Un remaniement plus cosmétique que stratégique

La présidence française a officialisé le remaniement du gouvernement français le 20 juillet 2023 avec huit nouveaux membres (Photo d'illustration, AFP).
La présidence française a officialisé le remaniement du gouvernement français le 20 juillet 2023 avec huit nouveaux membres (Photo d'illustration, AFP).
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Publié le Vendredi 21 juillet 2023

Un remaniement plus cosmétique que stratégique

  • Portés au pinacle par Emmanuel Macron en 2017, les ministres de la société civile sont les principaux sacrifiés
  • Il s'agit d'un remaniement à la marge qui leur permet de se séparer des maillons faibles

PARIS: Emmanuel Macron et Elisabeth Borne ont procédé jeudi à un remaniement à la marge qui leur permet de se séparer des maillons faibles sans pour autant régler politiquement le problème de la majorité relative, selon plusieurs experts.

Portés au pinacle par Emmanuel Macron en 2017, les ministres de la société civile sont les principaux sacrifiés des "ajustements" de l'exécutif, remplacés à l'Education et à la Santé par deux personnalités plus connues du camp présidentiel.

Gabriel Attal, étoile montante de la macronie, remplace à l'Education l'universitaire Pap Ndiaye, et la combative Aurore Bergé l'ancien directeur de la Croix rouge Jean-Christophe Combe aux Solidarités, deux ministres accusés de ne pas suffisamment "incarner" leurs dossiers, pourtant jugés prioritaires par Emmanuel Macron.

"On va vers un gouvernement de personnalités plus présentes dans l'espace médiatique" et des nominations de "soldats de la macronie", note le politologue Bruno Cautrès. C'est un remaniement "de confort", pour le constitutionnaliste Benjamin Morel.

"C’est plus un ajustement avec le départ de personnalités qui n'ont pas convaincu. En fait on solutionne des couacs", ajoute Anne-Charlène Bezzina, maître de conférences en droit public à l'Université de Rouen.

«Pas d'élargissement»
Mais cette exposition médiatique est "à double tranchant", prévient-elle, surtout pour Gabriel Attal à l'Education qui est un ministère "clivant".

Son ascension "un peu irrésistible au sein du gouvernement risque de l'exposer tôt" et au final de le priver du "destin national espéré", selon Mme Bezzina. A moins que la stratégie du président soit de le "tester et couper l’herbe sous pied".

Au-delà de ces deux personnalités connues, Emmanuel Macron fait monter plusieurs parlementaires, comme le MoDem Philippe Vigier, et les élus Renaissance Thomas Cazenave, Prisca Thevenot, Fadila Khattabi et Sabrina Agresti-Roubache.

"Il se débarrasse des vilains petits carnards (du gouvernement, ndlr) et tente de bétonner sa majorité parlementaire" mais sans l'élargir, résume Benjamin Morel, en envoyant des signaux à des élus qui ont pu se sentir, au Parlement, "méprisés".

"Mais il n'est pas dans une stratégie d’ouverture" qui consisterait à faire entrer au gouvernement des ministres susceptibles de "parler à la droite ou à la gauche", relève-t-il alors que les LR avaient redit leur opposition à tout "débauchage".

"Le problème de la majorité relative reste entier", selon Bruno Cautrès. "Il n'y a pas de gros changement de cap, il ne délivre pas de message politique fort vis-à-vis de la majorité".

Il n'y a "pas d’élargissement du tout. Au contraire on est sur une garde des plus rapprochées", ajoute Mme Bezzina.

«Colmater les fuites»
Dans l'entourage du président, on explique qu'il s'agit d'un remaniement "technique" afin d'avoir "une incarnation plus forte" dans les ministères et une "capacité à mettre en œuvre les réformes avec plus de rapidité et d'efficacité".

Dans l'opinion, le résultat de ce remaniement "sera soit neutre, soit négatif", prédit Céline Bracq, directrice générale de l'institut Odoxa car les Français souhaitaient "un remaniement d’ampleur avec un changement de Premier ministre et la sortie des ministres impopulaires".

"Politiquement, c’est une stratégie assez incompréhensible. Après la réforme des retraites et les émeutes, donner un signal politique assez fort, c’était un moyen de se relancer", estime-t-elle. Alors que là le remaniement a été tardif, effectué "en sourdine, au compte-gouttes".

Pour Anne-Charlène Bezzina, "c'est un peu reculer pour mieux sauter".

"Ca colmate temporairement les fuites qu’il avait pu y avoir dans la solidarité du premier gouvernement de Borne" mais cette nouvelle équipe "donne un peu l'impression qu’inéluctablement on va vers une fin du binôme avec Elisabeth Borne, qu'on est plus dans quelque chose de 'la fin à aménager', que d’un 'nouveau souffle'".


Macron fustige les «bourgeois des centres-villes» qui financent «parfois» le narcotrafic

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  • Emmanuel Macron a également insisté sur "la nécessité d'avoir une approche interministérielle du très local à l'international"
  • La question est au centre du débat public depuis l'assassinat jeudi à Marseille de Mehdi Kessaci, le frère d'un militant engagé contre le narcotrafic

PARIS: Le président Emmanuel Macron a estimé mercredi lors du Conseil des ministres que ce sont "parfois les bourgeois des centres-villes qui financent les narcotrafiquants", selon des propos rapportés par la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon lors de son compte-rendu.

