Une «ultime tentative» pour former un gouvernement au Liban

Sur cette photo du 28 avril 2020, des soldats libanais de la ville de Tripoli, dans le nord du pays, montent la garde devant une banque incendiée par des manifestants antigouvernementaux. (Photo, AP)
Sur cette photo du 28 avril 2020, des soldats libanais de la ville de Tripoli, dans le nord du pays, montent la garde devant une banque incendiée par des manifestants antigouvernementaux. (Photo, AP)
Short Url
Publié le Mercredi 02 juin 2021

Une «ultime tentative» pour former un gouvernement au Liban

  • Le rapport de la Banque mondiale, selon l'Associated Press, révèle que le produit intérieur brut (PIB) du pays devrait se contracter de 9,5% en 2021
  • 95% des travailleurs reçoivent leur salaire en livre libanaise, qui a perdu 76% de sa valeur

BEYROUTH : Les appels et les réunions politiques se sont intensifiés au Liban au cours des dernières 48 heures, une «ultime tentative» pour sauver le processus de formation d'un nouveau gouvernement, alors que la Banque mondiale s’insurge contre la réaction politique «absolument inadéquate» des autorités libanaises face aux défis actuels.

Les efforts pour former un cabinet précèdent l'arrivée jeudi d'une délégation de la Banque mondiale venue rencontrer des responsables libanais.

«La crise économique et financière figure probablement dans le top 10, voire le top 3, des crises les plus graves dans le monde depuis le milieu du XIXe siècle», prévient la Banque mondiale. Elle rappelle que, depuis fin 2019, le Liban est confronté à ses plus graves défis économiques et financiers en temps de paix, en plus de la propagation du coronavirus (à l’origine de la Covid-19) et l'explosion massive dans le port de Beyrouth l'année dernière.

«La réaction des autorités libanaises aux défis en termes de politiques publiques a jusque-là été absolument inadéquate», explique la Banque mondiale.

Toutefois, Il y avait un certain optimisme mardi, lorsque des réunions ont eu lieu avec la médiation du président du Parlement Nabih Berri qui ont abouti à l'approbation d'un gouvernement de 24 ministres au lieu de 18.

Mais le grand obstacle reste l'insistance du président Michel Aoun et de son parti politique à nommer les deux ministres chrétiens de l'Intérieur et de la Justice.

Cette position a été décrite par l'équipe du Premier ministre désigné Saad Hariri comme «une tentative de garantir le tiers de blocage en nommant deux ministres en plus des huit (qui lui sont alloués)».

Une réunion a eu lieu lundi soir entre le chef du Courant patriotique libre (CPL) Gebran Bassil, qui est le gendre d'Aoun, et des représentants du Hezbollah et du Mouvement Amal. Selon les informations divulguées, la réunion n'a abouti à aucun progrès.

Des sources font remarquer que Bassil a beaucoup insisté pour nommer des deux ministres, en particulier le ministre de l'Intérieur, refusant de laisser Hariri nommer l'un d’entre eux.

EN BREF

Le PIB du Liban est passé de près de $55 milliards en 2018 à environ $33 milliards en 2020, tandis que le PIB par habitant a chuté d'environ 40 % en dollars.

Selon le bureau des médias de Hariri, le Premier ministre désigné a informé mardi son bloc parlementaire de ses efforts pour former le prochain exécutif.

Le vice-président du Mouvement du futur, le Dr Mustafa Alloush, indique que la démission de Hariri n’est pas impossible. « Que peut dire Hariri aux gens qui attendent un nouveau gouvernement de sauvetage, alors qu'il n'a pas pu le former en raison de l'intransigeance de l'autre camp? Leur dit-il que nous avons atteint le point de l'effondrement ?», demande Alloush à Arab News. «Le parti politique d'Aoun mise sur un vide présidentiel sans gouvernement, ce qui lui permettrait de maintenir sa position».

