Israël contre Iran : Pourquoi Riyad est déterminée à la désescalade

Bâtiments endommagés à Bat Yam, en Israël, le 15 juin. (Reuters)
Bâtiments endommagés à Bat Yam, en Israël, le 15 juin. (Reuters)
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Publié le Dimanche 22 juin 2025

Israël contre Iran : Pourquoi Riyad est déterminée à la désescalade

Israël contre Iran : Pourquoi Riyad est déterminée à la désescalade
  • Il est important pour les observateurs de noter que l'Arabie saoudite considère aujourd'hui l'Iran non pas comme un adversaire, mais comme un pays musulman frère confronté à une agression grave et injustifiée
  • Riyad a souligné que la stabilité régionale dépendait du renforcement de la coopération entre les nations musulmanes

Comme le dirait toute personne ayant suivi les récentes déclarations émanant du ministère saoudien des Affaires étrangères, le Royaume a exprimé sa position sur les tensions régionales actuelles de manière on ne peut plus claire : l’agression actuelle contre l’Iran est non seulement inacceptable, mais constitue également une provocation dangereuse menaçant la stabilité de l’ensemble du Moyen-Orient.

Il est important que les observateurs comprennent que l’Arabie saoudite ne considère plus l’Iran comme un adversaire, mais comme une nation musulmane sœur faisant face à une attaque grave et injustifiée. En condamnant cette agression comme une violation flagrante des normes internationales, Riyad a exprimé sa pleine solidarité avec le peuple iranien et a rejeté toute atteinte à la souveraineté de ce pays. Cette position de principe reflète la conviction profonde du Royaume en la non-ingérence et le respect mutuel entre les nations.

Ce qui inquiète particulièrement, c’est l’objectif apparent derrière le calendrier de ces hostilités : faire dérailler des négociations sensibles entre Téhéran et Washington. L’Arabie saoudite y voit une manœuvre calculée visant à saboter un dialogue qui pourrait permettre de désamorcer l’un des défis les plus épineux de la région : le dossier nucléaire iranien.

Depuis l’accord historique de Pékin en mars 2023, les relations irano-saoudiennes sont, lentement mais sûrement, entrées dans une nouvelle phase prometteuse. Bien que les hostilités passées ne puissent être facilement oubliées, des mesures de renforcement de la confiance ont commencé à s’enraciner, avec des comités bilatéraux travaillant dans divers domaines pour éviter que les différends ne dégénèrent. Ces progrès fragiles — et l’idée plus vaste d’un Moyen-Orient paisible et prospère — sont précisément ce qui risque d’être perdu si les tambours de guerre étouffent l’élan diplomatique.

Riyad a également souligné que la stabilité régionale dépend d’une coopération renforcée entre les nations musulmanes. Sous l’égide de l’Organisation de la coopération islamique, le Royaume croit en la possibilité d’un front uni pour promouvoir la paix et le développement, à condition que les intentions soient sincères et non entachées d’ambitions géopolitiques.

L'agression actuelle est non seulement inacceptable, mais aussi une provocation dangereuse.

                                            Faisal J. Abbas | Rédacteur en chef
 

Dans un tourbillon d’engagements diplomatiques, le prince héritier Mohammed ben Salmane s’est entretenu par téléphone avec des dirigeants du monde entier — de Washington à Londres en passant par l’Extrême-Orient — pour appeler à une action collective afin de stopper ce qui pourrait devenir une catastrophe régionale. Il a également parlé directement avec le président iranien Masoud Pezeshkian, soulignant l’engagement de l’Arabie saoudite en faveur de la désescalade et sa volonté de jouer les médiateurs.

Ce leadership dépasse les simples gestes politiques. Sur le terrain, le Royaume a fourni un abri, des soins médicaux et des moyens de transport à plus de 70 000 pèlerins iraniens bloqués en Arabie saoudite en raison du conflit. Agissant sur instruction du prince héritier, le Royaume a financé leur séjour et coordonné leur retour en toute sécurité — un geste humanitaire qui reflète les valeurs que l’Arabie saoudite défend systématiquement.

Parallèlement, le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Faisal ben Farhane, s’est engagé sans relâche auprès de ses homologues à travers le monde pour rallier des soutiens à un cessez-le-feu, et a rencontré directement son homologue iranien afin d’explorer des solutions diplomatiques. Il convient de noter que Riyad avait exhorté Téhéran — bien avant le déclenchement des hostilités — à prendre au sérieux l’ultime proposition de Washington, avertissant que la position des États-Unis sur la question nucléaire ne devait pas être sous-estimée.

À l’avenir, si l’Iran venait à faire face à des défis humanitaires à la suite de cette crise, il ne fait aucun doute que le Royaume ferait partie des premiers à offrir son aide. Il ne s’agit pas seulement d’altruisme — mais d’un impératif stratégique et moral, fondé sur la conviction que le bien-être des nations voisines conditionne le destin collectif de la région.

L'Arabie saoudite a tracé une ligne de démarcation ferme : aucun belligérant ne sera autorisée à utiliser son espace aérien, ses terres ou ses eaux. La neutralité de Riyad est active et non passive - elle est délibérée, disciplinée et inébranlable dans son engagement en faveur de la désescalade.

Inutile de préciser que le ciblage délibéré de civils, le bombardement de médias et d’hôpitaux, ainsi que les menaces à l’encontre du Guide suprême de la République islamique sont condamnables et révoltants ; mais en continuant à les tolérer, nous risquons de normaliser des crimes de guerre inacceptables.

Espérons qu’il reste des voix responsables dans les salles de décision du monde entier pour reconnaître que cette escalade doit cesser avant que le point de non-retour ne soit franchi.

Faisal J. Abbas est le rédacteur en chef d'Arab News. X : @FaisalJAbbas

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com