Début des procès en Chine de deux Canadiens accusés d'espionnage

Des diplomates de divers pays, dont Jim Nickel (C), chef de mission adjoint de l'ambassade du Canada à Pékin, devant le tribunal populaire intermédiaire de Dandong où se déroule le procès de l'homme d'affaires canadien Michael Spavor accusé d'espionnage, le 19 mars 2021. (Noel Celis / AFP)
Des diplomates de divers pays, dont Jim Nickel (C), chef de mission adjoint de l'ambassade du Canada à Pékin, devant le tribunal populaire intermédiaire de Dandong où se déroule le procès de l'homme d'affaires canadien Michael Spavor accusé d'espionnage, le 19 mars 2021. (Noel Celis / AFP)
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Publié le Vendredi 19 mars 2021

Début des procès en Chine de deux Canadiens accusés d'espionnage

  • Michael Spavor, un des deux hommes détenus en Chine depuis fin 2018, a été jugé en un peu plus de deux heures à Dandong (nord-est), a annoncé un diplomate canadien
  • A la sortie du palais de justice, des diplomates canadiens ont agité la main en direction d'une fourgonnette de la police aux vitres teintées, pensant que l'homme d'affaires s'y trouvait

DANDONG, Chine : La Chine a commencé vendredi à juger deux Canadiens qu'elle accuse d'espionnage, Ottawa disant espérer leur libération immédiate, sur fond d'intense activité diplomatique entre Pékin et les États-Unis.

Michael Spavor, un des deux hommes détenus en Chine depuis fin 2018, a été jugé en un peu plus de deux heures à Dandong (nord-est), a annoncé un diplomate canadien.

Le tribunal a fait savoir que le verdict serait annoncé à une date ultérieure.

Ni les diplomates, ni la presse n'ont été autorisés à assister à l'audience ou à voir l'accusé.

A la sortie du palais de justice, des diplomates canadiens ont agité la main en direction d'une fourgonnette de la police aux vitres teintées, pensant que l'homme d'affaires s'y trouvait.

M. Spavor a été arrêté en décembre 2018 en même temps qu'un compatriote, Michael Kovrig, peu après l'interpellation au Canada d'une dirigeante du géant des télécoms chinois Huawei, à la demande des États-Unis.

Pékin dément tout lien entre ces deux affaires.

"Pas une coïncidence"

Le numéro deux de l'ambassade du Canada en Chine, Jim Nickel, a déclaré à la presse que son pays travaillait "étroitement" avec les Etats-Unis pour obtenir la libération de M. Spavor et de M. Kovrig, qui doit pour sa part être jugé lundi à Pékin.

"Nous avons bon espoir que dans une certaine mesure ce procès puisse mener à leur libération immédiate", a-t-il assuré.

Le diplomate canadien s'est dit "frustré" de n'avoir pas pu assister à l'audience et par l'absence de transparence de la procédure.

Le procès s'est ouvert alors qu'une rencontre entre de hauts dirigeants chinois et américains a débuté en Alaska dans une atmosphère glaciale, pour la première prise de contact directe à ce niveau sous l'administration de Joe Biden.

"Ce n'est pas une coïncidence", a déclaré à l'AFP le sinologue Jean-Pierre Cabestan, de l'Université baptiste de Hong Kong, estimant qu'il y a déjà eu plusieurs tentatives secrètes de règlement négocié de cette affaire.

"Le procès suivi d'une expulsion rapide des deux Michael a peut-être même été la condition de la tenue de la rencontre" en Alaska, a-t-il observé.

Le Wall Street Journal avait rapporté début décembre que Huawei discutait d'un accord avec l'administration américaine qui permettrait à Mme Meng Wanzhou de regagner la Chine.

Mme Meng, qui n'est autre que la fille du fondateur de Huawei, avait été interpellée à l'aéroport de Vancouver le 1er décembre 2018 à la demande de la justice américaine, qui l'accuse d'avoir contourné des sanctions américaines contre l'Iran. Washington veut la juger pour fraude bancaire.

L'affaire a entraîné une dégradation sans précédent des relations entre Pékin et Ottawa.

"Soutien international"

La nature exacte des accusations contre les deux Canadiens n'est pas connue.

En mars 2019, l'agence de presse officielle Chine nouvelle avait rapporté que M. Kovrig était soupçonné d'espionnage et de vol de secrets d'Etat et que M. Spavor était une de ses principales sources d'information.

Michael Spavor, qui était établi dans le nord-est de la Chine, organisait des voyages vers la Corée du Nord, notamment pour la star américaine du basket Dennis Rodman. Il a été reçu par le dirigeant nord-coréen Kim Jong Un.

La ville de Dandong, où se déroule son procès, se trouve à la frontière de la Corée du Nord. Des diplomates d'une dizaine de pays occidentaux, dont les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne, accompagnaient vendredi leurs collègues canadiens à l'extérieur du tribunal.

"Nous apprécions ce soutien international", a déclaré M. Nickel.

Jeudi, sortant de son silence, la famille de Michael Spavor a jugé "nécessaire de s'exprimer et d'exiger sa libération inconditionnelle".

"Son maintien injuste et continu en détention qui le prive de sa liberté est à la fois inéquitable et déraisonnable, surtout compte tenu du manque de transparence de l'affaire", soulignent ses proches.

Richard Atwood, président par intérim du centre de réflexion Crisis Group, l'employeur de Michael Kovrig, 49 ans, a plaidé dans le même sens.

"Dès le moment où il a été détenu, la nature politique de l'affaire a été claire", a-t-il dénoncé.

Les conditions de détention des "deux Michael" n'a rien à voir avec la situation de Mme Meng, placée en résidence surveillée dans une villa cossue de Vancouver, où elle peut se déplacer munie d'un bracelet électronique.

Par contraste, les deux Canadiens n'ont aucun accès à leurs avocats ou à leurs proches, et n'ont de contact qu'avec des représentants de leur ambassade, une fois par mois.

Ces contacts ont été interrompus l'an dernier pendant neuf mois au nom de la lutte contre l'épidémie de Covid-19.

A Vancouver, la procédure d'extradition vers les États-Unis de Mme Meng est entrée dans sa dernière phase et les ultimes audiences sont prévues en mai.

 


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.