Les chasseurs russes à la veille d’élargir le fossé entre Ankara et les US

La Turquie s’est tournée vers les Su-35 russes et les Su-57 de cinquième génération après avoir été exclue du programme de chasseurs américains en 2019. (Photo, Reuters/File)
La Turquie s’est tournée vers les Su-35 russes et les Su-57 de cinquième génération après avoir été exclue du programme de chasseurs américains en 2019. (Photo, Reuters/File)
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Publié le Lundi 15 mars 2021

Les chasseurs russes à la veille d’élargir le fossé entre Ankara et les US

  • Ce rappel de la Russie à l’intention d’Ankara la semaine dernière sur les Su-57 a pour objectif d’éloigner davantage la Turquie de Washington
  • La Russie propose à ses partenaires stratégiques la version d'exportation de l'avion de combat Su-57

ANKARA: Que la Russie se dise prête à négocier avec Ankara au sujet de la livraison des avions de combat Su-35 et Su-57 le cas échéant, pourrait créer de nouvelles tensions entre les États-Unis et la Turquie, selon des experts.

La Turquie a retenu le mois dernier les services d’un cabinet d'avocats à Washington afin de faire pression dans le dossier de sa réadmission au programme américain d'avions de combat F-35, suspendue après l'achat du système de défense aérienne russe. Washington insiste que l’usage système russe S-400 en Turquie est incompatible avec les systèmes de l'OTAN, et qu’il exposerait les F-35 à d'éventuelles manipulations russes.

La commande turque, qui comprenait une centaine de F-35, a d’ailleurs été annulée par les États-Unis. Ankara se trouve donc contrainte de magasiner des alternatives auprès d’autres fournisseurs, et de se concentrer sur la construction de son propre avion de combat.

Le 12 mars dernier, Valeria Reshetnikova, porte-parole du Service fédéral russe pour la coopération militaire et technique (FSMTC), s’est exprimée au sujet des «potentiels projets d'Ankara d'acheter des combattants russes Su-35 et Su-57». Elle a déclaré que «le camp turc a été entièrement informé des spécifications techniques. S'il y a une demande de la Turquie pour ces avions, nous sommes prêts pour négocier».

«Le camp turc a fait part il y a longtemps de son intention de développer son propre chasseur TF-X de cinquième génération. La Russie s’est déjà dite prête à envisager la possibilité d'une coopération dans le cadre de ce programme. Cependant, nous n'avons pas encore reçu une demande d'Ankara à ce sujet», poursuit Reshetnikova.

Ce rappel de la Russie à l’intention d’Ankara la semaine dernière sur les Su-57 a pour objectif d’éloigner davantage la Turquie de Washington, ainsi que d’éviter une «réinitialisation» de leur relation, selon les analystes.

Aydin Sezer, un expert des relations Turquie-Russie, estime que cet appel pour négocier l'achat d'avions russes est une tactique pour garder l’attention de l’Occident sur la coopération militaire entre Moscou Ankara.

CONTEXTE

-        La Turquie a retenu le mois dernier les services d’un cabinet d'avocats à Washington afin de faire pression dans le dossier de sa réadmission au programme américain d'avions de combat F-35, suspendue après l'achat du système de défense aérienne russe

-        Washington insiste que l’usage système russe S-400 en Turquie est incompatible avec les systèmes de l'OTAN, et qu’il exposerait les F-35 à d'éventuelles manipulations russes.

-        La commande turque, qui comprenait une centaine de F-35, a d’ailleurs été annulée par les États-Unis. Ankara se trouve donc contrainte de magasiner des alternatives auprès d’autres fournisseurs, et de se concentrer sur la construction de son propre avion de combat

 

«Le Kremlin sait pertinemment que la Turquie ne va pas acheter un avion russe», affirme Sezer à Arab News. «Même si elle décide de le faire, elle ne le recevrait pas avant dix ans, au plus tôt. La Russie voulait rappeler à la Turquie ses engagements non tenus tout en essayant de rompre les liens entre la Turquie et l'administration Biden depuis le tout début », a-t-il déclaré.

