Au Liban, les retraités démunis face à l'effondrement monétaire

Après 32 années de service dans la police, Jean Assaf vit l'effondrement au quotidien (Photo, AFP).
Après 32 années de service dans la police, Jean Assaf vit l'effondrement au quotidien (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 29 mars 2021

Au Liban, les retraités démunis face à l'effondrement monétaire

  • Depuis l'automne 2019, le Liban vit au rythme d'une crise économique inédite, marquée par une dégringolade historique de la monnaie nationale et d'une paupérisation à grande échelle
  • Comme nombre de ses compatriotes, Samir Merhi se dit piégé par des dirigeants «corrompus de la tête aux pieds» et victime de «la plus grande escroquerie de l'histoire» financière

BEYROUTH: Rentré au Liban en 2009 après avoir fait fortune à l'étranger, Samir Merhi espérait profiter d'une retraite dorée dans le pays de ses aïeux. Mais à 72 ans, la crise financière a ruiné ses décennies de labeur, l'obligeant de nouveau à partir.

Dans un hôtel de la rue Hamra, au cœur de Beyrouth, le septuagénaire relate une carrière prolifique entre les pays du Golfe et le Royaume-Uni, quatre décennies investies dans la construction et l'industrie de la mode.

Mais de ses « millions de dollars » amassés à l'étranger, et placés dans l'immobilier au Liban ou dans des banques locales, il ne lui reste rien, ou si peu. Avec les restrictions bancaires draconiennes sur les retraits et les transferts, ses économies sont prises en otage et risquent de s'évaporer.

« Je suis obligé de tout reprendre à zéro, pour assurer ma fin de vie. Je n'ai pas le choix », déplore l'homme d'affaires en costume, en attendant le taxi qui doit l'emmener à l'aéroport. Direction les Etats-Unis, où vit notamment son frère.

« Rendez-moi mon argent et je n'aurais pas besoin d'aller aux Etats-Unis », s'emporte-t-il. « Qu'est-ce que je vais aller faire là-bas (...) Je ne veux pas mourir aux Etats-Unis ! »

Depuis l'automne 2019, le Liban vit au rythme d'une crise économique inédite, marquée par une dégringolade historique de la monnaie nationale et d'une paupérisation à grande échelle.

Comme nombre de ses compatriotes, Samir Merhi se dit piégé par des dirigeants « corrompus de la tête aux pieds » et victime de « la plus grande escroquerie de l'histoire » financière.

Mais si le septuagénaire peut envisager un semblant d'avenir ailleurs, c'est loin d'être le cas pour tous les retraités. Et avec la dépréciation de la livre libanaise, indemnisations de fin de carrière et pensions ne valent plus rien.

« Je compte sur Dieu »

Après 32 années de service dans la police, Jean Assaf vit l'effondrement au quotidien. Avant, sa pension valait environ 1 400 dollars, contre à peine 180 dollars aujourd'hui.

Si le taux de change officiel est toujours de 1 507 livres libanaises pour un dollar, au marché noir un dollar dépasse désormais les 12 000 livres.

« J'espérais pouvoir vivre honorablement à la fin de ma vie », témoigne l'ancien gendarme de 80 ans, dans son salon aux murs couverts de photos, médailles et canevas brodés.

Il peut difficilement compter sur ses cinq enfants, eux-mêmes empêtrés dans des difficultés.

Comme lui, plus de 108 000 retraités du secteur public sont frappés de plein fouet par la crise. Selon le ministère des Finances, la pension moyenne s'élève à 2,2 millions de livres, soit environ 170 dollars.

L'effondrement du pouvoir d'achat a plus largement entraîné un déclassement social inédit. Désormais 55% de la population vit sous le seuil de pauvreté.

Parmi les ONG mobilisées pour aider les plus démunis, Grassroots a érigé une tente dans le quartier de Mar Mikhaël, dévasté en août par l'explosion au port de Beyrouth qui a tué plus de 200 personnes.

L'ONG fournit vêtements, provisions alimentaires et organise quotidiennement une soupe populaire.

Ces derniers mois, ce sont « surtout des retraités » qui viennent, rapporte la directrice Mayssa Mansour.

Aucune classe épargnée

Malgré une pluie battante, plusieurs personnes affluent. Certaines jettent un regard furtif sans oser entrer.

« Ils ont honte, ce sont de gens qui n'auraient jamais demandé l'aumône », explique Mansour.

Adib, 69 ans, vient quotidiennement récupérer des plats gratuits pour sa famille. Retraité de la police depuis 2004, sa pension vaut à peine 100 dollars aujourd'hui. Sur ses deux enfants, un fils ingénieur est au chômage depuis deux ans.

« J'appartenais à la classe moyenne. Désormais je suis même en-deçà du seuil de pauvreté », confie-t-il.

Les classes aisées aussi sont concernées. Sara et Fouad Ammar, un couple d'enseignants à la retraite, ont vu le montant cumulé de leurs pensions mensuelles fondre à 600 dollars, contre plus de 6 000 avant la crise.

