Les Houthis accusés d'utiliser les déplacés comme boucliers humains

Des habitants se tiennent près du site d'une attaque de missiles balistiques des Houthis soutenus par l'Iran dans le quartier peuplé de Rawda à Marib, au Yémen. (Photo, Reuters/Archives)
Des habitants se tiennent près du site d'une attaque de missiles balistiques des Houthis soutenus par l'Iran dans le quartier peuplé de Rawda à Marib, au Yémen. (Photo, Reuters/Archives)
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Publié le Vendredi 19 février 2021

Les Houthis accusés d'utiliser les déplacés comme boucliers humains

  • Al-Aryani a accusé les Houthis soutenus par l'Iran de prendre les camps de déplacés à Marib pour cibles
  • La milice Houthi a repris une offensive majeure pour prendre le contrôle de la ville de Marib, riche en pétrole et en gaz, au début du mois

AL-MUKALLA, Yémen: Des dizaines de Houthis et de soldats gouvernementaux ont été tués jeudi dans de violents affrontements à Marib, des responsables locaux et des ONG ont averti que les combats auront certainement un impact majeur sur la crise humanitaire au Yémen, alors que le ministre de l’Information du pays Muammar Al-Aryani accusait les Houthis soutenus par l'Iran de viser les camps des déplacés à Marib et d’utiliser la population comme boucliers humains.

De violents combats ont éclaté jeudi dans les régions de Kasara, Serwah, Murad, Jada’an  et Al-Makhdra de Marib pendant que les forces gouvernementales et les membres des tribus alliées, soutenus par des avions de guerre de la coalition arabe, ont riposté aux attaques incessantes des Houthis.

Un officier militaire local, qui a préféré l’anonymat, a déclaré à Arab News que 27 Houthis étaient morts avec quatre soldats gouvernementaux, dont un commandant des armées de  terre, le brigadier Ahmed Al-Shara’abi. Ils ont été tués au moment où les avions de guerre de la coalition ciblaient des combattants et des renforts houthis se dirigeant vers les champs de bataille de Marib.

Des vidéos amateurs publiées sur les réseaux sociaux par des partisans du gouvernement ont montré des dizaines de combattants houthis morts abandonnés dans le désert et les régions montagneuses de Marib et de Jawf avoisinant. Les chiffres officiels indiquent que plus de 700 Houthis ont été tués au cours d'une semaine de violents combats dans la région.

L’accélération actuelle des combats a commencé au début du mois lorsque les Houthis soutenus par l’Iran ont repris une offensive majeure dans le but de prendre le contrôle de la ville de Marib, riche en pétrole et en gaz, la dernière importante forteresse du gouvernement du Yémen dans la moitié nord du pays.

Malgré des attaques au sol agressives et de lourdes frappes de missiles et de drones sur la ville, les rebelles n'ont pas réussi à avancer vers la ville après avoir subi de lourdes pertes.

Jeudi, le général Abdu Abdullah Majili, porte-parole de l’armée yéménite, a déclaré à Arab News que les troupes de l’armée et les membres des tribus alliées avaient empêché les Houthis de faire des gains sur le terrain.

L'officier de l'armée yéménite a salué le rôle des avions de guerre de la coalition arabe, qui ont ouvert la voie aux troupes de l'armée et aux membres de la tribu pendant qu'ils repoussaient les Houthis sur les champs de bataille de Marib.

Au même moment, les représentants du gouvernement yéménite et les groupes de défense des droits de l’homme ont réitéré leurs inquiétudes quant à l'impact de l'offensive des Houthis sur des milliers de personnes déplacées vivant à Marib.

Le ministre de l’Information du Yémen, Muammar Al-Aryani, a accusé jeudi les Houthis de viser les camps des déplacés à Marib et d’utiliser la population comme boucliers humains. Il a averti que l’offensive des rebelles déplacerait plus de 2 millions de personnes abritées dans la ville après avoir fui les combats et la répression des Houthis dans leurs provinces d’origine.

«Nous demandons une enquête internationale sur les crimes de la milice houthie contre les camps de déplacés dans la province de Marib», a déclaré le ministre yéménite dans un message sur Twitter. «Il s’agit d’une violation flagrante des règles du droit international humanitaire relatives à la protection des civils pendant les conflits».

