Guadeloupe: l'autonomie, pas la préoccupation première des habitants

Manifestation autour d’un rond-point de Pointe-à-Pitre, le 27 novembre en Guadeloupe (Photo, AFP).
Manifestation autour d’un rond-point de Pointe-à-Pitre, le 27 novembre en Guadeloupe (Photo, AFP).
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Publié le Dimanche 28 novembre 2021

Guadeloupe: l'autonomie, pas la préoccupation première des habitants

  • Emaillé de violences, dégradations, pillages, incendies et blocages routiers, le mouvement a embrassé des revendications sociales, économiques et identitaires
  • Détonateur «de problèmes bien plus profonds», le débat sur l'obligation vaccinale et le pass sanitaire pose cependant en creux la question de l'autonomie

LE GOSIER: La question de l'autonomie, mise sur la table par le gouvernement, semble loin des préoccupations actuelles des habitants de Guadeloupe, en proie à une grave crise aux multiples facettes qui pose cependant la question de leur "rapport" avec l'Etat français.

"A mon avis, c'est pour noyer le poisson. Pourquoi parler d'autonomie, qui ne figure pas dans les revendications principales" du mouvement de contestation, lance Rosemonde Thrasibule, une habitante du Lamentin de 58 ans.

"Ce n'est pas ce qui nous intéresse là, dans un premier temps. Il faudra en parler certes, mais le moment venu", ajoute-t-elle, interrogée par l'AFP samedi.

La veille, dans une allocution télévisée aux Guadeloupéens, le ministre des Outre-Mer Sébastien Lecornu avait déclaré que le gouvernement était "prêt" à parler de "l'autonomie" de l'île, abordée en "creux" par les élus locaux au cours des dernières réunions.

"C'est du cinéma, du bluff, pour gagner du temps. Avant de parler (autonomie), il y a des priorités, beaucoup de choses à régler" abonde "G", qui réside lui aux Abymes.

Parmi les priorités, ce trentenaire liste le retrait de l'obligation vaccinale pour les soignants et pompiers, ainsi que du pass sanitaire, éléments déclencheurs de la crise.

Emaillé de violences, dégradations, pillages, incendies et blocages routiers, le mouvement a embrassé des revendications sociales, économiques et identitaires, révélant les attentes d'une population où beaucoup vivent sous le seuil de pauvreté et où le chômage des jeunes explose.

Détonateur "de problèmes bien plus profonds", le débat sur l'obligation vaccinale et le pass sanitaire pose cependant en creux la question de l'autonomie, dans la mesure où il "vient heurter nos réalités profondes et notre identité", selon Jean-Marie Gotin, 59 ans.

Ce conseiller principal d'éducation dans un collège des Abymes développe: "Si un département français refuse une loi votée par le parlement français, alors cela pose le problème de notre rapport à la France. On ne peut pas à la fois être dedans et dehors. A partir du moment où nous acceptons le droit commun, les contraintes pèsent sur notre réalité."

"Il y a une contradiction qui ne nous permet pas d'avancer. Nous devons nous interroger sur comment réaménager notre rapport avec la France car le cadre actuel ne semble pas compatible avec nos besoins de développement et notre épanouissement collectif", ajoute-t-il, jugeant que "la période est intéressante car elle nous place face à notre miroir et notre avenir".

«Malentendu à régler»

Comme Jean-Marie Gotin, Tatiana, habitante des Abymes âgée de 43 ans, pense que "les spécificités (locales) que la métropole n'a pas" doivent être prises en compte.

Selon eux, le débat se posait avec moins d'acuité en 2009, date du dernier mouvement de contestation d'ampleur en Guadeloupe, mais "chaque crise remet toujours sur la table du degré de pouvoir de nos politiques" souligne Tatiana.

Dès lors, "il y a un malentendu à régler", sinon la question du rapport à la France "se posera de nouveau demain (quand) une autre loi viendra imposer quelque chose qui heurte nos réalités" estime Jean-Marie Gotin.

Les élus locaux, justement, disposent déjà de compétences propres, par exemple concernant la distribution de l'eau, problème chronique sur l'île.

