Peut-être que l’ouragan Melissa n’est pas le meilleur exemple à citer lorsqu’on appelle à agir pour protéger la planète contre le changement climatique, puisque les Caraïbes sont une région notoirement sujette aux phénomènes météorologiques extrêmes. Mais chaque jour, de nouvelles données confirment que davantage de vies seront perdues si le réchauffement climatique n’est pas traité de manière globale — une étude universitaire internationale affirmant même que la hausse des températures tuerait désormais une personne par minute dans le monde.
La dévastation en Jamaïque survient alors que le monde tourne son attention vers la COP30 au Brésil en novembre. On peut se demander si cette réunion des signataires de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques sera différente des 29 précédentes, qui n’ont guère donné de résultats. Comme lors des conférences précédentes, experts, dirigeants d’entreprises, militants et responsables nationaux rivaliseront d’accès aux médias et aux réseaux sociaux pour défendre ou critiquer la mise en œuvre des accords passés visant à protéger la nature et à préserver l’environnement des excès humains responsables du réchauffement global.
Les pays continueront à faire semblant de présenter des engagements climatiques nationaux actualisés et d’évaluer les progrès réalisés dans le domaine des énergies renouvelables et des objectifs fixés lors des précédents sommets. Mais il devient de plus en plus évident qu’au lieu de travailler vers les objectifs de l’Accord de Paris, les nations cherchent à affaiblir leurs politiques, voire à les abandonner complètement, en invoquant des contraintes budgétaires ou économiques.
Puisque de nombreux experts estiment désormais que la bataille pour limiter la hausse des températures à 1,5 °C au-dessus de la moyenne préindustrielle est perdue, la question pressante est de savoir si le monde peut agir collectivement pour s’adapter aux phénomènes extrêmes et minimiser l’impact d’une planète plus chaude sur ses habitants.
Les signes ne sont guère encourageants. Les appels d’Antonio Guterres ont peu de chances de résonner et d’orienter l’agenda mondial vers une coopération accrue. Le secrétaire général de l’ONU a appelé cette semaine les nations à reconnaître leur échec et à admettre les conséquences dévastatrices du dépassement du seuil de 1,5 °C, visibles en Amazonie, au Groenland, en Antarctique occidental ou sur les récifs coralliens. Mais ce dépassement ne sera probablement ni limité ni temporaire, comme le souhaite le chef de l’ONU, surtout quand moins d’un tiers des pays signataires ont soumis leurs plans d’action climatique et leurs contributions déterminées au niveau national prévues par l’Accord de Paris.
Pendant ce temps, des puissances comme les États-Unis ont tout bonnement abandonné le processus, tandis que la Chine montre également des signes d’hésitation.
De nouvelles données confirment presque chaque jour que davantage de vies seront perdues.
Mohamed Chebaro
Le consensus mondial sur la santé de la planète fait défaut, malgré les rappels incessants contenus dans d’innombrables rapports et études scientifiques. Dans le rapport annuel Lancet Countdown on Health and Climate Change publié cette semaine, les experts soulignent que le changement climatique ravage la santé des populations du monde entier et avertissent que les échecs politiques entraînent des millions de morts évitables chaque année, la transition vers un mode de vie plus propre étant au point mort.
L’investisseur et philanthrope milliardaire Bill Gates a raison d’admettre que les dirigeants mondiaux ont échoué à éviter le pire et à empêcher la planète de dépasser le seuil des 1,5 °C. Il ajoute qu’ils devraient désormais concentrer leurs efforts sur la protection de la santé plutôt que sur la réduction des températures. Mais si le monde n’a pas réussi à contenir la hausse des températures, peut-il au moins en atténuer les conséquences sanitaires ? La volonté de transformer les économies et les sociétés pour adopter un mode de vie à faibles émissions a déjà polarisé le monde. Et ce qui a causé l’échec de ces efforts risque fort de compromettre toute stratégie visant à protéger les pays vulnérables qui subissent de plein fouet les effets du changement climatique.
Je ne sais pas s’il faut se rassurer par l’affirmation de Gates selon laquelle le réchauffement climatique est loin d’être un phénomène « mettant fin à la civilisation ». Pourtant, améliorer le bien-être des populations, notamment dans les régions vulnérables, en investissant dans l’accès à l’énergie, la santé et la résilience agricole, pourrait, comme il le suggère, en atténuer l’impact.
Mais comment cette approche pourrait-elle réussir si sa mise en œuvre dépend encore une fois d’un consensus entre responsables politiques, experts, militants et donateurs — ce même consensus qui a fait défaut la première fois ?
Mohamed Chebaro est un journaliste libano-britannique qui a plus de 25 ans d'expérience dans les domaines de la guerre, du terrorisme, de la défense, des affaires courantes et de la diplomatie.
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com