Nazisme: un pasteur jette une lumière crue sur les protestants d'Alsace-Moselle

Des prisonniers de guerre allemands hissent le drapeau français dans un centre d'accueil pour enfants rapatriés, près de Strasbourg, en Alsace, en juillet 1945, après la Seconde Guerre mondiale. (Photo AFP)
Des prisonniers de guerre allemands hissent le drapeau français dans un centre d'accueil pour enfants rapatriés, près de Strasbourg, en Alsace, en juillet 1945, après la Seconde Guerre mondiale. (Photo AFP)
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Publié le Dimanche 21 avril 2024

Nazisme: un pasteur jette une lumière crue sur les protestants d'Alsace-Moselle

  • Cette région de l'est de la France a subi de 1940 à 1944 une annexion nazie douloureuse, avec notamment la tragédie des «Malgré-nous», «, ces 130.000 Alsaciens et Mosellans incorporés de force dans l'armée allemande
  • Nourris d'archives, les deux ouvrages du pasteur français Michel Weckel évoquent les «réseaux luthériens» pro-allemands (puis pro-nazis), actifs dans l'Entre-deux-guerre et radicalement opposés au retour dans le giron français de l'Alsace en 1918

STRASBOURG, France : Un «lanceur d'alerte» ? En l'espace de deux livres, le pasteur français Michel Weckel, 65 ans, jette une lumière inédite et crue sur des compromissions longtemps tues d'une partie des protestants d'Alsace-Moselle avec le nazisme.

Cette région de l'est de la France a subi de 1940 à 1944 une annexion nazie douloureuse, avec notamment la tragédie des «Malgré-nous», «, ces 130.000 Alsaciens et Mosellans incorporés de force dans l'armée allemande.

«Le moment était venu de faire ce travail», explique à l'AFP M. Weckel, désormais en retraite et qui fut délégué régional pendant une vingtaine d'années de la Cimade, association d'aide aux personnes migrantes et réfugiées.

En 2022, son premier ouvrage, intitulé «Ces protestants alsaciens qui ont acclamé Hitler» , avait suscité des remous dans la région.

Son nouveau livre, «Entre silences et non-dits, les protestants d'Alsace face au nazisme», sorti le 9 avril chez le même éditeur, poursuit ce travail de rupture avec une certaine «position victimaire» dans laquelle l'Alsace s'est, selon lui, «drapée».

- «Honte» -

Le drame des «Malgré-nous», vécu dans la région «comme une honte», a été «totalement incompris» ailleurs en France, mais en Alsace-Moselle, il a «écrasé» tout le reste et renforcé la dimension victimaire de la mémoire, analyse l'historienne Frédérique Neau-Dufour, qui a préfacé le dernier livre de M. Weckel.

Une mémoire «très lourde» car «les blessures traversent chaque famille», observe-t-elle, faisant le parallèle avec l'Autriche, autre «territoire annexé qui, après la guerre, peut se targuer de l'annexion pour dire qu'il n'a pas voulu le nazisme. Ça exonère de se poser les vraies questions».

Nourris d'archives, les deux ouvrages évoquent les «réseaux luthériens» pro-allemands (puis pro-nazis), actifs dans l'Entre-deux-guerre et radicalement opposés au retour dans le giron français de l'Alsace en 1918.

Les affinités d'une partie du protestantisme local avec le nazisme y sont passées au crible, avec un portrait glaçant du «luthéranisme rural» du nord de l'Alsace et de Moselle, dont plusieurs membres s'engagèrent dans des associations radicales, puis dans les organes de l'Etat nazi durant l'annexion.

«Ils se sentaient foncièrement allemands et pensaient que le rattachement de l'Alsace (à la France), qui s'est fait progressivement après la guerre de 30 ans au XVIIe siècle, était une erreur historique», explique l'auteur.

Pour ces militants «pangermanistes», «c'était la volonté de Dieu que l'Alsace soit allemande», poursuit celui qui a débuté dans les années 80 «dans une paroisse luthérienne extrêmement traditionaliste» où on pratiquait encore «les cultes en allemand». Jeune pasteur, Michel Weckel s'interrogeait alors sur les scores électoraux élevés de l'extrême droite dans ce secteur.

Parmi eux, Fritz Spieser, fils de pasteur et chef de file du réseau autonomiste de la Hunebourg, du nom d'un château du nord de l'Alsace. En septembre 1940, il y accueillit Heinrich Himmler, futur architecte de la «solution finale».

