Liban "nécessaire et inévitable" le monopole des armes à l'Etat.

Depuis le cessez-le-feu qui a mis fin il y a un an à une guerre meurtrière entre Israël et le mouvement pro-iranien, le Liban est sous forte pression de Washington pour qu'il pousse le Hezbollah à remettre ses armes à l'armée libanaise.

Conformément à l'accord de cessez-le-feu, l'armée libanaise doit démanteler la présence militaire du Hezbollah entre la frontière avec Israël et le fleuve Litani, à une trentaine de kilomètres plus au nord.

L'armée a ainsi soumis un plan au gouvernement, dans lequel elle s'engage à accomplir cette tâche titanesque d'ici la fin de l'année, avant de procéder par étapes sur le reste du territoire libanais.

Dans son discours, prononcé à la veille de la fête nationale, le président libanais a jugé le monopole de l'Etat sur les armes "nécessaire et inévitable" tout en appelant le comité chargé de surveiller la trêve regroupant Etats-Unis, France, ONU, Liban et Israël, à "s'assurer que les forces armées libanaises contrôlent seules" le sud du pays.

Il a répété que le Liban était prêt à négocier, sous parrainage américain ou international, "tout accord qui mettra fin à ces agressions transfrontalières".

Joseph Aoun a enfin exhorté "les amis du Liban et les pays frères à superviser l'ensemble de ce processus en établissant un calendrier clair et en mettant en place un mécanisme international de soutien à l'armée libanaise".

Au cours des dernières semaines, l'armée israélienne a multiplié les frappes sur le sud du Liban, accusant le Hezbollah de chercher à y reconstruire les infrastructures militaires détruites lors de sa guerre contre ce mouvement soutenu pro-iranien et allié au Hamas palestinien.

Selon le ministère de la Santé, une personne a été tuée lors d'une frappe vendredi dans le sud du Liban. Plus de 330 personnes ont été tuées au Liban et 945 blessées depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu, selon la même source.

Morris Tidball-Binz, rapporteur spécial de l'ONU sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, a dénoncé vendredi dans un communiqué le "schéma répété de meurtres illégaux et de violations du cessez-le-feu par Israël".


L'armée israélienne affirme que l'attaque au Liban a tué 13 militants du Hamas

Des personnes en deuil portent les cercueils des victimes de la frappe aérienne israélienne de mardi, lors d'un cortège funèbre dans le camp de réfugiés palestiniens d'Ein El-Hilweh, dans la ville portuaire de Sidon, au sud du Liban, jeudi. (AP)
Des personnes en deuil portent les cercueils des victimes de la frappe aérienne israélienne de mardi, lors d'un cortège funèbre dans le camp de réfugiés palestiniens d'Ein El-Hilweh, dans la ville portuaire de Sidon, au sud du Liban, jeudi. (AP)
Short Url
  • L’armée israélienne affirme avoir tué 13 membres du Hamas, dont Jihad Saïdaoui, dans une frappe sur le camp d’Aïn el-Héloué, tandis que le Hamas dénonce un « massacre » visant des civils
  • Le lieu de la frappe est au cœur d’un récit contradictoire : Israël parle d’un camp d’entraînement, tandis que des témoins et le Hamas évoquent un terrain de sport fréquenté par des jeunes du camp

JERUSALEM: L'armée israélienne a affirmé vendredi avoir tué "13 terroristes du Hamas" dans sa frappe menée mardi soir sur le camp de réfugiés palestiniens d'Aïn el-Héloué au Liban, dans laquelle les autorités libanaises ont annoncé 13 morts, sans préciser leur identité.

"Treize terroristes du Hamas ont été éliminés" dans cette frappe, "dont Jihad Saïdaoui, impliqué dans la formation de terroristes destinés à mener des attaques" contre Israël et ses soldats à partir territoire libanais, écrit dans un communiqué en hébreu l'armée qui avait aussi utilisé la graphie de "Jaouad Sidaoui".

A l'AFP qui lui demandait de lui fournir la liste nominative des douze autres personnes qu'elle dit avoir éliminées dans la frappe, l'armée israélienne a répondu n'avoir rien à ajouter à ce qui a été publié dans son communiqué.

