Barnier ouvre mardi les travaux d'une Assemblée comme lui en sursis

Le Premier ministre français Michel Barnier marche après un séminaire gouvernemental à l'hôtel de Matignon à Paris, le 27 septembre 2024. (Photo par Thomas SAMSON / AFP)
Le Premier ministre français Michel Barnier marche après un séminaire gouvernemental à l'hôtel de Matignon à Paris, le 27 septembre 2024. (Photo par Thomas SAMSON / AFP)
Short Url
Publié le Dimanche 29 septembre 2024

Barnier ouvre mardi les travaux d'une Assemblée comme lui en sursis

  • Conscient de la fragilité de son gouvernement face à une Assemblée elle-même promise par beaucoup à la dissolution.
  • Le gouvernement va en effet devoir s'atteler au plus vite à la difficile tâche de faire adopter avant le 31 décembre par le Parlement les budgets de l'Etat et de la Sécurité sociale.

PARIS : Le Premier ministre Michel Barnier ouvre mardi les travaux du Parlement avec sa déclaration de politique générale, conscient de la fragilité de son gouvernement face à une Assemblée elle-même promise par beaucoup à la dissolution.

"Je suis là depuis 20 jours, je ne sais pas pour combien de temps", compte tenu "de la situation (...) inédite à l'Assemblée nationale", avec un hémicycle divisé en trois blocs loin de la majorité absolue, a reconnu samedi le Premier ministre, à l'occasion d'un déplacement à Mâcon (Saône-et-Loire) au 130e congrès des sapeurs-pompiers.

"Mais je suis là comme quelqu'un qui engage un long chemin (...) avec beaucoup de détermination", a-t-il déclaré, après avoir reçu les encouragements des participants, et s'être vu offrir un casque pour sa "protection".

Peu de choses ont filtré depuis la nomination de Michel Barnier le 5 septembre sur les lignes directrices qu'il entend donner à sa politique.

Tout au plus a-t-il esquissé quelques pistes fiscales dans une interview vendredi, à la suite d'un séminaire gouvernemental, affirmant qu'il "protégerait de toute augmentation fiscale ceux qui sont sur le terrain, qui travaillent, qui produisent".

- Chausse-trapes -

M. Barnier se sait attendu au tournant, par les groupes du "socle commun" qui soutiennent son action - la droite et les trois partis du camp présidentiel - mais aussi par l'extrême droite, qui l'a placé "sous surveillance", et peut à tout moment le faire tomber en joignant ses voix à celle de la gauche pour faire adopter une motion de censure.

Vingt-sept députés du groupe Ensemble pour la République (ex-Renaissance) ont fait monter la pression dimanche, se disant opposés à toute augmentation des impôts.

Marine Le Pen devrait elle temporiser avant de renverser M. Barnier, étant elle-même accaparée par son procès dans l'affaire des assistants parlementaires du Rassemblement national au Parlement européen, qui s'ouvre lundi jusqu'au 27 novembre.

Mais le petit jeu des pronostics a déjà commencé: une ancienne ministre a parié avec son entourage que le gouvernement tiendrait jusqu'en juin. Un de ses conseillers tablant plutôt sur la mi-novembre.

Le gouvernement va en effet devoir s'atteler au plus vite à la difficile tâche de faire adopter avant le 31 décembre par le Parlement les budgets de l'Etat et de la Sécurité sociale, dans un contexte financier particulièrement dégradé, comme l'a une nouvelle fois souligné M. Barnier samedi.

La plupart des acteurs politiques s'attendent à ce que l'exécutif doive, comme l'an dernier, en passer par dix 49.3 (cette disposition de la Constitution qui permet de faire adopter un texte sans vote), qui seront autant d'occasions de censure.

Parmi les chausse-trapes à éviter, la question de l'Aide médicale d'Etat (AME), dont la suppression est de longue date une demande de la droite, et notamment du nouveau ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, contre l'avis d'une grande partie des macronistes. L'AME permet aux étrangers en situation irrégulière de bénéficier d'un accès aux soins.

