«On se sent encore plus à leur place»: à Paris, un début de ramadan assombri par Gaza

Des fidèles prient à la Grande Mosquée de Paris, à la veille du ramadan 2021 (Photo, AFP).
Des fidèles prient à la Grande Mosquée de Paris, à la veille du ramadan 2021 (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Lundi 11 mars 2024

«On se sent encore plus à leur place»: à Paris, un début de ramadan assombri par Gaza

  • Si partout dans le monde les musulmans entament un mois de jeûne, «les Palestiniens, eux, jeûnent tous les jours»
  • Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a demandé aux préfets de renforcer la sécurité autour des lieux de culte musulman pendant le ramadan

PARIS: Les musulmans de France entament lundi le ramadan, mois de jeûne, de prières et de partage, avec cette année une inquiétude et un sentiment de solidarité accru avec les Palestiniens de Gaza.

"Après la consultation des données astronomiques et des observations de la lune", la commission religieuse de la Grande Mosquée de Paris "a déterminé le premier jour du mois béni de Ramadan", qui sera donc "lundi 11 mars", a indiqué la Grande Mosquée dans un communiqué dimanche soir.

"Nous prions notre Seigneur pour que ce mois béni apporte un cessez-le-feu immédiat et une paix juste et durable à Gaza, et apaise les douleurs des victimes de la violence et de l’injustice dans le monde", a ajouté le recteur de la Grande Mosquée Chems-eddine Hafiz.

"La chose particulière cette année, c'est la guerre à Gaza. Ça nous donne encore plus de courage pour jeûner, on se sent encore plus à leur place", déclare à l'AFP, devant la Grande mosquée de Paris, Mohammed (il ne souhaite pas donner son nom), 33 ans.

"On y pense constamment", abonde Youssra Medjaldi, étudiante de 23 ans. Si partout dans le monde les musulmans entament un mois de jeûne, "les Palestiniens, eux, jeûnent tous les jours", ajoute-t-elle.

"Ils sont dans nos prières, depuis plusieurs années déjà, mais encore plus cette année. Plusieurs familles sont dans un esprit d'austérité par solidarité pour nos frères musulmans", déclare la jeune femme.

Sa voisine, Lucie Kienlen, 25 ans, abonde: "On est conscient que chacun n'a pas suffisamment pour se nourrir là-bas". Interrogée sur l'opportunité d'un boycott des produits israéliens, auquel plusieurs comptes appellent sur les réseaux sociaux, l'étudiante estime que "c'est plus que nécessaire", d'autant que "certaines marques ne nous apportent rien".

Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a demandé aux préfets de renforcer la sécurité autour des lieux de culte musulman pendant le ramadan. La France compte entre cinq et six millions de musulmans, ce qui fait de l'islam la deuxième religion du pays.

Durant cette période, les croyants sont invités à s'abstenir de boire, de manger, de fumer et d'avoir des relations sexuelles, de l'aube (dès que l'on peut "distinguer un fil blanc d'un fil noir" dit le Coran) jusqu'au coucher du soleil.

Aumône et grands repas

Lucie Kienlen, qui s'est convertie l'an dernier, se prépare avec enthousiasme à son deuxième ramadan, l'un des piliers de l'islam. "L'an dernier, ça a affermi ma décision", explique-t-elle, assurant avoir été "très bien accompagnée" pour ce "moment de partage", où elle n'a "jamais coupé le jeûne seule" car elle était invitée "une fois chez l'un, une fois chez l'autre".

"J'avais très peur d'avoir faim et soif. Mais ça a été tellement facile!", ajoute-t-elle.

Le jeûne est prescrit aux musulmans pubères, mais des dispenses sont prévues pour les voyageurs, les malades, les personnes âgées, les femmes enceintes ou venant d'accoucher.

Le ramadan est aussi la période où d'importants dons sont consentis aux mosquées et salles de prières (environ 2.560 en France). Les musulmans sont invités à acquitter une aumône pour les pauvres, la zakât el-Fitr.

"C'est un moment où on initie des actes qu'on veut pérenniser, l'occasion de faire le point. Les portes du paradis sont grandes ouvertes pendant ce mois, les bonnes actions acceptées, le pardon plus facilement accordé", résume Adam, 23 ans, un étudiant en médecine qui compte venir plusieurs fois par semaine à la mosquée, notamment pour les prières nocturnes.

"On devrait profiter de ce mois pour revoir nos habitudes alimentaires et ne pas tomber dans le piège de la surconsommation dans lequel on tombe souvent dans le ramadan", ajoute le jeune homme.

"On ne gâche pas de nourriture. Quand on a plus, on donne à la mosquée", assure Nur Moulin, 48 ans, qui a déjà commencé les préparatifs du ramadan chez elle -dont "la décoration, car l'ambiance est importante" en cette période qui voit de grands repas festifs en famille à la rupture du jeune.

