L’exposition virtuelle Turath se penche sur l’influence artistique des Arabes aux USA

En 1891, Assad Ghosn peignait des portraits et des paysages. (Photo fournie)
En 1891, Assad Ghosn peignait des portraits et des paysages. (Photo fournie)
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Publié le Samedi 23 janvier 2021

L’exposition virtuelle Turath se penche sur l’influence artistique des Arabes aux USA

  • «Nous voulions montrer que les Arabes font partie intégrante de la scène culturelle américaine», affirme Akram Khater, co-organisateur de l’exposition en ligne Turath
  • Dans les cinq sections de l'exposition, Turath met en avant des écrivains, des artistes et des musiciens qui ont prospéré grâce à leur art, sans avoir la renommée de certains de leurs contemporains comme Amin Rihani et Khalil Gibran

DUBAÏ: Ils disent que l'histoire se répète… Les troubles politiques au Liban et la guerre civile en Syrie ont conduit à un exode alarmant de milliers de jeunes Arabes instruits, à la recherche de sécurité et de meilleures opportunités à l'étranger. Ce n’est pas la première fois. Une émigration semblable avait eu lieu il y a un siècle au Levant.

Au début des années 1900, les États-Unis représentaient en effet une destination majeure pour les immigrants du monde entier. On estime qu’environ 100 000 Arabes, originaires pour la plupart de la Syrie et du Liban modernes (alors appelés «Grande Syrie» sous domination ottomane) se sont rendus en Amérique entre 1880 et 1940, à la recherche d’une prospérité économique.

Une nouvelle exposition virtuelle – intitulée Turath («héritage» en arabe) – met à l’honneur les récits de la première communauté arabe américaine, et rend hommage à leur art méconnu, de la peinture au spectacle.

Turath, qui sera disponible en ligne tout au long de l’année 2021, a été organisée par le centre Moise A. Khayrallah pour les études sur la diaspora libanaise de la Carolina State University. Le directeur du centre est le Dr Akram Khater, professeur d’histoire libanais, arrivé aux États-Unis en 1978, peu après le début de la guerre civile. Il a expliqué à Arab News pourquoi cette exposition était capitale.

 «Les Arabes aux États-Unis ne font pas vraiment partie du récit de l'Amérique», explique Akram Khater, qui a co-organisé Turath. «Nous ne faisons pas partie de la construction de l’Amérique d’aujourd’hui. Dans l’esprit de la plupart des Américains, nous sommes perçus comme antiaméricains par excellence – assimilés aux terroristes, aux extrémistes religieux – et le 11-Septembre n’a fait qu’amplifier cette perception, de sorte que nous sommes devenus des étrangers. Nous voulions montrer que non seulement nous vivons ici depuis cent cinquante ans, comme beaucoup d'autres immigrants, mais aussi que nous sommes partie intégrante de la scène culturelle américaine.»

Kawkab Amirka, 15 avril 1892, Khayrallah Center Archive. (Photo fournie)
Kawkab Amirka, 15 avril 1892, Khayrallah Center Archive. (Photo fournie)

Pour témoigner de cette histoire méconnue, le centre s’est associé à plusieurs institutions de renom, notamment le Musée national arabo-américain du Michigan et le Comité national libanais de Gibran, afin de rendre accessible au public une série d’objets historiques et d’images d’archives. Le résultat est fascinant et peut être déconcertant pour certains. L’exposition rassemble un exemplaire du premier journal arabe d'Amérique du Nord, Kawkab Amirka, datant de 1892 («Étoile de l’Amérique»), une ancienne machine à écrire sophistiquée Remington en langue arabe, ainsi qu’une rare photographie des années 1920 de l'actrice Mary Nash dans le magazine Vogue, sur laquelle elle porte des bijoux de la journaliste devenue designer Marie Azeez el-Khoury.

L’exposition accorde une place importante aux femmes. «Elles ont fait partie de l'immigration depuis le tout début», explique Akram Khater. «Les femmes ont toujours travaillé, aussi bien dans les usines textiles que dans la culture, elles étaient entrepreneuses et productrices. Il ne s’agit pas de romancer l’histoire et d’affirmer qu’elles étaient toutes fortes, certaines ne l’étaient pas, tout comme certains hommes qui ont été brisés par l’immigration. C’était dur, il fallait laisser derrière soi tout ce qu’on connaissait pour aller dans des lieux ou vous étiez, au mieux, tolérés.»