- "Rien" à l'agenda -

Hormis ces lois budgétaires, les parlementaires se demandent bien sur quels textes ils vont pouvoir travailler, compte tenu de la difficulté à faire émerger des majorités au Palais Bourbon.

Michel Barnier va-t-il reprendre le projet de loi sur la fin de vie, dont ne veulent pas ses ministres conservateurs? Introduire la proportionnelle aux élections, à laquelle la droite est hostile? Que vont devenir les projets de loi mis entre parenthèses avec la dissolution comme ceux sur l'agriculture ou le logement?

A l'Assemblée le risque est "que ça vivote mais que ça ne produise rien", se désole la même ancienne ministre, qui ne voit "rien" à l'agenda de l'Assemblée en octobre, si ce n'est le 31 octobre la "niche" réservée aux textes du RN, et peut-être des propositions de loi transpartisanes.

L'Assemblée n'est d'ailleurs pas totalement en ordre de bataille pour travailler, avec une vice-présidente et trois présidents de commission nommés au gouvernement, et pas encore remplacés.

Cette assemblée mal-née pourrait elle-même n'avoir qu'une durée de vie assez limitée. Beaucoup de députés s'attendent à une nouvelle dissolution dès que la Constitution le permettra, soit un an après les législatives anticipées.

Marine Le Pen en avait fait son cheval de bataille pour la rentrée parlementaire du RN le 14 septembre, estimant que la situation politique ne pouvait "pas tenir" et espérant que la "mandature soit la plus courte possible".

Mardi, la pression sur Michel Barnier s'exprimera aussi dans la rue, avec des manifestations dans toute la France pour demander l'abrogation de la réforme des retraites et l'augmentation des salaires, à l'appel de plusieurs syndicats.


Attal ne souhaite pas de nouvelle dissolution si Bayrou tombe

 Gabriel Attal "fera tout pour que François Bayrou reste Premier ministre" et ne souhaite pas de nouvelle dissolution si celui-ci n'obtient pas la confiance de l'Assemblée le 8 septembre car "ce n'est pas aux Français de régler les problèmes de l'Assemblée". (AFP)
Gabriel Attal "fera tout pour que François Bayrou reste Premier ministre" et ne souhaite pas de nouvelle dissolution si celui-ci n'obtient pas la confiance de l'Assemblée le 8 septembre car "ce n'est pas aux Français de régler les problèmes de l'Assemblée". (AFP)
Short Url
  • "Je ferai tout pour aider le gouvernement à tenir et François Bayrou à rester Premier ministre", a déclaré mercredi le chef du groupe parlementaire Renaissance (macroniste) sur France inter
  • "Ce à quoi je suis prêt, c'est qu'on se mette autour d'une table avec les responsables politiques prêts à avancer. De toute façon, quel que soit le vote du 8 septembre, il faudra un budget pour le pays", a-t-il ajouté

PARIS: Gabriel Attal "fera tout pour que François Bayrou reste Premier ministre" et ne souhaite pas de nouvelle dissolution si celui-ci n'obtient pas la confiance de l'Assemblée le 8 septembre car "ce n'est pas aux Français de régler les problèmes de l'Assemblée".

"Je ferai tout pour aider le gouvernement à tenir et François Bayrou à rester Premier ministre", a déclaré mercredi le chef du groupe parlementaire Renaissance (macroniste) sur France inter.

"Ce à quoi je suis prêt, c'est qu'on se mette autour d'une table avec les responsables politiques prêts à avancer. De toute façon, quel que soit le vote du 8 septembre, il faudra un budget pour le pays", a-t-il ajouté.

Se disant hostile à la suppression des deux jours fériés sans compensation salariale, il n'a pas répondu s'il était prêt à faire une concession sur la taxation des plus fortunés à l'égard de la gauche.

"On proposera des alternatives. Mais pour ça, encore faut-il qu'il y ait un gouvernement", a-t-il éludé.

Si le gouvernement Bayrou chute, l'ancien Premier ministre "ne croit pas qu'une nouvelle dissolution apporterait de la stabilité".

"Si on se demande chaque année s'il faut que les Français revotent, c'est que le problème ne vient pas des Français, mais bien de l'Assemblée elle-même. Et ce n'est pas aux Français de régler les problèmes de l'Assemblée, c'est à l'Assemblée de régler ses propres problèmes", a-t-il estimé.

