Explosion au port de Beyrouth: nouvelle suspension de l'enquête

Une vue aérienne de la capitale libanaise, dont la moitié a été dévastée par une gigantesque explosion le 4 août 2020. (AFP).
Une vue aérienne de la capitale libanaise, dont la moitié a été dévastée par une gigantesque explosion le 4 août 2020. (AFP).
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Publié le Mardi 12 octobre 2021

Explosion au port de Beyrouth: nouvelle suspension de l'enquête

  • Soutenu essentiellement par les familles des victimes du drame qui a endeuillé en août 2020 la capitale libanaise, Tareq Bitar avait été la cible lundi soir d'une violente attaque verbale du chef du puissant Hezbollah pro-iranien
  • Le gouvernement libanais a décidé de se pencher sur les «circonstances liées à l'enquête» lors d'une réunion mercredi

BEYROUTH: Soumis à des pressions croissantes de la classe politique libanaise, le juge chargé de l'enquête sur l'explosion au port de Beyrouth a de nouveau été contraint mardi de suspendre ses investigations, après avoir émis un mandat d'arrêt à l'encontre d'un député. 

L'explosion, survenue le 4 août 2020 et causée par le stockage sans mesures de précaution d'énormes quantités de nitrate d'ammonium, a fait au moins 214 morts, plus de 6.500 blessés et dévasté plusieurs quartiers de la capitale.  

Pointées du doigt pour négligence criminelle, les autorités ont rejeté toute investigation internationale et sont accusées par les familles des victimes et des ONG de torpiller l'enquête locale pour éviter des inculpations. Et les responsables politiques refusent d'être interrogés par le juge.  

Lundi, le juge Tareq Bitar a été la cible d'une violente attaque verbale de Hassan Nasrallah, chef du puissant mouvement armé Hezbollah, qui l'a accusé de politiser l'enquête et demandé son remplacement par un magistrat "honnête et transparent". 

Mardi, M. Bitar a émis un mandat d'arrêt contre le député et ex-ministre des Finances, Ali Hassan Khalil, membre du mouvement chiite Amal, allié du Hezbollah, qui ne s'est pas présenté à un interrogatoire et a délégué son avocat. 

Mais il a été aussitôt contraint de suspendre son enquête après de nouvelles plaintes déposées par M. Khalil et un autre député et ex-ministre d'Amal, Ghazi Zaayter, devant la cour de cassation, selon une source judiciaire. 

"Cela a provoqué une suspension de l'enquête et l'arrêt des interrogatoires prévus" en attendant la décision de la cour, a-t-elle dit à l'AFP. 

"Escalade" 

Le juge Bitar avait repris la semaine dernière son travail après une première suspension de l'enquête due à une plainte d'un autre député soupçonné de "négligence et manquements" dans le cadre de l'enquête. La plainte avait été rejetée par une cour d'appel. 

"Il y a une décision politique de ne pas permettre au juge de travailler", a réagi Nizar Saghieh, directeur de l'ONG juridique Legal Agenda.  

"Les forces qui le contestent épuisent pour le moment tous les recours juridiques, mais il est clair que certaines parties sont prêtes à recourir à des moyens non légaux pour l'empêcher de travailler", a-t-il dit à l'AFP. 

Selon M. Saghieh, les déclarations de Hassan Nasrallah, dont le mouvement est un acteur incontournable sur la scène politique, montre que la classe politique a "perdu patience". 

Mardi soir, le député Ali Hassan Khalil a menacé dans un entretien à la chaîne Al-Mayadeen, proche du Hezbollah, d'une "escalade politique, peut-être d'un autre genre", si le cours de l'enquête "n'était pas rectifié".    

Certains craignent que le juge Bitar, au cœur d'une campagne de dénigrement, ne connaisse le même sort que son prédécesseur, Fadi Sawan, écarté en février après l'inculpation de hauts responsables. 

"Esquiver la responsabilité" 

Dans ce contexte tendu, le gouvernement libanais a décidé de se pencher sur les "circonstances liées à l'enquête" lors d'une réunion mercredi. 

L'enquête locale sur l'explosion n'a enregistré aucun progrès, la classe dirigeante étant accusée de tout faire  pour éviter des inculpations dans un pays où sévit "la culture d'impunité" selon des ONG. 