Rosemonde Thrasibule pointe leurs promesses aux jeunes non tenues, dont le taux de chômage est bien supérieur à celui de la moyenne nationale (35% contre 20% en 2020).

"Oui, ils sont laissés pour compte. Mais nos hommes politiques leur promettent, par du porte-à-porte avant les élections, de leur trouver un emploi s'ils votent pour eux. Puis une fois élus, ils les laissent à quai."

Aussi, estime-t-elle, davantage d'autonomie, quelle que soit sa forme éventuelle, "ne changera rien" s'ils ne prennent pas leurs responsabilités. 


Salamé au 20H: Glucksmann «très fier» mais reconnaît une «incompatibilité» s'il concourt en 2027

L'eurodéputé Place publique Raphaël Glucksmann s'est dit jeudi "très heureux", "très fier", de voir sa compagne Léa Salamé présenter le 20 Heures de France 2 depuis lundi, tout en reconnaissant une "incompatibilité" s'il se présentait à la présidentielle en 2027. (AFP)
L'eurodéputé Place publique Raphaël Glucksmann s'est dit jeudi "très heureux", "très fier", de voir sa compagne Léa Salamé présenter le 20 Heures de France 2 depuis lundi, tout en reconnaissant une "incompatibilité" s'il se présentait à la présidentielle en 2027. (AFP)
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  • Interrogé sur la position de Léa Salamé s'il venait à concourir à la présidentielle en 2027, il a reconnu que "c'est évident que ce sera dans ce cas-là un problème et une incompatibilité", sans lever davantage le voile sur ses intentions
  • "On est en 2025 et une femme n'a pas les opinions politiques de son mari et je peux vous garantir d'ailleurs que, en l'occurrence, c'est probablement très vrai sur certains sujets"

PARIS: L'eurodéputé Place publique Raphaël Glucksmann s'est dit jeudi "très heureux", "très fier", de voir sa compagne Léa Salamé présenter le 20 Heures de France 2 depuis lundi, tout en reconnaissant une "incompatibilité" s'il se présentait à la présidentielle en 2027.

"J'ai été extrêmement fier et j'ai trouvé que c'était un moment incroyable pour elle donc c'est ma fierté pour elle, pour ce qu'elle représente, pour ce à quoi elle aspire", a déclaré le chef de Place publique sur franceinfo, rappelant que le couple "a toujours su bien être complètement séparés dans (ses) carrières".

Interrogé sur la position de Léa Salamé s'il venait à concourir à la présidentielle en 2027, il a reconnu que "c'est évident que ce sera dans ce cas-là un problème et une incompatibilité", sans lever davantage le voile sur ses intentions.

"On est en 2025 et une femme n'a pas les opinions politiques de son mari et je peux vous garantir d'ailleurs que, en l'occurrence, c'est probablement très vrai sur certains sujets", a ajouté le responsable politique, qui s'exprime très rarement sur sa vie privée.

Ne sont-ils pas d'accord sur tout ? "Ah ben non, non, d'ailleurs, c'est un fait que je partage devant vous", a-t-il ironisé.

Mais "à la fin, je vous dis, il n'y aura pas de conflit d'intérêts en cas de" candidature à la présidentielle, a-t-il conclu.

Alors que le gouvernement Bayrou est à quelques jours de sa très probable chute, les manœuvres vont bon train pour sa succession, le PS souhaitant être appelé à former un gouvernement.

"Je veux une personnalité de gauche", a expliqué Raphaël Glucksmann, soucieux "d'essayer autre chose", "une autre méthode" après "deux gouvernements minoritaires de droite successifs".

Mais, a-t-il prévenu, "la personnalité qui doit faire un travail qui est très ingrat" comme Premier ministre sans majorité parlementaire, "ne doit pas être suspecté d'avoir des ambitions pour la suite parce que sinon, les forces politiques a priori de toute façon refuseront de lui faire des cadeaux".

"Je serais suspecté de cela", a-t-il estimé.


