Le Venezuela dévalue à nouveau sa monnaie avec six zéros en moins

Vue d'un tas de détritus avec des billets de bolivar vénézuélien inutilisés dans une rue de la ville de Puerto Concha, dans l'État de Zulia, au Venezuela, le 8 septembre 2021. (Federico Parra/ AFP)
Vue d'un tas de détritus avec des billets de bolivar vénézuélien inutilisés dans une rue de la ville de Puerto Concha, dans l'État de Zulia, au Venezuela, le 8 septembre 2021. (Federico Parra/ AFP)
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Publié le Vendredi 01 octobre 2021

Le Venezuela dévalue à nouveau sa monnaie avec six zéros en moins

  • La mesure, annoncée le mois dernier par la banque centrale, vise à faciliter les transactions quotidiennes des quelques 30 millions de Vénézuéliens
  • Le pays a vu son PIB chuter de 80% depuis 2013, notamment en raison de la baisse de sa production et des cours du pétrole, mais aussi de la mauvaise gestion et de la crise politique

CARACAS, Venezuela : Un million de bolivars qui n'en valent plus qu'un: le Venezuela, en proie à l'inflation la plus élevée au monde, dévalue vendredi sa monnaie pour la troisième fois en treize ans.

Le pays qui traverse la pire crise de son histoire, va imprimer de nouveaux billets - qui auront donc perdu six zéros - pour accompagner la mesure, alors que ceux-ci ont presque disparu de la circulation dans le pays.

La mesure, annoncée le mois dernier par la banque centrale, vise à faciliter les transactions quotidiennes des quelques 30 millions de Vénézuéliens

Il fallait avant la dévaluation sept millions de bolivars pour acheter une baguette de pain, dans un pays jadis considéré comme un des plus riches d'Amérique du sud grâce à son pétrole, qui a vu son PIB chuter de 80% depuis 2013, notamment en raison de la baisse de sa production et des cours du pétrole, mais aussi de la mauvaise gestion et de la crise politique.

94,5% des foyers vivent sous le seuil de pauvreté de 1,9 dollar par jour, selon une récente étude universitaire. Plusieurs millions de Vénézuéliens ont fui leur pays, en raison de la crise économique et politique.

Depuis 2008, ce sont quatorze zéros qui auront été supprimés. Un nouveau bolivar représentera 100 billiards de bolivars de 2007, reflet de l'incroyable érosion de la monnaie vénézuélienne.

Sans surprise, avec une telle dévaluation, les salaires se sont évaporés. "On touche notre salaire tous les quinze jours, moins de trois dollars", explique à l'AFP Marelys Guerrero, 43 ans, institutrice payée en millions de bolivars.

Pour faire face à l'inflation la plus élevée au monde, anticipée à 1.600 % en 2021 par le cabinet d'analyses Ecoanalitica, les Vénézuéliens ont désormais recours au dollar qui a supplanté le bolivar. Plus des deux tiers des transactions dans le pays sont effectuées dans cette monnaie, qui paradoxalement est celle des Etats-Unis, le principal adversaire du régime.

Le loyer d'un appartement dans un quartier modeste de la capitale démarre à 150 dollars, et un panier de produits alimentaires de base pour une famille de cinq personnes coûte près de 220 dollars.

Le bolivar est relégué aux transactions par carte, aux transferts bancaires... et transformé les paiements quotidiens en véritables casse-têtes.

- Un jouet pour enfants -

Pour payer un pourboire à un voiturier au parking d'un restaurant, il faut payer par carte au comptoir et au lieu d'un billet, le gardien reçoit un reçu.

Face au manque d'argent liquide, les arrêts de bus, dans lesquels ne sont acceptés que des bolivars, se sont transformés en bureaux de change à ciel ouvert.

"Nous changeons le dollar à quatre millions de bolivars. Le ticket (de bus) coûte deux millions", explique William Hernandez, un chauffeur de 56 ans.

Dans la rue, les enfants manient des liasses de billets et multiplient les enchères en jouant aux cartes, avec de vrais bolivars qui ne valent plus rien depuis belle lurette.

Le gouvernement invoque régulièrement les sanctions internationales imposées depuis 2019, notamment par les Etats-Unis, pour tenter d'évincer le président Nicolas Maduro du pouvoir, même si la crise dure depuis plus de 8 ans.

Des négociations sont en cours entre le gouvernement chaviste du président socialiste Maduro, réélu en 2018 lors d'un scrutin contesté, et l'opposition dirigée par Juan Guaido, reconnu comme président par intérim par une cinquantaine de pays dont les Etats-Unis.

