Les Etats-Unis perdent patience et attendent d'Israël des «résultats»

Des enfants palestiniens déplacés attendent devant leur tente de fortune dans un camp situé à côté d'une rue de Rafah, le 14 mars 2024, au milieu des combats en cours entre Israël et le groupe militant du Hamas. (AFP)
Des enfants palestiniens déplacés attendent devant leur tente de fortune dans un camp situé à côté d'une rue de Rafah, le 14 mars 2024, au milieu des combats en cours entre Israël et le groupe militant du Hamas. (AFP)
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Publié le Samedi 06 avril 2024

Les Etats-Unis perdent patience et attendent d'Israël des «résultats»

  • En évoquant pour la première fois jeudi la possibilité de conditionner l'aide américaine à Israël à des mesures "tangibles", Joe Biden a clairement franchi un cap, au moins en parole
  • Fin février, une distribution d'aide alimentaire à Gaza ayant tourné au drame avait déjà représenté un tournant pour l'administration Biden

WASHINGTON: La mort des sept humanitaires de l'ONG World Central Kitchen à Gaza dans des frappes israéliennes a représenté la tragédie de trop pour l'administration Biden, mais les Etats-Unis ne devraient pas, pour autant, opérer un changement majeur de politique vis-à-vis de leur allié.

L'impatience se faisait croissante depuis des semaines, face au désastre humanitaire en cours dans la bande de Gaza mais aussi face à la crainte d'une offensive terrestre majeure à Rafah, dans le sud du territoire palestinien assiégé, à laquelle les Etats-Unis se disent catégoriquement opposés.

En évoquant pour la première fois jeudi la possibilité de conditionner l'aide américaine à Israël à des mesures "tangibles" sur cette situation humanitaire, le président américain Joe Biden a clairement franchi un cap, au moins en paroles.

"A l'évidence, le fiasco avec World Central Kitchen a fait monter la pression politique" sur le président démocrate, relève James Ryan du Middle East Research and Information Project, un centre de réflexion.

"La tournure des événements a fait comprendre (...) qu'Israël ne fait pas vraiment assez d'efforts pour distinguer entre les combattants et les civils", observe-t-il.

La Maison Blanche elle-même a parlé d'"un point culminant" pour le président américain et le "catalyseur" de l'appel téléphonique jeudi avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, au moment où les 2,4 millions d'habitants de Gaza sont menacés de famine.

«Vrai test»

Les Etats-Unis se sont empressés de saluer vendredi les mesures finalement annoncées par Israël comme l'ouverture "temporaire" de nouveaux points de passage à Gaza, notamment à Erez dans le nord. Le gouvernement israélien s'y opposait depuis le début de la guerre contre le Hamas, le 7 octobre.

Le président américain a-t-il menacé de cesser la livraison d'aide militaire à Israël? Interrogé, Joe Biden a répondu à la presse: "Je leur ai demandé de faire ce qu'ils sont en train de faire".

Son chef de la diplomatie Antony Blinken, qui a multiplié ces derniers mois les réunions houleuses avec le gouvernement israélien, a lui évoqué "des développements positifs, mais le vrai test ce sont les résultats, et c'est ce que nous examinerons dans les prochains jours et prochaines semaines".

Il a par ailleurs salué la reconnaissance par Israël de sa "totale responsabilité" dans les frappes qui ont tué les sept travailleurs humanitaires à Gaza.

Fin février, une distribution d'aide alimentaire à Gaza ayant tourné au drame avait déjà représenté un tournant pour l'administration Biden, l'incitant à accroître sa pression sur le gouvernement israélien et à livrer par d'autres moyens des vivres, par voie aérienne ou maritime.

"L'appel de M. Netanyahu et de M. Biden montre clairement que Washington n'est plus disposé à poursuivre sa politique actuelle de soutien total sans changements rapides", écrit David Makovsky, du Washington Institute for Near East Policy.

Symbole également de la pression qui pèse sur l'administration Biden, plus de trente élus démocrates de la Chambre des représentants des Etats-Unis ont exigé vendredi dans une lettre l'arrêt total des transferts d'armes à Israël.

"Après la récente frappe contre des travailleurs humanitaires et la crise humanitaire qui ne cesse de s'aggraver, nous pensons qu'il est un injustifiable d'autoriser ces transferts d'armes", indique la lettre, signée par plusieurs poids lourds des démocrates, dont l'ancienne présidente de la Chambre des représentants Nancy Pelosi.