À travers les cinq sections de l'exposition, Turath met en avant des écrivains, des artistes et des musiciens qui ont prospéré grâce à leur art, mais qui n'ont pas obtenu la même reconnaissance que leurs contemporains plus populaires – les intellectuels Amin Rihani et Khalil Gibran, qui étaient membres de The Pen League de New York, plus connue en arabe sous le nom «Al-Rabita al-Qalamiyya ».

«Gibran est très impressionnant, il a accompli beaucoup de choses, mais il n’était pas le seul. Il faisait partie d'un mouvement, et c'est ce que nous cherchons à mettre en avant. Nous présentons ici une sélection de personnalités culturelles arabes qui ont connu un succès aux États-Unis», affirme Akram Khater.

La romancière

Afifa Karam (1883-1924)
Afifa Karam (1883-1924)

«Tu n'as pas de droits sur mon corps, que tu as acheté à mon père avec de l'argent. Auparavant, c’était son droit, mais maintenant c’est devenu le mien», a écrit un jour cette défenseuse passionnée des droits des femmes, qui a publié son premier roman alors qu’elle n’était âgée que d’une vingtaine d’années.

Née dans une famille maronite, Afifa Karam a quitté sa ville côtière libanaise d'Amchit à l'âge de 14 ans pour aller vivre à Shreveport, en Louisiane.

Sa carrière littéraire et journalistique est impressionnante. Elle a rédigé des articles dans le journal Al-Hoda sur les questions féminines et inauguré les premières revues féminines arabes, dont The New World: A Ladies’ Monthly Arabic MagazineLe Nouveau monde: un magazine arabe mensuel pour les femmes») pour la diaspora. Ses romans dénonçaient ouvertement le patriarcat, les mariages arrangés, et affirmaient le droit des femmes à vivre librement. Au fil des ans, Karam a été surnommée «défenseuse de la femme syrienne» et «princesse de la plume».

 

L'artiste

Assad Ghosn (1877-1941)
Assad Ghosn (1877-1941)

En 1891, Assad Ghosn, spécialiste du portrait et des paysages, a étudié la peinture à l’huile à la prestigieuse Accademia di Belle Arti di Roma en Italie. Il s’est installé aux États-Unis en 1904, et a ouvert un atelier à Brooklyn, à New York, pour finir par déménager à Richmond, en Virginie. Le Centre Khayrallah a travaillé en étroite collaboration avec la famille Ghosn pour préserver le précieux matériel du patrimoine de l'artiste.

Outre le portrait classique de Ghosn de trois femmes inconnues assises côte à côte, une de ses œuvres se démarque des autres: son formidable portrait du début du XIX siècle du célèbre éditeur Naoum Mokarzel, né au Mont-Liban. Détournant le regard, Mokarzel tient un stylo – synonyme de son attachement de longue date aux mots – et le journal arabe Al-Hoda L’Orientation»), qu'il a fondé à Philadelphie en 1898.

 

L’actrice

Rahme Haidar (1886-1939)
Rahme Haidar (1886-1939)

Une carte interactive de l’exposition indique que, entre les années 1910 et 1930, Haidar, oratrice publique (et princesse), née à Baalbeck, a donné des conférences sur la Grande Syrie et la Terre Sainte dans des églises aux quatre coins des États-Unis – de Washington à la Floride – et au Canada. Haidar portait souvent des vêtements orientaux et interprétait des scènes bibliques musicales. Elle a aussi réalisé des films, dirigeant les acteurs et jouant également dans Gems of the EastLes Joyaux du Levant»).

En 1927, un article dans The Windsor Star en Ontario a publié ces paroles cruciales adressées à son public: «Mon but ce soir est de vous apporter une connaissance plus claire de la Syrie et des Syriens et de corriger de nombreuses fausses impressions qui sont courantes à propos de mon pays. C'est une terre minuscule, chère au cœur de chaque chrétien, mais une terre qui est passée de main en main, et qui a été volée et renversée par de nombreuses nations».

 

Le musicien

Alexandre Maloof (1884-1956)
Alexandre Maloof (1884-1956)

Les amateurs de musique de la vieille école vont pouvoir se régaler, car Turath regroupe une collection éclectique de disques vinyles d'anciens labels arabes tels que Cleopatra Records et Arabphon. Alexandre Maloof, oudiste, pianiste et compositeur accompli qui a vécu à New York, a fondé une maison de disques et un orchestre éponymes. L’un de ses morceaux les plus connus est America Ya HilwaÔ Belle Amérique»), qu’il a composé en 1912, quand le président William Taft avait demandé aux Américains de faire des propositions pour un hymne national américain.