Jadis acteur majeur du marché pétrolier mondial, le Venezuela, qui a produit jusqu'à 3,3 millions de barils par jour, en est aujourd'hui à un peu plus de 500.000 b/j.

Si certains habitants de Caracas craignent que la nouvelle dévaluation ne réduise encore leur pouvoir d'achat, certains se réjouissent de la simplification qu'elle entraîne, comme Rodrigo Bermudez, un comptable.

"C'est un soulagement... Le nombre de chiffres rendait toute transaction si fastidieuse", explique-t-il, en montrant une facture comportant bien trop de zéros pour être intelligible.

Au Venezuela et ailleurs, quelques cas emblématiques d'hyperinflation

Valse des étiquettes, brouettes de billets pour acheter le pain... plusieurs pays ont été confrontés à l'hyperinflation, dans laquelle est englué le Venezuela, où la hausse des prix devrait atteindre 1.600% cette année.

L'hyperinflation, définie comme une hausse des prix de plus de 50% par mois, résulte généralement d'un dérapage des finances publiques, notamment dans des conditions extrêmes, comme les conflits ou les changements de régime. Elle se caractérise par un effondrement de l'activité, combiné avec de la création de monnaie.

- L'Allemagne de Weimar -

Ruinée et endettée après sa défaite lors de la Première Guerre mondiale, la République de Weimar a fait tourner la planche à billets, enclenchant entre 1921 et 1924 un phénomène d'hyperinflation.

En 1923, les images d'Allemands allant chercher leur pain avec des brouettes de billets de banque marquent les esprits. L'inflation atteint alors jusqu'à 20% par jour, d'après le think tank américain Cato Institute. Le phénomène a alimenté la montée du nazisme selon nombre d'historiens.

La palme de la pire hyperinflation jamais constatée revient à la Hongrie, où, en 1946, les prix pouvaient doubler en 15 heures.

- L'Argentine en 1989 -

En Argentine, l'hyperinflation a atteint 3.079% en 1989 et 2.314% en 1990, poussant les clients à se dépêcher de faire leurs achats dans la crainte permanente de voir changer les étiquettes.

Cette crise déclenche une explosion sociale avec des pillages de supermarchés et entraîne le départ anticipé du président Raul Alfonsin.

L'hyperinflation est jugulée par un programme de convertibilité à parité fixe (1 dollar pour 1 peso) à partir de 1991, année où l'inflation se limite à 84%. Mais la parité finit par plonger le pays dans la récession, entraînant son abandon en 2002.

- L'ex-Yougolavie en 1993-1994 -

Plongée dans la crise par la désintégration de l'ancienne Yougoslavie en 1991, puis par l'embargo de l'ONU en 1992, la République fédérale de Yougoslavie (RFY, Serbie et Monténégro), sombre en décembre 1993 dans l'hyperinflation, avec une hausse des prix de 300.000.000%.

La population est confrontée à des magasins vides ainsi qu'à une dévaluation vertigineuse et permanente.

En janvier 1994, alors que l'inflation s'établit à 1.000.000%, le gouvernement lance un programme de réformes et met en circulation un "super-dinar", valant officiellement un mark allemand.

- Le Zimbabwe en 2008 -

La valse des étiquettes s'emballe au Zimbabwe entre 2008 et 2009 avec la dégringolade du dollar zimbabwéen, enclenchée par une réforme agraire controversée qui a vu l'éviction de force de la plupart des fermiers blancs du pays.

Pour tenter d'enrayer la chute de sa devise, le gouvernement de Robert Mugabe fait tourner sans retenue la planche à billets. Il introduit un billet de 100.000 milliards de dollars zimbabwéens, juste assez pour acheter une miche de pain.

Les produits de base, comme le sucre et la farine de maïs, deviennent des luxes rares.

Dans les années 2000, les Zimbabwéens se déplaçaient encore avec des sacs, voire des brouettes de billets pour faire leurs courses.

Après plusieurs dévaluations, les autorités ont abandonné en 2009 leur devise au profit du dollar américain.

- Le Venezuela actuellement -

Le Venezuela, qui retire ce vendredi six zéros à sa devise dans une énième réforme, se débat depuis des années avec l'inflation la plus élevée au monde.

Dans cet ancien riche pays pétrolier, l'hyperinflation a atteint 400.000% en 2018, près de 10.000% en 2019, 3.000% en 2020 et devrait s'établir à 1.600% cette année.

Un nouveau bolivar représentera 100 millions de milliards de bolivars de 2007.

Les énormes sommes des billets ne permettent d'acheter que quelques légumes ou un maigre morceau de viande, dans une économie largement dollarisée. Les billets locaux valent tellement peu que les enfants s'en servent pour jouer.