Ou Hermann Bickler, avocat strasbourgeois mennonite, qui occupa dans la SS d'éminentes fonctions et fut proche de l'écrivain collaborationniste Louis-Ferdinand Céline.

Tous ne se sont pas compromis : l'auteur rend hommage à cinq pasteurs résistants, comme Charles Fichter, membre du réseau Mithridate, déporté à Mauthausen mais qui survivra.

- «Sépulcral» -

Figure moins glorieuse, Paul Frey, «nazi notoire» : à la Libération, lui, sa femme et l'une de ses filles seront traînés dans les rues de Sélestat, offerts aux insultes et aux crachats des passants.

Le pasteur dut balayer les rues de la commune avec une pancarte indiquant : «C'est au Führer que je le dois».

Son fils Albert s'engagera dans les Jeunesses hitlériennes, puis dans la Wehrmacht. Après la guerre, devenu pasteur, il sera pacifiste et militant des droits humains.

Fille d'Albert et petite-fille de Paul, Pascale Frey, 64 ans, savait par son père «des choses» sur son aïeul, explique-t-elle à l'AFP. Mais c'est en lisant le second livre de M. Weckel qu'elle a «pris la mesure de son engagement» : elle a voulu «en savoir plus» en rencontrant l'auteur et en lui confiant des documents familiaux.

«Je suis très heureuse d'avoir apporté cette petite pierre», glisse Mme Frey. «Il faut que ça bouge, c'est l'histoire de l'Alsace!»

Michel Weckel est «un lanceur d'alerte» qui «attire l'attention sur quelque chose d'injuste»: un «regard biaisé sur le passé», estime Mme Neau-Dufour, qui pointe dans sa préface le «silence sépulcral» qui a entouré jusqu'à présent cette facette de l'histoire du protestantisme local.


Présidentielle: Le Pen «annoncera sa décision» après son procès en appel, sans attendre la cassation

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  • Le Rassemblement national sera fixé sur le nom de sa candidate (ou de son candidat) avant les prochaines vacances d'été
  • Tel est en tout cas l'agenda fixé par Mme Le Pen dans un entretien au mensuel conservateur Causeur, publié jeudi

PARIS: Candidate déclarée à la prochaine présidentielle malgré son inéligibilité, Marine Le Pen affirme qu'elle ne se présentera "évidemment pas" si sa peine est confirmée en appel et qu'elle "annoncera donc (sa) décision" dans la foulée, sans attendre une éventuelle cassation.

Le Rassemblement national sera fixé sur le nom de sa candidate (ou de son candidat) avant les prochaines vacances d'été. Tel est en tout cas l'agenda fixé par Mme Le Pen dans un entretien au mensuel conservateur Causeur, publié jeudi.

Condamnée en première instance - dans l'affaire des assistants parlementaires européens - à une peine d'inéligibilité de cinq ans avec application immédiate, la triple candidate à l'élection présidentielle admet qu'elle ne pourra "évidemment pas" se représenter une quatrième fois si cette peine devait être confirmée en appel.

"Je prendrai ma décision de me présenter ou non lors du rendu de l'arrêt de la cour d'appel", ajoute-t-elle, évacuant l'hypothèse d'un suspense prolongé en cas de pourvoi en cassation. "On ne sait pas quand une telle décision serait rendue et on ne peut pas se lancer dans une campagne présidentielle au dernier moment", explique-t-elle.

Son second procès étant programmé du 13 janvier au 12 février 2026, avec un délibéré attendu quatre mois plus tard, "j'annoncerai donc ma décision cet été", précise celle qui s'était hissée au second tour en 2017 et en 2022 face à Emmanuel Macron.

Un calendrier choisi aussi "pour ne pas hypothéquer la candidature de Jordan Bardella dans le cas où il devrait y aller", souligne-t-elle, confirmant ainsi le statut de dauphin du jeune président du parti à la flamme.


