Fnideq, entre crise migratoire et malaise social

Des migrants escaladent une digue dans la ville de Fnideq après avoir tenté de traverser la frontière entre le Maroc et l'enclave nord-africaine espagnole de Ceuta le 19 mai 2021. FADEL SENNA / AFP
Des migrants escaladent une digue dans la ville de Fnideq après avoir tenté de traverser la frontière entre le Maroc et l'enclave nord-africaine espagnole de Ceuta le 19 mai 2021. FADEL SENNA / AFP
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Publié le Lundi 24 mai 2021

Fnideq, entre crise migratoire et malaise social

  • Le Maroc s’achemine aujourd’hui vers un remodelage de la configuration géopolitique de la région et vers un rééquilibrage des rapports de force
  • En deux jours, plus de 8 000 personnes, dont plus de 1 500 mineurs, ont pu regagner clandestinement la frontière

CASABLANCA: «Je n’ai plus rien à perdre. J’ai plus de 30 ans et je n’ai ni famille, ni travail stable, rien. Mon pays ne m’a rien donné. Je vais retenter ma chance vers Ceuta.»  Samir, 32 ans, natif de Fnideq, au nord-ouest du Maroc, affirme à Arab News en français déterminé à passer la frontière pour «l’eldorado» européen. Il guette, de la petite colline qui surplombe la ville de Ceuta, les mouvements de la Guardia Civil espagnole et des garde-côtes marocains. Depuis une semaine, avec l’éclatement de la crise migratoire entre le Maroc et l’Espagne, où plus de 8 000 migrants ont réussi à franchir, en deux jours, la frontière de l’enclave espagnole de Ceuta, des dizaines de milliers de Marocains se sont rués vers la ville mitoyenne de Fnideq.

« En fermant les frontières, et en l’absence d’alternative, les autorités nous ont condamnés à une mort inévitable » affirme Samir à Arab News en français.

Quand la contrebande faisait vivre toute une région

Si les tensions actuelles entre le Maroc et son voisin ibérique ont connu plusieurs rebondissements d’ordres diplomatique, politique et géopolitique ces derniers jours, elle a surtout révélé la profondeur de la crise sociale qui touche essentiellement la région nord du Maroc. Et pour cause: la ville de Fnideq, communément appelée «Castillejos» par les locaux, vit une crise économique sans précédent à cause de la fermeture de ses frontières avec Ceuta par les autorités marocaines au mois de décembre 2019.

«Toute la province de M’diq-Fnideq vit grâce à la contrebande qui provient de Ceuta. Près de 10 000 familles dépendent de ce commerce frontalier. En fermant les frontières, et en l’absence d’alternative, les autorités nous ont condamnés à une mort inévitable. Comme des centaines de commerçants, j’ai dû fermer boutique. Je n’ai plus de revenus et j’ai tout vendu, mes meubles, mes habits, pour pouvoir nourrir ma famille. Nous n’avons pas de visibilité et nous ne savons plus quoi faire», nous confie, désespéré, Karim, un ancien commerçant du marché Al-Massira, au centre-ville de Fnideq. Avant la fermeture des frontières, ce marché était la destination privilégiée des Marocains. Ils pouvaient s’y procurer des produits alimentaires, des vêtements et des produits cosmétiques à des prix très alléchants.

Manifestations à Fnideq en février 2021

Trois mois après la fermeture des frontières entre le Maroc et l’enclave de Ceuta, le premier cas de contamination à la Covid-19 a été détecté au Maroc. Les autorités ont instauré, en mars 2020, un confinement général de trois mois. Depuis, la sinistrose a gagné Fnideq, où le taux de chômage dépasse actuellement 20%, soit près du double de la moyenne nationale. Ayant été peu soutenus par l’État, qui n’a pas mis en place de filets sociaux, les habitants de Fnideq se sont sentis abandonnés.

Au début du mois de février 2021, les gens sont donc sortis dans la rue afin de protester contre leurs conditions de vie et contre cette crise économique et sociale qu’ils subissent depuis plus d’un an. Ils demandent à l’État de leur venir en aide et de leur proposer des alternatives économiques viables. Le souvenir des protestations du Rif, survenues au mois d’octobre 2016 pour les mêmes motifs, refait surface, et les autorités tentent de prendre les choses en main. Des contrats de travail et des aides à la création de projets sont alors proposées à la population. Toutefois, ces mesures se sont avérées insuffisantes pour faire face à l’ampleur de cette crise profonde, qui touche toute la région.