FSMTC intensifie ses invitations à Ankara depuis le mois de février afin qu'elle poursuive les négociations sur les Su-35 et Su-37.

La Russie propose à ses partenaires stratégiques la version d'exportation de l'avion de combat Su-57, considéré comme la dernière génération d'avions de combat furtifs polyvalents russes.

La Turquie s’est tournée vers les Su-35 russes et les Su-57 de cinquième génération après avoir été exclue du programme de chasseurs américains en 2019. Le président turc Recep Tayyip Erdogan a inspecté les Su-57 avec son homologue russe Vladimir Poutine en 2019 à Moscou, lors d'une foire internationale de l'aviation.

Le ministre turc de l’industrie et de la technologie, Mustafa Varank, a récemment déclaré que la Turquie n’hésiterait pas à discuter avec la Russie de l’achat de Su-35 et Su-57 le cas échéant.

«Nous sommes contre l’avion du pays X, et nous sommes contre l’avion du pays Y. S'il y a un avion en Russie qui réponde à nos besoins actuels et qui ne serait pas difficile à intégrer dans notre système et à exploiter, nous pourrions bien sûr l’acheter à la Russie, ou à un autre pays d'Europe», a-t-il déclaré à Sputnik News le 11 mars.

«C'est le même discours tenu par les responsables turcs à la fin de 2016 et au début de 2017, lorsque le problème de l’achat du S-400 s’est posé», rappelle Caglar Kurc, chercheur sur la défense et les forces armées, à Arab News.

«Bien que Varank n'ait aucun rôle officiel dans les décisions d'achat, je pense que la Turquie tente à nouveau de jouer la carte russe contre les États-Unis. Il se pourrait que la Russie pour sa part recherche tout simplement un acheteur», a-t-il déclaré. Cependant, il estime que cette fois, la position américaine est sans ambiguïté.

«Il n'y a pas de messages contradictoires comme on en voyait avec l'administration Trump. D’ailleurs, l'administration Biden a déjà signalé que les relations turco-américaines seraient plus transactionnelles dorénavant. Ceci signifie que les États-Unis ne vont pas hésiter pas à monter la pression si la Turquie continue d'avoir une coopération militaro-industrielle significative avec la Russie», a-t-il déclaré.

Selon Sezer, les récentes mesures de politique étrangère de la Turquie ont perturbé les décideurs politiques russes.

«Ankara s'est engagé à acheter le deuxième lot de S-400 l'année dernière. Mais en deux mois, il n'y a eu aucune tentative de la part d’Ankara de le négocier, comme si elle a tout d’un coup oublié tous ses engagements antérieurs», affirme Kurc.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


La diplomatie française estime qu'Israël doit faire preuve de « la plus grande retenue » au Liban

Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
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  • l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, Hezbollah.
  • Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

PARIS : La France a exhorté mercredi Israël « à faire preuve de la plus grande retenue » au Liban après la frappe israélienne qui a touché Beyrouth dimanche dernier, et a souligné que le démantèlement des sites militaires du Hezbollah revenait « exclusivement aux forces armées libanaises ».

Malgré un cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre après plus d'un an de guerre entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, très affaibli, qui affirme de son côté respecter l'accord.

Le week-end dernier, Israël a assuré avoir visé un entrepôt de missiles.

Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

« La France rappelle que le respect du cessez-le-feu s'impose à toutes les parties sans exception afin de garantir la sécurité des populations civiles des deux côtés de la Ligne bleue », la frontière de facto délimitée par les Nations unies, a souligné mercredi Christophe Lemoine, porte-parole du ministère français des Affaires étrangères.

« La France appelle donc Israël à faire preuve de la plus grande retenue et à se retirer au plus vite des cinq points toujours occupés sur le territoire libanais », a-t-il ajouté lors d'un point presse.

Une commission regroupant le Liban, Israël, les États-Unis, la France et l'ONU est chargée de superviser l'application du cessez-le-feu.

Beyrouth presse la communauté internationale de faire pression sur Israël pour qu'il mette fin à ses attaques et se retire des cinq positions frontalières où il s'est maintenu dans le sud du pays, malgré l'accord.