"Brochettes de poulet, poulet au riz..." elle énumère les plats d'un air gourmand, même si cette année, avec l'inflation, "les prix ont augmenté: quand on fait des courses, on le remarque". "Mais c'est le moment où on compte pas!" ajoute-t-elle.


France/Algérie : Retailleau souhaite la suspension de l'accord de 1968

Le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, s’adresse au gouvernement lors d’une séance de questions à l’Assemblée nationale, chambre basse du parlement français, à Paris le 15 janvier 2025. (Photo : Thibaud MORITZ / AFP)
Le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, s’adresse au gouvernement lors d’une séance de questions à l’Assemblée nationale, chambre basse du parlement français, à Paris le 15 janvier 2025. (Photo : Thibaud MORITZ / AFP)
Short Url
  • Invité sur BFMTV, le ministre de l'Intérieur a répété que la France avait été « humiliée » par l'Algérie lorsque ce pays a refusé l'entrée sur son territoire à un influenceur algérien expulsé de France.
  • Il s'agit d'un accord bilatéral signé le 27 décembre 1968 qui crée un statut unique pour les ressortissants algériens en matière de circulation, de séjour et d'emploi.

PARIS : Dans un contexte de grandes tensions entre les deux pays, Bruno Retailleau a souhaité dimanche la fin de l'accord franco-algérien de 1968 relatif aux conditions d'entrée en France des ressortissants algériens.

Invité sur BFMTV, le ministre de l'Intérieur a répété que la France avait été « humiliée » par l'Algérie lorsque ce pays a refusé l'entrée sur son territoire à un influenceur algérien expulsé de France. « L'Algérie, a-t-il dit, n'a pas respecté le droit international » en refusant l'accès à ce ressortissant algérien qui possédait « un passeport biométrique » certifiant sa nationalité.

Le ministre a également évoqué le sort de l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, emprisonné en Algérie.

« La France doit choisir les moyens de répondre à l'Algérie », a poursuivi M. Retailleau. « On est allé au bout du bout (...). Je suis favorable à des mesures fortes, car sans rapport de forces, on n'y arrivera pas. »

Il a souhaité à cet égard que l'accord de 1968 soit remis en cause. « Cet accord est dépassé et a déformé l'immigration algérienne. Il n'a pas lieu d'être. Il faut le remettre sur la table », a-t-il jugé.

Il s'agit d'un accord bilatéral signé le 27 décembre 1968 qui crée un statut unique pour les ressortissants algériens en matière de circulation, de séjour et d'emploi.

Le texte, qui relève du droit international et prime donc sur le droit français, écarte les Algériens du droit commun en matière d'immigration.

Leur entrée est facilitée (sans qu'ils n'aient besoin de visa de long séjour), ils peuvent s'établir librement pour exercer une activité de commerçant ou une profession indépendante et accèdent plus rapidement que les ressortissants d'autres pays à la délivrance d'un titre de séjour de 10 ans.

Dénonçant "l'agressivité" d'Alger vis-à-vis de Paris, M. Retailleau a fait valoir que "la France a fait tout ce qu'elle pouvait sur le chemin de la réconciliation et en retour, on a eu que des gestes d'agression".

"La fierté française a été blessée par l'offense que l'Algérie a faite à la France", a-t-il dit encore.


Bruno Retailleau sur l'AME: "on y touchera"

Le ministre LR de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre LR de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
Short Url
  • « On y touchera », a affirmé le ministre, connu pour sa fermeté sur les questions migratoires. « C'est un sujet du PLFSS (projet de loi de financement de la sécurité sociale) », a-t-il ajouté.
  • M. Retailleau demande que soient reprises les conclusions du rapport Evin/Stefanini, remis fin 2023 avant la dissolution de l'Assemblée nationale, qui, selon lui, avait jugé que l'AME constituait un « encouragement à la clandestinité ».

PARIS : Le ministre LR de l'Intérieur Bruno Retailleau a assuré samedi que le gouvernement Bayrou allait « toucher » à l'aide médicale d'État (AME), un dispositif permettant à des étrangers en situation irrégulière de se soigner.

« On y touchera », a affirmé le ministre, connu pour sa fermeté sur les questions migratoires. « C'est un sujet du PLFSS (projet de loi de financement de la sécurité sociale) », a-t-il ajouté.

M. Retailleau demande que soient reprises les conclusions du rapport Evin/Stefanini, remis fin 2023 avant la dissolution de l'Assemblée nationale, qui, selon lui, avait jugé que l'AME constituait un « encouragement à la clandestinité ».

Dans ce document, l'ancien ministre socialiste Claude Evin et le préfet Patrick Stefanini, figure de LR, prônaient notamment un ajustement du panier de soins accessibles via l'AME.

Ils ont aussi souligné le rôle du dispositif pour éviter l'aggravation de l'état de santé des migrants en situation irrégulière, ainsi que la propagation de maladies à l'ensemble de la population.

La droite et l'extrême droite, quant à elles, réclament la réduction du périmètre des soins éligibles à l'AME, voire sa suppression pure et simple. Le dispositif est en revanche défendu par la gauche et une partie du bloc centriste.

