Loi immigration: Le gouvernement multiplie les mains tendues à droite

Le ministre français de l'Intérieur Gérald Darmanin s'adresse au Sénat lors d'une séance de vote sur un projet de loi sur l'immigration au Sénat, à Paris le 14 novembre 2023 (Photo, AFP).
Le ministre français de l'Intérieur Gérald Darmanin s'adresse au Sénat lors d'une séance de vote sur un projet de loi sur l'immigration au Sénat, à Paris le 14 novembre 2023 (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Samedi 09 décembre 2023

Loi immigration: Le gouvernement multiplie les mains tendues à droite

  • Soucieux de trouver une majorité sur son projet de loi immigration, le gouvernement multiplie les mains tendues à LR
  • Un effort salué par une partie des macronistes, désireux d'élargir l'assise du camp présidentiel, mais qui fait craindre à d'autres un basculement à droite

PARIS: Soucieux de trouver une majorité sur son projet de loi immigration, le gouvernement multiplie les mains tendues à LR. Un effort salué par une partie des macronistes, désireux d'élargir l'assise du camp présidentiel, mais qui fait craindre à d'autres un basculement à droite.

Le vote le 14 novembre au Sénat d'une version du texte très durcie, avec les voix des sénateurs macronistes, a sonné pour beaucoup comme un coup de tonnerre. "Je suis extrêmement choquée du texte final du Sénat", avait par exemple réagi l'ancienne ministre Nadia Hai (Renaissance).

Limitation du droit du sol, suppression de l'Aide médicale d’État, rétablissement du délit de séjour irrégulier, autant de marqueurs de droite inadmissibles pour nombre de parlementaires macronistes, qui se sont étonnés que le gouvernement ait pu donné au banc un "avis de sagesse" sur la question de l'AME.

A gauche, Boris Vallaud se montrait tranchant: "Fin du +en même temps+, triste clarification", commentait le président du groupe PS à l'Assemblée.

A la manœuvre sur le projet de loi immigration débattu à partir de lundi dans l'hémicycle, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin assume ses efforts pour séduire la droite: "nous devons faire un compromis avec la droite et le centre puisque la gauche a déjà dit qu'elle ne voudrait en aucun cas voter le texte", a-t-il dit sur franceinfo vendredi.

A l'aile droite de la majorité, le président du groupe Horizons à l'Assemblée, Laurent Marcangeli, a applaudi la version du texte sortie du Sénat. "La vision de la Nupes (l'alliance de gauche) sur la politique migratoire, sur l'asile, est beaucoup plus éloignée de la réalité et de la majorité que celle des Républicains", a souligné le député de Corse-du-Sud, issu de LR.

Le président du groupe LR, Olivier Marleix, pourtant un antimacroniste acharné, reconnaît lui-même cette proximité entre LR et la majorité, puisque son groupe vote "60%" des textes qu'elle propose, plus qu'aucun autre à l'Assemblée.

«L'irréparable»

Au-delà du projet de loi immigration, certains responsables du camp présidentiel ne cachent pas leur souhait de sortir de la situation de majorité relative issue des législatives de 2022, pour retrouver des marges de manœuvre pour gouverner, et sortir de la stratégie consistant à trouver des majorités "texte par texte" portée par Élisabeth Borne.

"Je pense qu'il faut prendre acte de la composition de la majorité à l'Assemblée aujourd'hui (...) Il faut qu'on ait un terrain praticable pour mener à bien des votes. Arrêter les 49.3, arrêter le +au cas par cas+, qui ne donne pas de visibilité", confie une macroniste historique, qui rêve d'un nouveau "schéma", pourquoi pas avec un Premier ministre issu de la droite, qui permette de retrouver de la "lisibilité" et un "cap".

Point de vue partagé par un pilier du Palais Bourbon. "Une des victimes de la majorité relative, c'est nos finances publiques, c'est surtout la capacité à prendre des décisions courageuses". Et si ce député "aurait adoré" qu'une alliance puisse se construire avec une partie de la gauche en 2022, il constate que "mécaniquement aujourd'hui les seuls avec qui on peut faire une coalition c'est la droite".