Alloush explique que si «un cabinet est formé sans que nul ne détienne le tiers de blocage d'ici la fin de son mandat l'année prochaine, Aoun devra quitter le palais présidentiel et rentrer chez lui. Mais, dans le cas d’un gouvernement intérimaire et d'un parlement de facto illégitime, une fois le mandat (du président) terminé en mai prochain sans élections législatives, son parti et lui resteront sans aucun doute au palais présidentiel. Ils vont entraîner le pays (…) vers les perturbations dont le pays a été témoin dans les années 1980».

Le conseiller aux médias de Hariri, Hussein Al-Wajh, a révélé que le CPL «menace» d’une démission collective du Parlement. «Si les députés du CPL démissionnent, les députés des Forces libanaises leur emboîteront le pas car ils font partie de ceux qui exigent des élections législatives anticipées», a-t-il déclaré à Arab News. « Nous n'avons aucun problème à organiser des élections législatives anticipées. Cependant, l'autre camp est-il prêt pour de un scénario ?»

Un membre du bloc parlementaire du Rassemblement démocratique, le député Bilal Abdallah, estime que tous les indicateurs montrent que les efforts déployés par Berri et le chef du Parti socialiste progressiste Walid Joumblatt ont entraîné «une certaine flexibilité» dans la position de Hariri. Cependant, la réunion qui s'est tenue entre Bassil et les représentants du Hezbollah et du mouvement Amal s’est soldée par un échec, a-t-il ajouté.

«Ce qui se passe maintenant reflète un manque de conscience de la gravité de la situation au Liban et de la situation économique et sociale désastreuse que subissent les citoyens», a souligné Abdallah.

Le rapport de la Banque mondiale, selon l'Associated Press, révèle que le produit intérieur brut (PIB) du pays devrait se contracter de 9,5% en 2021, après avoir diminué de 20,3% en 2020 et de 6,7% l'année précédente.

Le PIB du Liban est passé de près de $55 milliards en 2018 à environ 33 milliards en 2020, tandis que le PIB par habitant a chuté d'environ 40 % en dollars.

«Information Internationale», qui est une institution privée d'études et de statistiques au Liban, a affirmé mardi dans un rapport que la pauvreté avait touché environ 2,365 millions de libanais.

«Près de 45% des Libanais n'ont pas de couverture médicale. La plupart des régions souffrent de coupures de courant de 10 heures par jour».

Le rapport a également révélé que 95% des travailleurs reçoivent leur salaire en livre libanaise, qui a perdu 76% de sa valeur. L'inflation a atteint 85 % en 2020, puis 26 % au cours des quatre premiers mois de 2021, portant le total à 111 %.

Le 22 octobre de l'année dernière, Hariri a été chargé de former un nouveau gouvernement à la suite de la démission du Premier ministre de l'époque, Hassan Diab, après l'explosion du port du 4 août.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


La diplomatie française estime qu'Israël doit faire preuve de « la plus grande retenue » au Liban

Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
Short Url
  • l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, Hezbollah.
  • Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

PARIS : La France a exhorté mercredi Israël « à faire preuve de la plus grande retenue » au Liban après la frappe israélienne qui a touché Beyrouth dimanche dernier, et a souligné que le démantèlement des sites militaires du Hezbollah revenait « exclusivement aux forces armées libanaises ».

Malgré un cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre après plus d'un an de guerre entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, très affaibli, qui affirme de son côté respecter l'accord.

Le week-end dernier, Israël a assuré avoir visé un entrepôt de missiles.

Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

« La France rappelle que le respect du cessez-le-feu s'impose à toutes les parties sans exception afin de garantir la sécurité des populations civiles des deux côtés de la Ligne bleue », la frontière de facto délimitée par les Nations unies, a souligné mercredi Christophe Lemoine, porte-parole du ministère français des Affaires étrangères.

« La France appelle donc Israël à faire preuve de la plus grande retenue et à se retirer au plus vite des cinq points toujours occupés sur le territoire libanais », a-t-il ajouté lors d'un point presse.

Une commission regroupant le Liban, Israël, les États-Unis, la France et l'ONU est chargée de superviser l'application du cessez-le-feu.

Beyrouth presse la communauté internationale de faire pression sur Israël pour qu'il mette fin à ses attaques et se retire des cinq positions frontalières où il s'est maintenu dans le sud du pays, malgré l'accord.


