L'avenir de Chypre entre les visions contradictoires de la Turquie et de l'UE

L'apparition d'Erdogan lors d'un défilé militaire le 20 juillet dans la partie nord de la capitale, Nicosie, aurait pu se passer sans incident s'il n'avait pas réitéré sa position controversée sur le différend chypriote. (Photo, AFP)
L'apparition d'Erdogan lors d'un défilé militaire le 20 juillet dans la partie nord de la capitale, Nicosie, aurait pu se passer sans incident s'il n'avait pas réitéré sa position controversée sur le différend chypriote. (Photo, AFP)
Des touristes sont évacués de Chypre avec des camions de l'armée britannique à Nicosie, le 27 juillet 1974. (Photo, AFP/Archives)
Des touristes sont évacués de Chypre avec des camions de l'armée britannique à Nicosie, le 27 juillet 1974. (Photo, AFP/Archives)
Une photo d'archive datée de 1974 montre des soldats chypriotes grecs pris comme prisonniers de guerre par des soldats turcs qui ont envahi Chypre à la suite d'une effusion de sang ethnique qui a éclaté dans l'île méditerranéenne. (Photo, AFP/Archives)
Une photo d'archive datée de 1974 montre des soldats chypriotes grecs pris comme prisonniers de guerre par des soldats turcs qui ont envahi Chypre à la suite d'une effusion de sang ethnique qui a éclaté dans l'île méditerranéenne. (Photo, AFP/Archives)
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Publié le Dimanche 25 juillet 2021

L'avenir de Chypre entre les visions contradictoires de la Turquie et de l'UE

  • Le président turc Erdogan a réitéré son appel d'une solution à deux États lors d'une récente visite dans le nord de Chypre
  • Le Conseil de sécurité de l'ONU a réagi en condamnant «la nouvelle réouverture d'une partie de la zone clôturée» de la ville abandonnée de Varosha

ANKARA / DUBAÏ : le plus long «conflit gelé» d'Europe est à nouveau sous le feu des projecteurs suite à la visite dans le nord de Chypre du président turc Recep Tayyip Erdogan, au cours de laquelle il a réitéré son appel d'une solution à deux États et soutenu les initiatives visant à reconstruire un ville fantôme située dans la zone tampon militaire de l'île. 

L'apparition d'Erdogan lors d'un défilé militaire le 20 juillet dans la partie nord de la capitale, Nicosie, aurait pu se passer sans plus de cérémonie s'il n'avait pas réitéré sa position controversée sur le différend chypriote avec des propos repris et développés par son allié, le leader Turc chypriote, Ersin Tatar. 

Si l'histoire peut nous servir de guide, Chypre défie les solutions toutes prêtes.

Les tentatives de résolution du conflit ont subi un coup dur en 2004 lorsque les Chypriotes grecs ont voté contre une proposition de l'ONU visant à réunir les parties turque et grecque de la nation, tandis que les Chypriotes turcs l'ont approuvée. Trois Chypriotes grecs sur quatre ont rejeté le plan présenté par Kofi Annan, le chef de l'ONU, qui aurait donné à des dizaines de milliers de Chypriotes le droit de retourner dans les maisons qu'ils ont perdues en 1974.

C'était l'année où les troupes turques occupaient le tiers du nord de Chypre en réaction à un coup d'État avorté organisé par une junte militaire à Athènes qui visait à unir l'île à la Grèce. La ville fantôme qui fait l'objet d'une réouverture controversée est Varosha, une banlieue de Famagouste, autrefois la principale station balnéaire de l'île méditerranéenne dont la population chypriote grecque a fui depuis l'invasion turque. 

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Les espoirs naissants d'un règlement parrainé par l'ONU au lendemain de l'invasion avaient été anéantis par la création unilatérale en 1983 de la République turque de Chypre du Nord (RTCN), reconnue uniquement par la Turquie. Alors que Chypre est en grande partie en paix depuis la partition de facto de 1974, le «conflit gelé» s'est avéré si insoluble qu'il est devenu le «cimetière des diplomates».

