En Afrique du Nord, des journalistes de plus en plus muselés

«Le mode opératoire au Maroc est de lancer une kyrielle d'accusations criminelles contre le journaliste ciblé, tandis que les autorités algériennes préfèrent recourir à des délits que le code pénal définit de façon très vague». (Photo, AFP)
«Le mode opératoire au Maroc est de lancer une kyrielle d'accusations criminelles contre le journaliste ciblé, tandis que les autorités algériennes préfèrent recourir à des délits que le code pénal définit de façon très vague». (Photo, AFP)
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Publié le Lundi 19 juillet 2021

En Afrique du Nord, des journalistes de plus en plus muselés

  • Au Maroc, Soulaimane Raissouni, le rédacteur en chef d'un journal indépendant aux opinions critiques, a été condamné la semaine passée à cinq ans de prison
  • De son côté, Alger, a censuré plusieurs médias indépendants et condamné des journalistes

TUNIS: Procès expéditifs ou à huis clos, lourdes peines de prison: plusieurs journalistes ont été pris ces derniers mois dans l'étau judiciaire au Maroc et en Algérie, frères ennemis du Maghreb qui referment ensemble une brève embellie de liberté d'expression, selon les défenseurs des droits humains.

"Ce sont deux systèmes déstabilisés qui réagissent mal et sont en train de s'enfermer de façon surprenante dans une spirale" de répression, estime le Français Christophe Deloire, directeur général de l'ONG Reporters sans Frontières.

D'un côté, Alger, qui fait face depuis 2019 à une contestation inédite, marquée au début par une certaine libération de parole, a censuré plusieurs médias indépendants et condamné des journalistes.

Parmi eux, Adel Sayad, journaliste d'une radio locale, s'est vu infliger samedi deux ans de prison ferme pour des publications sur Facebook.

En septembre dernier, le journaliste reconnu Khaled Drareni (en photo), fondateur d'un site d'information indépendant et correspondant de chaînes européennes, avait été condamné à deux ans de prison pour "incitation à attroupement non armé" après avoir couvert une manifestation du mouvement prodémocratie Hirak.

"Dans l'Algérie de 2021, un mot peut vous mener en prison, on doit être attentif à tout ce qu'on dit ou écrit", déplore M. Drareni, qui a bénéficié d'une grâce présidentielle et attend un procès en cassation.

Autre figure emblématique, Rabah Karèche, journaliste à Tamanrasset (sud), incarcéré depuis trois mois pour avoir rendu compte d'un mouvement de protestation de Touaregs contre l'expropriation de leurs terres.

Critique des États-Unis

Au Maroc, Soulaimane Raissouni, le rédacteur en chef d'un journal indépendant aux opinions critiques, a été condamné la semaine passée à cinq ans de prison.

La justice doit se prononcer lundi sur le sort d'un autre journaliste, Omar Radi, également connu pour sa liberté de ton.

Comme d'autres confrères avant eux, les deux sont poursuivis  pour des affaires de mœurs, le premier pour "agression sexuelle", le second pour "viol".

Leurs soutiens dénoncent des procès "politiques" et leurs avocats ont épinglé de multiples irrégularités: écoutes illégales, enquêtes policières à charge, audiences non contradictoires, etc. 

Les autorités, elles, assurent que les poursuites n'ont rien à voir avec leur métier et mettent en avant "l'indépendance de la justice". Les plaignants nient de leur côté toute "instrumentalisation".

"Le mode opératoire au Maroc est de lancer une kyrielle d'accusations criminelles contre le journaliste ciblé, tandis que les autorités algériennes préfèrent recourir à des délits que le code pénal définit de façon très vague", détaillait l'été dernier l'ONG Human Rights Watch.

Dans une déclaration d'une fermeté peu habituelle envers son allié marocain, le département d'État américain a averti lundi qu'il "suivait" le procès de M. Radi et a exprimé sa "déception" après la lourde condamnation de M. Raissouni.

Cette procédure "est en contradiction avec les promesses fondamentales du système marocain sur des procès équitables (...), et avec le calendrier de réformes de sa majesté le roi Mohammed VI", a déclaré le porte-parole de la diplomatie américaine, Ned Price.

L'Algérie s'est de son côté retrouvée pointée du doigt en 2020 par deux résolutions successives du Parlement européen, soulignant "la détérioration de la situation des droits de l'Homme" et mentionnant le cas de Khaled Drareni.

Signe d'une fermeture grandissante, entre les difficultés d'accréditation et les contrôles étroits sur le terrain, de moins en moins de correspondants étrangers sont présents en Algérie et au Maroc.

"Cela discrédite ces pays et risque de porter atteinte à leur image, voire à certaines relations diplomatiques", a averti M. Deloire.

Exil en France

Par opposition, la Tunisie, jeune démocratie se targuant d'une grande liberté de parole, caracole au 73e rang du classement RSF de la liberté de la presse, loin devant le Maroc (136) et l'Algérie (146), et Tunis s'en prévaut dans les forums internationaux.