"Dans la quasi-totalité des pays européens qui nous entourent, ils ont une Assemblée avec des forces éclatées. Et pourtant ils arrivent à travailler ensemble et à trouver des solutions ", a-t-il fait valoir.


Vote de confiance: le RN veut une dissolution pour «donner une majorité au pays», affirme Chenu

Le vote de confiance convoqué le 8 septembre par François Bayrou sera son "ultime échec", a prédit mardi le vice-président du Rassemblement national Sébastien Chenu, disant espérer une dissolution pour "donner une majorité au pays". (AFP)
Le vote de confiance convoqué le 8 septembre par François Bayrou sera son "ultime échec", a prédit mardi le vice-président du Rassemblement national Sébastien Chenu, disant espérer une dissolution pour "donner une majorité au pays". (AFP)
Short Url
  • "S'il est un président responsable, il se tourne vers les Français, il dissout l'Assemblée et il leur dit 'donnez une majorité'", a estimé M. Chenu, soulignant que "les Français ont vu ce que ça donnait, un pays sans majorité"
  • Un argument-clé pour le RN, qui "fera campagne (...) pour gouverner le pays non seulement sur un programme, mais sur l'idée de donner une majorité à ce pays", a assuré le vice-président du parti d'extrême droite

PARIS: Le vote de confiance convoqué le 8 septembre par François Bayrou sera son "ultime échec", a prédit mardi le vice-président du Rassemblement national Sébastien Chenu, disant espérer une dissolution pour "donner une majorité au pays".

"François Bayrou tente une ultime manoeuvre, il rencontrera un ultime échec", a déclaré sur Cnews et Europe 1 le député du Nord, anticipant déjà l'étape d'après et une nouvelle dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron.

"S'il est un président responsable, il se tourne vers les Français, il dissout l'Assemblée et il leur dit 'donnez une majorité'", a estimé M. Chenu, soulignant que "les Français ont vu ce que ça donnait, un pays sans majorité".

Un argument-clé pour le RN, qui "fera campagne (...) pour gouverner le pays non seulement sur un programme, mais sur l'idée de donner une majorité à ce pays", a assuré le vice-président du parti d'extrême droite.

Discours également relayé par son porte-parole Thomas Ménagé, député du Loiret, qui a expliqué sur RMC que "la seule solution dans la Ve République (...) c'est de demander aux Français de s'exprimer à nouveau pour dégager une majorité claire et que la France ne soit pas à l'arrêt".

Pour autant, M. Chenu a balayé tout risque de crise économique lié à l'instabilité politique: "On nous fait le coup à chaque fois. A chaque élection ou à chaque menace de censure, on nous dit attention, tout va s'arrêter, le pays va s'écrouler (...) La France tiendra. Ce n'est pas parce qu'on va changer de Premier ministre, ou qu'on aura une nouvelle majorité, que la France va s'écrouler".


Bayrou en mission impossible face à une chute plus probable que jamais

France's Prime Minister Francois Bayrou speaks during a press conference in Paris on August 25, 2025.
France's Prime Minister Francois Bayrou speaks during a press conference in Paris on August 25, 2025.
Short Url
  • François Bayrou demandera la confiance de l’Assemblée le 8 septembre, dans une tentative désespérée de sauver son gouvernement, fragilisé par le rejet de son plan d’économies
  • Une coalition d’oppositions – de l'extrême gauche à l'extrême droite – annonce déjà son vote contre, tandis que les syndicats prévoient des mobilisations pour le 10 septembre

PARIS: François Bayrou entame mardi devant la CFDT une opération de la dernière chance pour tenter d'arracher la survie de son gouvernement, plus que jamais menacé d'être renversé par les oppositions lors du vote de confiance du 8 septembre qui inaugure une nouvelle période d'incertitudes.

Confronté au rejet de son plan d'économies budgétaires de près de 44 milliards d'euros d'économies, par les opposants comme dans l'opinion, ainsi qu'à des appels à bloquer le pays le 10 septembre, le Premier ministre a brandi un va-tout lundi pour sa rentrée.

