Election, inflation, manifestation: au Kenya, première année sous tension pour le président Ruto

Le président kényan William Ruto prononce son discours d'ouverture lors du Sommet africain sur le climat 2023 au Kenyatta International Convention Centre (KICC) à Nairobi, le 4 septembre 2023. (Photo,  SIMON MAINA / AFP)
Le président kényan William Ruto prononce son discours d'ouverture lors du Sommet africain sur le climat 2023 au Kenyatta International Convention Centre (KICC) à Nairobi, le 4 septembre 2023. (Photo, SIMON MAINA / AFP)
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Publié le Mardi 12 septembre 2023

Election, inflation, manifestation: au Kenya, première année sous tension pour le président Ruto

  • Locomotive d'Afrique de l'Est en ralentissement depuis 2019, l'économie kényane a été sérieusement ébranlée par le Covid puis l'onde de choc de la guerre en Ukraine
  • Si l'inflation a ralenti à +6,7% en août, sur un an, le prix de l'essence a augmenté de 22%, l'électricité de près de 50%, le sucre de 61%, les haricots de 30%

NAIROBI: Dans son échoppe du centre de Nairobi, Anita Wairimu propose de tout: boissons, biscuits, cadenas de valise, câbles de téléphone, collants... Mais elle ne vend presque rien.

"J'ai cette boutique depuis huit ans, c'est l'année la plus difficile, pire que durant le Covid. Les prix augmentent, les gens n'ont pas d'argent", soupire-t-elle.

Il y a un an, cette mère célibataire de 44 ans votait pour William Ruto, qui s'était fait le candidat des "débrouillards" du petit peuple, promettant de redresser le pays en améliorant le sort des vendeurs de rue, petits artisans et autres moto-taxis qui peinent à joindre les deux bouts.

Le 13 septembre 2022, en le voyant prêter serment, "j'étais tellement heureuse", se souvient-elle. Un an plus tard, elle s'affirme "déçue".

Elle qui gagnait environ 1 000 shillings (6,50 euros) par jour peine désormais à en faire 500. "On survit. Ce qu'on gagne sert uniquement à manger et payer le loyer", ajoute-t-elle, expliquant devoir parfois se contenter d'un repas par jour.

Locomotive d'Afrique de l'Est en ralentissement depuis 2019, l'économie kényane a été sérieusement ébranlée par le Covid puis l'onde de choc de la guerre en Ukraine.

Si l'inflation a ralenti à +6,7% en août, sur un an, le prix de l'essence a augmenté de 22%, l'électricité de près de 50%, le sucre de 61%, les haricots de 30%.

Les prévisions de croissance pour 2023 s'annoncent inférieures aux +4,8% de 2022 (contre +7,6% l'année précédente), plombées notamment par une monnaie en dépréciation continue (-30% sur le dollar en 18 mois) et une dette record de 10 100 milliards de shillings (64,4 milliards d'euros).

Taxes

"La première année de M. Ruto a été extrêmement compliquée", estime Ken Gichinga, chef économiste au cabinet d'analyse Mentoria Economics: "Premièrement, le contexte mondial n’est pas facile. Ensuite, les politiques mises en place n’ont pas été efficaces".

La décision du président de supprimer des subventions sur les carburants et certains produits alimentaires "a ralenti l'économie presque du jour au lendemain" et son "fonds des débrouillards", mesure-phare de son programme consistant en un système de micro-prêts, propose pour l'instant des "montants trop faibles", souligne-t-il.

Dans la loi de finances 2023-2024, le gouvernement a également augmenté des taxes (doublement de la TVA sur les carburants notamment) et en a instauré d'autres, venant amputer pouvoir d'achat et capacité d'investissement.

Le gouvernement affirme y être contraint pour assainir la situation laissée par la précédente administration, dont M. Ruto était le vice-président.

Saluant cette politique, le Fonds monétaire international et la Banque mondiale ont accordé de nouveaux prêts au Kenya.

"L'économie va mal partout, c'est mondial", rappelle Simon Migwi, un "boda boda" (moto-taxi) qui soutient le président.

«Trahi»

Anita Wairimu n'en est pas moins amère: "C'est nous, les débrouillards, qui souffrons le plus".

"Ils ont menti aux débrouillards, ils ont trompé les débrouillards", peste Robert Kiberenge, 47 ans, "au chômage depuis 14 ans".

Même s'il a voté pour Raila Odinga, l'adversaire de Ruto à la présidentielle, lui aussi se sent "trahi".

L'opposition a tenté de capitaliser sur le mécontentement, organisant dix journées de mobilisation, émaillées d'affrontements qui ont fait 50 morts, selon des ONG.

Pour sortir de l'impasse, des négociations sont en cours entre gouvernement et opposition sur le coût de la vie mais aussi sur des sujets politiques comme la création d'un statut de chef de l'opposition.

