Le nouveau directeur de la Banque centrale peut-il sortir le Liban de la crise ?

Parmi les nombreuses personnes qui ont manifesté devant le siège de la Banque centrale du Liban à Beyrouth cette année, on trouve des soldats à la retraite, qui ont exigé des ajustements de leurs pensions en fonction de l'inflation le 30 mars 2023. (AFP)
Parmi les nombreuses personnes qui ont manifesté devant le siège de la Banque centrale du Liban à Beyrouth cette année, on trouve des soldats à la retraite, qui ont exigé des ajustements de leurs pensions en fonction de l'inflation le 30 mars 2023. (AFP)
Le siège de la Banque centrale du Liban à Beyrouth. (AFP/photo d'archive)
Le siège de la Banque centrale du Liban à Beyrouth. (AFP/photo d'archive)
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Publié le Jeudi 03 août 2023

Le nouveau directeur de la Banque centrale peut-il sortir le Liban de la crise ?

  • Wassim Mansouri a la lourde tâche d'établir de nouvelles règles pour les transactions monétaires entre le gouvernement et la Banque centrale
  • Dans l'impasse politique du Liban, il n'est pas certain qu'il réussisse là où le gouverneur sortant Riad Salamé a échoué

BEYROUTH: Wassim Mansouri, premier vice-gouverneur de la Banque du Liban, la Banque centrale libanaise, a assumé lundi les responsabilités de l'ancien gouverneur Riad Salamé, ce qui présage une période d'optimisme prudent et suscite l'espoir d'un retour tardif à la responsabilité fiscale.

Au milieu de la pire crise financière de l'histoire du pays, aggravée par des années de désintégration des actifs par son élite politique, M. Mansouri est confronté à une tâche ardue: restaurer la crédibilité, longtemps malmenée, de la Banque centrale.

«Il est nécessaire de mettre fin à la politique d'emprunt du gouvernement auprès de la Banque centrale et de limiter ce processus aux seules questions d'urgence, pour une période limitée, à condition qu'il soit légalisé», a déclaré M. Mansouri le jour de son entrée en fonction.

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Wassim Mansouri, gouverneur intérimaire de la Banque centrale du Liban, lors d'une conférence de presse au siège de la banque, à Beyrouth, le 31 juillet 2023. (AFP)

Il tente ainsi d'établir de nouvelles règles pour les transactions monétaires entre le gouvernement et la Banque centrale afin de remettre la politique fiscale en conformité avec le code libanais de la monnaie et du crédit, établi en 1963.

M. Mansouri cherche à obtenir une couverture juridique et législative de ses conditions, tant de la part des autorités exécutives que législatives, afin de continuer à financer le gouvernement tout en s'exonérant de toute responsabilité ultérieure.

Il a appelé à la mise en œuvre de réformes fiscales dans les six mois. Ces dernières devraient inclure l'approbation du budget pour 2023-2024, l'adoption de contrôles des capitaux, une restructuration des banques et l'application d'une discipline financière.

Les marchés financiers ont réagi positivement à la nouvelle du départ de M. Salamé, après trente ans d'un parcours semé d'embûches. La valeur du dollar (1 dollar = 0,91 euro) a chuté par rapport à la livre libanaise, passant de 99 000 à 88 500 au cours de la semaine qui précédait son départ.

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L'ancien gouverneur de la Banque centrale du Liban, Riad Salamé. (Photo d'archives de l'AFP)

«C'est comme si une bouffée d'air frais venait de s'échapper d'un trou qui s'est soudainement ouvert dans un mur épais et impénétrable construit entre la Banque centrale et le monde entier – à proprement parler», a affirmé George Kanaan, PDG de l'Association des banquiers arabes, à Arab News.

«Soudain, on nous dit qu'il est prêt à fournir des statistiques, à travailler avec le gouvernement, à informer le Parlement, à discuter, on nous explique qu'il veut que les choses soient légalisées dans le cadre d'une législation appropriée pour lui permettre de travailler.»

«Cela n'a rien à voir avec le passé. C'est un nouveau départ. Mais la question est de savoir ce qui se passera juste après. La réponse est une série de réformes, à commencer par des réformes législatives. Alors nous pourrons commencer à voir comment la crise pourrait enfin se résorber.»