Maintenant, en plus de jouer la carte nationaliste pour faire plaisir à leurs électeurs nationaux, Erdogan et les leaders chypriotes turcs pourraient bien signaler leur perte de confiance dans le temps et les négociations pour mettre fin à l'isolement international du nord séparatiste et à l'embargo économique vieux de plusieurs décennies.

Pour commencer, ils ont l'intention de convertir une partie de Varosha en site de réinstallation et de permettre aux gens de récupérer les propriétés libérées lors de l'invasion de 1974. En novembre 2020, les autorités chypriotes turques ont rouvert une petite zone de Varosha. Maintenant, Erdogan affirme qu' «une nouvelle ère commencera à Maras (le nom turc de Varosha) qui profitera à tout le monde».

Lors de sa dernière visite dans le nord de Nicosie, Erdogan, qui, en tant que Premier ministre turc en 2004, avait soutenu le plan de réunification d'Annan, a affirmé qu'Ankara n'avait pas «50 ans à perdre encore».

Mercredi, dans un discours vidéo aux membres de son parti l’AKP, Erdogan a déclaré : «Nous ferons tous les efforts possibles pour assurer la reconnaissance de l'État chypriote turc dès que possible. Toutes les autres offres et propositions ne sont plus valables».

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Erdogan s'est engagé à ne faire aucune « concession » alors qu'il faisait pression pour une solution à deux États pour Chypre, lors d'une visite sur l'île divisée de la Méditerranée orientale. (Photo, AFP)

Erdogan s'est penché sur les détails des plans de régénération, affirmant qu'un premier 3,5 % de Varosha, dont les hôtels, les résidences et les magasins abandonnés sous contrôle turc, serait retiré de son statut militaire.

Une version antérieure de la zone tampon où se trouve Varosha a été créée en 1964 par une force de maintien de la paix des Nations Unies en réponse à une vague de violence intercommunautaire. À la suite de l'invasion turque de 1974, cette soi-disant Ligne verte est devenue la ligne de partage de facto.

Tandis qu'environ 165 000 Chypriotes grecs ont fui vers le sud, environ 45 000 Chypriotes turcs se sont installés dans le nord, où ils ont établi leur propre administration indépendante. Malgré une résolution unanime du Conseil de sécurité de l'ONU, la Turquie a refusé de retirer ses troupes de Chypre.

Selon les résolutions de l'ONU, Varosha devrait être remis à l'administration de l'ONU et les propriétés vacantes de la ville devraient être restituées à leurs propriétaires légaux. Dans un communiqué publié vendredi, le Conseil de sécurité a condamné «la nouvelle réouverture d'une partie de la zone clôturée de Varosha» et a exprimé «son profond regret concernant ces actions unilatérales».

 

EN CHIFFRES

 * 1 281 506 – La population totale actuelle de Chypre

Certains analystes pensent que la rhétorique d'Erdogan est conçue pour encourager les Chypriotes grecs à traiter avec la partie turque sur un pied d'égalité.

Ahmet Sozen, professeur de sciences politiques et de relations internationales à l'Université de la Méditerranée orientale à Chypre du Nord, a indiqué que les tactiques de pression pourraient pousser les Chypriotes grecs à entamer des négociations, bien que progressivement.

«C'est une décision qui change la donne. Ce n'est qu'un début, car les Chypriotes grecs ne l'accepte pas», a-t-il déclaré à Arab News, «Mais, en fin de compte, il y a 300 réclamations individuelles de Chypriotes grecs sur leurs propriétés dans cette région et cela devrait encourager le côté Grec pour négocier avec Ankara sur ces droits de propriété».

Sozen croit que la Turquie a l'intention d'utiliser la question de Varosha pour lancer les futures séries de négociations avec une main plus forte dans le but de parvenir à une solution à deux États.