L'offensive des Houthis a entravé la distribution d'une aide humanitaire vitale aux personnes déplacées et sapé les appels à la paix, a ajouté le ministre yéménite.

L'Observatoire des droits de l'homme euro-méditerranéen, installé à Genève, ainsi que 30 autres organisations locales et internationales de défense des droits de l'homme et de la société civile, ont adressé mercredi une lettre conjointe au haut diplomate de l'UE, Josep Borrell, exhortant l'UE à intervenir. Les groupes ont mis en garde contre une catastrophe humanitaire majeure si les Houthis mettent la main sur la ville.

Abdul Rahman Barman, le président du Centre Américain pour la justice, l'un des signataires, a déclaré à Arab News que les rebelles ne cessent pas de persécuter les 2 millions de personnes déplacées qui vivent à Marib, ce qui les inciterait à chercher refuge dans d'autres zones plus sûres au Yémen.

«Nous avons participé à l’écriture cette lettre car Marib accueille la plus grande concentration de personnes déplacées au Yémen», a affirmé Barman. «Nous demandons à la communauté internationale d'utiliser tout son pouvoir afin de faire pression sur les Houthis et mettre ainsi fin à leurs attaques contre Marib».

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Nouveaux bombardements israéliens au Liban malgré des discussions «positives»

Israël a de nouveau bombardé jeudi le sud du Liban, disant viser des sites du Hezbollah pro-iranien qu'elle accuse de se réarmer, au lendemain des premières discussions directes depuis plusieurs décennies entre des représentants des deux pays. (AFP)
Israël a de nouveau bombardé jeudi le sud du Liban, disant viser des sites du Hezbollah pro-iranien qu'elle accuse de se réarmer, au lendemain des premières discussions directes depuis plusieurs décennies entre des représentants des deux pays. (AFP)
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  • Le président libanais Joseph Aoun, saluant les réactions "positives" à la réunion de mercredi, a annoncé que les discussions reprendraient le 19 décembre afin d'éloigner "le spectre d'une deuxième guerre" au Liban
  • "Il n'y a pas d'autre option que la négociation", a-t-il ajouté

JBAA: Israël a de nouveau bombardé jeudi le sud du Liban, disant viser des sites du Hezbollah pro-iranien qu'elle accuse de se réarmer, au lendemain des premières discussions directes depuis plusieurs décennies entre des représentants des deux pays.

L'armée israélienne, qui a multiplié ses frappes ces dernières semaines, a encore frappé jeudi le sud du Liban après avoir appelé des habitants de plusieurs villages à évacuer.

Les bombardements ont touché quatre localités, où des photographes de l'AFP ont vu de la fumée et des maisons en ruines.

Dans le village de Jbaa, Yassir Madir, responsable local, a assuré qu'il n'y avait "que des civils" dans la zone. "Quant aux dégâts, il n'y a plus une fenêtre à 300 mètres à la ronde. Tout le monde est sous le choc", a-t-il ajouté. 


« La Syrie n’est pas condamnée » : les leçons d’un an de transition, selon Hakim Khaldi

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  • Parmi les scènes les plus marquantes, Khaldi se souvient d’une vieille dame de Homs qui, voyant les portraits d’Assad retirés des bâtiments officiels, murmure : « On peut respirer ? Est-ce que c’est vrai ? »
  • Mais ce soulagement intense laisse rapidement place à une inquiétude plus sourde : celle du vide

PARIS: La Syrie post-Assad, carnets de bord, de Hakim Khaldi, humanitaire chez Médecins sans frontières, publié chez L’Harmattan, n’est pas seulement un récit de témoins, mais une immersion dans la réalité d’un pays brisé mais pas vaincu, où la chute d’un pouvoir omnipotent n’a pas suffi à étouffer l’exigence de dignité.
Ce qu’il raconte, c’est l’envers des discours diplomatiques, la géographie vécue d’une société projetée brutalement hors d’un demi-siècle d’autoritarisme dans un vide politique, économique et moral.

Les premiers jours après la chute du régime de Bachar Al-Assad ressemblent, selon Khaldi, à un moment de bascule irréel.

Dans ses carnets, comme dans ses réponses à Arab News en français, revient une même conviction : la chute d’un régime ne signifie pas la naissance immédiate d’un pays. La Syrie, aujourd’hui, est entre les deux, « en état de transformation ».