En raison de la portée évocatrice des chansons et des émotions fortes qu’elles procuraient – en plus d’une tournée organisée à travers le pays – des musiciens comme Maloof, ont eu une influence bien plus grande que les poètes sur la société arabo-américaine, qui avaient tendance à évoluer dans les cercles élitistes, affirme Khater. «Si vous êtes [un immigré] à Shreveport, en Louisiane, ou quelque part dans le Wisconsin, vous n’entendez pas beaucoup la langue arabe, sauf dans la cuisine avec votre famille. Vous gardez vos traditions pour votre lieu de culte ou pour la maison, mais, à l’extérieur, vous devez vous intégrer  pour que les gens ne se sentent pas trop menacés. Et puis vous sortez, et vous entendez le son du oud… Je pense que les gens ont dû être émus aux larmes par ces mots.»

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur arabnews.com


L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle

L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle. (Photo Fournie)
L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle. (Photo Fournie)
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  • Fraîchement conçue, cette installation baignée de jaune, ancrée dans les œuvres passées de l'artiste, offre une expérience sensorielle riche et complexe ainsi qu'un commentaire culturel incisif.
  • « The Social Health Club » s'articule autour d'objets trouvés au marché Haraj de Djeddah en 2018.

RIYAD : Ce mois-ci, l'artiste saoudienne Ahaad Alamoudi fait monter la température au Basel Social Club qui se tient jusqu'au 21 juin dans la ville suisse avec sa dernière installation, « The Social Health Club ». 

Fraîchement conçue, cette installation baignée de jaune, ancrée dans les œuvres passées de l'artiste, offre une expérience sensorielle riche et complexe ainsi qu'un commentaire culturel incisif. Elle marque également une première pour l'artiste avec un élément de performance en direct.

Basée à Djeddah, Alamoudi est connue pour créer des installations multimédias immersives s'inspirant de la dynamique complexe de son pays natal en pleine évolution. « The Social Health Club » s'articule autour d'objets trouvés au marché Haraj de Djeddah en 2018, notamment divers équipements de sport, dont un rameur.

« Ce sont des pièces que j'ai chinées dans des brocantes. J'aime le fait qu'aucune instruction n'accompagne ces machines : je ne connais ni leur nom, ni leur provenance, ni leur fabricant. Mais elles font désormais partie du paysage urbain dans lequel j'évolue. J'ai essayé de créer un espace ludique », a-t-elle déclaré à Arab News. 

Dans « The Social Health Club », les équipements, peints principalement dans un jaune vif et saturé, restent intacts, symbolisant une culture obsédée par l'auto-optimisation. Au cœur de l'installation se trouve un caméo représentant un fer à repasser peint en jaune, déjà présent dans son œuvre vidéo de 2020 intitulée « Makwah Man » (Makwah signifie « fer à repasser » en arabe).

« Beaucoup de mes œuvres sont issues d'un récit que je crée dans une vidéo. Dans « Makwah Man », cet homme vêtu d'une thobe jaune repasse un long morceau de tissu jaune au milieu du désert. Et pendant qu'il repasse, il nous dit comment vivre notre vie. Mais en nous disant comment vivre notre vie, il commence aussi à remettre en question la sienne, à comprendre le rôle du pouvoir, à prendre conscience de la pression du changement et de l'adaptation », explique Alamoudi. 

« Le jaune est présent dans la vidéo, mais l'artiste porte également une thobe jaune. Il y a aussi, dans cette version présentée à Art Basel, un portant de thobes jaunes qui tournent dans l'exposition. Pour moi, la thobe jaune est un symbole unificateur. J'essaie de dire que nous vivons tous cela différemment. Ainsi, dans la performance (pour « The Social Health Club »), un culturiste local vêtu d'une thobe jaune fera des exercices sur ces machines. Il n'a pas de règles à suivre. Il ne connaît rien, ne sait pas comment utiliser « correctement » l'équipement. Il entrera dans l'espace et utilisera les machines comme il le pourra.

« La performance sera enregistrée. Mais je pense que c'est plutôt une activation », a-t-elle poursuivi. « Ce n'est pas l'œuvre elle-même. L'œuvre existe sous la forme des machines. 