Pourtant, au Maroc comme en Algérie, le pouvoir a conscience d'une aspiration au changement, et promis des réformes. Mais "il y a loin des annonces à la réalité", déplore M. Deloire.

En février, un collectif incluant des journalistes marocains exilés avait accusé Rabat de vouloir "museler le journalisme d'investigation".

Pendant que les procès se poursuivent, certains journalistes se sont tournés vers les instances internationales.

Le groupe de travail de l'ONU sur la détention arbitraire a ainsi été saisi sur les cas de MM. Radi et Raissouni.

Le caricaturiste algérien Nime, condamné fin 2019 à de la prison pour un dessin mettant en scène le chef de l'armée choisissant un président, a quant à lui fini par s'exiler récemment en France.


Attaques israéliennes à Doha: le Qatar s'entretient avec la présidente de la CPI

L'émir du Qatar, Cheikh Tamim bin Hamad Al Thani, préside le sommet sur l'urgence arabo-islamique 2025 à Doha, au Qatar. (QNA/AFP)
L'émir du Qatar, Cheikh Tamim bin Hamad Al Thani, préside le sommet sur l'urgence arabo-islamique 2025 à Doha, au Qatar. (QNA/AFP)
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  • Le Qatar explore des recours légaux contre Israël après une frappe à Doha ayant tué plusieurs membres du Hamas et un agent de sécurité qatari
  • Bien que simple observateur à la CPI, Doha intensifie ses démarches diplomatiques et judiciaires pour demander des comptes à Israël

DOHA: Un haut représentant du Qatar a rencontré mercredi la présidente de la Cour pénale internationale (CPI) alors que Doha cherche à engager des poursuites contre Israël après des frappes sans précédent sur son territoire, selon un communiqué du ministère des Affaires étrangères qatari.

Mohammed Al-Khulaifi, qui a été chargé d'entreprendre d'éventuelles démarches légales après l'attaque israélienne, s'est entretenu avec la juge Tomoko Akane à La Haye, a indiqué le ministère.

Le pays du Golfe explore "toutes les voies juridiques et diplomatiques disponibles pour s'assurer que les responsables de l'attaque israélienne contre le Qatar rendent des comptes", a précisé jeudi auprès de l'AFP un responsable qatari, s'exprimant sous couvert d'anonymat en raison de la sensibilité des discussions.

Le Qatar, en tant qu'État observateur à la CPI, ne peut pas saisir directement la cour.

La frappe meurtrière menée la semaine dernière à Doha, visant des dirigeants du mouvement islamiste palestinien Hamas, a déclenché une vague de critiques à l'international, les Nations unies condamnant une "violation choquante du droit international". Elle a aussi valu à Israël une rare réprobation du président américain Donald Trump.

Israël et le Qatar, pays médiateur dans les négociations en vue d'une trêve à Gaza, sont tous deux alliés des États-Unis.

Le Hamas a affirmé que ses principaux dirigeants politiques, installés au Qatar avec l'aval de Washington depuis 2012, avaient survécu à l'attaque qui a tué cinq de ses membres, ainsi qu'un membre des forces de sécurité qataries.

À l'issue d'un sommet extraordinaire lundi à Doha, la Ligue arabe et l'Organisation de la coopération islamique ont appelé "tous les Etats (...) à revoir les relations diplomatiques et économiques avec Israël et à engager des poursuites à son encontre".

En 2024, la CPI a émis des mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, pour crimes de guerre et de crimes contre l'humanité à Gaza.

L'offensive israélienne, qui a fait plus de 65.000 morts dans le territoire palestinien selon les chiffres du Hamas, fiables selon l'ONU, a été déclenchée par l'attaque sans précédent du mouvement islamiste le 7 octobre 2023 sur le sol israélien.

La CPI a également émis des mandats d'arrêt contre l'ancien ministre israélien de la Défense Yoav Gallant et le commandant militaire du Hamas Mohammed Deif, tué depuis par Israël.


L'Arabie saoudite et le Pakistan signent un pacte de défense mutuelle

Le chef de l'armée pakistanaise, le maréchal Syed Asim Munir (à droite), le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane (2e à droite), le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif (2e à gauche) et le ministre saoudien de la Défense photographiés après la signature d'un pacte de défense historique à Riyad, le 17 septembre 2025. (PMO)
Le chef de l'armée pakistanaise, le maréchal Syed Asim Munir (à droite), le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane (2e à droite), le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif (2e à gauche) et le ministre saoudien de la Défense photographiés après la signature d'un pacte de défense historique à Riyad, le 17 septembre 2025. (PMO)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane reçoit le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif au palais d'Al-Yamamah à Riyad, mercredi. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane reçoit le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif au palais d'Al-Yamamah à Riyad, mercredi. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane reçoit le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif au palais d'Al-Yamamah à Riyad, mercredi. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane reçoit le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif au palais d'Al-Yamamah à Riyad, mercredi. (SPA)
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  • Le pacte marque une étape majeure dans le renforcement des liens sécuritaires et économiques entre deux alliés de longue date
  • L'accord de Riyad transforme des décennies de coopération militaire en un engagement sécuritaire contraignant