Les services de sécurité des Émirats déjouent un transfert illégal d'armes vers le Soudan

Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
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  • Les services de sécurité ont réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises 
  • Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays

ABU DHABI: Les services de sécurité des Émirats arabes unis ont déjoué une tentative de transfert illégal d'armes et d'équipements militaires aux forces armées soudanaises, a déclaré mercredi le procureur général des Émirats arabes unis, Hamad Saif al-Chamsi.

M. Al-Chamsi a déclaré que les services de sécurité avaient réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises après l'arrestation de membres d'une cellule impliquée dans la médiation non autorisée, le courtage et le trafic illicite d'équipements militaires, sans avoir obtenu les licences nécessaires auprès des autorités compétentes.

Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays.

L'avion transportait environ cinq millions de munitions de type Goryunov (54,7 x 62 mm).

Les autorités ont également saisi une partie du produit financier de la transaction en possession de deux suspects dans leurs chambres d'hôtel.

M. Al-Chamsi a déclaré que l'enquête avait révélé l'implication de membres de la cellule des chefs militaires soudanais, notamment l'ancien chef des services de renseignement Salah Gosh, un ancien officier de l'agence de renseignement, un ancien conseiller du ministre des Finances et une personnalité politique proche du général Abdel Fattah al-Burhan et de son adjoint Yasser al-Atta. Plusieurs hommes d'affaires soudanais ont également été impliqués.

Selon les enquêteurs, les membres de la cellule ont conclu un marché d'équipement militaire portant sur des fusils Kalachnikov, des munitions, des mitrailleuses et des grenades d'une valeur de plusieurs millions de dollars.

Les armes ont été transférées de l'armée soudanaise à une société d'importation des Émirats arabes unis en utilisant la méthode de transfert des HAWALADARS.

La transaction a été facilitée par l'intermédiaire d'une société appartenant à un membre fugitif de la cellule travaillant pour les forces armées soudanaises, en coordination avec le colonel Othman al-Zubair, responsable des opérations financières au sein de l'armée soudanaise.

De faux contrats et de fausses factures commerciales ont été utilisés pour prétendre que les paiements concernaient un contrat d'importation de sucre.

L'enquête a conclu que ces transactions avaient été effectuées à la demande du comité d'armement des forces armées soudanaises, présidé par Al-Burhan et son adjoint Al-Atta, en toute connaissance de cause et avec leur approbation. Les membres de la cellule ont été directement chargés de négocier et de finaliser les transactions par Ahmed Rabie Ahmed al-Sayed, une personnalité politique proche du commandant en chef soudanais et responsable de la délivrance des certificats et des approbations des utilisateurs finaux.

Les enquêteurs ont confirmé que Salah Gosh jouait un rôle central dans la gestion du trafic illégal d'équipements militaires aux Émirats arabes unis, en coordination avec d'autres membres de la cellule.

Le groupe a réalisé une marge bénéficiaire de 2,6 millions de dollars (1 dollar = 0,88 euro) par rapport à la valeur réelle des deux transactions, qu'il s'est répartie entre lui et plusieurs complices. La part de Gosh a été retrouvée en possession du suspect Khalid Youssef Mukhtar Youssef, ancien officier de renseignement et ex-chef de cabinet de Gosh.

La cargaison saisie était arrivée à l'aéroport des Émirats arabes unis à bord d'un avion privé en provenance d'un pays étranger.

L'avion s'était posé pour faire le plein et avait officiellement déclaré qu'il transportait un lot de fournitures médicales.

Cependant, la cargaison militaire a été découverte sous la supervision du ministère public, sur la base de mandats judiciaires émis par le procureur général.

Les autorités ont également saisi des copies des contrats relatifs aux deux transactions, de faux documents d'expédition, ainsi que des enregistrements audio et des messages échangés entre les membres de la cellule.

L'enquête a permis de découvrir plusieurs sociétés appartenant à un homme d'affaires soudano-ukrainien, dont une opérant aux Émirats arabes unis.

