Un an après qu'Israël a accepté un cessez-le-feu avec le Hezbollah libanais, la pression monte sur le gouvernement libanais pour qu'il prenne des mesures extrêmes afin de désarmer le groupe militant et de couper ses liens avec son principal bienfaiteur, l'Iran. Les États-Unis ont informé le président Joseph Aoun et le premier ministre Nawaf Salam que, si des mesures concrètes ne sont pas prises pour mettre fin à toutes les sources de financement du groupe et pour démanteler ses armes, Washington ne peut pas garantir qu'Israël n'interviendra pas pour mettre fin à la menace du Hezbollah.
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a répété que Tel Aviv était prêt à intervenir pour détruire le Hezbollah. Ces dernières semaines, lui et son ministre de la défense, Israël Katz, ont accusé le Hezbollah de reconstruire son arsenal, de recruter des milliers de personnes et de faire passer en contrebande des armes en provenance d'Iran via la Syrie. Israël a intensifié ses attaques quotidiennes contre ce qu'il appelle des cibles du Hezbollah dans le sud du Liban et dans la vallée de la Bekaa. Il affirme avoir tué des centaines de militants du groupe depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu en novembre dernier.
Entre-temps, le secrétaire général du parti, Naim Qassem, a envoyé des messages sévères au gouvernement libanais, rejetant toute tentative de désarmer le groupe ou d'engager des pourparlers directs avec Israël. Alors que le gouvernement et l'armée ont pour mandat de mettre fin à la présence du Hezbollah dans le sud du Liban et de limiter toutes les armes à l'État, ce qui signifie désarmer le Hezbollah, peu de choses ont été faites à cet égard. Une confrontation entre l'armée et le Hezbollah pourrait facilement déclencher une guerre civile au Liban. Alors que M. Aoun est déterminé à tenir sa promesse de désarmer les acteurs non étatiques et de limiter les armes au contrôle de l'État, le gouvernement et l'armée nationale ne disposent en réalité d'aucun outil pour mettre en œuvre cette promesse.
Une confrontation entre l'armée et le Hezbollah pourrait facilement déclencher une guerre civile au Liban.
Oussama Al-Sharif
Rien ne prouve que le Hezbollah se réarme et se prépare à un nouveau round avec Israël. Il a subi des pertes considérables lors de la dernière guerre et, avec l'effondrement du régime Assad en Syrie, il a perdu le contrôle des routes de contrebande en provenance d'Iran. Ses dirigeants affirment aujourd'hui qu'ils n'engageront pas de dialogue sur leur désarmement alors qu'Israël continue de violer l'accord de cessez-le-feu en occupant cinq positions stratégiques au Sud-Liban. Ils affirment qu'Israël n'a jamais rempli ses obligations au titre de la résolution 1701 du Conseil de sécurité des Nations unies.
En outre, le parti, qui est représenté au gouvernement, a réaffirmé qu'un monopole exclusif de l'État sur les armes ne pouvait être discuté que dans le cadre d'une stratégie globale visant à défendre le Liban contre les menaces israéliennes.
Cette impasse correspond aux objectifs et à la stratégie à court terme d'Israël. M. Netanyahou, qui se sent acculé à Gaza par le plan de paix du président Donald Trump, n'a pas de telles restrictions lorsqu'il s'agit du Liban, ou de l'Iran d'ailleurs. Il a laissé entendre que la confrontation avec l'Iran n'était pas terminée. Il pourrait ne pas être satisfait de la visite historique du président syrien Ahmad Al-Sharaa à la Maison Blanche cette semaine, qui pourrait avoir pour conséquence de restreindre les mouvements israéliens en Syrie grâce à des garanties américaines accordées à Damas. Mais en ce qui concerne le Liban, M. Netanyahou peut faire valoir des arguments solides.