Les premiers jours après la chute du régime de Bachar Al-Assad ressemblent, selon Khaldi, à un moment de bascule irréel : « On ne savait pas si c’était la fin d’une époque ou le début d’une autre tragédie », confie-t-il.
Dans les villes « libérées », les scènes oscillent entre euphorie et sidération ; la population découvre, sans y croire encore, la possibilité de parler librement, de respirer autrement.

Il raconte ces familles qui, pendant quarante ans, n’avaient jamais osé prononcer le mot « moukhabarat » (services secrets en arabe), ne serait-ce qu’à voix basse chez elles.
Et brusquement, les voilà qui se mettent à raconter : les disparitions, les tortures, les humiliations, et la peur devenue routine.
Des parents ressortent des photos d’adolescents morts sous la torture, des certificats de décès maquillés, des lettres écrites depuis la prison mais jamais envoyées.

Parmi les scènes les plus marquantes, Khaldi se souvient d’une vieille dame de Homs qui, voyant les portraits d’Assad retirés des bâtiments officiels, murmure : « On peut respirer ? Est-ce que c’est vrai ? »
Ce qui l’a le plus frappé, c’est « ce sentiment presque physique d’un poids qui tombe. C’est ce que j’ai le plus entendu », affirme-t-il.

Mais ce soulagement intense laisse rapidement place à une inquiétude plus sourde : celle du vide. En quelques jours, l’État s’est évaporé : plus de police, plus d’électricité, plus d’école, plus de justice.
Les anciens bourreaux disparaissent dans la nature, mais les réseaux de corruption se reconstituent, et les premières milices locales émergent, prêtes à occuper le terrain déserté par les institutions.

Pourtant, au fil de ses déplacements, Khaldi est frappé par la force de résilience et d’auto-organisation de la population : « Les Syriens n’ont jamais cessé d’exister comme société, même quand l’État les avait réduits au silence », assure-t-il.
Dans les villages, des comités improvisés se forment et organisent la distribution alimentaire, la remise en marche d’une station d’eau, la sécurité ou la scolarisation d’urgence.

Un an après la chute du régime (le 8 décembre 2024), la Syrie tente de se relever lentement, mais elle demeure une mosaïque de composants hybrides.

Cette responsabilité populaire est, pour Khaldi, l’un des rares points lumineux du paysage syrien, la preuve qu’une société peut exister en dehors de l’appareil répressif qui prétendait être l’État.

Un an après la chute du régime (le 8 décembre 2024), la Syrie tente de se relever lentement, mais elle demeure une mosaïque de composants hybrides, de milices rivales, de zones d’influence et d’ingérences étrangères. « Une mosaïque qui ne ressemble plus au pays d’avant », estime Khaldi.
Le territoire est éclaté entre forces locales, groupes armés (notamment les milices druzes à Soueida, au nord-est du pays), gouvernances provisoires ou structures étrangères. Les routes sont coupées, les administrations doublées ou contradictoires.

Avec des infrastructures détruites, une monnaie en chute libre et un secteur productif quasi paralysé, la survie quotidienne est devenue un exercice d’équilibriste.
Les Syriens ne nourrissent plus d’illusions sur l’arrivée immédiate d’un modèle démocratique idéal : il s’agit d’abord de survivre, de reconstruire, de retrouver un minimum de continuité.

Le traumatisme est profond, à cause des disparitions massives, de l’exil et des destructions psychologiques. Pourtant, affirme Khaldi, « jamais je n’ai entendu un Syrien regretter que la dictature soit tombée ».

De ses observations et des témoignages qu’il a collectés en arpentant le pays, Khaldi tire les priorités pour éviter que la Syrie ne devienne ni un conflit gelé ni un espace livré aux milices.
De son point de vue, la reconstruction politique ne peut se réduire à remplacer un gouvernement par un autre : il faut rebâtir les fondations, à savoir une justice indépendante, une police professionnelle et des administrations locales.

Des dizaines de groupes armés contrôlent aujourd’hui une partie du territoire, et une transition politique sérieuse est impensable sans un processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration, soutenu par une autorité légitime et par un cadre international solide.
Au-delà des aides internationales, la Syrie a besoin d’un cadre empêchant la capture des fonds par les anciens réseaux de corruption ou les factions armées.
Elle doit donner la priorité à la relance de l’agriculture, au rétablissement de l’électricité, des réseaux routiers et des petites industries, les seules capables à court terme de soutenir la vie quotidienne.