«Cette décision vise également à empêcher des milliers de requêtes devant la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) à Strasbourg par ceux qui revendiquent leurs droits de propriété à Varosha. En ouvrant une partie de la zone militaire à un usage civil, cela donnera à la Commission des biens immobiliers (IPC) des Chypriotes turque le pouvoir de traiter la question de l'indemnisation», a-t-il expliqué. 

L'IPC est la seule institution chypriote turque reconnue par la CEDH, qui a abandonné plusieurs demandes déposées par des Chypriotes grecs déplacés après avoir été créée pour obtenir réparation de ces griefs. Si Varosha retourne partiellement à un usage civil, l'IPC sera probablement chargé de résoudre les problèmes de propriété.

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Des gens traversent le point de passage de Ledras dans la capitale chypriote Nicosie depuis la partie sud vers la République turque autoproclamée de Chypre du Nord (RTCN), le 4 juin 2021, alors que le pays ouvre ses points de passage à la suite de l'assouplissement des restrictions dans l’île divisée au milieu de la pandémie de la Covid-19. (Photo, AFP)

Mais comme l'a démontré la condamnation du Conseil de sécurité, la Turquie fait face à un fort recul de la part des alliés de l'OTAN, des membres de l'UE et même de l'ONU. Antony Blinken, le secrétaire d'État américain, qui a discuté des derniers développements avec son homologue chypriote grec, Nikos Christodoulides, a qualifié la décision de Varosha d’«inacceptable et incompatible» avec les résolutions de l'ONU.

Un porte-parole du secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, s'est dit «profondément préoccupé» et a appelé «toutes les parties à s'abstenir d'actions unilatérales qui provoquent des tensions».

De son côté, Nicos Anastasiades, le président de Chypre, a qualifié toute tentative d'ouverture de Varosha d’«illégale et inacceptable». Si la véritable préoccupation de la Turquie était de rendre les propriétés à leurs propriétaires légaux, «Ankara aurait dû adopter des résolutions de l'ONU et remettre la ville à l'ONU,  permettant aux propriétaires de revenir dans des conditions plus sécuritaires», a-t-il soutenu.

Dimitris Tsarouhas, expert à l'Université Bilkent, à Ankara, décrit la nouvelle approche de la question de Varosha comme «étrange mais pas inattendue», car ce n'est «pas vraiment une décision chypriote turque mais une décision purement turque».

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Des hôtels, des restaurants et des bâtiments résidentiels à l'abandon restent inhabités dans la ville clôturée au bord de mer de Varosha, dans le nord de l'île méditerranéenne divisée de Chypre, sous contrôle turc, le 14 octobre 2020. (Photo, AFP/Archives)

«L'enclave avait été abandonnée par ses propriétaires chypriotes grecs en 1974 mais ils vivent depuis dans l'espoir d'y retourner, notamment parce que la Turquie n'a pas envoyé de colons», a signalé Tsarouhas.

«Je suppose que cette petite réouverture vise à inciter les Chypriotes grecs à revenir, ou du moins à revendiquer leur propriété par l'intermédiaire des autorités chypriotes turques, légitimant ainsi en partie la République turque de Chypre du Nord (RTCN)». 

Notant que l'UE et les États-Unis « ont tous deux été explicites en condamnant une décision contredisant des décennies de travail de l'ONU sur Chypre», a affirmé Tsarouhas : «Il me semble que l'objectif d'Erdogan est de consolider la coalition nationaliste à l’intérieur de la Turquie et de montrer au monde qu'il croit vraiment à la politique à deux États qu'il a élaborée pour la première fois il y a quelques années». 