«J’ai envoyé mes quatre enfants, dont deux sont âgés de 9 et 13 ans, à Ceuta. Je n’ai pas de nouvelles de mes enfants mineurs. J’espère qu’ils ne seront pas envoyés au Maroc comme leurs deux autres frères. Je ne les abandonne pas comme vous pourriez le croire» affirme Samira, une veuve de 54 ans à Arab News en français.

Exode massif, tout âge confondu

Cette crise s’est traduite par un exode massif, la semaine dernière, de migrants majoritairement issus de cette région. En deux jours, plus de 8 000 personnes, dont plus de 1 500 mineurs, ont pu regagner clandestinement la frontière. Jamais un tel chiffre n’avait été enregistré sur une aussi courte période. Le plus surprenant, dans cet afflux massif, c’est que, dorénavant, l’immigration clandestine ne concerne plus que les jeunes Marocains. Des femmes, des mères au foyer, des personnes âgées, des étudiants et des mineurs de 10, 12, et 14 ans ont risqué leur vie pour gagner l’enclave de Ceuta à la nage. La crise, le malaise social et le désespoir touchent donc désormais toutes les couches sociales et tous les âges.

«J’ai envoyé mes quatre enfants, dont deux sont âgés de 9 et 13 ans, à Ceuta. Je n’ai pas de nouvelles de mes enfants mineurs. J’espère qu’ils ne seront pas envoyés au Maroc comme leurs deux autres frères. Je ne les abandonne pas comme vous pourriez le croire, mais je n’ai pas le choix, je n’ai plus de quoi les nourrir. J’ai frappé à toutes les portes depuis plusieurs mois. J’ai déjà pensé au suicide à maintes reprises», nous confie, les larmes aux yeux, Samira, une veuve de 54 ans. Elle faisait partie de ces femmes qui transportaient chaque jour sur leurs dos, dans des conditions inhumaines, les marchandises de l’enclave de Ceuta vers Fnideq.

Une victoire diplomatique qui met à nu la vulnérabilité de millions de Marocains

La crise entre le Maroc et l’Espagne occasionnée par l’hospitalisation de Brahim Ghali, chef des indépendantistes du Front Polisario, à Logroño (dans le nord de l’Espagne), s’est vraisemblablement soldée par un succès diplomatique du royaume chérifien. En effet, le Maroc a pu, malgré des accusations de chantage, faire pression sur l’Espagne, et il s’achemine aujourd’hui vers un remodelage de la configuration géopolitique de la région et vers un rééquilibrage des rapports de force. Toutefois, ces tensions ont révélé la grande vulnérabilité et le malaise social de millions de Marocains qui, en raison de la crise de la Covid-19, risquent de rejoindre les rangs des pauvres (NDLR: voir notre article «Covid-19: plus d’un million de “nouveaux pauvres” au Maroc en 2020»).

Il est à noter que cette crise intervient peu avant la présentation du rapport sur le nouveau modèle de développement du Maroc. Selon nos informations, la Commission spéciale sur le modèle de développement (CSMD), présidée par Chakib Benmoussa, ambassadeur du royaume du Maroc en France, a consacré une bonne partie de ce rapport aux répercussions sociales de la crise économique de la Covid-19, tout en proposant des solutions à mettre en place de manière urgente. Selon nos sources, il sera remis au roi Mohammed VI entre la fin mai et le début du mois de juin 2021.


L'organisation humanitaire controversée GHF, dit avoir terminé sa mission à Gaza

L'organisation humanitaire GHF, soutenue par Israël et les Etats-Unis et vivement critiquée par l'ONU, a annoncé lundi avoir terminé sa mission à Gaza, se prévalant d'y avoir fourni des dizaines de millions de repas gratuits "sans détournement" de l'aide par le Hamas. (AFP)
L'organisation humanitaire GHF, soutenue par Israël et les Etats-Unis et vivement critiquée par l'ONU, a annoncé lundi avoir terminé sa mission à Gaza, se prévalant d'y avoir fourni des dizaines de millions de repas gratuits "sans détournement" de l'aide par le Hamas. (AFP)
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  • L'organisme au financement opaque, déployé en mai dans le territoire palestinien en guerre, après deux mois de blocus humanitaire total imposé par Israël, a été vivement critiquée par la communauté humanitaire internationale
  • Ses distributions de nourriture ont été entachées par des violences qui ont tué plus de 1.000 personnes à proximité de ses sites, selon le bureau des droits de l'Homme de l'ONU

JERUSALEM: L'organisation humanitaire GHF, soutenue par Israël et les Etats-Unis et vivement critiquée par l'ONU, a annoncé lundi avoir terminé sa mission à Gaza, se prévalant d'y avoir fourni des dizaines de millions de repas gratuits "sans détournement" de l'aide par le Hamas.