Le chef de l'État a appuyé "l'importance d'une politique de prévention et de sensibilisation puisque, je reprends ses mots, +c'est parfois les bourgeois des centres-villes qui financent les narcotrafiquants+", a précisé Maud Bregeon, ajoutant: "on ne peut pas déplorer d'un côté les morts et de l'autre continuer à consommer le soir en rentrant du travail".

Emmanuel Macron a également insisté sur "la nécessité d'avoir une approche interministérielle du très local à l'international". La question est au centre du débat public depuis l'assassinat jeudi à Marseille de Mehdi Kessaci, le frère d'un militant engagé contre le narcotrafic.

 


Amiante dans les écoles: plus de 50 personnes et sept syndicats portent plainte à Marseille

Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire. (AFP)
Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire. (AFP)
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  • "La grande majorité des établissements scolaires en France, construits avant son interdiction en 1997, présentent encore à ce jour de l’amiante dans de nombreux éléments du bâti", rappelle dans un communiqué l'avocate Julie Andreu
  • Or, la vétusté de certains d'entre eux aggrave l'exposition à l'amiante et selon l'avocate, "les responsables concernés (collectivités locales) n’ont pas pris les mesures qui s’imposent"

MARSEILLE: Ils sont parents d'élèves, enseignants, agents municipaux: une cinquantaine de personnes, toutes exposées à l'amiante dans des écoles des Bouches-du-Rhône, vont déposer mercredi à Marseille une plainte contre X pour "mise en danger délibérée de la vie d'autrui".

Sept syndicats et trois associations de victimes de l'amiante sont aussi plaignants dans ce dossier, qui concerne 12 établissements scolaires, la plupart à Marseille.

"La grande majorité des établissements scolaires en France, construits avant son interdiction en 1997, présentent encore à ce jour de l’amiante dans de nombreux éléments du bâti", rappelle dans un communiqué l'avocate Julie Andreu, qui représente ces plaignants d'une douzaine d'établissements scolaires et dont la plainte va être déposée à 14h.

Or, la vétusté de certains d'entre eux aggrave l'exposition à l'amiante et selon l'avocate, "les responsables concernés (collectivités locales) n’ont pas pris les mesures qui s’imposent".

Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire.

"Une collègue est décédée en avril 2024 des suites d’un cancer lié à l’amiante, reconnu comme maladie professionnelle", a expliqué dans un dossier de presse le collectif stop amiante éducation, dans lequel sont réunis les syndicats et associations plaignants.

Le collectif dénonce "de nombreuses défaillances", notamment une absence d'information sur l'amiante, malgré les obligations réglementaires, ou encore une absence de protection pendant les travaux.

En mars, les syndicats enseignants avaient révélé que plus de 80% des bâtiments scolaires en France étaient potentiellement concernés par la présence d'amiante.

Un rapport du Haut Conseil de la Santé Publique publié en 2014, prévoit que d’ici 2050, 50.000 à 75.000 décès par cancer du poumon dus à l’amiante aient lieu, auxquels s’ajoutent jusqu'à 25.000 décès par mésothéliome (un autre type de cancer).

 


Assassinat de Mehdi Kessaci: «Non, je ne me tairai pas» face au narcotrafic, dit son frère dans une tribune au Monde

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  • "Je dirai et répéterai que mon frère Mehdi est mort pour rien. Je dirai la violence du narcotrafic"
  • "On me parle de crime d’avertissement. Mais un crime n'est jamais un avertissement"

PARIS: "Non, je ne me tairai pas" face au narcotrafic, a déclaré mercredi dans une tribune publiée dans le journal Le Monde Amine Kessaci, le frère de Mehdi, abattu jeudi à Marseille par deux personnes à moto.

"Je dirai et répéterai que mon frère Mehdi est mort pour rien. Je dirai la violence du narcotrafic", a également écrit le militant écologiste de 22 ans, engagé dans la lutte contre le narcobanditisme. En 2020, cette famille de six enfants avait déjà été endeuillée par l'assassinat d'un autre de ses frères, Brahim, 22 ans, dont le corps avait été retrouvé carbonisé dans un véhicule.

"On me parle de crime d’avertissement. Mais un crime n'est jamais un avertissement", a encore déclaré Amine Kessaci, qui a enterré mardi son frère Mehdi. "Voici ce que font les trafiquants : ils tentent d’annihiler toute résistance, de briser toute volonté, de tuer dans l’œuf tout embryon de révolte pour étendre leur pouvoir sur nos vies", a-t-il ajouté.

La protection policière qui lui a été accordée ne l'a pas été à ses proches, a souligné le militant écologiste de 22 ans. "Pourtant, qui ignorait que ma famille avait déjà payé un tribut de sang? Comment ne pas savoir que ma famille pouvait être touchée ?", s'est-il interrogé.

"Face à un tel ennemi, l’Etat doit prendre la mesure de ce qu'il se passe et comprendre qu'une lutte à mort est engagée", a-t-il encore prévenu.

"Il est temps d’agir, par exemple de faire revenir les services publics dans les quartiers, de lutter contre l’échec scolaire qui fournit aux trafiquants une main-d’œuvre soumise, de doter les enquêteurs et les forces de police des moyens dont ils ont besoin, de renforcer, de soutenir réellement les familles de victimes du narcotrafic. Nous comptons nos morts, mais que fait l’Etat ?"

Medhi Kessaci, 20 ans, a été assassiné jeudi à Marseille près d'une salle de concert par deux hommes à moto, activement recherchées, un "crime d'intimidation" et "un assassinat d'avertissement" pour les autorités.