Autrefois célèbre comme terrain de jeu des célébrités hollywoodiennes, Varosha pourrait encore sortir des ruines de la guerre. Mais pour l'instant, son nouveau souffle est principalement une monnaie d'échange dans un jeu géopolitique.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Gaza: Bruxelles propose de taxer des biens importés d'Israël dans l'UE et de sanctionner deux ministres

La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu.  "Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas. (AFP)
La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu. "Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas. (AFP)
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  • L'exécutif européen avait déjà proposé en août 2024 de sanctionner ces deux ministres. Une tentative vaine, faute d'accord au sein des 27 Etats membres
  • Ces sanctions pour être adoptées requièrent l'unanimité des pays de l'UE

BRUXELLES: La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu.

"Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas.

Les mesures commerciales devraient, si elles étaient adoptées par les pays de l'UE, renchérir de quelque 227 millions d'euros le coût de certaines importations israéliennes, principalement d'origine agricole.

La Commission européenne a également proposé de sanctionner deux ministres israéliens d'extrême droite, Itamar Ben-Gvir, chargé de la Sécurité nationale, et Bezalel Smotrich chargé des Finances, selon un responsable de l'UE.

L'exécutif européen avait déjà proposé en août 2024 de sanctionner ces deux ministres. Une tentative vaine, faute d'accord au sein des 27 Etats membres. Ces sanctions pour être adoptées requièrent l'unanimité des pays de l'UE.

"Tous les États membres conviennent que la situation à Gaza est intenable. La guerre doit cesser", a toutefois plaidé mercredi Mme Kallas. Ces propositions seront sur la table des représentants des 27 Etats membres dès mercredi.

Les sanctions dans le domaine commercial ne nécessitent que la majorité qualifiée des Etats membres. Mais là encore, un accord sera difficile à obtenir, jugent des diplomates à Bruxelles.

Des mesures beaucoup moins ambitieuses, également présentées par la Commission européenne il y a quelques semaines, n'avaient pas trouvé de majorité suffisante pour être adoptées. Avait notamment fait défaut le soutien de pays comme l’Allemagne ou l'Italie.

Les exportations israéliennes vers l'UE, son premier partenaire commercial, ont atteint l'an dernier 15,9 milliards d'euros.

Seuls 37% de ces importations seraient concernés par ces sanctions, si les 27 devaient donner leur feu vert, essentiellement dans le secteur agro-alimentaire.


Trump s'en prend à des magistrats après l'assassinat de Charlie Kirk

Cette capture d'écran provenant de la diffusion en direct du tribunal de l'Utah montre Tyler Robinson, suspect dans le meurtre du militant politique Charlie Kirk, assistant à une audience à distance depuis sa cellule de prison à Provo, dans l'Utah, le 16 septembre 2025. (AFP)
Cette capture d'écran provenant de la diffusion en direct du tribunal de l'Utah montre Tyler Robinson, suspect dans le meurtre du militant politique Charlie Kirk, assistant à une audience à distance depuis sa cellule de prison à Provo, dans l'Utah, le 16 septembre 2025. (AFP)
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  • Dans le viseur du locataire de la Maison Blanche, sur son réseau Truth, se trouvent deux de ses cibles privilégiées : l'ex-procureur spécial Jack Smith, et le juge Juan Merchan qui avait présidé son procès pour des paiements cachés à une star du X
  • Donald Trump reproche à Jack Smith d'avoir ouvert il y a quelques années une enquête sur Turning Point, le mouvement créé par l'influenceur ultraconservateur américain Charlie Kirk, assassiné le 10 septembre

WASHINGTON: Le président américain Donald Trump a de nouveau stigmatisé mercredi des magistrats qui l'avaient poursuivi et jugé durant le mandat de Joe Biden, prenant prétexte du récent assassinat de l'influenceur ultraconservateur Charlie Kirk.

Dans le viseur du locataire de la Maison Blanche, sur son réseau Truth, se trouvent deux de ses cibles privilégiées : l'ex-procureur spécial Jack Smith, et le juge Juan Merchan qui avait présidé son procès pour des paiements cachés à une star du X.

Donald Trump reproche à Jack Smith d'avoir ouvert il y a quelques années une enquête sur Turning Point, le mouvement créé par l'influenceur ultraconservateur américain Charlie Kirk, assassiné le 10 septembre.