L'explosion au port a enfoncé dans l'abîme le pays plongé dans une crise socio-économique sans précédent et où la classe politique inchangée depuis des décennies est accusée de corruption, d'incompétence et d'inertie. 

Depuis qu'il a hérité de l'affaire, le juge Bitar a convoqué l'ex-Premier ministre, Hassan Diab, et quatre ex-ministres en vue de leur inculpation.  

La nouvelle suspension de l'enquête a suscité l'ire des proches des victimes ainsi que la condamnation de plusieurs ONG et de l'Union européenne (UE).  

"Les politiciens déposent toutes les plaintes auxquelles ils peuvent penser pour suspendre l'enquête (...) dans une tentative ridicule d'échapper à la justice", a déclaré à l'AFP Aya Majzoub, de Human Rights Watch.  

"Les poursuites judiciaires doivent pouvoir se dérouler sans aucune ingérence, et les responsables de cette tragédie doivent répondre de leurs actes", a souligné l'UE dans un communiqué. 

Les autorités libanaises "non seulement esquivent la responsabilité, mais sapent également les attentes de responsabilité", a déploré Sahar Mandour d'Amnesty International. 


Sanctions contre le Hezbollah: le Liban dit lutter contre le blanchiment d'argent

Jeudi, les Etats-Unis, alliés d'Israël, ont imposé des sanctions à plusieurs membres du Hezbollah accusés d'avoir "facilité le transfert de dizaines de millions de dollars de l'Iran vers le Hezbollah en 2025, en utilisant des bureaux de change". (AFP)
Jeudi, les Etats-Unis, alliés d'Israël, ont imposé des sanctions à plusieurs membres du Hezbollah accusés d'avoir "facilité le transfert de dizaines de millions de dollars de l'Iran vers le Hezbollah en 2025, en utilisant des bureaux de change". (AFP)
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  • La visite de la délégation à Beyrouth, menée par Sebastian Gorka, le chef de la lutte antiterroriste à la Maison Blanche, intervient alors que Washington cherche à couper les sources de financement du Hezbollah
  • Cette déclaration survient quelques jours après que Washington a pris des sanctions économiques contre des personnes accusées de blanchir de l'argent servant à financer les activités du Hezbollah

BEYROUTH: Le président libanais Joseph Aoun a affirmé dimanche à des responsables américains en visite au Liban que son pays appliquait "scrupuleusement" des mesures pour prévenir le blanchiment d'argent et le "financement du terrorisme".

Cette déclaration survient quelques jours après que Washington a pris des sanctions économiques contre des personnes accusées de blanchir de l'argent servant à financer les activités du mouvement libanais pro-iranien Hezbollah.

La visite de la délégation à Beyrouth, menée par Sebastian Gorka, le chef de la lutte antiterroriste à la Maison Blanche, intervient alors que Washington cherche à couper les sources de financement du Hezbollah, tout en continuant à exercer des pressions sur les autorités libanaises pour qu'elles désarment ce mouvement.

Dans un communiqué publié à l'issue de la rencontre, M. Aoun a déclaré avoir informé la délégation que "le Liban applique scrupuleusement les mesures adoptées pour prévenir le blanchiment d'argent, la contrebande ou leur utilisation dans le financement du terrorisme".

Jeudi, les Etats-Unis, alliés d'Israël, ont imposé des sanctions à plusieurs membres du Hezbollah accusés d'avoir "facilité le transfert de dizaines de millions de dollars de l'Iran vers le Hezbollah en 2025, en utilisant des bureaux de change".

Le mouvement "utilise ces fonds pour soutenir ses forces paramilitaires, reconstruire son infrastructure terroriste et résister aux efforts du gouvernement libanais visant à affirmer son contrôle souverain sur l'ensemble du territoire libanais", indique le communiqué du ministère américain des Finances.

"Nous avons discuté des moyens avec lesquels nous pouvons collaborer pour stopper le flux d’argent en provenance d’Iran à destination du Hezbollah et créer un Liban plus sûr et plus prospère", a déclaré dimanche sur X le secrétaire adjoint au Trésor chargé du terrorisme et du renseignement financier, John Hurley, qui faisait partie de la délégation.

En septembre, l'émissaire américain Tom Barrack avait affirmé que le groupe recevait "60 millions de dollars par mois".

