Collaborer ou non avec la CPI? Le dilemme d'Israël soupçonné de «crimes de guerre»

La Procureure générale de la CPI, Fatou Bensouda, lors d'une conférence de presse à Khartoum, le 20 octobre 2020, à l'issue de sa visite de cinq jours dans le pays (Photo, AFP)
La Procureure générale de la CPI, Fatou Bensouda, lors d'une conférence de presse à Khartoum, le 20 octobre 2020, à l'issue de sa visite de cinq jours dans le pays (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 06 mars 2021

Collaborer ou non avec la CPI? Le dilemme d'Israël soupçonné de «crimes de guerre»

  • Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu a fustigé une décision reflétant «l'essence même de l'antisémitisme»
  • Israël tente de mobiliser des pays alliés pour pousser la CPI et son prochain procureur, le Britannique Karim Khan, à abandonner l'enquête

JERUSALEM: Israël doit-il ouvrir ses portes aux enquêteurs de la Cour pénale internationale (CPI) ou refuser toute collaboration? L'Etat hébreu affine sa stratégie après le l'ouverture d'une enquête sur de présumés « crimes de guerre » perpétrés par l'Etat hébreu dans les Territoires palestiniens.  

La Procureure générale de la CPI, Fatou Bensouda, a lancé mercredi une bombe juridique en annonçant une enquête sur des crimes de guerre présumés dans les Territoires palestiniens, une initiative rejetée par Israël mais saluée par les Palestiniens.  

Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu -- dont le pays n'est pas membre de la CPI contrairement à la Palestine, Etat non internationalement reconnu --, a aussitôt fustigé une décision reflétant « l'essence même de l'antisémitisme ».  

La CPI, seul tribunal permanent au monde pour les crimes de guerre, a été créée en 2002 pour juger les pires crimes de la planète lorsque les tribunaux locaux ne veulent pas ou ne peuvent pas intervenir. Elle ne vise pas des gouvernements ou des Etats mais des personnes.  

A terme, cette juridiction pourrait donc cibler M. Netanyahu ou l'actuel ministre de la Défense, Benny Gantz, chef de l'armée lors de la dernière guerre de Gaza (2014) au coeur de l'enquête de la CPI, qui a tenu la nuit dernière une réunion avec ses conseillers sur le sujet.  

Pugnace, M. Netanyahu a promis de se « battre pour la vérité » et la défense de « chaque soldat, chaque officier, chaque civil ». Mais comment se battre?    

En Israël, la presse s'est aussitôt demandée si la CPI allait devenir une « affaire Goldstone 2 », en référence à la commission du juge Richard Goldstone mise en place par le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU mais boycottée par Israël pour juger entre autres l'opération « Plomb durci », menée par l'armée israélienne contre Gaza à l'hiver 2008-2009.  

Le rapport sur cette opération, fatale à 1 440 Palestiniens et 13 Israéliens, a conclu à de possibles « crimes de guerre », voire de « crimes contre l'humanité ».  

Dans la foulée de cette affaire, l'ex-ministre des Affaires étrangères, Tzipi Livni, avait dû annuler une visite à Londres car sous le coup d'un mandat d'arrêt... Alors, Israël doit-il boycotter la CPI comme il l'avait fait pour la commission Goldstone?   

« La peur est là »   

Pour Pnina Sharvit Baruch, ancienne directrice du service des enquêtes internes de l'armée, l'Etat hébreu « ne doit pas collaborer complètement à l'enquête » de la CPI qui porte sur une série d'événements depuis juin 2014, allant de la dernière guerre de Gaza aux violences liées à la « marche du retour » des Palestiniens en passant par l'essor des colonies israéliennes en Cisjordanie.  

« Ce qu'Israël va probablement faire c'est fournir à la Procureure les éléments pertinents » à sa défense, « sans coopération formelle » car il « n'a pas confiance en cette cour », dit-elle.  

« Si vous êtes innocent et jugé par une cour professionnelle, vous êtes stressé, vous avez peur d'être reconnu coupable même si vous êtes innocent (...) Mais si vous considérez que la cour n'est pas professionnelle et objective, vous ne voulez simplement pas vous y soumettre », ajoute-t-elle.  

« J'ai parlé avec des soldats et ils sont vraiment préoccupés, ils ont peur d'être arrêtés demain ».  

Daniel Reisner, ancien haut placé des Affaires juridiques de l'armée, dit avoir toujours « conseillé au gouvernement de coopérer à moins qu'il ne s'agisse d'un tribunal bidon ».   

« De la manière dont la procureure Bensouda a agi je ne coopérerais pas avec le tribunal, mais je ne sais si je dirais la même chose avec l'arrivée de son successeur (...) qui semble plus sérieux », a-t-il dit cette semaine au club de la presse de Jérusalem.  

« Nuisible »   

Israël tente de mobiliser des pays alliés pour pousser la CPI et son prochain procureur, le Britannique Karim Khan, à abandonner l'enquête.   

Selon le bureau du Premier ministre israélien, la vice-présidente américaine Kamala Harris, dont le pays est visé par la CPI pour son rôle en Afghanistan, a fait part de son « opposition complète » à la décision de la procureure Bensouda lors d'un entretien téléphonique avec M. Netanyahu dans la nuit de jeudi à vendredi.  

