À Srebrenica, 30 ans après le génocide, l'espoir infatigable de retrouver les dernières victimes

Dragana Vucetic, médecin et anthropologue légiste à la Commission internationale pour les personnes disparues (ICMP), pose dans le laboratoire de l'ICMP à Tuzla, le 4 juin 2025.  (Photo par ELVIS BARUKCIC / AFP)
Dragana Vucetic, médecin et anthropologue légiste à la Commission internationale pour les personnes disparues (ICMP), pose dans le laboratoire de l'ICMP à Tuzla, le 4 juin 2025. (Photo par ELVIS BARUKCIC / AFP)
Short Url
Publié le Mardi 10 juin 2025

À Srebrenica, 30 ans après le génocide, l'espoir infatigable de retrouver les dernières victimes

  • plus de 8 000 hommes et adolescents bosniaques (musulmans) ont été tués en l'espace de quelques jours, après la conquête de l'enclave de Srebrenica, pourtant « zone protégée » de l'ONU.
  • À ce jour, plus de 6 800 victimes, soit environ 80 %, ont été identifiées, détaille la docteure Dragana Vucetic, anthropologue médico-légale au sein de la Commission internationale pour les personnes disparues (ICMP). 

SCEBRENICA, BOSNIE HERZEGOVINE : La joie d'avoir survécu aux massacres de Srebrenica en 1995 n'a pas duré longtemps pour Sadik Selimovic. Lorsqu'il apprend que ses trois frères et son père n'ont pas eu cette chance, sa vie prend la « seule direction possible » : partir à leur recherche.

Trente ans plus tard, cet homme de 62 ans, que la tragédie familiale a poussé à devenir enquêteur à l'Institut bosnien pour les personnes disparues, ne parvient pas à maîtriser son angoisse face au fait que les restes d'environ mille victimes n'ont pas encore été retrouvés.

Dans ce génocide, comme l'a jugé la justice internationale, commis en juillet 1995 par les forces serbes de Bosnie, plus de 8 000 hommes et adolescents bosniaques (musulmans) ont été tués en l'espace de quelques jours, après la conquête de l'enclave de Srebrenica, pourtant « zone protégée » de l'ONU.

« Au cours des trois dernières années, nous avons mené des recherches dans 62 endroits », espérant découvrir des fosses communes, « mais nous n'avons pas trouvé le moindre corps », explique Sadik Selimovic dans un entretien avec l'AFP. 

« Ceux qui savent où se trouvent les charniers ne veulent pas le dire », poursuit cet homme qui passe son temps à chercher des témoins parmi les Serbes qui vivent dans la région de Srebrenica, souvent ses voisins, ses amis d'école ou ceux avec qui il a travaillé avant la guerre (1992-1995) dans l'usine de batteries de Potocari, aujourd'hui centre mémorial du génocide.

« Comment peuvent-ils vivre avec ce qu'ils savent ? », s'interroge-t-il. « Je ne comprends pas. Mais il y a des gens qui ont parlé. Il faut aussi le dire. »

La dernière fosse commune, avec dix victimes de Srebrenica, a été découverte en 2021 dans la région de Dobro Polje, à 180 km au sud-ouest de la ville.

À ce jour, plus de 6 800 victimes, soit environ 80 %, ont été identifiées, détaille la docteure Dragana Vucetic, anthropologue médico-légale au sein de la Commission internationale pour les personnes disparues (ICMP). 

Dans la morgue de l'ICMP et de la Commission bosnienne pour les personnes disparues à Tuzla, dans le nord-ouest de la Bosnie-Herzégovine, se trouvent encore les restes de « 90 personnes dont l'empreinte génétique (ADN) a été isolée », mais qui n'ont pas encore pu être identifiées.

On y trouve également une cinquantaine de victimes identifiées. « Mais les familles ne souhaitent toujours pas valider l'identification et autoriser l'inhumation. Le plus souvent, parce que les restes squelettiques sont incomplets », explique cette experte qui travaille depuis plus de vingt ans au centre d'identification.

Dans un premier temps, les bourreaux ont jeté les corps des victimes dans de grandes fosses communes à proximité des « cinq lieux d'exécutions de masse ». 

- Fosses communes -

« Quelques mois plus tard, ces fosses ont été ouvertes et les cadavres, déjà au premier stade de décomposition, ont été transportés vers d'autres endroits, parfois à une centaine de kilomètres de distance », raconte le Dr Vucetic.

C'est là que les cadavres ont été « déchirés en morceaux » par des pelles mécaniques et des bulldozers, puis transportés souvent à deux ou trois endroits différents, dans une tentative de dissimuler le crime.