La Gaza Humanitaran Foundation (GHF) a annoncé dans un communiqué "la fin réussie de sa mission d'urgence à Gaza après avoir distribué plus de 187 millions de repas gratuits directement aux civils dans le cadre d'une opération humanitaire record qui a permis de garantir que l'aide alimentaire parvienne aux familles palestiniennes en toute sécurité et sans détournement par le Hamas ou d'autres entités".

L'organisme au financement opaque, déployé en mai dans le territoire palestinien en guerre, après deux mois de blocus humanitaire total imposé par Israël, a été vivement critiquée par la communauté humanitaire internationale.

Ses distributions de nourriture ont été entachées par des violences qui ont tué plus de 1.000 personnes à proximité de ses sites, selon le bureau des droits de l'Homme de l'ONU.

L'ONG a rejeté les critiques et sa responsabilité dans ces violences.

"A un moment critique, nous sommes fiers d’avoir été la seule opération d'aide capable de fournir de manière fiable et sûre des repas gratuits directement au peuple palestinien de Gaza, à grande échelle et sans détournement, s'est félicité son directeur John Acree, cité par le communiqué.

"Le modèle de la GHF, dans lequel le Hamas ne pouvait plus piller et tirer profit du détournement de l'aide, a joué un rôle majeur pour amener le Hamas à la table des négociations et parvenir à un cessez-le-feu. Nous les remercions pour tout ce qu’ils ont apporté aux Gazaouis", a salué sur X le porte-parole du département d'Etat, Tommy Pigott.

 

 


Israël: des généraux limogés, d'autres sanctionnés, en lien avec le 7-Octobre

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  • Ces mesures prises par le chef d'état-major Eyal Zamir ont provoqué un regain de tension avec le ministre israélien de la Défense Israël Katz
  • Le limogeage de généraux de premier plan le 7-Octobre met en exergue la façon dont le Premier ministre Benjamin Netanyahu a réussi jusque-là à esquiver ses torts dans le fiasco du 7-Octobre

JERUSALEM: L'armée israélienne a annoncé le limogeage de trois généraux à des postes clés le 7 octobre 2023 et des sanctions disciplinaires contre plusieurs autres à cause de leur échec à empêcher ce jour-là l'attaque la plus meurtrière qu'ait connue Israël.

Ces mesures prises par le chef d'état-major Eyal Zamir ont provoqué un regain de tension avec le ministre israélien de la Défense Israël Katz, qui a annoncé lundi avoir demandé un "examen approfondi" du rapport, commandité par l'armée, qui leur a servi de base pour prendre ces mesures.

Le limogeage de généraux de premier plan le 7-Octobre met en exergue la façon dont le Premier ministre Benjamin Netanyahu a réussi jusque-là à esquiver ses torts dans le fiasco du 7-Octobre, malgré les appels de l'opinion publique et de l'opposition à la formation d'une commission d'enquête nationale.

M. Netanyahu a répété que les fautes de la direction politique ayant mené au 7-Octobre ne pourraient être examinées qu'après la fin de la guerre.

Le général de division Aharon Haliva, à l'époque chef des renseignements militaires, le général de division Oded Basyuk, alors chef des opérations, et le général de division Yaron Finkelman, qui commandait ce jour-là depuis peu la région militaire sud d'Israël, vont être déchargés "du cadre de réserve et ne (feront) plus partie" de l'armée, indique un communiqué de l'armée publié dimanche soir.

Le général Haliva a été le premier responsable militaire à démissionner, en 2024, en invoquant sa responsabilité pour le drame du 7-Octobre. Le général Finkelman a lui aussi démissionné en invoquant les mêmes motifs. Quant au général Basyuk, il a pris sa retraite après la guerre de 12 jours lancée par Israël contre l'Iran en juin.