«Cependant, il existe une raison pour laquelle les réformes ont été bloquées: la classe politique libanaise ne les considère pas comme nécessaires, ou bien elle pense que si elles sont mises en œuvre, elles lui porteront préjudice. Dans ce cas, le printemps sera de courte durée.»

En effet, il n'y a aucune garantie que M. Mansouri réussisse. Il n'y a pas de proposition de loi qui permettrait à la Banque centrale de prêter de l'argent à l'État avec une couverture législative. Et rien n'indique la possibilité d'une session parlementaire pour adopter un tel projet de loi.

Le Premier ministre intérimaire, Najib Mikati, n'a pas présenté de projet de loi qui permettrait au gouvernement d'emprunter des devises étrangères à la banque. Selon les médias locaux, il a hésité à le faire «en raison de son caractère illégal», ce qui place la balle dans le camp du Parlement.

La politique de prêt de la Banque centrale à l'État a été une cause fondamentale de l'épuisement des réserves monétaires et de l'effondrement des secteurs bancaire et financier libanais, autrefois florissants, aggravés par l'incapacité du gouvernement à mettre en œuvre des réformes et à lutter contre le gaspillage et la corruption.

Le gouvernement cherche actuellement un prêt d’1,2 milliard de dollars sur six mois pour couvrir les salaires du secteur public, de l'armée et de la sécurité, le coût des importations essentielles et les interventions sur le marché en cas de besoin.

M. Mansouri peut-il réussir là où M. Salamé a échoué? Le gouvernement est en mode intérimaire prolongé et le Parlement reste profondément divisé, ce qui rend difficile l'adoption de toute législation qui pourrait s'avérer controversée. Par ailleurs, les réserves de la Banque centrale, selon les données financières, ne s'élèvent plus qu'à 9 ou 10 milliards de dollars.

Le Parlement est divisé en plusieurs factions, dont les Forces libanaises, les Phalanges libanaises, les députés réformistes et certains députés indépendants, qui refusent de voter des lois en l'absence d'un président. Le poste est vacant depuis la fin du mandat de Michel Aoun, au mois d’octobre de l'année dernière, le Parlement ne parvenant pas à se mettre d'accord sur un successeur. Ils boycotteront donc probablement la session législative si elle est programmée.

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La livre libanaise a atteint de nouveaux sommets face au dollar. (Photo AFP)

Certaines parties, comme le Courant patriotique libre, ont posé des conditions à leur participation aux sessions, tandis que d'autres, notamment le mouvement Amal et le Hezbollah, ont fait preuve de peu d'enthousiasme.

Interrogé sur la capacité de M. Mansouri à apporter des changements, compte tenu de la paralysie politique; M. Kanaan fait remarquer que le nouveau gouverneur possède des alliés qui veulent sa réussite.

«Il n'est pas seul», a déclaré M. Kanaan. «Beaucoup de gens le soutiennent. Tout seul, il n'y arrivera pas ; les autres vice-gouverneurs et lui seraient probablement contraints de partir s'ils insistent sur les réformes.»

«Je pense qu'il y a d'autres parties au Liban, mais pas nécessairement des organes politiques, qui veulent que les réformes soient conduites. Il est certain que le monde entier, en dehors du Liban, les réclame. Tout le monde les exige.»

«Le Liban est actuellement témoin d'un flux de liquidités et d'une atmosphère économique positive qui va dans le sens de la hausse, ce qui relâche la pression en faveur des réformes. Tout le monde aurait tendance à dire, si les choses vont bien: “Pourquoi aurions-nous besoin de réformes puisque les choses finiront par aller dans la bonne direction sans elles?” Et ce serait regrettable.»

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Des militaires à la retraite se heurtent à des soldats devant la Banque centrale du Liban lors d'une manifestation pour réclamer des ajustements à l'inflation pour leurs pensions, à Beyrouth, le 30 mars 2023. (AFP)

M. Mansouri s'est montré prudent au cours des premiers jours de son mandat et s'est abstenu de toute nouvelle déclaration aux médias, laissant le temps à «l'action», comme le disent les membres de son entourage. Mais cela signifie qu'il est difficile de prédire le résultat final.