« Lors des exhumations, nous avons retrouvé des corps complets dans seulement 10 % des cas », précise Dragana Vucetic. Grâce à des tests ADN, il a été possible de recomposer certains squelettes dont des parties ont été retrouvées dans quatre fosses communes différentes. 

Entre 2012 et 2022, environ 6 000 personnes ont été identifiées, puis les identifications se sont raréfiées, avec seulement trois cas depuis début 2025.

Mevlida Omerovic, 69 ans, espère depuis 2013 que le squelette de son mari, Hasib, tué à l'âge de 33 ans avec son frère Hasan, soit exhumé afin que les trois corps soient enterrés ensemble au mémorial de Srebrenica.

« Il ne reste que sa mâchoire, mais j'ai maintenant décidé de le faire enterrer », a-t-elle déclaré lors des commémorations du 30^e anniversaire du génocide, le 11 juillet. « Nous saurons où se trouve sa tombe et nous pourrons nous y rendre pour prier », dit Mme Omerovic. Son frère Senad, tué à l'âge de 17 ans, n'a jamais été retrouvé.

L'enquêteur Sadik Selimovic a retrouvé les restes de ses frères et de son père. Le dernier qu'il a retrouvé est son petit frère Sabahudin, enterré en 2023.

Mais il n'a pas l'intention de s'arrêter là. « C'est ce qui me maintient en vie. Je sais ce que c'est que d'apprendre que l'on a retrouvé un proche », dit-il.

Alors, il lit les témoignages, sillonne la zone et retourne des dizaines de fois aux mêmes endroits pour les examiner attentivement.

Mais ce qui l'inquiète, c'est la Drina, le fleuve qui marque la frontière naturelle entre la Bosnie et la Serbie et qui coule non loin de Srebrenica. « Je crains que la Drina ne soit la plus grande fosse commune. Personne ne retrouvera jamais ceux qui y ont trouvé la mort ».


Le président syrien Ahmad al-Chareh arrive aux Etats-Unis

La visite du président Ahmed Al-Sharaa aux États-Unis est la première d'un président syrien depuis l'indépendance du pays en 1946, selon les analystes. (AP)
La visite du président Ahmed Al-Sharaa aux États-Unis est la première d'un président syrien depuis l'indépendance du pays en 1946, selon les analystes. (AP)
Short Url
  • Le président intérimaire syrien Ahmad al-Chareh a entamé une visite historique aux États-Unis après la levée des sanctions marquant un tournant diplomatique majeur
  • Cette visite, centrée sur la coopération antiterroriste, l’intégration à la coalition internationale et la reconstruction de la Syrie, symbolise la reconnaissance internationale du nouveau régime post-Assad et son rapprochement avec Washington

WASHINGTON: Le président intérimaire syrien, Ahmad al-Chareh, est arrivé aux Etats-Unis samedi pour une visite officielle inédite, a rapporté l'agence de presse officielle de son pays, au lendemain de son retrait de la liste noire américaine du terrorisme.

Le chef d'Etat par intérim, dont les forces rebelles ont renversé le dirigeant de longue date Bachar al-Assad en fin d'année dernière, doit rencontrer lundi le président américain, Donald Trump.

Il s'agit de la première visite bilatérale d'un chef d'Etat syrien aux Etats-Unis depuis l'indépendance du pays en 1946.

A son arrivée, M. Chareh a échangé des passes de basketball avec le commandant des forces américaines aux Moyen-Orient, Brad Cooper, ainsi qu'avec le chef de la coalition internationale anti-jihadistes, Kevin Lambert, selon des images qu'il a postées sur les réseaux sociaux.

Lors de cette visite, Damas devrait signer un accord pour rejoindre cette coalition menée par les Etats-Unis, selon l'émissaire américain pour la Syrie, Tom Barrack.

Le groupe jihadiste Etat Islamique (EI) avait été défait militairement en 2019 en Syrie par la coalition et les Forces démocratiques syriennes (FDS), conduites par les Kurdes, qui négocient actuellement leur intégration dans l'armée syrienne.

Les Etats-Unis prévoient pour leur part d'établir une base militaire près de Damas, a indiqué à l'AFP une source diplomatique en Syrie.

La Syrie, sortie de plus de 13 ans de guerre civile, cherche aussi à garantir des fonds pour sa reconstruction, un chantier dont le coût pourrait dépasser les 216 milliards de dollars (187 milliards d'euros), selon la Banque mondiale.

Jeudi, le Conseil de sécurité de l'ONU a levé les sanctions contre M. Chareh, qui jusqu'à présent avait besoin d'une exemption des Nations unies pour chaque déplacement international.