Soutien «inébranlable»

Sans doute consciente de sa marge de manoeuvre limitée, l'administration Biden s'est gardée de dire ce qui changerait si Israël n'entendait pas le message ou si les mesures annoncées s'avéraient insuffisantes, comme l'a estimé le chef de l'ONU.

Washington a réaffirmé avec force son soutien "inébranlable" à Israël, l'un des piliers de sa politique étrangère sous toutes les administrations successives, démocrates comme républicaines.

D'autant plus que, comme l'a rappelé vendredi le porte-parole du Conseil de sécurité nationale John Kirby, Israël est entouré d'ennemis historiques des Etats-Unis, à commencer par l'Iran et le Hezbollah libanais.

Les Etats-Unis apportent des milliards de dollars d'aide militaire à Israël. Et même s'ils décident de retarder ou reporter certains transferts limités, cette manne n'est pas remise en cause.

M. Biden cherchera à "donner au gouvernement de M. Netanyahu tous les moyens possibles afin d'éviter de poser des conditions aux transferts d'armes ou à d'autres formes d'aide", souligne James Ryan, sans exclure toutefois "à un moment donné, un changement de politique".

Un autre levier possible serait un revirement, certes peu probable, de la politique américaine sur la reconnaissance d'un Etat palestinien.

Les Palestiniens ont officiellement relancé mardi la procédure pour devenir Etat membre à part entière de l'ONU, espérant un vote ce mois-ci.

Mais les Etats-Unis privilégient, de longue date, les négociations directes entre Israéliens et Palestiniens, au point mort depuis dix ans.


Liban: Israël annonce des frappes dans le sud, appelle à des évacuations

L'armée israélienne a annoncé jeudi après-midi des frappes imminentes dans le sud du Liban contre ce qu'elle présente comme des infrastructures du mouvement islamiste Hezbollah, et a appelé à des évacuations dans deux villages de cette région. (AFP)
L'armée israélienne a annoncé jeudi après-midi des frappes imminentes dans le sud du Liban contre ce qu'elle présente comme des infrastructures du mouvement islamiste Hezbollah, et a appelé à des évacuations dans deux villages de cette région. (AFP)
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  • Les forces israéliennes vont "bientôt attaquer des infrastructures terroristes du Hezbollah à travers le sud du Liban afin de contrer ses tentatives illégales de rétablir ses activités dans la région"
  • Dans un "message urgent" en arabe, le colonel Adraee signale, cartes à l'appui, deux bâtiments dans les villages de Jbaa et Mahrouna, dont il appelle les riverains dans un rayon d'au moins 300 mètres à s'écarter

JERUSALEM: L'armée israélienne a annoncé jeudi après-midi des frappes imminentes dans le sud du Liban contre ce qu'elle présente comme des infrastructures du mouvement islamiste Hezbollah, et a appelé à des évacuations dans deux villages de cette région.

Cette annonce survient au lendemain d'une rencontre entre responsables civils libanais et israélien, lors d'une réunion de l'organisme de surveillance du cessez-le-feu entré en vigueur il y a un an, présentée comme de premières discussions directes depuis plus de 40 ans entre les deux pays toujours techniquement en état de guerre.

Les forces israéliennes vont "bientôt attaquer des infrastructures terroristes du Hezbollah à travers le sud du Liban afin de contrer ses tentatives illégales de rétablir ses activités dans la région", a annoncé le colonel Avichay Adraee, porte-parole de l'armée israélienne pour le public arabophone.

Dans un "message urgent" en arabe, le colonel Adraee signale, cartes à l'appui, deux bâtiments dans les villages de Jbaa et Mahrouna, dont il appelle les riverains dans un rayon d'au moins 300 mètres à s'écarter.

Accusant le Hezbollah de se réarmer dans le sud du pays et de violer ainsi les termes de la trêve entrée en vigueur fin novembre 2024, l'armée israélienne a multiplié depuis plusieurs semaines les frappes aériennes dans le sud du Liban mais a marqué une pause dans ses attaques pendant la visite du pape Léon XIV cette semaine.

Israël a même frappé jusque dans la banlieue de Beyrouth le 23 novembre pour y éliminer le chef militaire du Hezbollah, Haitham Ali Tabatabai.

Le Liban dénonce ces attaques comme des violations patentes du cessez-le-feu.