"Pourquoi le merveilleux Turning Point a-t-il été mis sous ENQUÊTE par le +Dérangé+ Jack Smith et l'administration Biden Corrompue et Incompétente ?", s'interroge Donald Trump dans un message sur Truth.

"Ils ont essayé de forcer Charlie, ainsi que de nombreuses autres personnes et mouvements, à cesser leurs activités. Ils ont instrumentalisé le ministère de la Justice contre les opposants politiques de Joe Biden, y compris MOI!", s'offusque-t-il encore.

Jack Smith, lui-même visé par une enquête administrative depuis le retour au pouvoir de Donald Trump, avait été nommé procureur spécial en 2022.

Il avait lancé des poursuites fédérales contre Donald Trump, pour tentatives illégales d'inverser les résultats de l'élection de 2020 et rétention de documents classifiés après son départ de la Maison Blanche.

Les poursuites avaient été abandonnées après la réélection de Trump, en vertu de la tradition consistant à ne pas poursuivre un président en exercice. Jack Smith avait ensuite démissionné du ministère de la Justice.

Sans jamais le citer nommément, le président Trump s'en prend également sur le réseau Truth à Juan Merchan, qui a présidé le procès Stormy Daniels. Le président avait été reconnu coupable de 34 chefs d'accusation, pour des paiements cachés de 130.000 dollars à l'ex-star du X.

Donald Trump exprime le souhait que le juge "corrompu" paie "un jour un prix très élevé pour ses actions illégales".

Depuis l'assassinat de Charlie Kirk, le camp républicain redouble de véhémence contre les démocrates et organisations progressistes, accusés de promouvoir la violence politique.

"La gauche radicale a causé des dégâts énormes au pays", a affirmé le président républicain mardi, avant son départ au Royaume-Uni. "Mais nous y remédions".

Selon le Washington Post, un élu républicain du Wisconsin a déposé une proposition de loi visant à bloquer les fonds fédéraux aux organisations employant des personnes "qui tolèrent et célèbrent la violence politique".

Le New York Times précise pour sa part que sont notamment dans le viseur l'Open Society Foundation du milliardaire George Soros ainsi que la Ford Foundation, qui toutes deux financent des organisations de gauche.


Pompe exceptionnelle pour la deuxième visite d'Etat de Trump au Royaume-Uni

Le président américain Donald Trump (C) et la première dame américaine Melania Trump débarquent d'Air Force One après avoir atterri à l'aéroport de Stansted, dans l'est de l'Angleterre, le 16 septembre 2025. (AFP)
Le président américain Donald Trump (C) et la première dame américaine Melania Trump débarquent d'Air Force One après avoir atterri à l'aéroport de Stansted, dans l'est de l'Angleterre, le 16 septembre 2025. (AFP)
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  • Donald Trump entame une visite d'État de deux jours au Royaume-Uni, marqué par un faste inédit à Windsor malgré des manifestations annoncées à Londres
  • Alors que le gouvernement de Keir Starmer tente de tirer profit de cette visite par des annonces d’investissements technologiques majeurs, la rencontre est aussi ternie par l’affaire Epstein

LONDRES: Tour en calèche, garde d'honneur géante, défilé aérien inédit: le Royaume-Uni sort le grand jeu pour la deuxième visite d'Etat de Donald Trump, reçu mercredi à Windsor par Charles III, à l'abri des manifestations.

"Cela va être un très grand jour", a commenté M. Trump en arrivant au Royaume-Uni mardi soir, se réjouissant de voir le roi, son "ami de longue date".

Encadrée par un dispositif de sécurité exceptionnel, cette visite d'Etat de deux jours débute par un déploiement spectaculaire de faste royal, dont le dirigeant républicain est friand, et une cérémonie militaire d'une ampleur sans précédent, impliquant 1.300 membres des forces armées britanniques.