« Le Social Health Club » a été créé en étroite collaboration avec la conservatrice Amal Khalaf. Ensemble, ils se sont rendus à Djeddah où Alamoudi a pu découvrir avec elle des « machines un peu inhabituelles, différentes des machines classiques que l'on trouve dans les salles de sport et dont tout le monde connaît immédiatement l'utilité », explique Alamoudi.

« Elle est vraiment incroyable », a-t-elle poursuivi. « Nous avons vraiment construit cet espace ensemble. En gros, j'ai principalement créé la vidéo ; tout le reste a été construit à partir de là. Elle m'a beaucoup aidée. Elle s'est vraiment intéressée aux changements sociaux et à la manière dont nous les abordons. Notre collaboration a été parfaite. »

Le jaune domine chaque centimètre carré de l'œuvre, de manière délibérée et intense. 

« Je suis obsédé par les symboles dans certaines de mes œuvres. Et cela s'accompagne également d'une couleur », explique Alamoudi. « Je voulais mettre en valeur quelque chose de luxueux, de coloré, presque comme de l'or, mais qui n'est pas de l'or. Son apparence est assez austère. » 

Le jaune est à la fois une invitation et un avertissement. « Je pense que le jaune est également assez trompeur. J'aime cette couleur qui incite les gens à s'approcher pour voir ce qui se passe, mais qui les amène en même temps à se demander ce que c'est  elle est si agressive qu'elle en devient un peu inconfortable. »

L'interaction du spectateur est essentielle à la signification de l'œuvre. 

« Je pense que les machines représentent quelque chose et qu'elles véhiculent quelque chose, mais elles sont en réalité activées par les gens, par ce que les gens font avec elles », explique Alamoudi. « C'est pourquoi j'encourage beaucoup de spectateurs à interagir avec les œuvres, à les utiliser ou à essayer de les utiliser sans aucune instruction. Beaucoup de personnes qui entrent dans l'espace peuvent avoir peur de les toucher ou d'interagir avec elles. La présence de l'artiste qui active les structures ajoute une autre dimension à l'œuvre elle-même. »

Elle espère que les visiteurs se sentiront libres d'explorer les œuvres, sans être encombrés par des attentes.

« Les gens sont censés les utiliser à leur guise. Ils peuvent s'asseoir dessus, se tenir debout dessus, les toucher — ils peuvent aussi les laisser tranquilles », conclut-elle en riant. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com  


La "Tour des arts" redonne du sens et de la couleur au Boulevard des Sports de Riyad

La Arts Tower, à l'intersection de Prince Mohammed bin Salman bin Abdulaziz Road et Prince Turki bin Abdulaziz Al Awwal Road, déborde de couleurs et de caractère. (Photo Fournie)
La Arts Tower, à l'intersection de Prince Mohammed bin Salman bin Abdulaziz Road et Prince Turki bin Abdulaziz Al Awwal Road, déborde de couleurs et de caractère. (Photo Fournie)
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  • Les pièces utilisées sont toutes liées au grand récit du Royaume, y compris la diversité économique, les transformations culturelles et les changements sociaux.
  • Pour M. Gharem, la Vision 2030 de l'Arabie saoudite, tout comme "The Arts Tower", lève constamment les yeux vers le haut, motivant les gens à sauter du familier à l'inattendu, les poussant à embrasser l'avenir avec imagination.

RIYADH : Lorsque vous vous aventurez sur la promenade de la dernière attraction de la capitale, le Sports Boulevard, un nouveau point de repère ne manque pas d'attirer votre attention.

Une tour située à l'intersection de la route Prince Mohammed bin Salman bin Abdulaziz et de la route Prince Turki bin Abdulaziz Al-Awwal est pleine de couleurs et de caractère.  

L'auteur de cette œuvre, baptisée "The Arts Tower", est l'artiste saoudien de renom Abdulnasser Gharem, qui, dès le début de sa carrière, a mis l'accent sur le quotidien dans le paysage architectural avec des œuvres telles que "Siraat" (Le chemin) et "Road to Makkah" (La route de La Mecque). 