A sa demande, Emmanuel Macron va ainsi convoquer une session parlementaire extraordinaire le 8 septembre, et M. Bayrou sollicitera le jour-même la confiance de l'Assemblée sur une déclaration de politique générale. Son espoir: faire valider la nécessité d'un tel plan de réduction du déficit public, avant d'en négocier les mesures, dans un second temps.

Mais les réactions des oppositions ont été immédiates et ne semblent laisser quasiment aucune chance de réussite au gouvernement, privé de majorité depuis sa naissance en décembre.

Du Rassemblement national à La France insoumise en passant par les Ecologistes et les communistes, tous ont promis de voter contre la confiance.

Matignon espérait peut-être trouver un compromis avec le Parti socialiste. Mais "les socialistes voteront contre la confiance" à François Bayrou, a tranché leur patron Olivier Faure.

Sauf revirement, coup de théâtre ou tractations positives d'ici là, ces oppositions conjuguées disent que la France sera virtuellement sans gouvernement dans deux semaines. Un nouveau rebondissement dans l'instabilité politique provoquée par la dissolution de l'Assemblée nationale en juin 2024, qui risque en outre d'ouvrir une phase de turbulences financières.

Fébrilité

Signe de fébrilité: la Bourse de Paris a nettement reculé lundi et le taux d'intérêt de la dette française a grimpé, dans la foulée de l'annonce surprise de François Bayrou.

A l'extrême droite, Marine Le Pen a réitéré son souhait d'une nouvelle dissolution de l'Assemblée. Un scénario qu'Emmanuel Macron a plusieurs fois assuré vouloir éviter.

A gauche, la secrétaire nationale des Ecologistes Marine Tondelier a estimé que l'initiative du Premier ministre était "de fait une démission". Il a "fait le choix de partir", c'est une "autodissolution", a abondé Olivier Faure.

PS, Ecologistes et le reste de la gauche unioniste, qui promettent une candidature commune pour 2027 (sans Mélenchon ni Glucksmann à ce stade) se disent" prêts" à prendre la suite du gouvernement Bayrou.

Après deux premières conférences de presse et une série estivale de vidéos Youtube, François Bayrou se retrouve confronté aux vives réactions aux mesures envisagées pour réduire le déficit public, en particulier son projet de suppression de deux jours fériés.

Un débat "dévoyé" selon le chef du gouvernement, qui, avant de débattre de ces dispositions dans le détail, entend solliciter la confiance sur le diagnostic: "Y a-t-il ou pas urgence nationale à rééquilibrer nos comptes publics et à échapper, parce que c'est encore possible, à la malédiction du surendettement?", a-t-il posé lundi.

La date retenue, le 8 septembre, précède de deux jours l'appel, lancé sur les réseaux sociaux et les messageries, à bloquer la France. Un appel soutenu par la gauche, de LFI au PS.

Les syndicats rejettent aussi les mesures du plan gouvernemental, qui comprennent aussi une année blanche fiscale et le gel des prestations sociales. Ils s'opposent également au projet d'une nouvelle réforme de l'assurance-chômage, et ont reçu très frileusement la proposition de la ministre du Travail Astrid Panosyan-Bouvet de permettre la monétisation de la cinquième semaine de congés payés.

Si elles demeurent circonspectes face aux appels du 10 septembre, les organisations syndicales réfléchissent aux modes d'actions, avant une intersyndicale prévue dès ce vendredi. Certaines fédérations de la CGT et de Solidaires ont déjà prévu de se mobiliser le 10 septembre.

C'est dans ce contexte que François Bayrou interviendra mardi lors de l'évènement de rentrée de la CFDT, initialement prévu à la Bourse du Travail à Paris et finalement déplacé à Boissy-la-Rivière (Essonne).

Le Premier ministre a fait du dialogue social un mantra de son bail à Matignon. Mais le "conclave" convoqué pour revisiter la réforme des retraites de 2023 s'est achevé sur un échec.

M. Bayrou doit ensuite s'exprimer jeudi lors de l'évènement de rentrée du Medef. Il est attendu vendredi à la Foire de Châlons.