La fermeture du détroit d'Ormuz ferait le plus grand tort aux alliés de l'Iran

Un navire et un boutre naviguent dans le détroit d'Ormuz au large de Khasab, à Oman. 24 juin 2025 (AFP)
Un navire et un boutre naviguent dans le détroit d'Ormuz au large de Khasab, à Oman. 24 juin 2025 (AFP)
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Publié le Jeudi 26 juin 2025

La fermeture du détroit d'Ormuz ferait le plus grand tort aux alliés de l'Iran

La fermeture du détroit d'Ormuz ferait le plus grand tort aux alliés de l'Iran
  • Dans le passé, le détroit d'Ormuz était une carte utilisée pour faire chanter le monde
  • Aujourd'hui, il n'est plus une préoccupation stratégique pour les Américains, qui sont devenus presque autosuffisants grâce à leur propre production de pétrole et à celle du Canada voisin

L'Iran menace, mais n'agit pas. Il ne minera pas le détroit d'Ormuz et ne le bloquera pas en bombardant les navires de passage. Ce scénario se retournerait contre lui et nuirait surtout à la Chine, premier acheteur de pétrole du Golfe, qui perdrait 4 millions de barils par jour.

Les ennemis de l'Iran - les Américains et les Israéliens - en profiteraient, car Pékin adopterait une attitude de colère à l'égard de l'Iran.

Lorsqu'un cargo a bloqué le canal de Suez pendant six jours en 2021, le monde a été paralysé, comme ce fut le cas lorsque les Houthis ont perturbé le trafic maritime mondial en prenant pour cible les navires passant par le détroit de Bab Al-Mandab.

Par conséquent, la fermeture du détroit d'Ormuz nuirait surtout aux alliés de l'Iran.

Dans le passé, le détroit d'Ormuz était une carte utilisée pour faire chanter le monde. Aujourd'hui, il n'est plus une préoccupation stratégique pour les Américains, qui sont devenus presque autosuffisants grâce à leur propre production de pétrole et à celle du Canada voisin.

Et si l'objectif de l'Iran en fermant le détroit était d'étouffer ses voisins du Golfe et de faire pression sur eux sans entrer dans une confrontation militaire ? Ces pays se préparent à ce jour sombre depuis des décennies. Même si le détroit était complètement fermé pendant plusieurs mois, ils pourraient absorber les pertes sans trop de dommages.

Si l'Iran passait à l'action, cela ferait grimper les prix du pétrole et porterait préjudice à la Chine et à l'Irak, principalement

Abdulrahman Al-Rashed

Le plus gros producteur, l'Arabie Saoudite, possède un oléoduc qui lui permet d'exporter via le port de Yanbu, sur la mer Rouge. Sa capacité est de 5 millions de barils par jour et peut être augmentée. Cela signifie qu'elle ne perdrait pas un seul baril de son marché. Les Émirats arabes unis disposent également du port de Fujairah, situé au-delà du détroit d'Ormuz, par lequel ils peuvent exporter plus de 1,5 million de barils par jour. Enfin, le Qatar est le plus grand producteur de gaz. Bien qu'il ne dispose pas de routes maritimes alternatives, il peut supporter plusieurs mois d'interruption forcée grâce à ses énormes réserves financières.

Le Koweït et le Bahreïn seront touchés, mais leurs partenaires du Conseil de coopération du Golfe peuvent les soutenir.

Le plus grand perdant du Golfe serait l'Irak - allié de l'Iran - qui exporte près de 3 millions de barils par jour via Ormuz. S'il était privé de ses exportations, il n'aurait pas la capacité financière de faire face à ses obligations envers ses citoyens ou à ses engagements extérieurs.

Nous savons que l'Iran s'est entraîné à plusieurs reprises à la fermeture du détroit d'Ormuz par le biais d'exercices militaires spécifiques. S'il passe à l'action, il fera grimper les prix du pétrole et portera préjudice à la Chine et à l'Irak, principalement.

Les États du Golfe se sont préparés à une telle éventualité en construisant des réseaux d'exportation qui contournent le détroit d'Ormuz

Abdulrahman Al-Rashed

Depuis les années 1980, la menace de fermeture du détroit est la carte de Téhéran pour intimider les Américains et les pays du Golfe. Mais les stratégies d'hier ne sont plus efficaces aujourd'hui. Les Etats-Unis sont devenus le premier producteur mondial de pétrole. La Chine est le premier acheteur du Golfe. Et les pays du Golfe se sont préparés à cette éventualité en construisant des réseaux d'exportation qui contournent le goulot d'étranglement qu'est Ormuz.

Les autres options de Téhéran pour élargir la portée du conflit restent dangereuses pour la région - et dangereuses pour lui-même. Chaque option s'apparente à une mission suicidaire qui menacerait un régime depuis longtemps déterminé à dominer et à s'étendre. C'est peut-être sa dernière chance. Il doit accepter la coexistence pacifique dans la région et rester à l'intérieur de ses frontières.

Abdulrahman Al-Rashed est un journaliste et un intellectuel saoudien. Il est l'ancien directeur général de la chaîne d'information Al-Arabiya et l'ancien rédacteur en chef d'Asharq Al-Awsat, où cet article a été initialement publié.

X : @aalrashed


NDLR: Les opinions exprimées par les auteurs dans cette section leur sont propres et ne reflètent pas nécessairement le point de vue d'Arab News.