Les services de sécurité des Émirats déjouent un transfert illégal d'armes vers le Soudan

Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
Short Url
  • Les services de sécurité ont réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises 
  • Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays

ABU DHABI: Les services de sécurité des Émirats arabes unis ont déjoué une tentative de transfert illégal d'armes et d'équipements militaires aux forces armées soudanaises, a déclaré mercredi le procureur général des Émirats arabes unis, Hamad Saif al-Chamsi.

M. Al-Chamsi a déclaré que les services de sécurité avaient réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises après l'arrestation de membres d'une cellule impliquée dans la médiation non autorisée, le courtage et le trafic illicite d'équipements militaires, sans avoir obtenu les licences nécessaires auprès des autorités compétentes.

Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays.

L'avion transportait environ cinq millions de munitions de type Goryunov (54,7 x 62 mm).

Les autorités ont également saisi une partie du produit financier de la transaction en possession de deux suspects dans leurs chambres d'hôtel.

M. Al-Chamsi a déclaré que l'enquête avait révélé l'implication de membres de la cellule des chefs militaires soudanais, notamment l'ancien chef des services de renseignement Salah Gosh, un ancien officier de l'agence de renseignement, un ancien conseiller du ministre des Finances et une personnalité politique proche du général Abdel Fattah al-Burhan et de son adjoint Yasser al-Atta. Plusieurs hommes d'affaires soudanais ont également été impliqués.

Selon les enquêteurs, les membres de la cellule ont conclu un marché d'équipement militaire portant sur des fusils Kalachnikov, des munitions, des mitrailleuses et des grenades d'une valeur de plusieurs millions de dollars.

Les armes ont été transférées de l'armée soudanaise à une société d'importation des Émirats arabes unis en utilisant la méthode de transfert des HAWALADARS.

La transaction a été facilitée par l'intermédiaire d'une société appartenant à un membre fugitif de la cellule travaillant pour les forces armées soudanaises, en coordination avec le colonel Othman al-Zubair, responsable des opérations financières au sein de l'armée soudanaise.

De faux contrats et de fausses factures commerciales ont été utilisés pour prétendre que les paiements concernaient un contrat d'importation de sucre.

L'enquête a conclu que ces transactions avaient été effectuées à la demande du comité d'armement des forces armées soudanaises, présidé par Al-Burhan et son adjoint Al-Atta, en toute connaissance de cause et avec leur approbation. Les membres de la cellule ont été directement chargés de négocier et de finaliser les transactions par Ahmed Rabie Ahmed al-Sayed, une personnalité politique proche du commandant en chef soudanais et responsable de la délivrance des certificats et des approbations des utilisateurs finaux.

Les enquêteurs ont confirmé que Salah Gosh jouait un rôle central dans la gestion du trafic illégal d'équipements militaires aux Émirats arabes unis, en coordination avec d'autres membres de la cellule.

Le groupe a réalisé une marge bénéficiaire de 2,6 millions de dollars (1 dollar = 0,88 euro) par rapport à la valeur réelle des deux transactions, qu'il s'est répartie entre lui et plusieurs complices. La part de Gosh a été retrouvée en possession du suspect Khalid Youssef Mukhtar Youssef, ancien officier de renseignement et ex-chef de cabinet de Gosh.

La cargaison saisie était arrivée à l'aéroport des Émirats arabes unis à bord d'un avion privé en provenance d'un pays étranger.

L'avion s'était posé pour faire le plein et avait officiellement déclaré qu'il transportait un lot de fournitures médicales.

Cependant, la cargaison militaire a été découverte sous la supervision du ministère public, sur la base de mandats judiciaires émis par le procureur général.

Les autorités ont également saisi des copies des contrats relatifs aux deux transactions, de faux documents d'expédition, ainsi que des enregistrements audio et des messages échangés entre les membres de la cellule.

L'enquête a permis de découvrir plusieurs sociétés appartenant à un homme d'affaires soudano-ukrainien, dont une opérant aux Émirats arabes unis.