"Si l'issue est autre qu'une baisse des prix de la nourriture, les gens n'auront pas l'impression d'un succès", prévient l'analyste politique Nerima Wako-Ojiwa.

Pour Michael Chege, ancien professeur de politique publique à l'université de Nairobi, le Kenya a cédé aux sirènes du "populisme". "Si l'idéologie des +débrouillards+ était appliquée, ça creuserait un déficit encore plus grand (...) Et l'opposition est plus populiste encore en lui demandant plus (au gouvernement)".

Visibilité internationale

Sur la scène internationale, William Ruto a multiplié les déplacements à l'étranger et les déclarations fortes, cultivant une image de champion de l'environnement et des pays en développement. Nairobi a notamment accueilli en septembre le premier Sommet africain sur le climat.

Ses détracteurs ont interrogé le coût de ses voyages quand il prône les économies dans son pays, ou pointé le fait qu'il demande une réforme des institutions financières internationales dont il applique les préconisations au Kenya.

Mais dans un pays au bord de la dépression, Joshua Mwiti veut rester optimiste.

"Il est trop tôt pour condamner le président", estime ce guide touristique de 32 ans, qui dit n'avoir "jamais voté": "Donnons-lui du temps. Lorsque vous construisez une maison, vous ne pouvez pas y vivre tout de suite".

Pour Anita Wairimu, le temps presse: "Si les choses ne changent pas, dans un an, je devrais fermer".


Microsoft signe un accord avec le fournisseur d'énergie renouvelable Brookfield

Le géant du numérique Microsoft a annoncé mercredi avoir signé un accord avec le fournisseur d'énergie renouvelable canadien Brookfield Asset Management, qui en ferait le plus important accord d'entreprise de fourniture d'énergie verte, selon le groupe. (AFP)
Le géant du numérique Microsoft a annoncé mercredi avoir signé un accord avec le fournisseur d'énergie renouvelable canadien Brookfield Asset Management, qui en ferait le plus important accord d'entreprise de fourniture d'énergie verte, selon le groupe. (AFP)
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  • L'accord prévoit le développement d'un champ d'éoliennes et de panneaux solaires de 10,5 GigaWatt (GWt) afin d'alimenter les centres de données du groupe numérique, qui vise la neutralité carbone d'ici à 2030
  • L'IA, et plus largement l'informatique dématérialisé, va entraîner une hausse exponentielle de la consommation énergétique des groupes numériques

SAN FRANCISCO: Le géant du numérique Microsoft a annoncé mercredi avoir signé un accord avec le fournisseur d'énergie renouvelable canadien Brookfield Asset Management, qui en ferait le plus important accord d'entreprise de fourniture d'énergie verte, selon le groupe.

Cet accord qualifié de "première" prévoit, selon Brookfield, le développement d'un champ d'éoliennes et de panneaux solaires de 10,5 GigaWatt (GWt) afin d'alimenter les centres de données du groupe numérique, qui vise la neutralité carbone d'ici à 2030.

Il met également en lumière les importants investissements réalisés par les plus grands groupes mondiaux afin d'atteindre leur objectifs en terme d'énergie propre tout en restant compétitif dans la course au développement de l'intelligence artificielle (IA).

Car l'IA, et plus largement l'informatique dématérialisé (cloud), va entraîner une hausse exponentielle de la consommation énergétique des groupes numériques, alors qu'ils multiplient les centres de données, particulièrement énergivores, augmentant leur dépendance vis-à-vis des fournisseurs d'énergie traditionnels.

"Cette collaboration avec Brookfield vient soutenir le développement innovant de réseaux d'énergies plus variées au niveau mondial et va contribuer à atteindre notre objectif de 100% de notre consommation d'électricité décarbonnée, 100% du temps, d'ici à 2030", a assuré le directeur des énergies renouvelables chez Microsoft, Adrian Anderson.

Les conditions financières de l'accord n'ont pas été précisées, alors que la puissance prévue pour le parc pourrait potentiellement fournir en énergie l'équivalent de millions de foyers.

L'accord devrait également permettre à Brookfield d'augmenter ses actifs en projets éoliens et solaires aux Etats-Unis, en Europe et dans d'autres régions dans les prochaines années.

L'entreprise s'est dite "ravie de collaborer avec Microsoft pour répondre à la demande de leurs clients avec la construction d'une capacité dépassant 10,5 GWt en énergie renouvelable", a déclaré Connor Teskey, directeur général de l'unité des énergies renouvelables de Brookfield.

L'échelle de l'accord, près de huit fois plus gros que le plus important accord entreprise signé jusqu'ici en terme d'achat d'énergie renouvelable, vient souligner la montée en puissance de Brookfield ainsi que la capacité d'achat de Microsoft.