LR ne censurera «ni un gouvernement PS, ni un gouvernement RN», assure Wauquiez

La ministre déléguée et porte-parole du gouvernement français Sophie Primas, le ministre français des Outre-mer Manuel Valls et le ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement Patrick Mignola quittent l'Élysée à Paris après une réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, le 3 septembre 2025. (AFP)
La ministre déléguée et porte-parole du gouvernement français Sophie Primas, le ministre français des Outre-mer Manuel Valls et le ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement Patrick Mignola quittent l'Élysée à Paris après une réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, le 3 septembre 2025. (AFP)
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  • Selon son entourage, le patron des députés LR a défini cette ligne "dès l'été 2024" après la dissolution, lorsqu'il s'était engagé à "ne censurer d'office aucun gouvernement, sauf s'il y a des ministres LFI"
  • "Mais évidemment, on ne s'interdit rien ensuite en fonction de la politique qui est menée", a ajouté cette source

PARIS: Les Républicains ne censureront "ni un gouvernement PS, ni un gouvernement RN" pour éviter "une instabilité catastrophique", a assuré jeudi le patron des députés LR Laurent Wauquiez qui a cependant précisé qu'un "grand nombre" de ses troupes ne votera pas la confiance lundi à François Bayrou.

"On ne censurera pas un gouvernement socialiste, on ne censurera pas un gouvernement RN", a affirmé le député de Haute-Loire sur BFMTV.

"Nous ne faisons pas partie de ceux qui font tomber des gouvernements dans ce pays, tout simplement (...) parce que je pense que l'instabilité est catastrophique pour le pays".

Selon son entourage, le patron des députés LR a défini cette ligne "dès l'été 2024" après la dissolution, lorsqu'il s'était engagé à "ne censurer d'office aucun gouvernement, sauf s'il y a des ministres LFI".

"Mais évidemment, on ne s'interdit rien ensuite en fonction de la politique qui est menée", a ajouté cette source.

Comme Nicolas Sarkozy dans Le Figaro mardi, Laurent Wauquiez a estimé que le Rassemblement national "fait partie de l'arc républicain", tout en reprochant au parti d'extrême droite de ne pas vouloir "réguler l'assistanat".

"Un parti qui se présente à des élections, qui a des élus et qui n'est pas interdit et qui est légal, bien sûr qu'il est dans l'arc républicain", a affirmé celui qui a plaidé ce printemps pour une alliance des droites allant de Gérald Darmanin à Sarah Knafo (Reconquête).

Avant le vote de confiance de lundi à l'Assemblée, qui devrait acter la chute du gouvernement, il s'est déclaré "déçu" par François Bayrou, qui ne s'est pas engagé publiquement à revenir sur la suppression de deux jours fériés, alors qu'il "m'avait donné son accord" lors d'une réunion avec la direction de LR mardi à Matignon.

"J'espère qu'aujourd'hui ou demain ce sera clarifié de façon beaucoup plus nette", a ajouté le député de Haute-Loire, laissant entendre que tous les députés LR ne suivront pas dans ces conditions les mots d'ordre du parti pour soutenir le chef du gouvernement.

"A l'intérieur aujourd'hui des Républicains, si jamais la voix de la France qui travaille n'est pas entendue, il y a un grand nombre de députés qui ne voteront" pas la confiance, a-t-il assuré, précisant que lui-même la votera "sans enthousiasme, mais par esprit de responsabilité".


Entre Bayrou et le PS, la défiance règne

Le Premier ministre français François Bayrou quitte le Palais de l'Élysée après une réunion hebdomadaire du cabinet, le 3 septembre 2025. (AFP)
Le Premier ministre français François Bayrou quitte le Palais de l'Élysée après une réunion hebdomadaire du cabinet, le 3 septembre 2025. (AFP)
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  • La tentative de François Bayrou de construire un "grand courant central" en s’alliant à l’aile modérée du PS a échoué, sur fond de malentendus historiques et tensions autour du budget 2025
  • Le Parti socialiste refuse désormais tout compromis, dénonçant une "provocation" dans la méthode Bayrou

PARIS: A Matignon, François Bayrou devait assurer la stabilité en nouant des accords avec le PS. Neuf mois plus tard, le Premier ministre est proche de la chute, ultime chapitre d'une "histoire d'actes manqués" entre les socialistes et le fondateur du MoDem.