Selon le communiqué de l'armée, les trois hommes portent chacun une responsabilité personnelle dans l'échec de l'institution militaire à anticiper et à repousser l'attaque lancée par le mouvement islamiste palestinien Hamas à partir de la bande de Gaza sur le sud d'Israël.

"Défaillance systémique" 

Ces mesures, prises par Eyal Zamir, font suite à la publication au début du mois du rapport d'un comité d'experts qu'il avait mandaté et qui a marqué la fin des enquêtes au sein de l'armée sur les défaillances ayant mené au drame du 7-Octobre.

Le rapport concluait à une "défaillance systémique et organisationnelle de longue date" au sein de l'appareil militaire.

Déplorant des "processus de prise de décision et de déploiement des forces déficients dans la nuit du 7 octobre 2023", le comité pointait des échecs au niveau de l'état-major général, de la direction des opérations, de la direction du renseignement militaire, du Commandement Sud, mais aussi de l'armée de l'Air et de la Marine.

Israël Katz, dont l'inimitié avec le chef d'état-major est connue, a réagi lundi à l'annonce des limogeages et mesures disciplinaires  en annonçant "un examen en profondeur" de ce rapport.

"A la suite des mesures annoncées hier par le chef d'état-major concernant la responsabilité des commandants dans les événements du 7 octobre, j'ai décidé de charger le contrôleur de l'établissement de la Défense, le général de division (à la retraite) Yaïr Wolansky, d'examiner en profondeur le rapport présenté par l'équipe dirigée par le général de division (à la retraite) Sami Turgeman", a annoncé le ministre de la Défense dans un communiqué.

Joute 

Il a précisé que le "contrôleur sera également invité à formuler une recommandation concernant des critères équitables pour l'élaboration de conclusions personnelles", faisant allusion aux limogeages et mesures disciplinaires annoncés par Eyal Zamir.

Selon les médias israéliens, il s'agit d'une énième joute dans le bras de fer qui oppose les deux hommes, M. Katz ayant cette fois-ci été ulcéré de ne pas avoir été prévenu directement des mesures qu'il a apprises par les médias.

En outre, le chef d'état-major s'est publiquement dissocié du gouvernement, notamment en appelant le 10 novembre à une "enquête systémique" sur le 7-Octobre.

Malgré les pressions de l'opinion publique et les demandes de l'opposition, le gouvernement israélien refuse l'établissement d'une commission nationale d'enquête dans l'échec des autorités à prévenir l'attaque.

Outre les trois généraux limogés, l'armée a annoncé des sanctions disciplinaires contre le général de division aérienne Tomer Bar et le vice-amiral David Saar Salma, respectivement à la tête de l'armée de l'Air et de la Marine.

Sont également visés par des mesures disciplinaires quatre autres généraux et quatre officiers supérieurs.

Le général Herzi Halévy, qui était à la tête de l'armée le 7 octobre 2023, a annoncé sa démission en janvier et quitté ses fonctions en mars. Il n'est pas concerné par les mesures.

 


Le Hezbollah enterre son chef militaire tué dans un bombardement israélien

Le Hezbollah a porté en terre lundi son chef militaire Haitham Ali Tabatabai, tué la veille par Israël dans la banlieue sud de Beyrouth, une attaque qui accentue encore la pression sur le Liban pour désarmer le mouvement pro-iranien. (AFP)
Le Hezbollah a porté en terre lundi son chef militaire Haitham Ali Tabatabai, tué la veille par Israël dans la banlieue sud de Beyrouth, une attaque qui accentue encore la pression sur le Liban pour désarmer le mouvement pro-iranien. (AFP)
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  • A l'appel de la formation chiite, des centaines de ses partisans sont descendus dans son fief de la banlieue sud de Beyrouth, pour les funérailles de celui que le mouvement a qualifié de "grand leader"
  • Jusque-là largement inconnu du grand public au Liban, il est le plus haut responsable du Hezbollah tué depuis la fin, il y a un an, de la dernière guerre qui a opposé le mouvement à Israël

BEYROUTH: Le Hezbollah a porté en terre lundi son chef militaire Haitham Ali Tabatabai, tué la veille par Israël dans la banlieue sud de Beyrouth, une attaque qui accentue encore la pression sur le Liban pour désarmer le mouvement pro-iranien.

A l'appel de la formation chiite, des centaines de ses partisans sont descendus dans son fief de la banlieue sud de Beyrouth, pour les funérailles de celui que le mouvement a qualifié de "grand leader".