Le gouvernement invoque les sanctions internationales imposées depuis 2019, notamment par Washington pour tenter d'évincer le président socialiste Nicolas Maduro, même si la crise dure depuis plus de 8 ans.


L'aéroport de Riyad presque à l'arrêt en raison de problèmes opérationnels

 L'aéroport international King Khalid à Riyad. Getty
L'aéroport international King Khalid à Riyad. Getty
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  • Les compagnies aériennes publient des déclarations, tandis que des sources indiquent à Arab News que la pluie est à blâmer
  • Dans son propre communiqué, Saudia a déclaré : "Les clients touchés sont contactés par l'intermédiaire de la compagnie aérienne"

RIYAD: Des milliers de passagers voyageant vers et depuis l'aéroport international King Khalid de Riyad ont été laissés en plan alors que les principales compagnies aériennes se sont efforcées de proposer des vols alternatifs suite à une série d'annulations et de retards.

Saudia et flyadeal ont été parmi les compagnies aériennes qui ont rencontré des difficultés, les deux compagnies ayant publié des déclarations attribuant ces problèmes à des problèmes opérationnels temporaires.

Une déclaration de l'aéroport sur son compte officiel X a exhorté les voyageurs à contacter directement les compagnies aériennes avant de se rendre à la plate-forme d'aviation pour vérifier l'état actualisé et l'horaire de leurs vols.

Le communiqué dit ceci : "L'aéroport international King Khalid souhaite vous informer qu'en raison de la concomitance d'un certain nombre de facteurs opérationnels au cours des deux derniers jours - y compris plusieurs vols détournés d'autres aéroports vers l'aéroport international King Khalid, en plus des travaux de maintenance programmés dans le système d'approvisionnement en carburant - cela a eu un impact sur les horaires de certains vols, y compris le retard ou l'annulation d'un certain nombre de vols opérés par certaines compagnies aériennes".

L'aéroport a ajouté que les équipes opérationnelles travaillent "24 heures sur 24 en étroite coordination avec nos partenaires aériens et les parties prenantes concernées pour faire face aux développements et rétablir la régularité opérationnelle dès que possible", tout en prenant toutes les mesures nécessaires pour minimiser l'impact sur l'expérience des passagers.

Des sources aéroportuaires ont déclaré à Arab News que le problème était lié aux fortes pluies qui se sont abattues sur Riyad plus tôt dans la journée de vendredi. De l'eau s'est apparemment infiltrée dans les réservoirs de carburant censés ravitailler les avions à réaction avant leur décollage, et plusieurs compagnies aériennes se sont alors efforcées de reprogrammer les vols des passagers.

Dans son propre communiqué, Saudia a déclaré : "Les clients touchés sont contactés par l'intermédiaire de la compagnie aérienne : "Les clients concernés sont contactés par le biais de divers canaux de communication, et tous les changements de billets sont effectués sans frais supplémentaires.

Arab News a contacté Saudia pour de plus amples informations.

Toujours dans un communiqué publié sur X, flyadeal a déclaré que tous ses passagers touchés par la perturbation "seront informés directement par e-mail et SMS des options de rebooking et d'assistance".


IA: pour la présidente de Microsoft France, il n'y a pas de «bulle»

 "Je ne crois pas du tout à la bulle" de l'intelligence artificielle (IA), assure lors d'un entretien à l'AFP Corine de Bilbao, présidente de Microsoft France, qui dit constater une diffusion rapide de l'IA chez les entreprises et les consommateurs. (AFP)
"Je ne crois pas du tout à la bulle" de l'intelligence artificielle (IA), assure lors d'un entretien à l'AFP Corine de Bilbao, présidente de Microsoft France, qui dit constater une diffusion rapide de l'IA chez les entreprises et les consommateurs. (AFP)
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  • Microsoft propose son propre assistant IA, baptisé Copilot, et contrôle 27% du capital de la start-up OpenAI, le créateur de ChatGPT, chatbot le plus utilisé au monde
  • En France, 40,9% des citoyens en âge de travailler ont adopté l'IA, assure Mme de Bilbao, contre 26,3% aux États-Unis, ce qui place la France à la cinquième place mondiale en termes d'adoption, selon une étude du Microsoft AI Economy Institute

PARIS: "Je ne crois pas du tout à la bulle" de l'intelligence artificielle (IA), assure lors d'un entretien à l'AFP Corine de Bilbao, présidente de Microsoft France, qui dit constater une diffusion rapide de l'IA chez les entreprises et les consommateurs.