Dans un avis de décès ayant circulé mercredi au Liban, le Hamas a publié la liste des noms des treize morts, en commençant par celui de Jihad Saïdaoui, avant de publier le lendemain sur Telegram, un message avec les photos de treize hommes d'apparence jeune, voire juvénile, accompagné d'un texte qualifiant la frappe "d'horrible massacre" ayant causé la mort de "plusieurs civils innocents".

Mardi, peu de temps après la frappe, l'armée israélienne avait annoncé avoir visé "des terroristes en opération dans un camp d'entraînement du Hamas".

"Les allégations (d'Israël) selon lesquelles le lieu ciblé serait un complexe d'entraînement appartenant au mouvement ne sont que pure calomnie (et visent) à justifier son agression criminelle et à inciter à la haine contre les camps et notre peuple palestinien", avait répliqué le Hamas, affirmant n'avoir "aucune installation militaire dans les camps palestiniens au Liban".

- "Terrain de sport" -

L'armée israélienne a diffusé ce qu'elle a présenté comme une vidéo de sa frappe montrant une attaque sur un bâtiment.

Mais le mouvement islamiste palestinien affirme que "ce qui a été pris pour cible est un terrain de sport ouvert fréquenté par les jeunes du camp (...) et que ceux qui ont été visés étaient un groupe de jeunes présents sur le terrain au moment de l'attaque".

"On a entendu trois explosions, nos maisons ont vacillé et les enfants tremblaient de peur", a déclaré à l'AFP au lendemain de l'attaque Mohammad Moustafa, habitant d'Aïn al-Heloué, le plus grand des camps de réfugiés palestiniens du Liban, près de la ville de Saïda, dans le sud du pays.

Agé de 67 ans, M. Moustafa a assuré que les morts étaient en majorité "des jeunes du camp qui jouaient au foot dans un terrain à l'intérieur du hangar" visé, dans lequel un correspondant de l'AFP a vu mercredi matin des taches de sang maculant le sol et des secouristes rassemblant des restes humains.

Lors des funérailles organisées à l'intérieur du camp pour 11 des 13 personnes tuées, un correspondant de l'AFP a vu des drapeaux aux couleurs du mouvement islamiste du Hamas, mais aussi des drapeaux palestiniens, sur les cercueils.

Les deux autres, dont une personne identifiée comme étant Jihad Saïdaoui, ont été enterrées dans un cimetière à l'extérieur du camp.

Le Liban "s'est engagé à désarmer les factions armées dans les camps palestiniens, mais les organisations terroristes continuent d'exploiter cyniquement la population et les infrastructures civiles" à leurs fins, écrit vendredi l'armée israélienne.

La frappe sur Aïn el-Héloué est survenue sur fond de trêve entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza et alors que l'armée israélienne intensifie ses tirs sur le sud du Liban malgré un cessez-le-feu avec le Hezbollah, allié du Hamas, qu'elle accuse de chercher à se réarmer.


Nouvelles frappes israéliennes sur Gaza, cinq morts selon les autorités locales

Cinq personnes dont un bébé ont été tuées jeudi dans la bande de Gaza, selon les autorités locales, au lendemain de la reprise de bombardements israéliens dans le territoire palestinien où Israël et le Hamas s'accusent de violer mutuellement la trêve. (AFP)
Cinq personnes dont un bébé ont été tuées jeudi dans la bande de Gaza, selon les autorités locales, au lendemain de la reprise de bombardements israéliens dans le territoire palestinien où Israël et le Hamas s'accusent de violer mutuellement la trêve. (AFP)
Short Url
  • Le bilan de ce nouvel accès de violence s'élève à 32 morts, selon les annonces des autorités locales confirmées par les hôpitaux
  • Dans la bande de Gaza, la reprise des bombardements fait peur aux habitants

GAZA: Cinq personnes dont un bébé ont été tuées jeudi dans la bande de Gaza, selon les autorités locales, au lendemain de la reprise de bombardements israéliens dans le territoire palestinien où Israël et le Hamas s'accusent de violer mutuellement la trêve.

Mercredi a été l'une des journées les plus meurtrières à Gaza depuis le 10 octobre et l'entrée en vigueur du cessez-le-feu.