Le cadre de l'accord se fonde sur les échanges déjà existants entre les deux groupes, qui vont être étendus plus de 10 fois plus en termes de capacité renouvelable entre 2026 et 2030.

Si l'accord prévoit dans un premier lieu du solaire et de l'éolien, il sera étendu à d'autres technologies permettant de fournir de l'électricité décarbonnée, en particulier lorsque le vent ou le soleil n'en fournira pas suffisamment.

Comme Microsoft, Google, Amazon et Meta figurent désormais parmi les plus grosses entreprises acheteuses d'énergie propre, afin d'atteindre leurs engagements de neutralité carbone.


Les semences céréalières tolérantes à la sécheresse, une alternative d'avenir au Maroc

Cette année, la production céréalière devrait être divisée par deux à 25 millions de quintaux contre 55,1 millions en 2023, poussant le pays vers davantage d'importations, selon la même source. (AFP).
Cette année, la production céréalière devrait être divisée par deux à 25 millions de quintaux contre 55,1 millions en 2023, poussant le pays vers davantage d'importations, selon la même source. (AFP).
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  • La petite localité rurale de Marchouch, à 70 kilomètres au sud-est de la capitale, abrite depuis 2013, sur une superficie de 120 hectares, une importante station expérimentale du Centre international de recherche agricole dans les zones arides (Icarda)
  • Les faibles précipitations ont réduit la surface emblavée de céréales de 3,7 millions en 2023 à 2,5 millions d'hectares prévus pour 2024, d'après la Banque centrale marocaine

MARCHOUCH: "Regardez ces beaux épis de blé", s'exclame fièrement le scientifique éthiopien Wuletaw Tadesse Degu, en inspectant un champ, près de Rabat, semé de graines supportant la sécheresse, devenues "essentielles" pour un pays menacé par les changements climatiques comme le Maroc.

La petite localité rurale de Marchouch, à 70 kilomètres au sud-est de la capitale, abrite depuis 2013, sur une superficie de 120 hectares, une importante station expérimentale du Centre international de recherche agricole dans les zones arides (Icarda) qui développe des variétés, notamment céréalières, résilientes aux aléas climatiques.

Ses champs de blé et d'orge, verdoyants et aux épis garnis, contrastent avec la situation critique du pays où la saison agricole est compromise par une sixième année consécutive de sécheresse.

Les faibles précipitations ont réduit la surface emblavée de céréales de 3,7 millions en 2023 à 2,5 millions d'hectares prévus pour 2024, d'après la Banque centrale marocaine.

Cette année, la production céréalière devrait être divisée par deux à 25 millions de quintaux contre 55,1 millions en 2023, poussant le pays vers davantage d'importations, selon la même source.

"La différence de qualité entre notre terrain et ceux d'autres agriculteurs est frappante. Il devient essentiel d'adopter les graines résilientes et de les déployer rapidement", explique à l'AFP M. Tadesse, à la tête du programme d'amélioration du blé tendre de l'Icarda, qui dispose de six laboratoires et une banque de gènes à Rabat.

Potentiel 

Selon l'expert éthiopien, le potentiel de ces variétés réside également dans l'amélioration du rendement: en 2023, la productivité céréalière était en moyenne d'une à deux tonnes par hectare au Maroc.

A Marchouch, elle a été de quatre tonnes par hectare avec seulement 200 millimètres de pluies --la moitié de ce que reçoit la région en temps normal--, grâce aux variétés résistantes à la sécheresse mais aussi à une gestion agricole optimale: choix du moment idoine pour semer, quantités adaptées et recours exceptionnel à l'irrigation (10 mm d'eau sur une partie des 120 hectares).

La production d'orge est elle montée de 1,5 tonne à deux tonnes par hectare avec des variétés résilientes dans des conditions climatiques sévères, souligne Miguel Sanchez Garcia, spécialiste d'amélioration d'orge à l'Icarda.

Un potentiel énorme qui suscite l'intérêt dans le monde.

Pour le blé seul, plus de 300 lignées prometteuses, développées principalement au Maroc grâce au croisement et transfert de gènes à partir de graines de blé sauvage et d'ancêtres du blé, sont envoyées chaque année à 90 programmes nationaux de création variétale dans le monde, indique Ahmed Amri, chercheur en ressources génétiques de l'Icarda.

Ce centre de recherche agricole est présent dans 17 pays d'Afrique, du Moyen-Orient et d'Asie centrale.

Ces lignées prometteuses sont testées localement, au moins sur trois ans, et les plus performantes sont mises sur le marché. Au cours des dix dernières années, plus de 70 variétés de blé issues des recherches de l'Icarda ont été enregistrées dans plusieurs pays.