Affaibli par la guerre qui l'a opposé l'an dernier à Israël, le Hezbollah est sous intense pression pour désarmer.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024, Israël continue de mener des attaques régulières contre ses bastions au Liban.

M. Aoun a appelé dimanche à "faire pression sur Israël pour qu'il mette fin à ses attaques".


Israël a reçu la dépouille de Hadar Goldin, tué en 2014 à Gaza

Après onze ans d'attente, Israël a annoncé dimanche le rapatriement du corps de l'officier israélien Hadar Goldin, tué en 2014 dans la bande de Gaza, remis plus tôt à la Croix-Rouge par le Hamas dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu dans le territoire palestinien. (AFP)
Après onze ans d'attente, Israël a annoncé dimanche le rapatriement du corps de l'officier israélien Hadar Goldin, tué en 2014 dans la bande de Gaza, remis plus tôt à la Croix-Rouge par le Hamas dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu dans le territoire palestinien. (AFP)
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  • Le bureau du Premier ministre israélien Benjamin Netanyau a indiqué que la dépouille rendue à la mi-journée par le mouvement islamiste avait été identifiée comme celle du lieutenant Hadar Goldin
  • Le Hamas a ainsi remis 24 des 28 corps retenus en otages à Gaza qu'il s'est engagé à rendre dans le cadre de la trêve entrée en vigueur le 10 octobre

JERUSALEM: Après onze ans d'attente, Israël a annoncé dimanche le rapatriement du corps de l'officier israélien Hadar Goldin, tué en 2014 dans la bande de Gaza, remis plus tôt à la Croix-Rouge par le Hamas dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu dans le territoire palestinien.

Le bureau du Premier ministre israélien Benjamin Netanyau a indiqué que la dépouille rendue à la mi-journée par le mouvement islamiste avait été identifiée comme celle du lieutenant Hadar Goldin.

Le Hamas a ainsi remis 24 des 28 corps retenus en otages à Gaza qu'il s'est engagé à rendre dans le cadre de la trêve entrée en vigueur le 10 octobre.

"Onze ans d'attente" 

Dimanche matin, la branche armée du Hamas, les Brigades Ezzedine al-Qassam, avait annoncé qu'elle allait remettre le corps de l'officier "trouvé hier dans un tunnel" de Rafah.

Des représentants de l'armée ont "informé la famille du soldat enlevé et tombé au combat, le lieutenant Hadar Goldin, que leur proche avait été rapatrié en Israël et son identification confirmée", a annoncé plus tard le bureau de M. Netanyahu.

"Je sais les souffrances que sa famille a endurées (...) et aujourd'hui, nous sommes unis dans la remise (du corps) à ses parents et à sa famille", a commenté M. Netanyahu sur X.

Le président Isaac Herzog s'est aussi félicité sur X du retour de la dépouille "après 11 années longues et douloureuses".

La guerre "a prouvé que, lorsque nous nous battons pour nos soldats, nous réussissons. La victoire signifie ramener tous les otages à la maison et ramener nos soldats en Israël", a déclaré pour sa part le père du soldat, Simcha Goldin.

Pour Judith Touati, habitante de Ramla, dans le centre d'Israël, "c'est un soulagement, il est temps que cette famille puisse enfin faire son deuil".

Selon l'armée, Hadar Goldin a été tué à 23 ans le 1e août 2014 pendant une mission de reconnaissance dans un tunnel près de Rafah lors d'une précédente guerre à Gaza.

"Des terroristes sont sortis d'un tunnel", ont attaqué des soldats, abattu Hadar Goldin et traîné son corps dans le tunnel, a affirmé dimanche la porte-parole du gouvernement, Shosh Bedrosian.

En janvier dernier, le corps de Oron Shaoul, tué, lui, en opération à Gaza-ville à 21 ans le 20 juillet 2014, avait été ramené par l'armée de Gaza à Israël.

Pendant des années, les dépouilles des deux soldats ont été au centre de négociations indirectes entre Israël et le Hamas en vue notamment de la libération de prisonniers palestiniens.

Retrouver "une vie normale" 

Quatre dépouilles d'otages restent encore retenues à Gaza, appartenant à trois Israéliens et un Thaïlandais, morts lors de l'attaque sans précédent du Hamas en Israël du 7 octobre 2023 qui a déclenché la guerre à Gaza.