Cette hypothèse fait bondir le président de la Commission des lois, Sacha Houlié, chef de file de l'aile gauche de la majorité. "Je n'ai pas été élu pour faire la politique des Républicains". Un représentant de cet espace politique prévient: "Si les Républicains intègrent la majorité, vous aurez forcément un groupe de gauche qui se crée en son sein (...) La majorité relative, ce sont les Français qui l'ont voulue".

A défaut d'une coalition, certains imaginent un éclatement de la droite et le ralliement d'une partie de ses députés. Dix-sept d'entre eux n'ont-ils pas signé une tribune appelant à être "constructifs" avec le gouvernement sur l'immigration ?

Un macroniste de longue date craint que ce projet de loi ne soit un "tournant" pour la majorité, voire un "délitement", avec l'abandon du dépassement "et de droite et de gauche" des origines. Mais il se rassure en observant la réécriture du texte sénatorial par la commission des lois, avec pas moins de 31 articles supprimés.

"Pour l'instant, non seulement nous n'avons pas commis l'irréparable, mais nous avons corrigé ce qui était en train de se jouer et qui était l'irréparable". Mais "ça tangue", confie-t-il.


Procès libyen: la cour d'appel de Paris libère l'intermédiaire Djouhri sous contrôle judiciaire

 La cour d'appel de Paris a accepté mercredi de libérer sous contrôle judiciaire l'intermédiaire Alexandre Djouhri, qui était le dernier prévenu du procès libyen à être encore incarcéré.
La cour d'appel de Paris a accepté mercredi de libérer sous contrôle judiciaire l'intermédiaire Alexandre Djouhri, qui était le dernier prévenu du procès libyen à être encore incarcéré.
Short Url
  • L'homme d'affaires franco-algérien de 66 ans, condamné le 25 septembre à six ans d'emprisonnement dans l'affaire du financement libyen de la campagne de 2007 de Nicolas Sarkozy, aura notamment pour interdiction de sortir d'Île-de-France
  • Il a également l'interdiction de mener une activité d'intermédiation économique et il devra remettre à la justice ses passeports français et algérien et pointer une fois par semaine à la gendarmerie

PARIS: La cour d'appel de Paris a accepté mercredi de libérer sous contrôle judiciaire l'intermédiaire Alexandre Djouhri, qui était le dernier prévenu du procès libyen à être encore incarcéré.

L'homme d'affaires franco-algérien de 66 ans, condamné le 25 septembre à six ans d'emprisonnement dans l'affaire du financement libyen de la campagne de 2007 de Nicolas Sarkozy, aura notamment pour interdiction de sortir d'Île-de-France, de s'absenter de son domicile en région parisienne entre 8H00 et 20H00, d'entrer en contact avec ses coprévenus.

Il a également l'interdiction de mener une activité d'intermédiation économique et il devra remettre à la justice ses passeports français et algérien et pointer une fois par semaine à la gendarmerie.

Le parquet général s'était opposé à sa libération en pointant notamment sa double nationalité et le risque de départ en Algérie où la coopération judiciaire avec la France est compliquée.

Selon son avocat, Me Pierre-Henri Bovis, il devrait sortir de la prison parisienne de La Santé "dans les prochaines heures".

"La cour d'appel de Paris, par sa décision, a reconnu cette fois-ci qu'il y avait des garanties de représentation suffisantes, et a enfin admis qu'il n'y avait pas de risque de fuite ou de pression" sur les témoins, s'est-il félicité, soulignant que son client ne s'était "jamais dérobé à ses obligations".

Alexandre Djouhri avait déposé une première demande de mise en liberté qui avait été rejetée début novembre, la cour d'appel estimant qu'il présentait un risque de fuite et des garanties de représentation "particulièrement faibles".

Dans ce dossier, deux autres personnes ont été condamnées en première instance à des peines d'emprisonnement avec mandat de dépôt: l'ancien président de la République Nicolas Sarkozy, condamné à cinq ans de prison, et le banquier Wahib Nacer.

