Contrer les ambitions nucléaires de l'Iran requiert un plan B

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Publié le Jeudi 09 septembre 2021

Contrer les ambitions nucléaires de l'Iran requiert un plan B

Contrer les ambitions nucléaires de l'Iran requiert un plan B
  • L'Union européenne a préféré s'abstenir de recourir à des mesures pertinentes à l'encontre d’un régime qui a élu à la tête du pays un homme accusé de meurtre de masse: Ebrahim Raïssi
  • Il incombe aux États-Unis et à l'Union européenne de faire part aux dirigeants iraniens de leur plan B et de se montrer résolus à le mettre en œuvre si Téhéran refuse de revenir à l'accord

Lorsqu'il est question de contrer la menace du programme nucléaire iranien, l'administration Biden, comme l'Union européenne (UE), semble placer son poids politique dans la relance du Plan d'action global conjoint (PAGC), connu sous le nom d'«accord sur le nucléaire iranien».

L'Union européenne et les États-Unis s'efforcent toujours de relancer l'accord nucléaire de 2015 malgré les dernières provocations nucléaires du régime iranien, comme l'augmentation de sa production d'uranium métal, qui n'a aucun but civil, ou les agressions dont il s’est rendu coupable aux niveaux régional et international; on se souvient notamment de ses attaques contre des navires internationaux et de sa tentative d'enlèvement d'un citoyen américain aux États-Unis.

L'Union européenne a préféré s'abstenir de recourir à des mesures pertinentes à l'encontre d’un régime qui a élu à la tête du pays un homme accusé de meurtre de masse: Ebrahim Raïssi. Durant le mois en cours, elle a plutôt fait part de son optimisme au sujet de la relance de l'accord sur le nucléaire. 

Un haut fonctionnaire de l'Union européenne a ainsi déclaré: «Le scénario le plus probable reste, selon nous, la conclusion d'un accord. Je ne suis pas en mesure d'affirmer quand ni [dans] quelles conditions. [Les dirigeants iraniens] rejoindront l'accord une fois qu’ils auront finalisé la mise en place de leur nouvelle administration. À mon avis, on peut espérer un retour à l'accord au début du mois de septembre.»

Cependant, l'erreur de taille commise par l'Union européenne et par l'administration Biden est de considérer que le retour à l'accord de 2015 constitue le seul moyen pour contrer la menace posée par le programme nucléaire iranien.

Pour commencer, les autorités iraniennes estiment que la volonté que manifestent les dirigeants européens et américains de relancer l'accord nucléaire à n'importe quel prix révèle un certain désespoir et une certaine faiblesse de leur part. Cela incite la République islamique à abuser de la situation en développant son programme nucléaire, en violant le droit international et en proférant des menaces. De leur côté, les pays occidentaux se contentent de présenter l'accord sur le nucléaire de 2015 comme le seul moyen d’empêcher le régime iranien de devenir un État nucléaire comme l’est la Corée du Nord.

 

La volonté que manifestent les dirigeants européens et américains de relancer l'accord nucléaire à n'importe quel prix révèle un certain désespoir et une certaine faiblesse de leur part

Dr Majid Rafizadeh

En second lieu, si l'Union européenne et les États-Unis se fient pleinement aux négociations sur le nucléaire et au retour au PAGC comme ils le font actuellement, ils ne se rendent pas compte que le régime iranien ne tient pas forcément à rejoindre cet accord. Il risque de devenir un État nucléaire avant même que les négociations arrivent à leur terme. D'après l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), le régime iranien a déjà franchi un cap dangereux dans son avancée nucléaire.

Il incombe donc aux États-Unis et à l'Union européenne d'envisager des alternatives sans attendre, surtout si les négociations sur le nucléaire ne débouchent pas sur des résultats concluants au cours des prochains mois. Mais que doit couvrir ce plan B?

Il est important qu’il soit multidimensionnel. Ce plan de secours doit essentiellement prévoir des sanctions et des pressions soutenues, à la fois unilatérales et multilatérales. Si le régime iranien refuse de revenir à l'accord sur le nucléaire et s'il poursuit le développement de ses activités dans ce domaine, les États-Unis et l'Union européenne pourront renforcer unilatéralement leurs sanctions à l'encontre de la production énergétique iranienne, en particulier le pétrole, mais aussi à l'encontre de la finance, du transport maritime, de la construction et de l'armement du pays. 

Malheureusement, l'UE mène une politique économique plus molle vis-à-vis du régime iranien. L'administration Biden, quant à elle, a fait part au mois de juin dernier de son intention de lever les sanctions associées aux activités nucléaires. Elle a également signalé qu'elle envisageait de lever les sanctions qui ne sont pas associées au nucléaire.

En outre, ce plan B devrait comporter une nouvelle imposition des sanctions prévues par les Nations unies et qui ont été levées en 2015 après la signature du PAGC. Il s'agit des quatre séries de sanctions onusiennes qui existaient avant l'entrée en vigueur de l'accord sur le nucléaire. Aux termes de cet accord, si Téhéran vient à manquer à ses obligations, chacune des parties signataires pourra déclencher un compte à rebours de trente jours avant un «retour» aux sanctions des Nations unies contre l'Iran. Les autres pays membres ne pourront pas mettre leur veto à une telle mesure. En d'autres termes, les États-Unis, l'Allemagne, la France et le Royaume-Uni auront la possibilité de déclencher le retour immédiat des sanctions prévues dans le cadre de l'accord des Nations unies sur le nucléaire. Le Conseil de sécurité des nations unies devra donc rétablir les sanctions contre le régime iranien dans un délai de trente jours.

 

Ce plan de secours devrait également prévoir des interventions militaires contre les sites nucléaires de l'Iran. Ce dernier ne doit à aucun prix se transformer en un État nucléaire. En ciblant ses installations nucléaires, on ralentira sa progression vers le nucléaire, même si on ne parviendra pas à la freiner totalement.

Il incombe donc aux États-Unis et à l'Union européenne de faire part aux dirigeants iraniens de leur plan B et de se montrer résolus à le mettre en œuvre si Téhéran refuse de revenir à l'accord sur le nucléaire.


 

Le Dr Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain formé à Harvard. Twitter: @Dr_Rafizadeh

 

NDRL: les opinions exprimées par les rédacteurs dans cette section sont les leurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue d'Arab News.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com