Le Hezbollah a attaqué Israël pendant la guerre contre Gaza. Le Hezbollah a tiré des centaines de roquettes sur le nord d'Israël et a forcé des dizaines de milliers d'Israéliens à évacuer. De l'avis d'Israël, partagé par Washington, le Hezbollah reste une menace et doit être démantelé soit par les Libanais eux-mêmes, soit par Israël.
La référence du Hezbollah à des pourparlers directs entre le Liban et Israël est une autre voie que Washington tente d'emprunter. L'envoyé spécial des États-Unis pour la Syrie et le Liban, Tom Barrack, a fait pression sur les responsables libanais pour qu'ils engagent des pourparlers de paix avec Israël. Il a suggéré que les deux parties conviennent d'accords de sécurité qui aboutiraient finalement à un traité de paix dans le cadre des accords d'Abraham de Trump. Si M. Aoun s'est dit prêt à entamer des pourparlers indirects, la question de la paix entre le Liban et Israël divise fortement les Libanais.
La crise actuelle au Liban sur le désarmement du parti maintiendra le pays dans un état de faiblesse et de polarisation.
Osama Al-Sharif
Pour Israël, les pourparlers sur la sécurité seraient axés sur la fin du rôle de maintien de la paix des Nations unies au Sud-Liban, l'abandon de toute obligation israélienne au titre de la résolution 1701 du Conseil de sécurité des Nations unies et l'obligation pour le Liban d'accepter une présence israélienne dans des points stratégiques clés au sud du fleuve Litani. Aucun responsable libanais n'accepterait de telles conditions. Pour Netanyahou, la réalité actuelle du soi-disant cessez-le-feu lui convient parfaitement.
Washington continuera à faire pression sur le gouvernement libanais dans le dossier du Hezbollah. Et la crise actuelle au Liban sur le désarmement du parti maintiendra le pays dans un état de faiblesse et de polarisation. Une telle impasse sert les intérêts israéliens à un moment où Netanyahou, cherchant à se maintenir au pouvoir, jure que la bataille contre les ennemis du Liban et de Gaza n'est pas terminée.
Il ne fait aucun doute que le Hezbollah a subi d'énormes pertes, non seulement sur le champ de bataille, mais aussi au niveau de la direction. Qassem n'est pas Hassan Nasrallah et le parti n'est plus que l'ombre de ce qu'il était il y a deux ans. L'Iran a perdu son allié syrien et la carte géopolitique de la région a été redessinée.
Ce qui est alarmant pour les Libanais, c'est que l'impasse politique actuelle ne peut plus durer très longtemps. Le pays est sur le point de devenir un État en faillite. Israël contrôle son espace aérien et lance des frappes quotidiennes. Les États-Unis offrent une issue, mais le remède est amer et dangereux. Le spectre d'une guerre civile est réel. La menace israélienne d'envahir et d'occuper davantage de territoires n'est pas farfelue.
Les dirigeants du Hezbollah ne doivent pas répéter les erreurs du passé. Les enjeux sont considérables en ce moment crucial de l'histoire du Liban. Le Hezbollah doit fournir à Aoun et au gouvernement les ressources nécessaires pour contrer les pressions américaines et les menaces israéliennes. Il doit accepter le principe selon lequel seul l'État devrait avoir le contrôle exclusif des armes et il doit démontrer sa volonté de remplir ses obligations en tant que parti politique libanais.
Une paix permanente entre Israël et le Liban est un objectif réaliste et légitime. Mais elle ne peut être imposée au peuple libanais alors qu'Israël refuse de se retirer du territoire qu'il occupe au Sud-Liban ou qu'il continue à violer la souveraineté du Liban. Cette paix doit être honorable et les États-Unis ne doivent pas utiliser l'épouvantail israélien pour forcer le Liban à se soumettre.
Osama Al-Sharif est un journaliste et commentateur politique basé à Amman.
X : @plato010
NDLR: Les opinions exprimées par les auteurs dans cette section leur sont propres et ne reflètent pas nécessairement le point de vue d'Arab News.