L'ex-chef de l'Etat a été incarcéré vingt jours à la prison de la Santé, avant d'obtenir sa libération auprès de la cour d'appel. M. Nacer, qui avait été condamné à une peine de quatre ans d'emprisonnement avec mandat de dépôt à exécution provisoire, a également été libéré de prison.

Alexandre Djouhri devrait donc comparaître libre, comme tous ses coprévenus, au procès en appel  prévu du 16 mars au 3 juin. Au total, 10 personnes, dont Nicolas Sarkozy et deux de ses proches, Claude Guéant et Brice Hortefeux, seront rejugées dans ce dossier.


Macron de retour sur le thème de la désinformation, après la polémique sur la labellisation

Le président français Emmanuel Macron attend avant d'accueillir le président roumain à l'Élysée, à Paris, le 9 décembre 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron attend avant d'accueillir le président roumain à l'Élysée, à Paris, le 9 décembre 2025. (AFP)
Short Url
  • Emmanuel Macron poursuit en Bretagne son tour de France consacré à la régulation des réseaux sociaux et à la lutte contre la désinformation, tout en répondant aux accusations de « dérive autoritaire » liées à son soutien à une labellisation des médias
  • Le président réaffirme qu’il ne s’agit pas d’un label d’État et dénonce les polémiques

PARIS: Emmanuel Macron reprend mercredi en Bretagne son tour de France sur la régulation des réseaux sociaux et la lutte contre la désinformation, l'occasion de répondre en personne aux accusations de dérive "autoritaire" provoquées par son soutien à une labellisation des médias.

Le chef de l'Etat est attendu dans l'après-midi à Saint-Malo, en Ille-et-Vilaine, pour un échange avec des lecteurs d'Ouest-France sur le thème de "la démocratie à l'épreuve des réseaux sociaux et des algorithmes".

Ses précédents débats organisés par la presse régionale l'ont mené depuis un mois à Toulouse, Arras (Pas-de-Calais) et Mirecourt (Vosges), et il devrait enchaîner avec Marseille la semaine prochaine.

Son idée directrice est de réfléchir à une adaptation de la législation pour réguler les réseaux sociaux, qui échappent largement à la loi de la presse de 1881 qui régit les médias traditionnels. Une réflexion censée déboucher sur des "décisions concrètes" début 2026, même si le président a déjà commencé à égrener des pistes.

Parmi elles, une mesure a déclenché une polémique à retardement.

Emmanuel Macron a en effet apporté un soutien très volontariste à des initiatives existantes de labellisation des médias "par des professionnels", pour distinguer les sites et réseaux qui font de l'information, selon les règles déontologiques, des autres.

"On va tout faire pour que soit mis en place un label", a-t-il lancé le 19 novembre à Arras, tout en assurant que ce n'était par à l'Etat de le faire.

- "Dérive totalitaire" -

Le 30 novembre, le Journal du dimanche s'est saisi de cette proposition pour lui reprocher une "dérive totalitaire", ironisant sur sa volonté présumée de mettre en place un "ministère de la Vérité", comme dans le roman dystopique "1984" de George Orwell.

L'accusation a été aussitôt relayée par les autres médias du milliardaire conservateur Vincent Bolloré puis par plusieurs dirigeants de la droite et de l'extrême droite, qui disent soupçonner le chef de l'Etat de vouloir "contrôler l'information" et museler la liberté d'expression à son profit.

En Conseil des ministres, il y a une semaine, Emmanuel Macron a répondu qu'il n'avait "jamais" envisagé de créer un "label d'Etat" pour les médias, et "encore moins" un "ministère de la Vérité", selon les propos rapportés par la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon.

Le compte de l'Elysée s'est même fendu d'un message sur le réseau X pour déplorer que "parler de lutte contre la désinformation suscite la désinformation", visant ceux qui avaient attaqué le président, du patron des Républicains Bruno Retailleau au présentateur vedette de CNews Pascal Praud.