Fadi Khalaf, secrétaire général de l'Association des banques du Liban, a déclaré à Arab News: «Il est trop tôt pour commenter la politique que le gouverneur adjoint de la Banque centrale a l'intention de mener. Nous sommes actuellement dans une phase de surveillance et d'attente.»

En ce qui concerne l'héritage de M. Salamé, dont le mandat de gouverneur a été renouvelé quatre fois entre l'ère de feu le président Elias Hraoui et celle d'Aoun, il est indéniable qu'il bénéficiait du soutien de la plupart des factions politiques.

Malgré ses objections constantes face aux politiques adoptées par l'élite politique au pouvoir, il a continué à couvrir les déficits et les dépenses de fonctionnement de l'État libanais.

L'une des dépenses les plus importantes de la Banque centrale était le coût de la production d'électricité, qui s'élevait à 2 milliards de dollars par an. L'argent était remis sous forme d'avances du Trésor au ministère de l'Énergie, sans jamais être remboursé à la banque.

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Une femme brandit une pancarte lors d'une manifestation organisée par le groupe Depositors Solidarity Union afin de protester contre les politiques monétaires de la Banque centrale libanaise devant le siège de la banque, à Beyrouth, le 23 juin 2023. (AFP)

Cette situation a incité M. Salamé à interrompre le processus en 2020. Le secteur de l'électricité continue d'être le plus gros fardeau pour la réserve obligatoire de la banque, ainsi que pour le Trésor public, déjà épuisé.

Bien que le conflit et la crise dans la Syrie voisine aient engendré des défis économiques difficiles pour le Liban, les tours de passe-passe financiers de M. Salamé ont protégé le pays d'une grande partie des répercussions jusqu'à la crise financière de 2019.

Cette dernière a provoqué l'effondrement du secteur bancaire et la détérioration du taux de change du dollar. Cette crise s'est aggravée lorsque le gouvernement de l'ancien Premier ministre Hassan Diab a fait défaut sur la dette extérieure du Liban, en 2020.

Un expert bancaire, qui s’est exprimé auprès d’Arab News sous couvert d'anonymat, estime que les emprunts «continueront, que ce soit directement ou conformément à la loi», perpétuant largement l'héritage de M. Salamé.

«Les dollars [de la Banque centrale] iront aux postes de dépenses de l'État, mais ce qui est nécessaire, c'est l'amélioration des finances de l'État et la rationalisation des dépenses en dollars», a précisé l'expert.

Pour M. Mansouri, la possibilité de mettre en œuvre un changement tangible est étroite.

«Je dirais que c'est une question de semaines», a déclaré M. Kanaan.

«Dans quelques semaines, soit il fait un pas dans la bonne direction, avec toutes sortes d'autres réformes, et alors nous serons en train de vraiment progresser dans la bonne direction, soit il s'en va, c'est la seconde solution. Ou alors il se plie à l'exercice de ses fonctions, comme Riad l'a fait avant lui.»

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com

 


Liban: le chef de l'Etat demande à l'armée de «s'opposer à toute incursion israélienne»

Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit. (AFP)
Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit. (AFP)
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  • Dans un communiqué, le chef de l'Etat a condamné cette opération et "demandé à l'armée de faire face à toute incursion israélienne (...) pour défendre le territoire libanais et la sécurité des citoyens"
  • Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière"

BERYROUTH: Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit.

Dans un communiqué, le chef de l'Etat a condamné cette opération et "demandé à l'armée de faire face à toute incursion israélienne (...) pour défendre le territoire libanais et la sécurité des citoyens".

Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière".

Cette unité "a investi le bâtiment de la municipalité du village, où dormait Ibrahim Salamé, un employé municipal, qui a été tué par les soldats de l'ennemi", a ajouté l'Ani.

Le ministère de la Santé a confirmé la mort de l'employé municipal.

Des villageois cités par l'Ani ont indiqué que l'incursion avait duré plusieurs heures et que les forces israéliennes s'étaient retirées à l'aube.

Sur X, le Premier ministre libanais Nawaf Salam a dénoncé "une agression flagrante contre les institutions de l'Etat libanais et sa souveraineté".