« Notre situation reste acceptable par rapport à d'autres », reconnaît Sara, 68 ans. « Mais ce n'est pas du tout ce à quoi nous nous attendions à la fin de notre vie ».

Sur leurs trois enfants, deux ont émigré au Canada en raison de la crise, ajoute son époux, 76 ans. Et « nous avons été privés de nos petits-enfants ! », renchérit-il, le regard triste.


La diplomatie française estime qu'Israël doit faire preuve de « la plus grande retenue » au Liban

Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
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  • l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, Hezbollah.
  • Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

PARIS : La France a exhorté mercredi Israël « à faire preuve de la plus grande retenue » au Liban après la frappe israélienne qui a touché Beyrouth dimanche dernier, et a souligné que le démantèlement des sites militaires du Hezbollah revenait « exclusivement aux forces armées libanaises ».

Malgré un cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre après plus d'un an de guerre entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, très affaibli, qui affirme de son côté respecter l'accord.

Le week-end dernier, Israël a assuré avoir visé un entrepôt de missiles.

Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

« La France rappelle que le respect du cessez-le-feu s'impose à toutes les parties sans exception afin de garantir la sécurité des populations civiles des deux côtés de la Ligne bleue », la frontière de facto délimitée par les Nations unies, a souligné mercredi Christophe Lemoine, porte-parole du ministère français des Affaires étrangères.

« La France appelle donc Israël à faire preuve de la plus grande retenue et à se retirer au plus vite des cinq points toujours occupés sur le territoire libanais », a-t-il ajouté lors d'un point presse.

Une commission regroupant le Liban, Israël, les États-Unis, la France et l'ONU est chargée de superviser l'application du cessez-le-feu.

Beyrouth presse la communauté internationale de faire pression sur Israël pour qu'il mette fin à ses attaques et se retire des cinq positions frontalières où il s'est maintenu dans le sud du pays, malgré l'accord.


Les services de sécurité des Émirats déjouent un transfert illégal d'armes vers le Soudan

Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
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  • Les services de sécurité ont réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises 
  • Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays

ABU DHABI: Les services de sécurité des Émirats arabes unis ont déjoué une tentative de transfert illégal d'armes et d'équipements militaires aux forces armées soudanaises, a déclaré mercredi le procureur général des Émirats arabes unis, Hamad Saif al-Chamsi.

M. Al-Chamsi a déclaré que les services de sécurité avaient réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises après l'arrestation de membres d'une cellule impliquée dans la médiation non autorisée, le courtage et le trafic illicite d'équipements militaires, sans avoir obtenu les licences nécessaires auprès des autorités compétentes.

Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays.

L'avion transportait environ cinq millions de munitions de type Goryunov (54,7 x 62 mm).

Les autorités ont également saisi une partie du produit financier de la transaction en possession de deux suspects dans leurs chambres d'hôtel.

M. Al-Chamsi a déclaré que l'enquête avait révélé l'implication de membres de la cellule des chefs militaires soudanais, notamment l'ancien chef des services de renseignement Salah Gosh, un ancien officier de l'agence de renseignement, un ancien conseiller du ministre des Finances et une personnalité politique proche du général Abdel Fattah al-Burhan et de son adjoint Yasser al-Atta. Plusieurs hommes d'affaires soudanais ont également été impliqués.

Selon les enquêteurs, les membres de la cellule ont conclu un marché d'équipement militaire portant sur des fusils Kalachnikov, des munitions, des mitrailleuses et des grenades d'une valeur de plusieurs millions de dollars.

Les armes ont été transférées de l'armée soudanaise à une société d'importation des Émirats arabes unis en utilisant la méthode de transfert des HAWALADARS.

La transaction a été facilitée par l'intermédiaire d'une société appartenant à un membre fugitif de la cellule travaillant pour les forces armées soudanaises, en coordination avec le colonel Othman al-Zubair, responsable des opérations financières au sein de l'armée soudanaise.

De faux contrats et de fausses factures commerciales ont été utilisés pour prétendre que les paiements concernaient un contrat d'importation de sucre.

L'enquête a conclu que ces transactions avaient été effectuées à la demande du comité d'armement des forces armées soudanaises, présidé par Al-Burhan et son adjoint Al-Atta, en toute connaissance de cause et avec leur approbation. Les membres de la cellule ont été directement chargés de négocier et de finaliser les transactions par Ahmed Rabie Ahmed al-Sayed, une personnalité politique proche du commandant en chef soudanais et responsable de la délivrance des certificats et des approbations des utilisateurs finaux.

Les enquêteurs ont confirmé que Salah Gosh jouait un rôle central dans la gestion du trafic illégal d'équipements militaires aux Émirats arabes unis, en coordination avec d'autres membres de la cellule.