Mais Israël, qui peut compter sur l'aval tacite des Etats-Unis pour ces frappes, affirme qu'il ne fait qu'appliquer la trêve en empêchant le Hezbollah, allié de la République islamique d'Iran, ennemie d'Israël, "de se reconstruire et de se réarmer".

Tout en déclarant que les discussions directes de mercredi avec le Liban s'étaient déroulées dans "une atmosphère positive", le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a rappelé mercredi soir que le désarmement du Hezbollah restait une exigence "incontournable" pour son pays.


Soudan: le chef des droits de l'homme de l'ONU appelle à cesser les combats «immédiatement»

Le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'homme a appelé jeudi les belligérants à "cesser immédiatement les combats" dans le sud du Soudan, affirmant craindre une nouvelle vague d'atrocités après les massacres d'El-Facher. (AFP)
Le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'homme a appelé jeudi les belligérants à "cesser immédiatement les combats" dans le sud du Soudan, affirmant craindre une nouvelle vague d'atrocités après les massacres d'El-Facher. (AFP)
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  • Depuis le 25 octobre, date à laquelle les FSR ont pris le contrôle de la ville de Bara, dans le Kordofan-Nord, le Haut-Commissariat a recensé "au moins 269 morts parmi les civils, victimes de frappes aériennes, de tirs d'artillerie et d'exécutions
  • "Il est véritablement choquant de voir l'histoire se répéter au Kordofan si peu de temps après les événements terrifiants d'El-Facher", a déclaré le Haut-Commissaire

GENEVE: Le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'homme a appelé jeudi les belligérants à "cesser immédiatement les combats" dans le sud du Soudan, affirmant craindre une nouvelle vague d'atrocités après les massacres d'El-Facher.

"Nous ne pouvons rester silencieux face à cette nouvelle catastrophe", a déclaré Volker Türk dans un communiqué. "Ces combats doivent cesser immédiatement et l’aide humanitaire vitale doit parvenir aux personnes menacées de famine".

Les combats se sont intensifiés cette semaine dans la région du Kordofan, dans le sud du Soudan riche en pétrole, l'armée cherchant à repousser les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) loin de l'axe routier vital reliant la capitale Khartoum au Darfour.

Depuis le 25 octobre, date à laquelle les FSR ont pris le contrôle de la ville de Bara, dans le Kordofan-Nord, le Haut-Commissariat a recensé "au moins 269 morts parmi les civils, victimes de frappes aériennes, de tirs d'artillerie et d'exécutions sommaires".

Et il affirme avoir relevé "des cas de représailles, de détentions arbitraires, d'enlèvements, de violences sexuelles et de recrutements forcés, y compris d'enfants".

"Il est véritablement choquant de voir l'histoire se répéter au Kordofan si peu de temps après les événements terrifiants d'El-Facher", a déclaré le Haut-Commissaire, en référence aux exactions commises par les FSR après la prise fin octobre de la dernière grande ville du Darfour (ouest) qui échappait à leur contrôle.

"Nous ne devons pas permettre que le Kordofan devienne un autre El-Facher", a insisté M. Türk.

Dans son communiqué, le Haut-Commissariat rapporte que le 3 novembre dernier, un drone des FSR avait frappé une tente où des personnes en deuil étaient rassemblées à El Obeid, dans le Kordofan du Nord, tuant 45 personnes, principalement des femmes.

Il indique aussi que le 29 novembre, une frappe aérienne des Forces armées soudanaises (SAF) à Kauda, dans le Kordofan du Sud, aurait fait au moins 48 morts, pour la plupart des civils.

Selon l'organisation, "de violents combats se poursuivent depuis dans les trois États du Kordofan". "La situation humanitaire est catastrophique : la famine est confirmée à Kadugli et un risque de famine persiste à Dilling", ajoute le Haut-Commissariat, affirmant que "toutes les parties entravent l’accès et les opérations humanitaires".

"Nous ne pouvons (...) laisser d’autres Soudanais devenir victimes de terribles violations des droits de l’homme. Nous devons agir", a insisté M. Türk.

Depuis avril 2023, les combats ont fait des dizaines de milliers de morts, forcé le déplacement de 12 millions de personnes et plongé le pays dans la plus grande crise humanitaire au monde, selon l'ONU.

