Le règlement de la situation explosive à la frontière libano-israélienne entre le Hezbollah et Israël ne s’est pas encore concrétisé. Ainsi, les rumeurs qui portent sur des conditions imposées par Israël pour arrêter l’escalade actuelle et éviter de tomber dans le piège d’une guerre ne sont rien d’autre que des idées à négocier. La proposition qui consiste à déployer des forces françaises hors du cadre de la Force internationale d'urgence intérimaire (Finul) aux côtés de l'armée, accompagnés par des «observateurs» du Hezbollah côté libanais, en échange du déploiement de forces américaines côté israélien semble quelque peu étrange.
En outre, prétendre qu'il y a un accord imminent entre les deux parties sous parrainage américano-français ne refléterait pas la réalité, qui indique que la prochaine étape sera aussi dangereuse que celle qui est actuellement à l’œuvre. Du côté libanais, il est trop tôt pour que le Hezbollah, qui fait partie de «l’axe de la résistance» dirigé par l’Iran, propose un règlement pour apaiser la région frontalière avant la fin de la guerre à Gaza. En effet, la guerre à Gaza atteint son paroxysme et son règlement est pour plus tard. On parle d’un retrait des forces et du Hezbollah de la région sud, conformément aux termes de la résolution 1701.
Les grandes garanties actuellement mises sur table conduiront logiquement à éliminer la marge de manœuvre militaire et sécuritaire du Hezbollah dans le Sud-Liban.
Tout règlement entre Israéliens et le Hezbollah par l’intermédiaire de pays de l’Otan comme les États-Unis et la France nécessitera avant tout l’aval explicite de l’Iran afin que sa milice au Liban puisse se plier aux termes d’un deal. Il faut rappeler que la stratégie iranienne au Liban repose sur le maintien permanent d’un point de friction militaire direct entre Israël et le Hezbollah.
Cependant, si les forces américaines étaient déployées du côté israélien et, en contrepartie, les forces françaises du côté libanais, il serait impossible au Hezbollah de maintenir ce point de friction. Et, en fin de compte, si le deal venait à être conclu, le Hezbollah devrait se replier au nord de la rivière du Litani, ce qui porterait atteinte à son rôle ainsi qu’à sa fonction originelle, à la frontière avec Israël.
La guerre entre Israël et le Hamas à Gaza atteint aujourd’hui des proportions apocalyptiques. Jusqu'à ce que les opérations israéliennes sur le terrain s’arrêtent, nous ne nous attendons pas à un accord sur la frontière libano-israélienne. Au contraire, l'intensité de ces escarmouches qui se sont récemment transformées en affrontements va s’accentuer au point que les citoyens libanais sentiront que la guerre va inévitablement éclater. Mais les deux parties respecteront les règles d’engagement connues, qu’elles éviteront de violer.
Toutefois, comme l'a dit la Finul dans un communiqué publié en début de semaine, une erreur de calcul pourrait survenir à tout moment et conduire au déclenchement d'une guerre.
Nous pensons que les fuites relatives à l’imminence d’un deal entre Israël et le Hezbollah, même si elles rejoignent certaines idées déjà en négociation, ne signifient en aucun cas que le climat est devenu propice à la conclusion d’un accord qui ramènerait la stabilité et la sécurité à la frontière libano-israélienne.
La meilleure chose que le Hezbollah pourrait faire aujourd'hui serait de réduire progressivement l’intensité des affrontements, puis des escarmouches, jusqu'à mettre fin à cette situation anormale à la frontière. Le parti pro-iranien sait pertinemment que rien ne pourrait être fait à partir du Liban afin de prêter main-forte au Hamas à Gaza.
Les escarmouches qui se sont transformées en affrontements à la frontière libanaise n'ont eu aucun impact sur le déroulement de la guerre à Gaza. Il en va de même pour les attaques que mènent les milices pro-iraniennes en Irak, en Syrie et au Yémen contre les intérêts américains. Les faits démontrent que les Israéliens ont poursuivi leur offensive terrestre à Gaza sans se soucier des autres fronts animés par l’Iran.
Ali Hamade est journaliste éditorialiste au journal Annahar, au Liban. Twitter: @AliNahar
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