Macron au Brésil, pour évoquer une "relation transatlantique réimaginée"

Le président français Emmanuel Macron s'exprime lors de l'ouverture du festival « Notre avenir – Brésil-France, dialogues avec l'Afrique » à Salvador, dans l'État de Bahia, au Brésil, le 5 novembre 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron s'exprime lors de l'ouverture du festival « Notre avenir – Brésil-France, dialogues avec l'Afrique » à Salvador, dans l'État de Bahia, au Brésil, le 5 novembre 2025. (AFP)
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  • Emmanuel Macron est arrivé à Salvador de Bahia pour promouvoir une « relation transatlantique réimaginée » entre l’Amérique du Sud, l’Afrique et la France, à travers la culture, la mémoire et la jeunesse
  • Cette visite s’inscrit dans une refondation des liens franco-africains, marquée par la reconnaissance de l’esclavage, la restitution d’objets coloniaux et la préparation du sommet Afrique–France à Nairobi en 2026

SALVADOR: Emmanuel Macron est arrivé mercredi à Salvador de Bahia, au Brésil, pour plaider en faveur d'une "relation transatlantique réimaginée" associant Amérique du Sud et Afrique, avant de participer à un sommet climat à Belem, a indiqué l'Elysée.

Le président français doit participer à l'ouverture du festival "Notre futur – Brésil-France, dialogues avec l'Afrique", qui réunit "les jeunesses et les nouvelles voix des sociétés civiles brésiliennes, africaines et françaises", a expliqué la présidence.

Il s'agit d'un "temps fort de la saison culturelle France-Brésil" qui a scandé l'année 2025.

La capitale de l'Etat de Bahia, dans le nord-est du pays, fut l'un des points d'arrivée majeurs des esclaves africains déportés. Elle est aujourd'hui le foyer vibrant de la culture afro-brésilienne.

Cette étape vise donc "à célébrer et à travailler avec Brasilia à une relation transatlantique réimaginée", associant les "partenaires africains", selon la présidence française.

Emmanuel Macron doit aussi visiter une galerie dédiée au photographe et anthropologue français Pierre Fatumbi Verger (1902-1996), et la Maison du Bénin, où il découvrira l'exposition "Je suis un fleuve noir".

Pour Paris, "cette visite à Bahia s'inscrit dans la politique de refondation et de renouvellement de notre relation avec l'Afrique", au moment où les relations entre la France et ses anciennes colonies africaines sont souvent distendues, voire glaciales comme au Sahel.

La culture est un point fort de cette "refondation", fait-on valoir dans l'entourage du président français, qui a enclenché une démarche de restitution des "objets volés pendant l'époque coloniale".

Autre volet: "la reconnaissance de l'esclavage", qui sera aussi mise en avant à Salvador, point de débarquement "d'un très grand nombre d'esclaves, qui venaient notamment de tout le golfe du Bénin et notamment du port de Cotonou", a fait valoir une conseillère présidentielle.

"Bahia, c'est un point d'étape. On se donne rendez-vous également à Nairobi en mai, pour le nouveau sommet Afrique-France qu'on organise pour la première fois dans un pays anglophone", a souligné l'Elysée.

Jeudi, Emmanuel Macron se rendra à Belem, en Amazonie brésilienne, pour prononcer un discours au sommet des chefs d'Etat et de gouvernement réunis par le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva avant le début de la COP30, conférence de l'ONU sur le climat.

Il terminera sa tournée vendredi à Mexico où il sera accueilli par la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum, un an après sa prise de fonctions.


Premières heures de semi-liberté pour Kohler et Paris à l'ambassade de France à Téhéran

Cécile Kohler et Jacques Paris, les deux Français sortis de prison en Iran vivent mercredi leurs premières heures de semi-liberté à l'ambassade de France, attendant de pouvoir quitter le pays à une date inconnue, que l'Iran semble vouloir lier au sort d'une Iranienne poursuivie en France. (AFP)
Cécile Kohler et Jacques Paris, les deux Français sortis de prison en Iran vivent mercredi leurs premières heures de semi-liberté à l'ambassade de France, attendant de pouvoir quitter le pays à une date inconnue, que l'Iran semble vouloir lier au sort d'une Iranienne poursuivie en France. (AFP)
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  • Le président français Emmanuel Macron s'est entretenu avec eux par visioconférence. "Ils l'ont remercié pour son engagement" afin d'obtenir leur libération, a aussi déclaré Pierre Cochard sur la radio RTL
  • Emanuel Macron a aussi parlé à son homologue iranien Massoud Pezeshkian, demandant la "libération pleine et entière", "le plus rapidement possible", de Cécile Kohler et Jacques Paris

PARIS: Cécile Kohler et Jacques Paris, les deux Français sortis de prison en Iran vivent mercredi leurs premières heures de semi-liberté à l'ambassade de France, attendant de pouvoir quitter le pays à une date inconnue, que l'Iran semble vouloir lier au sort d'une Iranienne poursuivie en France.

