La police tunisienne «a traîné mon frère puis l'a abandonné, inconscient, dans la rue»

Des manifestants bloquent une rue le 17 janvier 2020 à Ettadhamen au nord-ouest de Tunis. (AFP).
Des manifestants bloquent une rue le 17 janvier 2020 à Ettadhamen au nord-ouest de Tunis. (AFP).
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Publié le Samedi 23 janvier 2021

La police tunisienne «a traîné mon frère puis l'a abandonné, inconscient, dans la rue»

  • L’interpellation brutale de son frère ravive une douleur, celle de la perte d’un autre membre de la famille
  • Mouna Dridi déplore l’injustice vécue par sa famille, qui de l’abus de pouvoir et de la tyrannie de la police tunisienne»

PARIS: Dans la ville agricole de Siliana, située à 120 kilomètres de Tunis, un des fiefs de la révolte populaire depuis 2011, vit la famille Dridi dont l’un des membres, Mouna, architecte dessinatrice en bâtiment au chômage, souhaite, aujourd’hui, dénoncer les actes de violences que son jeune frère a subis lors d’une des nuits agitées de manifestations nocturnes des jeunes dans sa ville.

Il était 19 h 25, en cette soirée du 17 janvier 2021, lorsque Hassan Dridi, 28 ans, veilleur de nuit dans une des écoles de Siliana, a été arrêté par la police. «Mon frère a été interpellé avec une grande violence alors qu’il se rendait à son travail», explique Mouna Dridi à Arab News en français. «Alors qu’il marchait, il a été arrêté sans aucune raison valable, maltraité et abusé par des policiers.

tunisie
Hassan Dridi, 28 ans, sur son lit d'hôpital après l'agression dont il a été la victime à Siliana alors qu'il se rendait sur son lieu de travail. (Photo fournie). 

Après s'être évanoui sous les coups de matraque, il a été abandonné sur le trottoir. Mon frère n’était pas dans la rue pour manifester, il se rendait, comme chaque soir, à son travail pour subvenir aux besoins de notre famille», ajoute-t-elle.

Injustice et douleur

Comme de nombreuses familles dans la région, les Dridi subissent chômage et précarité. Pourtant, malgré cette situation précaire, les membres de la famille ont décidé, depuis de nombreuses années, de ne plus manifester pour réclamer les droits élémentaires garantis par la Constitution du pays. Et pour cause, la famille est endeuillée, brisée depuis le décès de l’un des leurs lors des confrontations protestataires survenues, à Siliana, le 27 novembre 2012.

«Nous avons décidé de ne pas manifester et ne pas exprimer nos opinions pour éviter d’être confrontés à la police», confie Mouna Dridi à Arab News en français. L’interpellation brutale de son frère ravive une douleur, celle de la perte d’un autre membre de la famille. «Nous avons perdu mon autre frère, Adel Dridi, lors du soulèvement des habitants de Siliana en 2012», nous fait savoir la jeune femme. «Aujourd’hui, mon autre frère, Hassan, agressé récemment, fait des cauchemars, il est traumatisé, et nous avec», explique-t-elle.

Briser la loi du silence sur la brutalité policière

«Mon frère est asthmatique, il s’est éloigné de la zone des manifestations, car le gaz lacrymogène est très nocif pour lui, mais il a été interpellé par les forces de l’ordre», confie Mouna, qui a décidé de briser la loi du silence. «Mon frère a bien signalé aux policiers qu’il se rendait à son travail, qu’il est asthmatique, mais cela n’a servi à rien, il n’a pas été écouté, pire encore, il a été traîné sur plusieurs mètres, d’un bout à un autre de l’avenue, il a même perdu connaissance», nous explique Mouna. «Il a été abandonné dans la rue, inconscient», regrette-t-elle.

«Selon les témoignages que j’ai recueillis auprès des voisins, un des policiers aurait traité mon frère d’alouch («agneau» en tunisien). Il faisait référence à Abderrahmane al-Othmani, un berger, qui, le 14 janvier 2021, a été interpellé et frappé, et dont le troupeau a été confisqué dans notre gouvernorat». Elle ajoute: «Les voisins ont été témoins de ce qui s’est passé, ils ont demandé aux policiers de le relâcher. Ce sont eux qui ont filmé, pris des photos et appelé les secours. Grâce à eux, mon frère a été transporté à l’hôpital pour les premiers de secours.»

«Nous avons tous les documents qui prouvent que Hassan Dridi travaille de nuit et qu’il a donc transgressé le couvre-feu pour se rendre à son travail, indispensable à la survie financière de notre famille», poursuit-elle.