Pour certains experts, les investissements colossaux dans l'IA semblent démesurés par rapport aux bénéfices générés, alimentant la peur d'une survalorisation du secteur.

Mais selon Corine de Bilbao, à la tête de la filiale française du géant américain des logiciels depuis 2021, "il y a des signes forts" de solidité comme le fait que cette technologie se diffuse "dans toutes les sphères de la société".

Microsoft propose son propre assistant IA, baptisé Copilot, et contrôle 27% du capital de la start-up OpenAI, le créateur de ChatGPT, chatbot le plus utilisé au monde, dans laquelle Microsoft a investi plus de 13 milliards de dollars.

En France, 40,9% des citoyens en âge de travailler ont adopté l'IA, assure Mme de Bilbao, contre 26,3% aux États-Unis, ce qui place la France à la cinquième place mondiale en termes d'adoption, selon une étude du Microsoft AI Economy Institute.

Un milliard d'agents IA

L'énergéticien français TotalEnergies utilise par exemple Copilot et des agents IA, capables de réaliser des tâches de façon autonome, à travers des cas d'usage "dans la maintenance, les achats, la sécurité", énumère la patronne.

Tandis que l'assureur italien Generali a "adopté massivement l'IA et automatisé plus d'un million d'opérations", ajoute-t-elle.

"Plus d'un milliard d'agents à l'échelle mondiale vont être diffusés dans les entreprises" d'ici 2028, s'enthousiasme Corine de Bilbao, citant une étude IDC pour Microsoft.

L'irruption de l'intelligence artificielle dans les entreprises peut toutefois se traduire par des vagues de licenciements comme chez Amazon, le groupe informatique HP ou encore l'assureur allemand Allianz Partners.

Microsoft France, qui compte près de 2.000 employés, a de son côté supprimé 10% de ses effectifs via un accord collectif de rupture conventionnelle sur la base du volontariat.  -

"C'est lié à la transformation de certains métiers, mais pas à l'IA", assure la dirigeante, ajoutant qu'en parallèle Microsoft est en train de recruter "des profils plus techniques", comme des "ingénieurs solutions", pour s'adapter aux demandes de ses clients.

"L'IA suscite beaucoup de peur", reconnaît Mme de Bilbao."On préfère parler de salariés augmentés" plutôt que d'emplois supprimés, poursuit-elle, beaucoup de tâches considérées comme rébarbatives pouvant être réalisées avec l'assistance de l'intelligence artificielle.

Selon elle, l'enjeu central est surtout celui de la formation des salariés à ces nouveaux outils.

"Nouvelle économie" 

"Il n'y aura pas de déploiement de l'IA s'il n'y a pas de valeur partagée, si l'ensemble des citoyens, des étudiants, des entreprises ne sont pas formés", souligne la patronne.

En France, le géant de Redmond (Etat de Washington) a déjà formé 250.000 personnes à l'IA sur un objectif d'un million d'ici 2027 et veut accompagner 2.500 start-up françaises.

"Un écosystème complet se développe entre les fournisseurs de modèles de langage, les infrastructures, on est en train de créer une nouvelle économie autour de cette IA", déclare Corine de Bilbao.

Microsoft a ainsi annoncé en 2024 un investissement de 4 milliards d'euros en France lors du sommet Choose France pour agrandir ses centres de données dans les régions de Paris et Marseille (sud), et construire un datacenter dans l'est de la France, près de Mulhouse.

"Ca avance très bien", explique-t-elle, sans donner de date à laquelle le centre sera opérationnel. "Cela ne pousse pas comme des champignons, ce sont des projets qui prennent quelques années en général", entre le dépôt de permis, de construction et l'accompagnement.

Pour 2026, le défi sera de passer d'une intelligence artificielle "expérimentale à une IA opérationnelle, qui délivre de la valeur pour les entreprises, à la fois sur leurs revenus, la productivité, et qui les aide à se transformer", conclut-elle.


Mercosur: Paris et Rome contrarient les plans de l'UE, ultimatum de Lula

Cette photographie montre des drapeaux européens flottant devant le bâtiment Berlaymont, siège de la Commission européenne à Bruxelles, le 2 décembre 2025. (AFP)
Cette photographie montre des drapeaux européens flottant devant le bâtiment Berlaymont, siège de la Commission européenne à Bruxelles, le 2 décembre 2025. (AFP)
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  • L’Italie rejoint la France pour demander un report de l’accord UE–Mercosur, menaçant la signature espérée par Ursula von der Leyen et ouvrant la voie à une minorité de blocage au sein des Vingt-Sept
  • Le Brésil met la pression, tandis que les divisions européennes persistent entre défense des agriculteurs et impératif économique face à la concurrence chinoise et américaine

BRUXELLES: L'Italie a rejoint la France mercredi pour réclamer un report de l'accord commercial entre l'Union européenne et le Mercosur, ce qui risque d'empêcher Ursula von der Leyen de parapher ce traité en fin de semaine, au grand dam du Brésil.