Une réaction officielle qui a déclenché une nouvelle cascade de commentaires enflammés y voyant la démonstration de velléités de contrôle macronistes.

A Saint-Malo, le président de la République doit aussi aborder "les conséquences de la désinformation en matière climatique", à l'occasion des dix ans de l'accord de Paris sur le climat, a fait savoir l'Elysée.


France: vote crucial pour le Premier ministre Sébastien Lecornu

Le Premier ministre français Sébastien Lecornu assiste à une séance de questions au gouvernement au Sénat, la chambre haute du Parlement français, à Paris, le 26 novembre 2025. (AFP)
Le Premier ministre français Sébastien Lecornu assiste à une séance de questions au gouvernement au Sénat, la chambre haute du Parlement français, à Paris, le 26 novembre 2025. (AFP)
Short Url
  • Sébastien Lecornu joue son avenir politique sur le vote du budget de la Sécurité sociale, menacé d’être rejeté faute de soutien des Républicains et d’Horizons, malgré l’appui inattendu des socialistes
  • Un rejet pourrait provoquer sa chute, alors que le gouvernement avertit qu’un échec ferait bondir le déficit de la Sécurité sociale et que le scrutin reste extrêmement incertain

PARIS: L'avenir du Premier ministre français Sébastien Lecornu pourrait dépendre mardi de son pari de faire adopter sans majorité le projet de budget de la Sécurité sociale par l'Assemblée nationale, où il s'est assuré du soutien des socialistes mais risque d'être lâché par les siens.

Le texte proposé par son gouvernement de centre-droit pourrait être rejeté. Pas à cause du parti Socialiste (PS), dont le patron Olivier Faure a appelé à voter "pour" et avec lequel le Premier ministre a mené les négociations, mais parce que dans son propre camp, les partis de droite Les Républicains (LR) et du centre-droit Horizons refusent de soutenir un budget qui, à leurs yeux, fait trop de concessions à la gauche.

Le scrutin s'annonce donc extrêmement serré sur ce projet de loi, dans lequel le chef du gouvernement a concédé la suspension de l'emblématique réforme des retraites.

Son rejet pourrait précipiter la chute de Sébastien Lecornu, même si la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon a jugé dimanche qu'une démission "n'aurait pas de sens".

Nommé il y a trois mois, le chef du gouvernement, qui défend la méthode des "petits pas", a en effet renoncé à recourir à un dispositif, celui de l'article 49.3 de la constitution, qui permet de faire passer un texte sans vote mais expose à la censure.

Sébastien Lecornu a déjà senti le vent du boulet souffler sur le volet "recettes" du texte, adopté à peu de voix grâce à plusieurs compromis et a de nombreux absents dans la chambre basse.

Il est reparti à la pêche aux voix pour le volet "dépenses" et surtout pour le vote final sur l'ensemble du projet de loi, prévus tous deux mardi.

Lundi soir, le président du parti Horizons, Edouard Philippe, candidat déclaré pour la présidentielle de 2027, a recommandé à ses députés de s'abstenir, en affirmant n'avoir "jamais voulu" une chute du gouvernement.

Les députés écologistes, dont le vote est crucial, pourraient s'abstenir quant à eux si le gouvernement cède à leur demande d'une augmentation des dépenses de l'assurance maladie.

Le gouvernement ne cesse d'avertir que si aucun texte n'est adopté, le déficit de la Sécurité sociale flamberait à 30 milliards d'euros en 2026, contre 23 en 2025.

L'issue du scrutin est d'autant plus incertaine que les votes ne seront pas unanimes au sein des groupes. LFI (gauche radicale) et RN (extrême-droite) avec l'UDR devraient voter contre, et les communistes majoritairement contre.

Le chef des LR, Bruno Retailleau a appelé à ne pas voter un "budget socialiste", mais certains de ses élus pourraient voter pour.

Si le texte est adopté, son chemin n'est pas terminé pour autant: il repartira au Sénat (chambre haute), avant de revenir à l'Assemblée, à qui le gouvernement pourra alors donner le dernier mot.