Ces sociétés ont fourni à l'armée soudanaise des armes, des munitions, des grenades et des drones, en collaboration avec les membres de la cellule et le responsable financier de l'armée.

L'une des sociétés figure sur la liste des sanctions américaines.

Les enquêtes en cours ont révélé que les intérêts financiers et les profits du groupe sont étroitement liés à la poursuite du conflit interne au Soudan.

Le procureur général a souligné que cet incident représentait une grave atteinte à la sécurité nationale des Émirats arabes unis, en faisant de leur territoire une plateforme pour le trafic illégal d'armes à destination d'un pays en proie à des troubles civils, en plus de constituer des infractions pénales punissables par la loi.

Il a conclu en déclarant que le ministère public poursuivait ses procédures d'enquête en vue de déférer les suspects à une procédure judiciaire d'urgence.

Les résultats définitifs seront annoncés à la fin de l'enquête.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Retailleau engage la procédure de dissolution d'Urgence Palestine

Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Short Url
  • A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine.
  • Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

PARIS : A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine, ainsi que de Lyon Populaire, qui appartient à l'ultra droite, après avoir lancé mardi celle du groupe antifasciste La Jeune Garde.

Invité de CNews/Europe 1, le ministre de l'Intérieur a justifié la dissolution d'Urgence Palestine en affirmant qu'il fallait « taper sur les islamistes ». « L'islamisme est une idéologie qui essaie d'instrumentaliser une religion. Il y a une défiguration de la foi », a-t-il dit.

« Il ne faut pas défigurer la juste cause des Palestiniens », a poursuivi M. Retailleau, qui a insisté sur le fait que « beaucoup de nos compatriotes musulmans professent une foi parfaitement compatible avec les valeurs de la République ».

Créé au lendemain de l'attaque sans précédent du Hamas dans le sud d'Israël le 7 octobre 2023, qui a déclenché la guerre à Gaza, le collectif Urgence Palestine dit rassembler « des citoyens, des organisations et mouvements associatifs, syndicaux et politiques mobilisés pour l'auto-détermination du peuple palestinien ». 

Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

« À l'heure où le peuple palestinien est confronté au génocide, à la famine, où les Israéliens cherchent à détruire et à anéantir le peuple palestinien, que fait le gouvernement français ? Il veut dissoudre notre collectif, c'est insupportable », a réagi Omar Al Soumi, l'un des militants d'Urgence Palestine.

« C'est la réalité d'une France complice du génocide », a-t-il accusé dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux.

Urgence Palestine a reçu de nombreux messages de soutien de la part d'organisations de l'extrême gauche et de la gauche radicale. 

« Non à la dissolution d'Urgence Palestine », a écrit sur Instagram le Nouveau Parti Anticapitaliste, dénonçant « des prétextes pour faire taire les voix solidaires avec la Palestine ! ».

L'eurodéputée insoumise Rima Hassan a également critiqué les dissolutions engagées contre la Jeune Garde et Urgence Palestine.

« La dérive autoritaire et fasciste de Macron est aussi réelle, tangible et concrète », a-t-elle réagi sur X.

Tsedek!, qui se présente comme un « collectif juif décolonial », a aussi apporté son soutien à ces deux organisations.

« Le gouvernement qui appelle à la dissolution d’Urgence Palestine, c’est la République qui reprend ses droits et réaffirme que l’antisémitisme ne passera pas en France », s'est au contraire félicitée Sarah Aizenman, présidente du collectif « Nous vivrons », auprès de l'AFP. 

« Cette organisation ne défend pas les droits des Palestiniens, elle soutient une organisation terroriste », a accusé Mme Aizenman.

Les annonces de procédures de dissolution contre La Jeune Garde et Urgence Palestine interviennent à la veille des rassemblements du 1er-Mai et pourraient tendre le climat des manifestations, notamment à Paris, selon un haut responsable de la police.

Le ministre de l'Intérieur et le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, ont par avance prévenu qu'aucun débordement ne serait toléré.

Environ 15 000 personnes sont attendues jeudi pour la manifestation parisienne.