La résolution préparée par les Etats-Unis salue l'engagement des nouvelles autorités de M. Chareh, qui il y a encore un an dirigeait le groupe Hayat Tahrir al-Sham (HTS), l'ancienne branche syrienne d'Al-Qaïda, à "lutter contre le terrorisme".

Le ministère syrien de l'Intérieur a annoncé samedi avoir mené 61 raids et procédé à 71 arrestations dans une "campagne proactive pour neutraliser la menace que représente l'EI", selon l'agence officielle Sana.

Ces raids ont eu lieu notamment dans les secteurs d'Alep, d'Idlib, de Hama, de Homs, de Deir ez-Zor, de Raqqa et de Damas, où demeurent des cellules dormantes de l'organisation, a-t-il été précisé.

C'est au titre de chef de HTS, qui à la tête d'une coalition islamiste a renversé Bachar al-Assad le 8 décembre 2024, que M. Chareh était inscrit depuis 2013 sur la liste des sanctions de l'ONU.

- Bouleversement -

Mais dès sa prise du pouvoir, il a clairement rompu avec son passé jihadiste, multipliant les ouvertures vers l'Occident et les pays de la région, notamment les riches monarchies arabes. Il a aussi engagé des négociations avec Israël, pays avec lequel la Syrie est théoriquement en état de guerre.

Donald Trump avait déjà rencontré le dirigeant syrien lors d'un voyage dans le Golfe en mai et avait annoncé la levée des sanctions américaines contre la Syrie.

Les deux hommes vont également évoquer les négociations directes entamées par les autorités syriennes avec Israël.

M. Trump avait pressé en mai le dirigeant syrien de rejoindre les accords d'Abraham, qui ont acté en 2020 la reconnaissance d'Israël par plusieurs pays arabes.

Aux yeux de Michael Hanna, analyste de Crisis Group, "le président Trump a bouleversé de manière inattendue la politique de longue date des États-Unis concernant la Syrie en mai et a continué à soutenir le nouveau gouvernement à Damas, malgré des épisodes d'instabilité et de violence sectaire qui ont entamé la confiance envers les nouveaux dirigeants du pays".

La visite prévue à la Maison-Blanche de M. Chareh est "un témoignage supplémentaire de l'engagement des Etats-Unis envers la nouvelle Syrie et un moment hautement symbolique pour le nouveau dirigeant du pays, marquant ainsi une nouvelle étape dans sa transformation étonnante de chef militant en homme d’Etat mondial", ajoute l'analyste.


Indonésie: 54 blessés dans une explosion d'origine inconnue près d'une école à Jakarta, selon la police

 Au moins 54 personnes ont été blessées vendredi à la suite d'une explosion près d'une école à Jakarta, la capitale indonésienne, a déclaré le chef de la police locale, Asep Edi Suheri, sans donner d'éléments sur l'origine du sinistre. (AFP)
Au moins 54 personnes ont été blessées vendredi à la suite d'une explosion près d'une école à Jakarta, la capitale indonésienne, a déclaré le chef de la police locale, Asep Edi Suheri, sans donner d'éléments sur l'origine du sinistre. (AFP)
Short Url
  • "Selon les premières données, quelque 54 personnes sont touchées. Certaines ont des blessures mineures, d'autres modérées et certaines ont déjà quitté l'hôpital", a déclaré M. Asep, cité sur la chaîne Kompas TV
  • L'explosion s'est produite "à proximité" d'un lycée, a-t-il précisé, ajoutant que la police avait bouclé le périmètre

JAKARTA: Au moins 54 personnes ont été blessées vendredi à la suite d'une explosion près d'une école à Jakarta, la capitale indonésienne, a déclaré le chef de la police locale, Asep Edi Suheri, sans donner d'éléments sur l'origine du sinistre.

"Selon les premières données, quelque 54 personnes sont touchées. Certaines ont des blessures mineures, d'autres modérées et certaines ont déjà quitté l'hôpital", a déclaré M. Asep, cité sur la chaîne Kompas TV.

L'explosion s'est produite "à proximité" d'un lycée, a-t-il précisé, ajoutant que la police avait bouclé le périmètre.

La police "procède aux constatations sur la scène de crime", a déclaré M. Asep, précisant qu'une équipe de déminage de la police de Jakarta était sur place afin de déterminer la cause de l'explosion.

Des postes de secours ont été établis dans deux hôpitaux pour aider les familles à retrouver les victimes blessées, a-t-il également indiqué.