En décembre, dans le cadre de l'examen du budget de l'État, le Sénat a approuvé, avec l'appui du gouvernement, une diminution de 200 millions d'euros du budget alloué à l'AME, pour un total de 1,3 milliard d'euros, en augmentation de plus de 9 % par rapport à 2024.

L'Aide médicale d'État (AME) permet la prise en charge des personnes en situation irrégulière résidant en France depuis plus de trois mois dont les ressources sont faibles et n’ouvrent pas droit à la couverture du système de droit commun.

Plus largement, concernant la politique migratoire, Bruno Retailleau a réitéré son souhait d'abolir le droit du sol à Mayotte, même s'il a reconnu que les conditions politiques n'étaient pas encore réunies.

Il a fait le même constat pour un débat sur le droit du sol en métropole.

« Il doit y avoir, non pas une automaticité, mais ça doit procéder d'un acte volontaire », a déclaré le ministre, qui veut ainsi revenir aux dispositions de la loi mise en place par l'ex-ministre RPR Charles Pasqua en 1993, avant d'être supprimées sous le gouvernement socialiste de Lionel Jospin.

La loi Pasqua soumettait l'obtention de la nationalité française pour un mineur né en France de parents étrangers disposant d'une carte de séjour, à une déclaration préalable à ses 18 ans.


50 ans après la loi Veil, les opposants à l'IVG ont appelé à « marcher pour la vie »

Nicolas Tardy-Joubert, président du groupe anti-avortement « Marche pour la vie », s’exprime lors d’une conférence de presse à la place de Catalunya à Paris, le 16 janvier 2022. (Photo par STEPHANE DE SAKUTIN / AFP)
Nicolas Tardy-Joubert, président du groupe anti-avortement « Marche pour la vie », s’exprime lors d’une conférence de presse à la place de Catalunya à Paris, le 16 janvier 2022. (Photo par STEPHANE DE SAKUTIN / AFP)
Short Url
  • Le cortège, organisé par des militants catholiques conservateurs, partira à 14 heures de la place du Trocadéro, à Paris.
  • Selon les derniers chiffres officiels, 243 623 IVG ont été enregistrées en 2023, soit 8 600 de plus que l'année précédente.

PARIS : Cinquante ans après la loi Veil, les opposants à l'avortement sont appelés à manifester dimanche dans le cadre de la « marche pour la vie ». Selon ses organisateurs, cette manifestation devrait rassembler plus de 10 000 personnes cette année.

Le cortège, organisé par des militants catholiques conservateurs, partira à 14 heures de la place du Trocadéro, à Paris.

La manifestation est organisée chaque année autour de l'anniversaire de la loi Veil relative à l’interruption volontaire de grossesse (IVG), promulguée le 17 janvier 1975.

« Depuis 1975, ce sont plus de 10 millions d'enfants à naître qui ont été exclus de la société française : qui pourrait se réjouir de cela ? », déclare à l'AFP Nicolas Tardy-Joubert, président de la Marche pour la vie.

« Aujourd'hui, tout est fait pour encourager l'avortement, il n'y a pas de politique qui dissuade réellement », estime-t-il.

Selon les derniers chiffres officiels, 243 623 IVG ont été enregistrées en 2023, soit 8 600 de plus que l'année précédente.

Si les règles encadrant l'avortement ont été assouplies depuis 1975 et si « la liberté garantie à la femme » de recourir à l'IVG a été inscrite dans la Constitution en 2024, les associations féministes s'alarment toutefois d'un droit toujours « fragile » et font état « d'attaques régulières » de la part de ses opposants.

Outre l'opposition à l'IVG, les organisateurs de la « marche pour la vie » réclament, comme l'an dernier, une échographie obligatoire dès la sixième semaine de grossesse, permettant d'entendre battre le cœur du fœtus, ou encore un délai de réflexion de trois jours avant toute IVG.

Ils appellent également à « encourager l’accouchement sous X » et à défendre « le droit absolu à l’objection de conscience des personnels de santé et protéger la clause de conscience spécifique ».

Autre sujet également à l'ordre du jour de la manifestation : le rejet de toute légalisation du suicide assisté et de l’euthanasie, ainsi que l'appel à « un grand plan pour que les soins palliatifs soient accessibles à tous ».

« Pour nous, l'interdit de tuer doit rester un fondement de notre société », insiste Nicolas Tardy-Joubert.

Porté par le gouvernement Attal, un projet de loi sur la fin de vie devait légaliser le suicide assisté et, dans certains cas, l'euthanasie, mais uniquement dans des situations strictement définies et en évitant d'employer ces termes, le gouvernement préférant parler d'"aide active à mourir". Son examen a été interrompu par la dissolution de l'Assemblée nationale en juin 2024.

Mardi, lors de sa déclaration de politique générale, le Premier ministre François Bayrou n'a pas abordé ce sujet sensible, ni le délai d'examen ni le fond, en renvoyant le texte « au pouvoir d'initiative » du Parlement.