En outre, Israël estime avoir la capacité d'examiner de « manière impartiale » les « allégations de violations présumées du droit international », a affirmé son procureur en chef Avichaï Mandelblit, sans toutefois dire si le pays devait ou devra coopérer avec la CPI.    

Et Benny Gantz a prévenu des conséquences géopolitiques selon lui d'un procès à la CPI. « Nous ne résoudrons le conflit entre nous (Palestiniens et Israéliens) que par des négociations, une cour n'aidera pas », a-t-il affirmé alors que le processus de paix israélo-palestinien est au point mort. 


Israël rejette une enquête de l'ONU l'accusant de «génocide» à Gaza

Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts dans la bande de Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire palestinien. (AFP)
Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts dans la bande de Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire palestinien. (AFP)
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  • "Israël rejette catégoriquement ce rapport biaisé et mensonger et appelle à la dissolution immédiate de cette commission d'enquête", a indiqué le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué
  • Une commission d'enquête internationale indépendante de l'ONU a accusé mardi Israël de commettre un "génocide" à Gaza depuis octobre 2023 avec l'intention de "détruire" les Palestiniens

JERUSALEM: Israël a "rejeté catégoriquement" mardi le rapport d'une commission d'enquête internationale indépendante des Nations unies qui l'accuse de commettre un "génocide" dans la bande de Gaza depuis octobre 2023.

"Israël rejette catégoriquement ce rapport biaisé et mensonger et appelle à la dissolution immédiate de cette commission d'enquête", a indiqué le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué.

Une commission d'enquête internationale indépendante de l'ONU a accusé mardi Israël de commettre un "génocide" à Gaza depuis octobre 2023 avec l'intention de "détruire" les Palestiniens, mettant en cause le Premier ministre Benjamin Netanyahu et d'autres responsables israéliens.

En riposte à une attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre 2023, Israël a lancé une offensive dans la bande de Gaza qui a fait des dizaines de milliers de morts et détruit une grande partie du territoire palestinien, où le mouvement islamiste palestinien a pris le pouvoir en 2007.

La commission, qui ne s'exprime pas au nom de l'ONU et est vivement critiquée par Israël, est arrivée "à la conclusion qu'un génocide se produit à Gaza et continue de (s'y) produire", a déclaré à l'AFP sa présidente, Navi Pillay.

Elle a conclu que les autorités et les forces de sécurité israéliennes avaient commis "quatre des cinq actes génocidaires" définis par la Convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime du génocide.

A savoir: "meurtre de membres du groupe; atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe; soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle; et mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe".

Cette commission a conclu que le président israélien, Isaac Herzog, Benjamin Netanyahu et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, avaient "incité à commettre un génocide et que les autorités israéliennes (n'avaient) pas pris de mesures" pour les en empêcher.

Le ministère des Affaires étrangères israélien a accusé les auteurs du rapport de "servir de relais au Hamas", affirmant qu'ils étaient "connus pour leurs positions ouvertement antisémites — et dont les déclarations horribles à l'égard des Juifs ont été condamnées dans le monde entier."

L'attaque du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts dans la bande de Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire palestinien.

L'ONU y a déclaré la famine, ce qu'Israël dément.


«Gaza brûle», déclare le ministre israélien de la Défense après des frappes intenses

Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza. (AFP)
Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza. (AFP)
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  • "Gaza brûle. Tsahal frappe d'une main de fer les infrastructures terroristes, et les soldats de Tsahal se battent vaillamment pour créer les conditions nécessaires à la libération des otages et à la défaite du Hamas"
  • "Nous ne céderons pas et ne reculerons pas jusqu'à ce que la mission soit achevée"

JERUSALEM: Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza.

"Gaza brûle. Tsahal frappe d'une main de fer les infrastructures terroristes, et les soldats de Tsahal se battent vaillamment pour créer les conditions nécessaires à la libération des otages et à la défaite du Hamas", a déclaré M. Katz sur X.

"Nous ne céderons pas et ne reculerons pas jusqu'à ce que la mission soit achevée", a-t-il ajouté.

 


Le Qatar est le seul pays capable d'être un médiateur concernant Gaza, souligne Rubio

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  • Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a estimé mardi que le Qatar était le seul pays capable de jouer le rôle de médiateur pour Gaza
  • "Evidemment, ils doivent décider s'ils veulent le faire après la semaine dernière ou non, mais nous voulons qu'ils sachent que, s'il existe un pays dans le monde qui pourrait aider à mettre fin à cela par une négociation, c'est le Qatar"

TEL-AVIV: Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a estimé mardi que le Qatar était le seul pays capable de jouer le rôle de médiateur pour Gaza, malgré une frappe israélienne ciblant des dirigeants du Hamas dans l'émirat.

"Evidemment, ils doivent décider s'ils veulent le faire après la semaine dernière ou non, mais nous voulons qu'ils sachent que, s'il existe un pays dans le monde qui pourrait aider à mettre fin à cela par une négociation, c'est le Qatar," a déclaré M. Rubio aux journalistes alors qu'il se rendait à Doha depuis Israël.