​​​​​ISLAMABAD : Le Pakistan et l’Arabie saoudite ont signé mercredi un « Accord stratégique de défense mutuelle », s’engageant à considérer toute agression contre l’un des deux pays comme une attaque contre les deux, renforçant ainsi la dissuasion conjointe et solidifiant des décennies de coopération militaire et sécuritaire.

Cet accord intervient moins de deux semaines après les frappes aériennes israéliennes à Doha visant des dirigeants du Hamas, un événement ayant intensifié les tensions régionales et souligné l’urgence pour les États du Golfe de renforcer leurs partenariats sécuritaires.

L'accord de Riyad marque également une volonté des deux gouvernements de formaliser leurs liens militaires de longue date en un engagement contraignant.

Le pacte a été signé lors de la visite officielle du Premier ministre Shehbaz Sharif à Riyad, où il a rencontré le prince héritier et Premier ministre Mohammed ben Salmane au palais Al-Yamamah. Accompagnés de ministres et responsables militaires de haut niveau, les deux dirigeants ont passé en revue ce que le bureau de Sharif a qualifié de relation « historique et stratégique » entre les deux nations, en discutant également des développements régionaux.

« L’accord stipule que toute agression contre l’un des deux pays sera considérée comme une agression contre les deux », a déclaré le communiqué conjoint.

Il décrit le pacte comme un reflet de l’engagement commun des deux gouvernements à renforcer la coopération en matière de défense et à œuvrer pour la sécurité et la paix dans la région et dans le monde.

Depuis des décennies, l’Arabie saoudite et le Pakistan entretiennent des liens étroits sur les plans politique, militaire et économique. Le Royaume accueille plus de 2,5 millions de ressortissants pakistanais — la plus grande communauté d’expatriés pakistanais — et a souvent soutenu financièrement Islamabad lors de crises économiques. La coopération en matière de défense a inclus des formations, des achats d’armes et des exercices militaires conjoints.

Le nouvel accord formalise cette coopération sous la forme d’un engagement de défense mutuelle, une étape qui, selon de nombreux analystes, place cette relation au même niveau que d’autres partenariats stratégiques dans la région.

Bien que le communiqué n’ait pas précisé les mécanismes de mise en œuvre, il a souligné que l’accord visait à développer les aspects de la coopération en matière de défense et à renforcer la dissuasion conjointe face à toute agression.

Cette visite intervient également alors que le Pakistan cherche à renforcer ses liens avec les États du Golfe, dans un contexte de défis économiques persistants.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.pk


La reconnaissance de la Palestine, message à Israël sur «les illusions de l'occupation» 

La prochaine reconnaissance de la Palestine par plusieurs Etats dont la France en marge de l'Assemblée générale de l'ONU adresse un message claire à Israël sur les "illusions" de l'occupation, a déclaré mercredi à l'AFP la ministre des Affaires étrangères palestinienne Varsen Aghabekian.(AFP)
La prochaine reconnaissance de la Palestine par plusieurs Etats dont la France en marge de l'Assemblée générale de l'ONU adresse un message claire à Israël sur les "illusions" de l'occupation, a déclaré mercredi à l'AFP la ministre des Affaires étrangères palestinienne Varsen Aghabekian.(AFP)
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  • "La reconnaissance n'est pas symbolique. C'est quelque chose de très important car cela envoie un message très clair aux Israéliens sur leurs illusions de [vouloir] continuer leur occupation pour toujours"
  • Cela envoie aussi "un message clair aux Palestiniens : 'nous soutenons votre droit à l'autodétermination'" et "cela nous donne un élan pour l'avenir, car nous allons construire dessus"

RAMALLAH: La prochaine reconnaissance de la Palestine par plusieurs Etats dont la France en marge de l'Assemblée générale de l'ONU adresse un message claire à Israël sur les "illusions" de l'occupation, a déclaré mercredi à l'AFP la ministre des Affaires étrangères palestinienne Varsen Aghabekian.

"La reconnaissance n'est pas symbolique. C'est quelque chose de très important car cela envoie un message très clair aux Israéliens sur leurs illusions de [vouloir] continuer leur occupation pour toujours", a déclaré Mme Aghabekian, en référence à l'occupation de la Cisjordanie et de la bande de Gaza par Israël.

Cela envoie aussi "un message clair aux Palestiniens : 'nous soutenons votre droit à l'autodétermination'" et "cela nous donne un élan pour l'avenir, car nous allons construire dessus", a-t-elle ajouté.