Ces sociétés ont fourni à l'armée soudanaise des armes, des munitions, des grenades et des drones, en collaboration avec les membres de la cellule et le responsable financier de l'armée.

L'une des sociétés figure sur la liste des sanctions américaines.

Les enquêtes en cours ont révélé que les intérêts financiers et les profits du groupe sont étroitement liés à la poursuite du conflit interne au Soudan.

Le procureur général a souligné que cet incident représentait une grave atteinte à la sécurité nationale des Émirats arabes unis, en faisant de leur territoire une plateforme pour le trafic illégal d'armes à destination d'un pays en proie à des troubles civils, en plus de constituer des infractions pénales punissables par la loi.

Il a conclu en déclarant que le ministère public poursuivait ses procédures d'enquête en vue de déférer les suspects à une procédure judiciaire d'urgence.

Les résultats définitifs seront annoncés à la fin de l'enquête.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Retailleau engage la procédure de dissolution d'Urgence Palestine

Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine.
  • Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

PARIS : A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine, ainsi que de Lyon Populaire, qui appartient à l'ultra droite, après avoir lancé mardi celle du groupe antifasciste La Jeune Garde.

Invité de CNews/Europe 1, le ministre de l'Intérieur a justifié la dissolution d'Urgence Palestine en affirmant qu'il fallait « taper sur les islamistes ». « L'islamisme est une idéologie qui essaie d'instrumentaliser une religion. Il y a une défiguration de la foi », a-t-il dit.

« Il ne faut pas défigurer la juste cause des Palestiniens », a poursuivi M. Retailleau, qui a insisté sur le fait que « beaucoup de nos compatriotes musulmans professent une foi parfaitement compatible avec les valeurs de la République ».

Créé au lendemain de l'attaque sans précédent du Hamas dans le sud d'Israël le 7 octobre 2023, qui a déclenché la guerre à Gaza, le collectif Urgence Palestine dit rassembler « des citoyens, des organisations et mouvements associatifs, syndicaux et politiques mobilisés pour l'auto-détermination du peuple palestinien ». 

Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

« À l'heure où le peuple palestinien est confronté au génocide, à la famine, où les Israéliens cherchent à détruire et à anéantir le peuple palestinien, que fait le gouvernement français ? Il veut dissoudre notre collectif, c'est insupportable », a réagi Omar Al Soumi, l'un des militants d'Urgence Palestine.

« C'est la réalité d'une France complice du génocide », a-t-il accusé dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux.

Urgence Palestine a reçu de nombreux messages de soutien de la part d'organisations de l'extrême gauche et de la gauche radicale. 

« Non à la dissolution d'Urgence Palestine », a écrit sur Instagram le Nouveau Parti Anticapitaliste, dénonçant « des prétextes pour faire taire les voix solidaires avec la Palestine ! ».

L'eurodéputée insoumise Rima Hassan a également critiqué les dissolutions engagées contre la Jeune Garde et Urgence Palestine.

« La dérive autoritaire et fasciste de Macron est aussi réelle, tangible et concrète », a-t-elle réagi sur X.

Tsedek!, qui se présente comme un « collectif juif décolonial », a aussi apporté son soutien à ces deux organisations.

« Le gouvernement qui appelle à la dissolution d’Urgence Palestine, c’est la République qui reprend ses droits et réaffirme que l’antisémitisme ne passera pas en France », s'est au contraire félicitée Sarah Aizenman, présidente du collectif « Nous vivrons », auprès de l'AFP. 

« Cette organisation ne défend pas les droits des Palestiniens, elle soutient une organisation terroriste », a accusé Mme Aizenman.

Les annonces de procédures de dissolution contre La Jeune Garde et Urgence Palestine interviennent à la veille des rassemblements du 1er-Mai et pourraient tendre le climat des manifestations, notamment à Paris, selon un haut responsable de la police.

Le ministre de l'Intérieur et le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, ont par avance prévenu qu'aucun débordement ne serait toléré.

Environ 15 000 personnes sont attendues jeudi pour la manifestation parisienne.