Une enquête est en cours pour déterminer la cause de l'explosion, a ajouté M. Asep. "Nous sommes en train de mener les investigations car cet incident vient de se produire", a-t-il expliqué.


Au moins neuf morts dans l'accident d'un avion-cargo aux États-Unis

Au moins neuf personnes sont mortes dans l'accident d'un avion-cargo qui s'est écrasé mardi peu après son décollage de Louisville, dans le centre-est des Etats-Unis, a annoncé mercredi le gouverneur du Kentucky. (AFP)
Au moins neuf personnes sont mortes dans l'accident d'un avion-cargo qui s'est écrasé mardi peu après son décollage de Louisville, dans le centre-est des Etats-Unis, a annoncé mercredi le gouverneur du Kentucky. (AFP)
Short Url
  • "Kentucky, d'autres nouvelles déchirantes nous parviennent de Louisville. Le nombre de victimes s'élève désormais à au moins 9, et pourrait encore augmenter. En ce moment, ces familles ont besoin de prières, d'amour et de soutien"
  • L'accident a également fait au moins 11 blessés. Le gouverneur de l'Etat tiendra une conférence de presse à 11H30, heure locale (16H30 GMT)

WASHINGTON: Au moins neuf personnes sont mortes dans l'accident d'un avion-cargo qui s'est écrasé mardi peu après son décollage de Louisville, dans le centre-est des Etats-Unis, a annoncé mercredi le gouverneur du Kentucky.

"Kentucky, d'autres nouvelles déchirantes nous parviennent de Louisville. Le nombre de victimes s'élève désormais à au moins 9, et pourrait encore augmenter. En ce moment, ces familles ont besoin de prières, d'amour et de soutien", a écrit sur X le gouverneur de l'Etat, Andy Beshear.

L'accident a également fait au moins 11 blessés. Le gouverneur de l'Etat tiendra une conférence de presse à 11H30, heure locale (16H30 GMT).

Le vol UPS 2976, qui devait rejoindre Hawaï, "s'est écrasé vers 17H15 heure locale" (22H15 GMT) mardi, selon le régulateur américain de l'aviation, la FAA. L'appareil était un McDonnell Douglas MD-11.

L'avion avait "trois membres d'équipage à son bord", a déclaré dans un communiqué le transporteur UPS, dont le siège de la division aérienne est installé à Louisville.

L'appareil aurait percuté "de manière assez directe" une installation de recyclage de pétrole, a précisé le gouverneur.

Une vidéo amateur partagée par la chaîne locale WLKY montre le moteur gauche de l'avion en feu tandis que l'appareil rase le sol en tentant de décoller de la piste, avant visiblement d'exploser plus loin, provoquant un large panache de fumée noire.

L'appareil a terminé sa course à près de 5 km de l'aéroport, selon la police.

Des images aériennes de télévisions locales montraient aussi, peu après le crash, un large brasier s'étalant sur plusieurs centaines de mètres de long dans une zone de hangars et de parkings, avec les gyrophares des équipes de secours à proximité.

Les vols, annulés mardi soir, ont été rétablis à l'aéroport international Mohamed-Ali de Louisville, a annoncé mercredi matin sur X le maire de la ville, Craig Greenberg.

UPS a annoncé mercredi via un communiqué suspendre toutes les opérations de tri des colis sur place, pour la deuxième journée consécutive.

Louisville sert de principal hub aérien américain pour UPS, selon une fiche d'information de l'entreprise.

Paralysie budgétaire 

Les enquêteurs de l'Agence américaine de sécurité des transports (NTSB) doivent arriver mercredi sur place.

L'accident de mardi intervient au moment où les conséquences de la paralysie budgétaire, due à un désaccord entre républicains et démocrates au Congrès, se font particulièrement ressentir dans le domaine du transport aérien.

Depuis plusieurs semaines, des pénuries de contrôleurs aériens - qui travaillent depuis le 1er octobre sans être payés - entraînent retards et annulations de vols à travers le pays.

Si la paralysie budgétaire se prolonge au-delà de cette semaine, l'espace aérien américain pourrait même être partiellement fermé, a mis en garde mardi le ministre des Transports, Sean Duffy.

UPS Airlines, la division aérienne du groupe américain de messagerie et de livraison de colis, opérait début septembre une flotte d'environ 500 avions de transport de marchandises, dont 27 MD-11, l'appareil impliqué dans l'accident de mardi.

Le dernier accident aérien majeur aux Etats-Unis s'est produit le 29 janvier dernier à proximité de l'aéroport Ronald-Reagan de Washington, quand un hélicoptère militaire est entré en collision avec un avion de ligne sur le point d'atterrir, tuant 67 personnes au total.