François Bayrou connaît ses classiques. Hors micro, il lui arrive de citer cette réplique d'un film dialogué par Michel Audiard: "J'ai été enfant de choeur. Mon père tenait un bistrot. Et j'ai été militant socialiste. C'est dire si j’ai entendu des conneries dans ma vie".

Fasciné par François Mitterrand, mais ancien ministre d’Édouard Balladur et d'Alain Juppé, le patron du MoDem n'est pas d'obédience socialiste. Mais depuis qu'il a choisi d'émanciper le centre de la droite, la frange sociale-démocrate du PS fait l'objet de ses convoitises dans le but de forger ce "grand courant central de la vie politique française". Contrariant ainsi le parti à la rose et son logiciel d'union de la gauche.

"Quelle différence entre Delors et moi ? Entre Jean-Yves Le Drian et moi ? Aucune", a régulièrement plaidé, en privé, le Premier ministre, qui a longtemps espéré le soutien de Michel Rocard en 2007.

Entre François Bayrou et le PS, le premier épisode de cette "histoire d'actes manqués" --expression du premier vice-président du MoDem Marc Fesneau-- date de cette année-là, Ségolène Royal, en ballotage défavorable face à Nicolas Sarkozy, cherchant en vain l'alliance avec le centriste, jusque sous ses fenêtres du 7e arrondissement de Paris.

Le malentendu s'est accentué en 2012 quand François Bayrou, après avoir voté pour François Hollande --"c'est moi qu'il l'ai fait élire", estime-t-il-- se retrouve battu aux législatives par une candidate PS.

Renversement de tendance en 2017: François Bayrou s'allie avec Emmanuel Macron. Moribond après le quinquennat de François Hollande, le PS subit la fuite de ses cadres. Mais sept ans plus tard, le vent a tourné, le président a dissout l'Assemblée et le PS, bien qu'allié avec La France insoumise, est redevenu incontournable.

Après l'échec de Michel Barnier, censuré par le RN dont il convoitait la mansuétude, "le pari de Bayrou était de traiter avec les socialistes", explique un proche. Lesquels, moyennant quelques concessions, laissent passer le budget 2025.

-"Provocation"-

"On a considéré qu’il fallait lui laisser le bénéfice du doute. On se disait que le budget était plutôt imaginé par Attal et élaboré par Barnier. Mais là, c’est le sien. Ce qu’il propose le 15 juillet, c’est une véritable provocation", explique le président des sénateurs socialistes, Patrick Kanner.

Dès l'hiver, les relations se sont rapidement dégradées. Après sa sortie sur le "sentiment" de "submersion" migratoire, les socialistes déposent une motion de censure. "François les a atomisés", se remémore un proche.

L'affaire Bétharram fournit un nouvel épisode, avec une question piquante posée à l'Assemblée par Colette Capdevielle, députée PS des Pyrénées-Atlantiques, le fief du Premier ministre.

Nouvelle contrariété avec la réélection d'Olivier Faure, artisan de l'alliance avec LFI, à la tête du PS. Jusqu'à l'échec du "conclave" sur les retraites qui fragilise la méthode Bayrou.

Dès les annonces du 15 juillet, les socialistes promettent la censure. François Bayrou ne quitte pas Paris mais aucune négociation ne s'enclenche. "Ils étaient en vacances", avance le Premier ministre. Nouveau psychodrame.

"Je me suis dit: un Bayrou qui s’est imposé comme Premier ministre à Macron, il va aussi imposer une méthode, une façon de travailler différemment. Et il ne se passe rien. C'est l'inverse", explique le député PS Jérôme Guedj.

"Bayrou n'a mis personne en condition de voter la confiance. Même avec la meilleure volonté du monde, c'était compliqué", explique une proche de François Hollande. Lequel a pourtant "activement travaillé contre la censure".

François Bayrou annonce un vote de confiance, le PS la lui refuse quasi-immédiatement. Le contre-budget proposé par le PS achève de convaincre le MoDem qu'aucun compromis n'est possible. Rupture consommée.

"Le PS nous a toujours renvoyés dans un camp, n'a jamais ouvert son jeu aux modérés. Continûment, par confort, ils n’ont jamais accepté qu’on puisse être autre chose que le camp de la droite ou le camp Macron, en nous y enfermant", regrette Marc Fesneau.