« Lenteur du système »

L'année dernière, le royaume a homologué six nouvelles variétés de blé et d'orge mais elles ne sont pas encore parvenues aux agriculteurs faute d'un système de multiplication et de distribution des graines "efficient", selon les chercheurs de l'Icarda.

Une fois les graines homologuées, elles sont mises en concurrence pour le droit de multiplication puis une fois qu'une entreprise a acquis ce droit, le processus prend cinq ans.

"Il y a une lenteur du système de certification de la semence qu'il faudrait revoir rapidement", concède Moha Ferrahi, chef du département amélioration de l'Institut national de la recherche agronomique.

Le responsable marocain déplore aussi le peu d'implication du secteur privé qui préfère acheter "des graines étrangères pour avoir un retour sur investissement rapide alors que ces graines ne sont pas adaptées aux conditions climatiques du Maroc".

Un manque à gagner important pour le royaume, en proie à des sécheresses successives, où un Marocain consomme en moyenne 200 kg de blé par an, soit trois fois plus que la moyenne mondiale, selon des données officielles.

"Contrairement à des pays comme l'Egypte ou l'Ethiopie, le Maroc a choisi la libéralisation du marché", note M. Amri, convaincu que ces lacunes seront rattrapées par le programme agricole national "Génération green 2020-2030", avec l'adoption renforcée des nouvelles variétés résilientes.


BlackRock et le PIF lancent une plate-forme de gestion d’investissements multi-actifs à Riyad

BlackRock Riyadh Investment Management englobera des stratégies d’investissement pour un éventail de classes d’actifs. (Photo fournie)
BlackRock Riyadh Investment Management englobera des stratégies d’investissement pour un éventail de classes d’actifs. (Photo fournie)
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  • Larry Fink, PDG de BlackRock, déclare: «Nous sommes ravis d’exploiter le partenariat approfondi que nous avons développé avec le PIF au fil de ces nombreuses années»
  • L’Arabie saoudite est devenue une destination de plus en plus attrayante pour les investissements internationaux à mesure que l’initiative Vision 2030 prend vie, selon Fink

RIYAD: BlackRock Arabie saoudite et le Fonds public d’investissement (PIF) ont signé, mardi, un protocole d’accord autorisant la première entité à établir une plate-forme d’investissement multi-actifs basée à Riyad

Il sera soutenu par un mandat d’investissement initial pouvant atteindre 5 milliards de dollars (1 dollar = 0,94 euro) du PIF, sous réserve de la réalisation des objectifs définis par les parties, indique un communiqué de presse. 

Les deux parties ont exprimé leur intention de créer BlackRock Riyadh Investment Management (Brim), qui englobera des stratégies d’investissement pour un éventail de classes d’actifs. Il devrait être dirigé par une équipe de gestion de portefeuille basée à Riyad et soutenu par la plate-forme mondiale de gestion d’actifs de BlackRock. 

Larry Fink, PDG de BlackRock, déclare: «Nous sommes ravis d’exploiter le partenariat approfondi que nous avons développé avec le PIF au fil de ces nombreuses années pour lancer cette première plate-forme de gestion d’investissements internationaux unique en son genre en Arabie saoudite.» 

«La croissance continue des marchés de capitaux du Royaume et la diversification de son secteur financier contribueront à la prospérité future de ses citoyens, à la compétitivité de ses entreprises et à la résilience de son économie.» 

L’Arabie saoudite est devenue une destination de plus en plus attrayante pour les investissements internationaux à mesure que l’initiative Vision 2030 prend vie, selon Fink. 

Il ajoute: «Nous sommes heureux d’offrir aux investisseurs du monde entier la possibilité de participer à cette aventure passionnante à long terme.» 

Yazeed al-Humied, gouverneur adjoint du PIF et responsable des investissements dans la région Mena, soutient: «La relation du PIF avec BlackRock est bien établie et se développe. Ce nouvel accord historique représente une avancée dans le travail du PIF visant à rendre le marché saoudien de l’investissement et de la gestion d’actifs plus diversifié et plus dynamique à l’échelle internationale.» 

Alors que l’Arabie saoudite continue de transformer son économie, le Brim cherchera à soutenir les investissements institutionnels étrangers dans le Royaume et à renforcer davantage le secteur saoudien de la gestion d’actifs, en élargissant les marchés de capitaux locaux tout en favorisant la diversification des investisseurs entre les classes d’actifs, en facilitant le partage des connaissances et le développement de la gestion des talents en Arabie saoudite. 

Le Brim sera entièrement intégré aux capacités d’investissement et à la plate-forme opérationnelle de BlackRock, bénéficiant de l’expertise du marché mondial. 

Le protocole non contraignant devrait remplir certaines conditions nécessaires et approbations réglementaires, en plus de respecter les objectifs spécifiés. 

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com