Jusque-là largement inconnu du grand public au Liban, il est le plus haut responsable du Hezbollah tué depuis la fin, il y a un an, de la dernière guerre qui a opposé le mouvement à Israël.

Dans cette banlieue densément peuplée de la capitale, des membres du Hezbollah en treillis ont porté son cercueil et ceux d'autres compagnons tués dans la frappe ciblée de dimanche, recouverts des drapeaux jaunes du groupe, au son de chants religieux, a rapporté un correspondant de l'AFP.

La foule, d'où émergeaient des portraits des dirigeants du Hezbollah et du guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, a scandé des slogans contre Israël et les États-Unis.

Cet assassinat est intervenu alors qu'Israël a intensifié ces derniers temps ses frappes sur le territoire libanais malgré le cessez-le-feu, disant viser des membres ou infrastructures du Hezbollah qu'il accuse de se réarmer, ce que le mouvement dément.

"Voie diplomatique" 

Le gouvernement libanais est sous forte pression de Washington pour contraindre le Hezbollah à rendre ses armes conformément à l'accord de cessez-le-feu du 27 novembre 2024, ce que le mouvement islamiste refuse jusqu'à présent.

Après l'assassinat de Haitham Ali Tabatabai, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a réaffirmé qu'Israël "ne permettra(it) pas au Hezbollah de reconstruire son pouvoir" et appelé Beyrouth  à "respecter son engagement" à le désarmer.

A Paris, la diplomatie française a appelé à la "retenue" après la frappe israélienne qui fait "peser un risque d'escalade dans un contexte déjà marqué par de fortes tensions".

Les options du Hezbollah apparaissent désormais limitées: le mouvement est sorti très affaibli du conflit qu'il avait enclenché avec Israël après le début de la guerre à Gaza, et a perdu sa voie d'approvisionnement via la Syrie depuis la chute de Bachar al-Assad en décembre dernier.

Washington presse également Beyrouth de lui couper les financements iraniens. Téhéran, principal allié du Hezbollah, a dénoncé lundi un "lâche assassinat".

Il existe aujourd'hui "deux tendances au sein du groupe", explique à l'AFP une source proche du Hezbollah, sous couvert d'anonymat. "Ceux qui veulent répondre à l'assassinat et ceux qui préfèrent s'abstenir, et pour l'instant, la direction du groupe préfère la voie diplomatique".

"Les options du Hezbollah sont très limitées", affirme à l'AFP Nicholas Blanford, analyste à l'Atlantic Council. "Sa base réclame vengeance, mais si le Hezbollah répond directement (...) Israël ripostera très durement et personne au Liban ne remerciera le Hezbollah pour ça".

Selon lui, la frappe sur le chef militaire du Hezbollah "montre qu'Israël peut toujours localiser et cibler les hauts responsables (du mouvement) malgré toutes les mesures de protection".

"Rejeter les pressions" 

L'assassinat de Haitham Ali Tabatabai visait à "effrayer et affaiblir" le Hezbollah pour qu'il "se rende et se soumette, mais cet objectif ne sera jamais atteint", a lancé lors des funérailles un haut responsable du mouvement, Ali Damuch.

Israël était "inquiet de la réponse possible du Hezbollah, et doit le rester", a-t-il ajouté, exhortant les autorités libanaises à "affronter l'agression par tous les moyens (...) et à rejeter les pressions (...) à se conformer aux diktats américains et aux conditions israéliennes".

En vertu de l'accord de cessez-le-feu, l'armée libanaise doit démanteler la présence militaire du Hezbollah sur une bande d'une trentaine de kms entre la frontière avec Israël et le fleuve Litani, plus au nord.

L'armée a soumis un plan au gouvernement, dans lequel elle s'engage à accomplir cette tâche titanesque, avant de procéder par étapes sur le reste du territoire libanais. Mais les Etats-Unis et Israël accusent les autorités libanaises de tarder, face à la ferme opposition du Hezbollah.

Ce dernier invoque notamment le maintien par Israël de cinq postes dans le sud du Liban, dont l'accord de cessez-le-feu stipule pourtant que l'armée israélienne doit se retirer.

Un responsable militaire libanais a affirmé à l'AFP la semaine dernière que les demandes américaines et israéliennes d'un désarmement d'ici fin 2025 étaient "impossibles" à satisfaire, faute de personnel et d'équipement, et au vu du risque de confrontations avec les communautés locales soutenant le Hezbollah.