La Arts Tower, à l'intersection de Prince Mohammed bin Salman bin Abdulaziz Road et Prince Turki bin Abdulaziz Al Awwal Road, déborde de couleurs et de caractère. (Photo Fournie)
La Arts Tower, à l'intersection de Prince Mohammed bin Salman bin Abdulaziz Road et Prince Turki bin Abdulaziz Al Awwal Road, déborde de couleurs et de caractère. (Photo Fournie)

Gharem a déclaré à Arab News : "Cette œuvre est le témoin de la transformation qui s'opère ici. C'est un symbole d'investissement dans l'infrastructure culturelle qui prouve l'importance de cette dernière pour toute société ou communauté. Je pense que la tour représente cette transformation, en particulier parce qu'elle transforme l'un des symboles de l'énergie en un phare pour l'expression créative".

Anciennement l'un des nombreux pylônes électriques de 83,5 mètres, la tour devait être supprimée dans le cadre du projet du boulevard des sports.

"J'ai demandé si je pouvais en avoir une", a déclaré M. Gharem, expliquant qu'en tant qu'un des artistes nominés pour proposer une œuvre destinée à embellir le boulevard, il tenait à utiliser la structure existante.  

Points marquants

La proposition retenue comporte un total de 691 panneaux colorés qui ont été installés pour donner vie à la façade animée de la tour.

Les pièces utilisées sont toutes liées au grand récit du Royaume, notamment la diversité économique, les transformations culturelles et les changements sociaux.

L'auteur et conservateur Nato Thompson a déclaré à propos de l'œuvre dans un communiqué : "En réaffectant un symbole de l'infrastructure énergétique et en le transformant en phare de l'expression artistique, Gharem met en lumière l'évolution du rôle de la culture et de l'art dans le parcours de développement de l'Arabie saoudite.

"Elle est la preuve vivante de l'engagement du Royaume à entretenir son paysage culturel, en faisant des arts et de la créativité un élément indissociable de son identité, tout comme le pétrole et l'énergie l'ont été dans le passé".

La proposition sélectionnée comprend un total de 691 panneaux colorés qui ont été installés pour donner vie à la façade vibrante de la tour.

Abdulnasser Gharem, artiste saoudien (Photo Fournie)
Abdulnasser Gharem, artiste saoudien (Photo Fournie)

Il utilise des éléments de l'architecture saoudienne et des motifs que nous reconnaissons dans nos anciennes maisons, principalement la forme triangulaire.  

"J'ai eu la chance que la tour soit composée de triangles, une forme géométrique qui rassemble les différentes régions du Royaume et les caractéristiques historiques de nos débuts, ce qui en fait un symbole d'unité", explique M. Gharem.  

Les pièces utilisées sont toutes liées au grand récit du Royaume, y compris la diversité économique, les transformations culturelles et les changements sociaux.

Cette pièce est un témoin de la transformation qui se produit ici. C'est un symbole d'investissement dans l'infrastructure culturelle, preuve de l'importance de cette dernière pour toute société ou communauté. Abdulnasser Gharem, artiste saoudien.

"Les couleurs font allusion au lien entre notre histoire et notre patrimoine et les concepts de gaieté et d'hospitalité mentale. Une tour vous oblige toujours à lever les yeux".

Pour M. Gharem, la Vision 2030 de l'Arabie saoudite, tout comme "The Arts Tower", lève constamment les yeux vers le haut, motivant les gens à sauter du familier à l'inattendu, les poussant à embrasser l'avenir avec imagination.

"L'œuvre est basée sur la lumière du soleil", a-t-il déclaré. "La lumière du jour donne une dimension complètement différente à l'œuvre par rapport à son éclairage urbain pendant la nuit. 

L'esquisse de "The Arts Tower" d'Abdulnasser Gharem. (Photo Fournie)
L'esquisse de "The Arts Tower" d'Abdulnasser Gharem. (Photo Fournie)

"Les couleurs ne se contentent pas d'apparaître ; elles changent, se transforment et s'animent de différentes manières tout au long de la journée. Ici, la nature devient un élément crucial de la structure".

Même le vent a joué un rôle dans la détermination du nombre et de l'emplacement des pièces colorées utilisées. "Il m'a appris qu'il fallait des espaces pour permettre à l'œuvre de respirer et m'a forcé à m'humilier devant le pouvoir de la nature.

"Le vent est devenu mon partenaire dans la conception", a-t-il déclaré.

La "Tour des arts" est conçue pour que les gens se sentent représentés et connectés.