Mouna Dridi déplore l’injustice vécue par sa famille, qui, selon elle, témoigne encore une fois, «de l’abus de pouvoir et de la tyrannie de la police tunisienne. Il s’agit cette fois-ci d’un acte de barbarie infligé à l’encontre de mon frère Hassan Dridi», confie-t-elle à Arab News en français.

Un peuple en détresse

«Je dénonce les violences à l’encontre de mon frère qui, j’insiste, n’a pas participé aux manifestations nocturnes», proteste la sœur de la victime. «Par ce témoignage, je souhaite dire la vérité sur ce qui s’est passé, ici, dans la province affligée de Siliana, cette ville qui a mené la révolution du printemps arabe en 2011 pour la liberté et la dignité. Nous sommes un peuple en détresse qui souhaite faire écouter sa voix», ajoute Mouna Dridi à Arab News en français.


Israël: des élus favorables à une loi instaurant la peine de mort pour les «terroristes»

 La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir. (AFP)
La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir. (AFP)
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  • Selon le médiateur israélien chargé des otages, Gal Hirsch, le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient cette initiative
  • La commission a approuvé un amendement au Code pénal, qui sera maintenant transmis au Parlement pour un vote en première lecture, une loi étant instaurée en Israël après une vote en troisième lecture

JERUSALEM: La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir.

La commission a approuvé un amendement au Code pénal, qui sera maintenant transmis au Parlement pour un vote en première lecture, une loi étant instaurée en Israël après une vote en troisième lecture.

Selon le médiateur israélien chargé des otages, Gal Hirsch, le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient cette initiative.

Dans une note explicative de la commission, il est indiqué que "son objectif est de couper le terrorisme à sa racine et de créer une forte dissuasion".

Le texte propose qu'un "terroriste reconnu coupable de meurtre motivé par le racisme ou la haine (...) soit condamné à la peine de mort - de manière obligatoire", ajoutant que cette peine serait "non optionnelle".

La proposition de loi a été présentée par une élue du parti Otzma Yehudit (Force Juive) d'Itamar Ben Gvir.

Ce dernier a menacé de cesser de voter avec la coalition de droite de Benjamin Netanyahu si ce projet de loi n'était pas soumis à un vote parlementaire d'ici le 9 novembre.

"Tout terroriste qui se prépare à commettre un meurtre doit savoir qu'il n'y a qu'une seule punition: la peine de mort", a dit le ministre lundi dans un communiqué.

M. Ben Gvir avait publié vendredi une vidéo de lui-même debout devant une rangée de prisonniers palestiniens allongés face contre terre, les mains attachées dans le dos, dans laquelle il a appelé à la peine de mort.

Dans un communiqué, le Hamas a réagi lundi soir en affirmant que l'initiative de la commission "incarne le visage fasciste hideux de l'occupation sioniste illégitime et constitue une violation flagrante du droit international".

"Nous appelons les Nations unies, la communauté internationale et les organisations pertinentes des droits de l'Homme et humanitaires à prendre des mesures immédiates pour arrêter ce crime brutal", a ajouté le mouvement islamiste palestinien.

Le ministère palestinien des Affaires étrangères et des expatriés, basé à Ramallah, a également dénoncé cette décision, la qualifiant de "nouvelle forme d'extrémisme israélien croissant et de criminalité contre le peuple palestinien".

"C'est une étape dangereuse visant à poursuivre le génocide et le nettoyage ethnique sous le couvert de la légitimité", a ajouté le ministère.


Frappes israéliennes sur le sud du Liban: deux morts 

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah. (AFP)
Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah. (AFP)
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  • Selon un bilan provisoire, "une frappe ennemie d'Israël" dans la région de Nabatiyé a fait lundi "un mort et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé
  • Un drone a visé une voiture à Doueir, a rapporté l'agence nationale d'information Ani

BEYROUTH: Des frappes israéliennes sur le sud du Liban ont tué lundi deux personnes et blessé sept autres, a indiqué le ministère libanais de la Santé, au lendemain de la menace d'Israël d'intensifier ses attaques contre le Hezbollah pro-iranien.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024, Israël continue de mener des attaques régulières contre les bastions du Hezbollah. Et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a accusé dimanche le Hezbollah de tenter de se "réarmer".

Selon un bilan provisoire, "une frappe ennemie d'Israël" dans la région de Nabatiyé a fait lundi "un mort et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé.

Un drone a visé une voiture à Doueir, a rapporté l'agence nationale d'information Ani.