Liban: incursion israélienne dans un village frontalier, un employé municipal tué

Un employé municipal a été tué jeudi, selon le ministère libanais de la Santé, lors d'une incursion israélienne nocturne dans un village du sud du Liban, confirmée par Israël qui a affirmé agir contre le Hezbollah pro-iranien. (AFP)
Un employé municipal a été tué jeudi, selon le ministère libanais de la Santé, lors d'une incursion israélienne nocturne dans un village du sud du Liban, confirmée par Israël qui a affirmé agir contre le Hezbollah pro-iranien. (AFP)
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  • En vertu d'un cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à la guerre entre le Hezbollah et Israël, ce pays a retiré ses troupes du sud du Liban mais continue d'occuper cinq points sur le territoire libanais, frontalier du nord d'Israël
  • Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière"

BEYROUTH: Un employé municipal a été tué jeudi, selon le ministère libanais de la Santé, lors d'une incursion israélienne nocturne dans un village du sud du Liban, confirmée par Israël qui a affirmé agir contre le Hezbollah pro-iranien.

En vertu d'un cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à la guerre entre le Hezbollah et Israël, ce pays a retiré ses troupes du sud du Liban mais continue d'occuper cinq points sur le territoire libanais, frontalier du nord d'Israël.

Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière".

Cette unité "a investi le bâtiment de la municipalité du village, où dormait Ibrahim Salamé, un employé municipal, qui a été tué par les soldats de l'ennemi", a ajouté l'Ani.

Le ministère de la Santé a confirmé la mort de l'employé municipal.

Des villageois cités par l'Ani ont indiqué que l'incursion avait duré plusieurs heures et que les forces israéliennes s'étaient retirées à l'aube.

Sur X, le Premier ministre libanais Nawaf Salam a dénoncé "une agression flagrante contre les institutions de l'Etat libanais et sa souveraineté".

L'armée israélienne a confirmé avoir mené cette incursion, affirmant qu'elle intervenait dans le cadre de ses "activités visant à détruire une infrastructure terroriste" du Hezbollah.

Elle a ajouté que l'unité avait "repéré un suspect à l'intérieur du bâtiment" de la municipalité et ouvert le feu après avoir identifié "une menace directe" sur les soldats.

L'incident "fait l'objet d'une enquête", selon l'armée.

Dans un autre village frontalier, Adaissé, une unité israélienne a dynamité un bâtiment servant à abriter des cérémonies religieuses, selon l'Ani.

Ces derniers jours, l'aviation israélienne a intensifié ses frappes au Liban, affirmant viser des membres ou des infrastructures du Hezbollah.

Mardi, le porte-parole du Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'Homme, Jeremy Laurence, a indiqué que 111 civils avaient été tués au Liban par les forces israéliennes depuis la fin de la guerre.

Le Hezbollah est sorti très affaibli du conflit et les Etats-Unis exercent une intense pression sur le gouvernement libanais pour qu'il livre ses armes à l'armée nationale, ce qu'il refuse jusqu'à présent.

Le mécanisme de surveillance du cessez-le-feu, qui regroupe outre le Liban et Israël, les Etats-Unis, la France et l'ONU, s'est réuni mercredi dans la localité frontalière de Naqoura, qui abrite le quartier général des forces de l'ONU.

L'émissaire américaine Morgan Ortagus a déclaré au cours de la réunion que "l'armée libanaise doit à présent exécuter entièrement son plan" visant à "placer toutes les armes sous le contrôle de l'Etat d'ici la fin de l'année".


Soudan: l'ONU appelle à mettre un terme au siège d'El-Facher après une tuerie dans une maternité

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  • Le chef des paramilitaires soudanais Mohamed Daglo a reconnu mercredi soir une "catastrophe" dans la ville, assurant: "La guerre nous a été imposée"
  • Antonio Guterres s'est dit "gravement préoccupé par l'escalade militaire récente" à El-Facher, appelant à "mettre un terme immédiatement au siège et aux hostilités"

PORT-SOUDAN: Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé jeudi à mettre un terme à l'"escalade militaire" au Soudan, après le meurtre de plus de 460 personnes dans une maternité à El-Facher, ville clé prise par les forces paramilitaires.