Le groupe a réalisé une marge bénéficiaire de 2,6 millions de dollars (1 dollar = 0,88 euro) par rapport à la valeur réelle des deux transactions, qu'il s'est répartie entre lui et plusieurs complices. La part de Gosh a été retrouvée en possession du suspect Khalid Youssef Mukhtar Youssef, ancien officier de renseignement et ex-chef de cabinet de Gosh.

La cargaison saisie était arrivée à l'aéroport des Émirats arabes unis à bord d'un avion privé en provenance d'un pays étranger.

L'avion s'était posé pour faire le plein et avait officiellement déclaré qu'il transportait un lot de fournitures médicales.

Cependant, la cargaison militaire a été découverte sous la supervision du ministère public, sur la base de mandats judiciaires émis par le procureur général.

Les autorités ont également saisi des copies des contrats relatifs aux deux transactions, de faux documents d'expédition, ainsi que des enregistrements audio et des messages échangés entre les membres de la cellule.

L'enquête a permis de découvrir plusieurs sociétés appartenant à un homme d'affaires soudano-ukrainien, dont une opérant aux Émirats arabes unis.

Ces sociétés ont fourni à l'armée soudanaise des armes, des munitions, des grenades et des drones, en collaboration avec les membres de la cellule et le responsable financier de l'armée.

L'une des sociétés figure sur la liste des sanctions américaines.

Les enquêtes en cours ont révélé que les intérêts financiers et les profits du groupe sont étroitement liés à la poursuite du conflit interne au Soudan.

Le procureur général a souligné que cet incident représentait une grave atteinte à la sécurité nationale des Émirats arabes unis, en faisant de leur territoire une plateforme pour le trafic illégal d'armes à destination d'un pays en proie à des troubles civils, en plus de constituer des infractions pénales punissables par la loi.

Il a conclu en déclarant que le ministère public poursuivait ses procédures d'enquête en vue de déférer les suspects à une procédure judiciaire d'urgence.

Les résultats définitifs seront annoncés à la fin de l'enquête.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Retailleau engage la procédure de dissolution d'Urgence Palestine

Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine.
  • Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

PARIS : A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine, ainsi que de Lyon Populaire, qui appartient à l'ultra droite, après avoir lancé mardi celle du groupe antifasciste La Jeune Garde.

Invité de CNews/Europe 1, le ministre de l'Intérieur a justifié la dissolution d'Urgence Palestine en affirmant qu'il fallait « taper sur les islamistes ». « L'islamisme est une idéologie qui essaie d'instrumentaliser une religion. Il y a une défiguration de la foi », a-t-il dit.

« Il ne faut pas défigurer la juste cause des Palestiniens », a poursuivi M. Retailleau, qui a insisté sur le fait que « beaucoup de nos compatriotes musulmans professent une foi parfaitement compatible avec les valeurs de la République ».

Créé au lendemain de l'attaque sans précédent du Hamas dans le sud d'Israël le 7 octobre 2023, qui a déclenché la guerre à Gaza, le collectif Urgence Palestine dit rassembler « des citoyens, des organisations et mouvements associatifs, syndicaux et politiques mobilisés pour l'auto-détermination du peuple palestinien ». 

Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

« À l'heure où le peuple palestinien est confronté au génocide, à la famine, où les Israéliens cherchent à détruire et à anéantir le peuple palestinien, que fait le gouvernement français ? Il veut dissoudre notre collectif, c'est insupportable », a réagi Omar Al Soumi, l'un des militants d'Urgence Palestine.

« C'est la réalité d'une France complice du génocide », a-t-il accusé dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux.

Urgence Palestine a reçu de nombreux messages de soutien de la part d'organisations de l'extrême gauche et de la gauche radicale. 

« Non à la dissolution d'Urgence Palestine », a écrit sur Instagram le Nouveau Parti Anticapitaliste, dénonçant « des prétextes pour faire taire les voix solidaires avec la Palestine ! ».

L'eurodéputée insoumise Rima Hassan a également critiqué les dissolutions engagées contre la Jeune Garde et Urgence Palestine.

« La dérive autoritaire et fasciste de Macron est aussi réelle, tangible et concrète », a-t-elle réagi sur X.

Tsedek!, qui se présente comme un « collectif juif décolonial », a aussi apporté son soutien à ces deux organisations.

« Le gouvernement qui appelle à la dissolution d’Urgence Palestine, c’est la République qui reprend ses droits et réaffirme que l’antisémitisme ne passera pas en France », s'est au contraire félicitée Sarah Aizenman, présidente du collectif « Nous vivrons », auprès de l'AFP. 

« Cette organisation ne défend pas les droits des Palestiniens, elle soutient une organisation terroriste », a accusé Mme Aizenman.

Les annonces de procédures de dissolution contre La Jeune Garde et Urgence Palestine interviennent à la veille des rassemblements du 1er-Mai et pourraient tendre le climat des manifestations, notamment à Paris, selon un haut responsable de la police.

Le ministre de l'Intérieur et le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, ont par avance prévenu qu'aucun débordement ne serait toléré.

Environ 15 000 personnes sont attendues jeudi pour la manifestation parisienne.