Alors que le boulevard des sports encourage l'activité physique, ce point de repère créatif a un objectif plus profond : c'est un espace de réflexion destiné à inspirer l'interaction humaine et la communauté - et plus important encore, à inviter les gens à ralentir, à s'engager et à réfléchir à l'avenir.

"La culture est l'un des facteurs clés du développement de notre pays. En fin de compte, la culture est aussi importante que l'énergie. Cela vaut la peine d'investir dans ce domaine, et c'est un certificat attestant que le Royaume s'est engagé à nourrir sa scène culturelle", a déclaré M. Gharem. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com 


Quand Pompidou "copie" le Louvre: 100 artistes exposent à Metz

Centre Pompidou (Photo AFP)
Centre Pompidou (Photo AFP)
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  • À partir de samedi, des « copistes » exposent au Centre Pompidou-Metz leur réinterprétation de classiques de l'art qu'ils « réactivent ».
  • Toutes ces œuvres, produites à partir d'autres œuvres, ont été créées spécialement pour cette exposition.

METZ, FRANCE : Faire revivre des œuvres du Louvre à travers le regard de 100 artistes : à partir de samedi, des « copistes » exposent au Centre Pompidou-Metz leur réinterprétation de classiques de l'art qu'ils « réactivent ».

Les commissaires de l'exposition, Donatien Grau, conseiller pour les programmes contemporains du musée du Louvre, et Chiara Parisi, directrice du Centre Pompidou-Metz, ont voulu en faire « une radioscopie de l'art contemporain et une exposition pour les amoureux de l'histoire de l'art ».

L'exposition est le résultat d'une « invitation envoyée à 100 artistes, non copistes a priori, à réactiver des œuvres du patrimoine », résume Donatien Grau.

Ici, une sculpture romaine recouverte de ballons métalliques colorés attire l'œil du visiteur : il s'agit d'une copie réalisée par l'artiste américain Jeff Koons de L'Hermaphrodite endormi, une sculpture antique dont on ignore l'auteur.

Un peu plus loin, plusieurs artistes ont fait le choix de créer leur interprétation de La Liberté guidant le peuple (1830) d'Eugène Delacroix : c'est le cas de Bertrand Lavier avec Aux armes citoyens (2025), dans lequel il se concentre sur les armes et le drapeau peints dans la version originale.

« La Vierge et l'Enfant au chancelier Rolin » (XVe siècle), peint par Jan Van Eyck, a aussi été en partie copié par l'Irano-Américain Y.Z. L'artiste Kami, quant à lui, a décidé de s'emparer d'un petit détail de l'œuvre originale, les mains, qu'il a reproduit comme un symbole. 

On peut aussi découvrir « la Joconde » copiée par le collectif Claire Fontaine, qui a camouflé son visage d'une tache noire, lui ôtant son sourire énigmatique.

Toutes ces œuvres, produites à partir d'autres œuvres, ont été créées spécialement pour cette exposition.

Giulia Andreani a réalisé trois portraits de femmes, a aimé « se heurter à des œuvres du Louvre », « détourner la technique » et « exploser le format ».

Chiara Parisi note que certaines copies sont réalisées presque à l'identique : « On est un peu déstabilisés » dans un premier temps en les regardant, puis « après on reconnaît la patte de l'artiste ».

D'autres, au contraire, ont détourné les originaux pour en faire des créations où « les œuvres ne sont pas là pour être reconnues », précise-t-elle. 

L'artiste Neila Czermak Ichti a détourné le tableau Roger délivrant Angélique (1819) de Jean-Auguste-Dominique Ingres. Dans sa version, « tout le monde a un peu changé de place. Le défi consistait à ce que le monstre n'ait pas la même place sans pour autant devenir une victime comme Angélique dans la version originale.

Donatien Grau a également mis en garde : « Le sujet de l'exposition n'est pas la copie, mais la pluralité des copistes. » « Copier, aujourd'hui, ce n'est pas se mettre face au tableau et le dupliquer. C'est mille autres choses » illustrées dans l'exposition.

Cela met aussi en valeur le patrimoine, qui « n'existe que quand on le recrée, qu'on le fait vivre, quand on l'habite », selon Donatien Grau.

Les œuvres originales n'ont pas été transportées à Metz : le visiteur peut les retrouver reproduites dans le catalogue d'exposition (25 euros) qui, selon Mme Parisi, « prolonge la visite ».

L'exposition « Copistes. En collaboration exceptionnelle avec le musée du Louvre » est visible jusqu'au 2 février 2026.