"Je les ai trouvés très heureux, très soulagés tous les deux par cette libération", a raconté mercredi matin sur la radio France Inter l'ambassadeur de France à Téhéran Pierre Cochard, qui est allé les chercher mardi à la sortie de la prison d'Evine, de sinistre réputation.

Le président français Emmanuel Macron s'est entretenu avec eux par visioconférence. "Ils l'ont remercié pour son engagement" afin d'obtenir leur libération, a aussi déclaré Pierre Cochard sur la radio RTL.

Emanuel Macron a aussi parlé à son homologue iranien Massoud Pezeshkian, demandant la "libération pleine et entière", "le plus rapidement possible", de Cécile Kohler et Jacques Paris.

A Soultz (Haut-Rhin, est de la France) où a grandi Cécile Kohler, dont le portrait orne la façade de la mairie, les habitants racontaient leur soulagement. "On est impatients qu'elle revienne, on espère que l'Iran ne va pas la retenir", confiait l'un d'eux, Mathieu Taquard.

Mardi soir, les parents ont pu parler par téléphone à leur fille: "Elle disait qu'elle était en forme, et qu'elle avait hâte de revenir", a résumé à l'AFP le maire de Soultz, Marcello Rotolo.

L'ambassadeur a donné quelques éléments sur le déroulé de leur libération.

"On s'est rendus à la prison d'Evine, qui est au nord de Téhéran. L'ambassade se trouve plutôt au centre, donc il y a un trajet important. On s'est présentés, il y avait plusieurs portes à franchir, une barrière. Cela a pris un peu de temps, en coordination avec les autorités iraniennes", a-t-il expliqué. "Les grands portes de la prison d'Evine se sont ouvertes, et on a pu croiser le regard de Cécile et Jacques", qui "avaient été informés à la dernière minute" de leur sortie.

"C'est évidemment un moment qu'on n'oublie pas", a-t-il dit. "Les premiers mots, c'étaient des larmes, des sourires mêlés de larmes. On est restés quelques instants ensemble et puis ensuite on est montés dans la voiture" pour gagner l'abri de l'ambassade, où ils sont protégés par la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques, en espérant pouvoir quitter rapidement l'Iran.

Iranienne à l'ambassade 

Les autorités iraniennes, qui les accusent d'espionnage, considèrent qu'ils sont en "libération conditionnelle", "libérés sous caution" et "placés sous surveillance jusqu'à la prochaine étape judiciaire".

"Nous n'allons ménager aucun effort pour obtenir leur retour en France dans les meilleurs délais", a promis le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot.

Professeure de lettres de 41 ans, et enseignant retraité de 72 ans, Cécile Kohler et Jacques Paris ont été arrêtés le 7 mai 2022, au dernier jour d'un voyage touristique en Iran.

Considérés comme des "otages d'Etat" par la France, qui à l'instar d'autres pays occidentaux accuse Téhéran de capturer des étrangers sur son sol pour négocier ensuite leur libération, ils étaient les deux derniers Français détenus sur le sol iranien.

Lourdement sanctionné par de nombreux membres de la communauté internationale, notamment pour ses activités nucléaires, l'Iran détiendrait selon des sources diplomatiques au moins une vingtaine d'Occidentaux qu'il pourrait utiliser comme levier pour obtenir la libération de certains de ses ressortissants à l'étranger ou obtenir des gages politiques.

Dans le cas de Cécile Kohler et Jacques Paris, Téhéran avait rendu publique en septembre la possibilité d'un accord de libération en échange de Mahdieh Esfandiari, une Iranienne arrêtée en France en février, accusée d'avoir fait la promotion du terrorisme sur les réseaux sociaux.

Téhéran semble afficher sa volonté de mettre en parallèle les deux dossiers, le chef de la diplomatie iranienne Abbas Araghchi annonçant mercredi matin que Mme Esfandiari, sous contrôle judiciaire depuis octobre dans l'attente de son procès en janvier, se trouvait désormais à l'ambassade d'Iran et "nous espérons qu'elle rentrera quand son procès sera achevé".

Les autorités françaises n'ont pas commenté cette annonce qui pourrait avoir des conséquences sur la date à laquelle les deux Français pourront quitter l'Iran.

L'élargissement de Cécile Kohler et Jacques Paris pourrait ouvrir la voie à un apaisement des relations entre l'Iran et la France. "Lorsqu'ils seront sur le territoire français, effectivement, cela ouvrira une possibilité de renouer des relations normales avec ce pays", a estimé M. Cochard.