 


Les dirigeants du CCG réaffirment le lien de «sécurité indivisible» lors du sommet de Bahreïn

Le prince héritier Mohammed bin Salman a dirigé la délégation saoudienne au sommet du CCG. (SPA)
Le prince héritier Mohammed bin Salman a dirigé la délégation saoudienne au sommet du CCG. (SPA)
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  • Toute atteinte à la souveraineté d'un État membre est considérée comme une menace pour la sécurité collective
  • Les pays soulignent l'objectif d'un Moyen-Orient exempt d'armes nucléaires

LONDRES: Les dirigeants du Conseil de coopération du Golfe ont réaffirmé leur lien de sécurité indivisible, enraciné dans une foi, une lignée et une langue communes, ainsi que dans une destinée partagée, à l'issue de la 46e session du Conseil suprême au palais d'Al-Sakhir, à Bahreïn.

Les délégués ont déclaré que la sécurité des États du CCG était indivisible et que toute atteinte à la souveraineté d'un État membre constituait une menace directe pour leur sécurité collective.

"Respecter la souveraineté des États du CCG et de tous les pays de la région, ne pas s'ingérer dans leurs affaires intérieures et rejeter le recours à la force ou à la menace d'y recourir", ont-ils déclaré dans un communiqué.

Le secrétaire du CCG, Jasem Mohamed Albudaiwi, a déclaré que les États du Golfe étaient unis dans leur soutien au Qatar à la suite des attaques distinctes lancées cette année contre ce pays par l'Iran et Israël dans le cadre du conflit à Gaza.

L'attaque de missiles iraniens visant la base aérienne américaine d'Al-Udeid en juin était "une agression rejetée, une violation claire de sa souveraineté, de son espace aérien et des principes de bon voisinage", a-t-il déclaré.

En septembre, Israël a lancé une attaque aérienne contre des figures du Hamas à Doha, qui a fait six morts, dont un citoyen qatari.

"L'agression israélienne brutale (...) représente une attaque flagrante contre les efforts internationaux visant à obtenir un cessez-le-feu et la libération des otages", a déclaré M. Albudaiwi.

Les dirigeants du Golfe ont salué les résultats du sommet de la paix de Charm el-Cheikh en octobre et les efforts internationaux visant à mettre fin à la guerre de Gaza, à faciliter l'aide humanitaire et à soutenir un État palestinien indépendant le long des frontières d'avant 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale, conformément à la solution à deux États et à l'initiative de paix arabe.

Ils ont déclaré que leur objectif était de consolider une paix juste, globale et durable au Moyen-Orient, tout en s'efforçant de résoudre les conflits régionaux et internationaux par des moyens pacifiques.

M. Albudaiwi a félicité l'Arabie saoudite et la France d'avoir coprésidé une conférence organisée en septembre à New York, qui a abouti à la reconnaissance du statut d'État palestinien par plusieurs pays, dont le Royaume-Uni, le Canada et l'Australie. Il a également salué les efforts constants du Qatar, de l'Égypte et de la Turquie pour faciliter les discussions qui ont abouti à l'accord de Gaza.


Le prince héritier Mohammed bin Salman a dirigé la délégation saoudienne au sommet du CCG et a coprésidé la quatrième réunion du Conseil de coordination saoudo-bahreïnien.

Le roi de Bahreïn, Hamad bin Isa bin Salman Al-Khalifa, a déclaré que le sommet avait abordé des questions régionales et diverses méthodes pour renforcer la solidarité et l'intégration du CCG.

L'émir du Koweït, Cheikh Mishal Al-Ahmad Al-Jaber Al-Sabah, a déclaré que le CCG avait surmonté des circonstances régionales et internationales complexes et a réitéré la condamnation par le CCG de l'agression israélienne contre le Qatar.

Les dirigeants ont insisté sur l'objectif consistant à débarrasser le Moyen-Orient des armes nucléaires et des armes de destruction massive. Ils ont souligné les efforts déployés par les forces navales conjointes basées à Bahreïn pour renforcer la sécurité énergétique, protéger la navigation maritime et préserver le commerce international.

Ils ont également souligné la nécessité de satisfaire aux exigences du marché commun et de l'union douanière du CCG, de stimuler le commerce et le tourisme et d'investir dans des domaines clés tels que les infrastructures, les transports, l'énergie, les communications, l'eau et l'alimentation.

Les dirigeants ont accueilli le premier ministre italien, Giorgia Meloni, qui a participé au sommet en tant qu'invitée d'honneur.

Le CCG a été créé en 1981 et se compose de six membres : Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Oman, Bahreïn, Qatar et Koweït. Son siège est situé à Riyad.