"On dit que le château de Windsor, c'est le top, non? Donc ça va être chouette", avait lancé Donald Trump, 79 ans, avant son départ de Washington, se félicitant aussi d'être le seul président américain à avoir deux fois les honneurs d'une visite d'Etat au Royaume-Uni. La première avait eu lieu en 2019.

Le président et son épouse Melania seront accueillis à la mi-journée dans ce domaine royal situé à l'ouest de Londres, d'abord par le prince héritier William et son épouse Catherine, puis par le roi Charles III, 76 ans, et la reine Camilla, 78 ans.

Une incertitude entoure toutefois la présence de Camilla: la reine consort se remet d'une sinusite aiguë qui l'a empêchée d'assister à des funérailles royales mardi.

Après une salve royale tirée du château et depuis la Tour de Londres, les trois couples doivent participer à une procession en calèche, mais toujours dans l'enceinte du domaine, et non dans les rues de la ville comme cela avait été le cas lors de la visite d'Etat du président français Emmanuel Macron en juillet.

- Fanfare et cornemuses -

Donald Trump aura l'unique privilège de passer en revue une garde d'honneur comprenant exceptionnellement trois régiments de la Garde royale, accompagnée d'une fanfare, tambours et cornemuses dans la cour carrée du château.

Après un déjeuner en privé avec la famille royale, le couple Trump déposera des fleurs sur la tombe de la reine Elizabeth II, décédée en septembre 2022, dans la chapelle St George.

Un défilé aérien, alliant de façon inédite des avions de combat F35 britanniques et américains, et la patrouille acrobatique des "Red Arrows", précèdera le traditionnel banquet royal avec quelque 150 invités.

Une profusion d'honneurs de nature à flatter l'ego du milliardaire américain, qui s'est plus tôt cette année lui-même comparé à un monarque.

Mais à 40 km de là, des milliers de manifestants sont attendus dans le centre de Londres, pour protester contre la venue d'un président très impopulaire dans le pays. Le rassemblement à l'appel de la coalition "Stop Trump", prévu à partir de 14H00 (13H00 GMT), sera encadré par plus de 1.600 policiers. D'autres sont prévus ailleurs au Royaume-Uni.

Le deuxième jour de la visite, jeudi, sera consacrée à une séquence plus politique, qui se déroulera à Chequers, résidence de campagne du Premier ministre Keir Starmer.

La conférence de presse pourrait donner lieu à des questions embarrassantes pour les deux dirigeants, relatives notamment à l'affaire Jeffrey Epstein. Elle est revenue hanter cette semaine Keir Starmer, qui a limogé son ambassadeur à Washington Peter Mandelson, après des révélations sur ses liens avec le délinquant sexuel américain, mort en prison en 2019.

Un sujet dont se passerait bien Donald Trump, qui voit sa présidence également empoisonnée par l'affaire Epstein depuis des semaines.

Des images du financier américain ont d'ailleurs été diffusées mardi soir par un groupe anti-Trump sur une tour du château de Windsor.

De son côté, le gouvernement de Keir Starmer, fragilisé sur le plan économique et en pleine crise politique, cherche à tirer parti de cette visite pour multiplier les annonces, entre accord sur la tech et investissements américains.

Il a déjà enregistré un investissement massif de 30 milliards de dollars (25 milliards d'euros) de Microsoft, un autre de 5 milliards de livres (5,8 milliards d'euros) de Google et l'annonce d'un partenariat incluant OpenAI et Nvidia pour développer des infrastructures dédiées à l'IA dans le nord-est de l'Angleterre.

Un partenariat plus général pour doper la coopération technologique dans l'IA, le quantique et le nucléaire doit être signé pendant la visite, mais ses contours sont encore flous.

Les espoirs d'accord pour faire baisser les droits de douane actuellement appliqués sur le whisky (10%) et l'acier (25%) semblent en revanche avoir été douchés, selon la presse britannique.