Le pays porte une blessure immense : celle des prisons secrètes, des fosses communes, des disparitions et des exactions documentées. « Sans justice, il n’y aura pas de paix durable », affirme Khaldi.
Il ne s’agit ni de vengeance ni de tribunaux-spectacle, mais de vérité et de reconnaissance, conditions indispensables à une réconciliation nationale.

De cet entretien se dégage une idée forte : malgré la faim, la peur, les ruines, malgré la fragmentation politique et l’ingérence étrangère, les Syriens n’ont pas renoncé à eux-mêmes.
Ils ouvrent des écoles improvisées, réparent des routes avec des moyens dérisoires, organisent l’entraide, résistent au chaos. « La Syrie n’est plus la Syrie d’avant, mais elle n’est pas condamnée pour autant », affirme Khaldi.
Son témoignage rappelle qu’un pays ne meurt pas quand un régime tombe ; il meurt lorsque plus personne ne croit possible de le reconstruire. Et les Syriens, eux, y croient encore.


Liban: Israël annonce des frappes dans le sud, appelle à des évacuations

L'armée israélienne a annoncé jeudi après-midi des frappes imminentes dans le sud du Liban contre ce qu'elle présente comme des infrastructures du mouvement islamiste Hezbollah, et a appelé à des évacuations dans deux villages de cette région. (AFP)
L'armée israélienne a annoncé jeudi après-midi des frappes imminentes dans le sud du Liban contre ce qu'elle présente comme des infrastructures du mouvement islamiste Hezbollah, et a appelé à des évacuations dans deux villages de cette région. (AFP)
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  • Les forces israéliennes vont "bientôt attaquer des infrastructures terroristes du Hezbollah à travers le sud du Liban afin de contrer ses tentatives illégales de rétablir ses activités dans la région"
  • Dans un "message urgent" en arabe, le colonel Adraee signale, cartes à l'appui, deux bâtiments dans les villages de Jbaa et Mahrouna, dont il appelle les riverains dans un rayon d'au moins 300 mètres à s'écarter

JERUSALEM: L'armée israélienne a annoncé jeudi après-midi des frappes imminentes dans le sud du Liban contre ce qu'elle présente comme des infrastructures du mouvement islamiste Hezbollah, et a appelé à des évacuations dans deux villages de cette région.

Cette annonce survient au lendemain d'une rencontre entre responsables civils libanais et israélien, lors d'une réunion de l'organisme de surveillance du cessez-le-feu entré en vigueur il y a un an, présentée comme de premières discussions directes depuis plus de 40 ans entre les deux pays toujours techniquement en état de guerre.

Les forces israéliennes vont "bientôt attaquer des infrastructures terroristes du Hezbollah à travers le sud du Liban afin de contrer ses tentatives illégales de rétablir ses activités dans la région", a annoncé le colonel Avichay Adraee, porte-parole de l'armée israélienne pour le public arabophone.

Dans un "message urgent" en arabe, le colonel Adraee signale, cartes à l'appui, deux bâtiments dans les villages de Jbaa et Mahrouna, dont il appelle les riverains dans un rayon d'au moins 300 mètres à s'écarter.

Accusant le Hezbollah de se réarmer dans le sud du pays et de violer ainsi les termes de la trêve entrée en vigueur fin novembre 2024, l'armée israélienne a multiplié depuis plusieurs semaines les frappes aériennes dans le sud du Liban mais a marqué une pause dans ses attaques pendant la visite du pape Léon XIV cette semaine.

Israël a même frappé jusque dans la banlieue de Beyrouth le 23 novembre pour y éliminer le chef militaire du Hezbollah, Haitham Ali Tabatabai.

Le Liban dénonce ces attaques comme des violations patentes du cessez-le-feu.

Mais Israël, qui peut compter sur l'aval tacite des Etats-Unis pour ces frappes, affirme qu'il ne fait qu'appliquer la trêve en empêchant le Hezbollah, allié de la République islamique d'Iran, ennemie d'Israël, "de se reconstruire et de se réarmer".

Tout en déclarant que les discussions directes de mercredi avec le Liban s'étaient déroulées dans "une atmosphère positive", le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a rappelé mercredi soir que le désarmement du Hezbollah restait une exigence "incontournable" pour son pays.