Bilan des émeutes: Des organisations critiquent «l'indécence» de Dupond-Moretti

Le ministre français de la Justice Eric Dupond-Moretti s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale à Paris le 11 juillet 2023. (Photo, AFP)
Le ministre français de la Justice Eric Dupond-Moretti s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale à Paris le 11 juillet 2023. (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 21 juillet 2023

Bilan des émeutes: Des organisations critiquent «l'indécence» de Dupond-Moretti

  • Eric Dupond-Moretti s'était félicité d'un taux de «  »95% de condamnations», souvent accompagnées de prison ferme, après les émeutes causées par la mort de Nahel
  • La réponse pénale « ferme, rapide, systématique» demandée par le ministre aux parquets est un « appel à la répression qui montre la méconnaissance du rôle des magistrats dans l'individualisation, tant des modes de poursuites que des peines prononcées»

PARIS: Des organisations de magistrats, avocats et personnels pénitentiaires ont critiqué jeudi "l'indécence" du garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti qui s'est félicité d'un taux de "95% de condamnations", souvent accompagnées de prison ferme, après les émeutes causées par la mort de Nahel.

La réponse pénale "ferme, rapide, systématique" demandée par le ministre aux parquets est un "appel à la répression qui montre la méconnaissance du rôle des magistrats dans l'individualisation, tant des modes de poursuites que des peines prononcées", écrivent dans un communiqué l'Association nationale des juges de l'application des peines (ANJAP), le Syndicat de la magistrature et le Syndicat des avocats de France (classés à gauche), l'Observatoire international des prisons, et des syndicats de personnels pénitentiaires.

Devant l'Assemblée nationale mercredi, Eric Dupond-Moretti avait rappelé sa demande de fermeté aux procureurs, et s'était réjoui d'un bilan "à la hauteur".

Entre le 27 juin et le 13 juillet, "1 278 jugements ont été prononcés, avec 95% de condamnations", "souvent avec mandat de dépôt" (départ en prison directement après l'audience), avait-il annoncé.

Le ministre avait précisé que "1 056 personnes ont été condamnées à une peine d'emprisonnement, dont 742 à une peine ferme". Au total, "près 600 personnes ont été incarcérées", avait-il ajouté.

"Nous, acteurs et actrices du milieu prison-justice, nous désolons de constater que le garde des Sceaux rend compte de l'action de la justice par une succession de chiffres censés représenter la fermeté et l'efficacité de l'action étatique", écrivent-ils. "Il alimente ainsi l'idée simpliste selon laquelle la prison est la seule réponse efficace à la délinquance".

"Au-delà de l'indécence à se prévaloir de placements massifs de personnes" en détention, il est "ici éludé" que le taux d'occupation moyen dans les maisons d'arrêt "frôle les 145%", écrivent aussi ces organisations.

La mort de Nahel, 17 ans, tué à bout portant par un policier lors d'un contrôle routier à Nanterre, a embrasé le pays, provoquant plusieurs nuits consécutives de violences, d'incendies de voitures, de saccages de bâtiments publics et de pillages dans de nombreuses villes de France.

Au total plus de 1 300 personnes ont été présentées à la justice après ces émeutes, dont 608 mineurs - qui n'ont pour la plupart pas été jugés, la procédure étant plus longue pour les moins de 18 ans.


Accord EU-USA: Bayrou juge que la France a été "un peu seule"

Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis
  • Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire"

PARIS: Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis, en marge d'un déplacement dans les locaux de Tracfin, organisme de lutte contre la criminalité financière, à Montreuil (93).

Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire", et qu'il fallait "un processus encore pas totalement élucidé de ratification" de cet accord.

"Il y a à vérifier quelle est la portée exacte de ces accords, et les Etats auront d'une manière ou d'une autre leur mot à dire", a-t-il ajouté.

"Je sais que toutes les autorités françaises, et en particulier le président de la République (Emmanuel Macron), ont été ceux qui se sont battus le plus contre des concessions qu'on considérait comme excessives", a-t-il affirmé avant de s'interroger: "Est-ce que nous avons été un peu seuls? Oui".