Sur place, un photographe de l'AFP a vu des pompiers tenter d'éteindre l'incendie de la voiture visée qui s'est propagé à d'autres véhicules à proximité. Des ouvriers ramassaient les bris de verre des devantures de commerces endommagées, a-t-il également constaté.

Une autre frappe sur un village de la région de Bint Jbeil a fait un mort, selon le ministère de la Santé.

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah.

Des centaines de personnes ont participé à leurs funérailles dimanche dans la ville de Nabatiyé, scandant "Mort à Israël".

Le Hezbollah a été fortement affaibli par la guerre, avec notamment l'assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah, par une frappe israélienne en septembre 2024 à Beyrouth, mais il demeure financièrement résilient et armé.

Les États-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe, ce que le Hezbollah refuse.

"Nous attendons du gouvernement libanais qu'il fasse ce qu'il s'est engagé à faire, c'est-à-dire désarmer le Hezbollah, mais il est clair que nous exercerons notre droit à l'autodéfense comme convenu dans les termes du cessez-le-feu", avait averti le Premier ministre israélien dimanche.


La Turquie mobilise ses partenaires musulmans autour de Gaza

La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien. (AFP)
La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien. (AFP)
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  • Devant le Comité permanent pour la coopération économique de l'OCI, réuni lundi à Istanbul, le président turc Recep Tayyip Erdogan a critiqué l'attitude "très médiocre" d'Israël
  • "Nous devons apporter davantage d'aide humanitaire aux habitants de Gaza, puis commencer les efforts de reconstruction" a poursuivi le chef de l'Etat en appelant la Ligue arabe et l'OCI à jouer "un rôle moteur" en ce sens

ISTANBUL: La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien.

Les ministres de ces sept pays (Turquie, Arabie saoudite, Qatar, Emirats arabes unis, Jordanie, Pakistan et Indonésie), tous membres de l'organisation de la coopération islamique (OCI), avaient été reçus par Donald Trump fin septembre à New York en marge de l'Assemblée générale de l'ONU, avant la présentation du plan de paix américain six jours plus tard.

Devant le Comité permanent pour la coopération économique de l'OCI, réuni lundi à Istanbul, le président turc Recep Tayyip Erdogan a critiqué l'attitude "très médiocre" d'Israël depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu le 10 octobre, alors que "le Hamas semble déterminé" à respecter l'accord, estime-t-il.

"Nous devons apporter davantage d'aide humanitaire aux habitants de Gaza, puis commencer les efforts de reconstruction" a poursuivi le chef de l'Etat en appelant la Ligue arabe et l'OCI à jouer "un rôle moteur" en ce sens.

En amont de cette réunion, le chef de la diplomatie turque Hakan Fidan a reçu samedi une délégation du bureau politique du Hamas emmenée par Khalil al-Hayya, le négociateur en chef du mouvement islamiste palestinien.

Selon des responsables du ministère des Affaires étrangères, M. Fidan doit appeler à la mise en place de mécanismes permettant aux Palestiniens d'assurer la sécurité et la gouvernance de Gaza.

"Agir avec prudence" 

"Nous devons mettre fin au massacre à Gaza. Un cessez-le-feu à lui seul ne suffit pas", a insisté M. Fidan lors d'un forum à Istanbul.

"Nous devons reconnaître que Gaza doit être gouvernée par les Palestiniens et agir avec prudence", a encore souligné le ministre turc, plaidant de nouveau pour une solution à deux Etats.

Le chef de la diplomatie turque accuse Israël de chercher des prétextes pour rompre le cessez-le-feu.

Mais les efforts d'Ankara, qui multiplie les contacts diplomatiques avec les pays de la région et cherche à infléchir la position pro-israélienne des Etats-Unis, sont vus d'un mauvais œil par Israël qui juge Ankara trop proche du Hamas.

Les dirigeants israéliens ont exprimé à plusieurs reprises leur refus de voir la Turquie participer à la force internationale de stabilisation à Gaza.

En vertu du plan de Donald Trump, sur lequel est basé l'accord de cessez-le-feu, cette force de stabilisation, formée principalement de troupes de pays arabes et musulmans, doit se déployer à Gaza à mesure que l'armée israélienne s'en retirera.

Seuls des pays jugés "impartiaux" pourront rejoindre cette force, a cependant prévenu le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar.

Autre signe de la méfiance du gouvernement israélien : une équipe de secouristes turcs dépêchée pour participer à la recherche de corps, y compris israéliens, dans les ruines de Gaza, attendait toujours en fin de semaine dernière le feu vert israélien pour entrer dans le territoire palestinien, selon Ankara.