Les informations se multiplient sur des exactions massives depuis que les Forces de soutien rapide (FSR, paramilitaires) ont pris dimanche, après 18 mois de siège, cette dernière grande ville qui échappait à leur contrôle dans la vaste région du Darfour, où "les massacres continuent" selon des images satellite analysées par le Humanitarian Research Lab (HRL) de l'université Yale.

Le chef des paramilitaires soudanais Mohamed Daglo a reconnu mercredi soir une "catastrophe" dans la ville, assurant: "La guerre nous a été imposée".

Antonio Guterres s'est dit "gravement préoccupé par l'escalade militaire récente" à El-Facher, appelant à "mettre un terme immédiatement au siège et aux hostilités".

L'Organisation mondiale de la santé (OMS) s'est dite "consternée par les informations faisant état du meurtre tragique de plus de 460 patients et accompagnateurs à la maternité saoudienne d'El-Facher". Selon l'institution, cette maternité était le seul hôpital encore partiellement opérationnel dans la ville.

Après la prise d'El-Facher à leurs rivaux, l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane, les FSR contrôlent désormais l'ensemble du Darfour, vaste région de l'ouest du Soudan couvrant le tiers du pays.

Les communications satellite restent coupées -sauf pour les FSR qui contrôlent le réseau Starlink-, les accès d'El-Facher restent bloqués malgré les appels à ouvrir des corridors humanitaires. Dans ce contexte, il est extrêmement compliqué de joindre des sources locales indépendantes.

Maîtres du Darfour 

"Plus de 2.000 civils ont été tués au cours de l'invasion de la milice (des FSR) à El-Facher, ciblant les mosquées et les volontaires du Croissant-Rouge", a pour sa part affirmé Mona Nour Al-Daem, chargée de l'aide humanitaire au gouvernement pro-armée.

A El-Facher, le comité de résistance local, qui documente les exactions depuis le début du conflit, a rapporté mercredi soir avoir entendu des tirs dans l'ouest de la ville, "où quelques soldats restants combattent avec (...) ténacité".

Depuis dimanche, plus de 36.000 personnes ont fui les violences, majoritairement vers la périphérie d'El-Facher et vers Tawila, cité située à 70 km plus à l'ouest et qui était déjà la plus importante zone d'accueil du Soudan, selon l'ONU, avec plus de 650.000 déplacés.

De rares images de l'AFP en provenance de Tawila montrent des déplacés portant leurs affaires sur leur dos ou sur leur tête. Certains montent des tentes, d'autres, parfois blessés, sont assis dans des conditions précaires.

Le Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme a alerté sur le "risque croissant d'atrocités motivées par des considérations ethniques" en rappelant le passé du Darfour, ensanglanté au début des années 2000 par les massacres et les viols des milices arabes Janjawid, dont sont issues les FSR, contre les tribus locales Massalit, Four ou Zaghawa.

"Unité" 

Les FSR, qui ont installé au Darfour une administration parallèle, contrôlent désormais l'ouest du Soudan et certaines parties du sud, avec leurs alliés. L'armée contrôle le nord, l'est et le centre du troisième plus vaste pays d'Afrique, ravagé par plus de deux ans de guerre.

Des experts craignent une nouvelle partition du Soudan, après l'indépendance du Soudan du Sud en 2011. Mais le chef des FSR a affirmé mercredi que la prise complète du Darfour par ses forces favoriserait "l'unité" du pays.

"La libération d'El-Facher est une opportunité pour l'unité du Soudan et nous disons : l'unité du Soudan par la paix ou par la guerre", a déclaré M. Daglo mercredi.

Les pourparlers menés depuis plusieurs mois par le groupe dit du "Quad", qui réunit les Etats-Unis, l'Egypte, les Emirats arabes Unis et l'Arabie saoudite, sont restés dans l'impasse, selon un responsable proche des négociations.

Leurs propositions de trêve se heurtent, selon lui, "à l'obstructionnisme continu" du pouvoir de M. Burhane, qui a refusé en septembre une proposition prévoyant à la fois son exclusion et celle des FSR de la transition politique post-conflit.