"Est-ce qu'on a le sentiment qu'à l'intérieur de l'Union européenne, des forces politiques et économiques étaient plutôt sur une ligne de trouver des accommodements? Oui", a-t-il ajouté, en estimant que de son point de vue, "la voie pour l'Europe est une voie d'affirmation et de résistance quand il faut et de fierté le plus souvent possible".

La classe politique française a été unanime à dénoncer l'accord conclu entre le président américain, Donald Trump, et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui prévoit notamment une hausse de 15% des droits de douane sur les exportations européennes.

Le président Emmanuel Macron a déploré mercredi en Conseil des ministres que l'Union européenne n'ait pas été assez "crainte" dans ses négociations commerciales avec les Etats-Unis, affirmant que la France continuerait de faire montre "d'exigence et de fermeté" dans la suite des discussions.


Lille: enquête ouverte après les propos sur internet d'une étudiante gazaouie

L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
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  • Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie

LILLE: Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie, dont Sciences Po Lille a annulé l'inscription mercredi.

"Une enquête a été ouverte pour apologie du terrorisme, apologie de crime contre l'humanité avec utilisation d'un service de communication au public en ligne", a écrit la procureure de la République de Lille, Carole Etienne, à l'AFP.

Des captures d'écran circulant sur les réseaux sociaux montrent qu'un compte, attribué à cette étudiante par des internautes et fermé depuis, a repartagé des messages appelant à tuer des juifs.

Elle a été désinscrite de l'Institut d'études politiques de Lille, où elle devait étudier à partir de septembre, en raison du contenu de certaines de ses publications qui "entre en contradiction frontale avec les valeurs portées par Sciences Po Lille", a indiqué l'établissement mercredi.

"Pourquoi on est passé à travers? Il y a quand même une question, il faut y répondre", a reconnu jeudi sur RMC François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre de l'Intérieur.

"Il y aura des poursuites qui seront engagées et sur la base de ces éléments-là, elle est susceptible d'être renvoyée dans son pays, bien évidemment", a-t-il ajouté.

"Administrativement, semble-t-il, je suis très prudent, il n'y avait pas de difficulté particulière, sauf que sur les réseaux sociaux, voilà, on s'en est rendu compte", a-t-il ajouté, précisant que "les services des titres de séjour relèvent du ministère des Affaires étrangères".

Sollicité par l'AFP, Sciences Po Lille a expliqué avoir "accueilli cette étudiante sur proposition du consulat général de France à Jérusalem".

L'incident a fait largement réagir dans la classe politique, jusqu'au gouvernement.

"Une étudiante gazaouie tenant des propos antisémites n'a rien à faire en France", a réagi sur X le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Il a indiqué avoir "demandé à ce qu'une enquête interne soit diligentée pour que cela ne puisse en aucun cas se reproduire".

Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a souligné sur le même réseau social avoir "demandé de faire fermer ce compte haineux", et a martelé que "les propagandistes du Hamas n'ont rien à faire dans notre pays".


Restitutions coloniales: le gouvernement français annonce un projet de loi

La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
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  • Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation
  • Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises

PARIS: Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation.

S'appliquant en priorité aux pays africains mais de "portée géographique universelle", ce texte vise à accélérer le retour dans leur pays d'origine de biens culturels appartenant aux collections nationales françaises.

Ils doivent revenir à des "Etats qui, du fait d'une appropriation illicite, en ont été privés" entre 1815 et 1972, selon le ministère français de la Culture.

Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises. Les oeuvres à restituer devront avoir été acquises "dans une situation de vol, de pillage, de cession ou de libéralité obtenue par contrainte ou violence ou d'une personne qui ne pouvait en disposer", a précisé le ministère.

La décision de sortie des collections pour opérer cette restitution ne passera plus par un processus législatif au cas par cas mais pourra intervenir sur seul décret du Conseil d'Etat et après avis, le cas échéant, d'une commission scientifique bilatérale.

Cette commission devra en effet documenter et déterminer, si besoin, le caractère illicite de l'appropriation des oeuvres réclamées à travers un travail qui associerait des experts et historiens français et l'Etat demandeur, selon le ministère.

Concernant la période historique retenue, 1815 correspond à la date d'un règlement des conquêtes napoléoniennes qui est dû à un premier mouvement de restitution d'œuvres à l'échelle européenne. 1972 est celle de l'entrée en application de la convention internationale de l'Unesco protégeant les biens culturels contre le trafic illicite.