Au début de la trêve, le Hamas avait libéré les 20 derniers otages vivants du 7-Octobre, et remis au fur et à mesure des dépouilles des otages morts.

En échange, Israël a libéré près de 2.000 prisonniers palestiniens, et rendu les corps de 15 Palestiniens tués pour chaque otage israélien décédé rendu.

En dépit de ces avancées dans l'application de l'accord de trêve, Samah Deeb, déplacée du nord de Gaza vers le centre du territoire dévasté, reste "inquiète" au vu de l'incertitude pesant sur "la prochaine étape du cessez-le-feu, qui prévoit le désarmement du Hamas et l'administration de la bande de Gaza".

"Nous nous sentons toujours prisonniers de la situation", déclare cette trentenaire à l'AFP.

"Nous voulons le retrait d'Israël. Nous voulons retourner dans nos maisons détruites (...), rebâtir les infrastructures et les écoles, et redonner une vie normale à nos enfants", abonde un autre Gazaoui déplacé, Mohammed Zamlout.

L'attaque du 7 octobre 2023 a entraîné la mort de 1.221 personnes côté israélien, majoritairement des civils, selon un décompte de l'AFP établi à partir de données officielles.

Depuis lors, plus de 69.176 Palestiniens, essentiellement des civils, ont été tués dans la bande de Gaza par la campagne militaire israélienne de représailles, selon le ministère de la Santé de Gaza, dont les chiffres sont jugés fiables par l'ONU. La guerre a plongé le territoire dans une grave crise humanitaire.

 


L'UE condamne les frappes israéliennes au Liban, exige le respect du cessez-le-feu

Un soldat de l'armée libanaise discute avec un ouvrier alors qu'il déblaye les décombres d'un site visé pendant la nuit par une frappe aérienne israélienne dans le village d'Et Taybeh, dans le sud du Liban. (AFP)
Un soldat de l'armée libanaise discute avec un ouvrier alors qu'il déblaye les décombres d'un site visé pendant la nuit par une frappe aérienne israélienne dans le village d'Et Taybeh, dans le sud du Liban. (AFP)
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  • L’Union européenne condamne les frappes israéliennes au sud du Liban et appelle Israël à respecter la résolution 1701 ainsi que le cessez-le-feu signé avec le Hezbollah en novembre 2024
  • L’UE exhorte toutes les parties libanaises, notamment le Hezbollah, à éviter toute escalade et à préserver les progrès réalisés vers la stabilité régionale

BRUXELLES: L'Union européenne a condamné les récentes frappes israéliennes sur le sud du Liban et appelé à respecter le cessez-le-feu conclu en novembre 2024 avec le Hezbollah, dans un communiqué publié samedi par sa diplomatie.

"L'UE appelle Israël à mettre fin à toutes les actions qui violent la résolution 1701 et l'accord de cessez-le-feu conclu il y a un an, en novembre 2024", souligne Anouar El Anouni, porte-parole de l'UE pour les Affaires étrangères.

"Dans le même temps, nous exhortons tous les acteurs libanais, et en particulier le Hezbollah, à s'abstenir de toute mesure ou réaction susceptible d'aggraver encore la situation. Toutes les parties doivent s'attacher à préserver le cessez-le-feu et les progrès accomplis jusqu'à présent", insiste le porte-parole.

De nouvelles frappes ont été menées jeudi sur le sud du Liban par Israël, qui a dit viser des cibles du mouvement pro-iranien Hezbollah, accusé de vouloir se réarmer.

L'armée israélienne avait appelé auparavant des habitants de quatre villages à évacuer des bâtiments en prévenant qu'elle allait frapper des infrastructures militaires du mouvement libanais.

L'armée libanaise a elle estimé que les raids israéliens visaient à "empêcher l'achèvement" de son déploiement dans cette région, conformément à l'accord de cessez-le-feu qui avait mis fin il y a près d'un an à la guerre entre le Hezbollah et Israël.

Ces frappes israéliennes ont déjà été condamnées par le président libanais Joseph Aoun et par l'Iran, qui a dénoncé vendredi des "attaques sauvages" et appelé la communauté internationale à réagir.