Le bilan de ce nouvel accès de violence s'élève à 32 morts, selon les annonces des autorités locales confirmées par les hôpitaux.

Dans la bande de Gaza, la reprise des bombardements fait peur aux habitants.

"Ma petite fille n'a cessé de me demander toute la nuit : la guerre va-t-elle revenir ?" a déclaré à l'AFP Lina Karaz à Gaza-ville.

"Nous sommes inquiets [...] Cette nuit, le bruit des bombardements et des explosions [...] était terrifiant", a-t-elle ajouté, "quand ce cauchemar prendra-t-il fin ?"

Pour Mohammed Hamdouna, déplacé de 36 ans vivant dans un camp de tentes dans la région de Khan Younès, dans le sud de la bande, "rien n'a changé, concrètement", depuis le 10 octobre.

 "Toujours sous la tente" 

"Les villes sont en ruines (et) nous vivons toujours sous la tente malgré le froid et la pluie qui a inondé (les tentes) il y a deux jours", déplore-t-il alors que la situation humanitaire reste catastrophique, selon l'ONU.

Selon la Défense civile de Gaza, organisation de premiers secours opérant sous l'autorité du Hamas, cinq personnes ont été tuées dans des bombardements israéliens sur le sud du territoire, dans la partie du territoire restant sous le contrôle israélien à ce stade de la mise en oeuvre de l'accord de trêve.

L'hôpital Nasser de Khan Younès a confirmé avoir enregistré le décès de trois personnes de la même famille, dont une fillette d'un an.

"Nous dormions paisiblement, nous sommes pacifiques et nous ne voulons pas la guerre", a dit à l'AFP Sabri Abou Sabt, qui a perdu son fils et sa petite-fille dans une frappe à l'est de Khan Younès.

Sollicitée par l'AFP, une porte-parole de l'armée israélienne a confirmé que l'armée avait mené une frappe visant à "démanteler des infrastructures terroristes". "Rien d'inhabituel", a-t-elle affirmé.

"Israël a pris la décision de mener ces frappes aériennes de manière indépendante", a précisé la porte-parole du Premier ministre israélien, Shosh Bedrosian lors d'un point presse jeudi.

Néanmoins, "les Etats-Unis ont été prévenus (par Israël) avant les frappes", a indiqué un responsable américain à l'AFP sous le couvert de l'anonymat.

"Nous sommes profondément préoccupés par les frappes aériennes israéliennes que nous avons vues, au cours desquelles des civils auraient été tués et blessés hier, y compris des enfants", a déclaré jeudi soir Stéphane Dujarric, le porte-parole du secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres.

"Cela rappelle de façon frappante à quel point le cessez-le-feu est fragile. Nous avons besoin que chacun veille à ce que le cessez-le-feu tienne et continue de tenir", a-t-il ajouté.

"Escalade dangereuse" 

"Israël est sous pression internationale, les Américains mobilisent toute la région, liant la question de Gaza à celle de la normalisation et des accords d'Abraham avec l'Arabie Saoudite", a noté Eran Ortal, chercheur au Centre d'études stratégiques de Bar Ilan.

"Donc bien que le Hamas n'ait pas été désarmé, et qu'il y ait de fortes chances qu'il parvienne également à éviter le désarmement dans un avenir proche, le potentiel de reprise de la guerre à Gaza ne semble pas élevé", a-t-il estimé.

Deux autres personnes ont été tuées dans des frappes, également à l'est de Khan Younès, selon la Défense civile.

L'armée israélienne a affirmé jeudi avoir tiré jeudi en direction  de "deux terroristes" dans le sud de la bande de Gaza.

Le Hamas a dénoncé une "escalade dangereuse" et appelé les Etats-Unis, pays médiateur, à "exercer une pression immédiate" sur Israël.

Le Qatar, autre pays médiateur, a condamné "fermement les attaques brutales" qui menacent selon lui de compromettre la trêve.

La guerre à Gaza avait été déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre 2023 qui a entraîné la mort de 1.221 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP établi à partir de données officielles.

Plus de 69.500 Palestiniens ont été tués par la campagne militaire israélienne de représailles selon le ministère de la Santé de Gaza, des chiffres fiables selon l'ONU.