Une signature dans les prochains jours est "prématurée", a lâché Giorgia Meloni à la veille d'un sommet européen à Bruxelles.

La cheffe du gouvernement italien veut d'abord des garanties "suffisantes" pour le secteur agricole, et se dit "convaincue qu'au début de l'année prochaine, toutes ces conditions seront réunies".

Cette sortie est une douche froide pour la Commission européenne. Bruxelles n'a cessé de marteler ces derniers jours qu'une signature était indispensable avant la fin de l'année, pour la "crédibilité" de l'Union européenne et afin de ne pas contrarier les partenaires latino-américains.

Prudent, l'exécutif européen fait mine d'y croire encore. "Les chefs d'Etat et de gouvernement vont en discuter au sommet européen" ce jeudi, a dit à l'AFP Olof Gill, porte-parole de la Commission.

Au Brésil, le président Lula, qui avait appelé à la responsabilité Emmanuel Macron et Georgia Meloni, a posé une forme d'ultimatum.

"Si on ne le fait pas maintenant, le Brésil ne signera plus l'accord tant que je serai président", a-t-il menacé. "Si jamais ils disent non, nous serons désormais fermes avec eux, parce que nous avons cédé sur tout ce qu'il était possible de céder diplomatiquement".

- "Billet remboursable" -

La prise de position de Rome sur ce dossier est potentiellement décisive.

Avec la France, la Pologne et la Hongrie, l'Italie est en capacité de former une minorité de blocage au sein des Vingt-Sept, ce qui empêcherait un examen de l'accord durant la semaine.

"Ca risque d'être très chaud", convient un diplomate européen anonymement, alors que l'Allemagne comme l'Espagne insistent pour approuver ce traité de libre-échange le plus vite possible.

Le chancelier allemand, Friedrich Merz, a promis d'exercer une pression "intensive" sur ses partenaires européens mercredi soir et jeudi matin, en appelant à ne pas "chipoter" avec les grands traités commerciaux.

Emmanuel Macron a prévenu que "la France s'opposerait de manière très ferme" à un éventuel "passage en force" de l'Union européenne, a rapporté la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon.

Paris ne considère pas encore comme "acquis" le report de la signature du traité, mais les déclarations de Giorgia Meloni sont la "preuve" que "la France n'est pas seule", a-t-elle ajouté.

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, espérait parapher ce traité lors du sommet du Mercosur samedi dans la ville brésilienne de Foz do Iguaçu. Mais elle a besoin au préalable de l'aval d'une majorité qualifiée d'Etats membres à Bruxelles.

"J'espère qu'elle a un billet (d'avion) remboursable", glisse une source diplomatique européenne.

- Manifestation à Bruxelles -

Cet accord commercial avec l'Argentine, le Brésil, le Paraguay et l'Uruguay permettrait à l'UE d'exporter davantage de véhicules, de machines, de vins et de spiritueux, tout en facilitant l'entrée en Europe de viande, sucre, riz, miel ou soja sud-américains, ce qui inquiète les filières concernées.

Les agriculteurs européens ne décolèrent pas et annoncent une dizaine de milliers de manifestants jeudi à Bruxelles contre ce traité.

Pour rassurer la profession, l'UE a ajouté des mesures de sauvegarde: un suivi des produits agricoles sensibles et une promesse d'intervention en cas de déstabilisation du marché.

Un compromis a été trouvé mercredi soir sur ce volet entre des eurodéputés et des représentants des États membres: les garanties pour les agriculteurs y sont supérieures à ce qu'avaient voté les Vingt-Sept en novembre, mais en deçà de la position adoptée par le Parlement européen mardi.

Elles ne devraient toutefois pas suffire à la France. Le bras de fer avec Bruxelles s'inscrit dans un contexte de vaste mobilisation agricole dans l'Hexagone contre la gestion par les autorités de l'épidémie de dermatose nodulaire contagieuse (DNC).

Et au sein de l'Union européenne, une série d'États redoutent que Paris ne se contente pas d'un report du Mercosur mais essaye de faire échouer le traité, malgré plus de 25 ans de négociations.

Allemands, Espagnols et Scandinaves comptent quant à eux sur cet accord pour relancer une économie européenne à la peine face à la concurrence chinoise et aux taxes douanières des États-Unis.