Visite du président israélien à Ankara: Erdogan prédit une «nouvelle ère»

Le président turc, Recep Tayyip Erdogan (à gauche), et le président israélien, Isaac Herzog. (Photo, AFP/AP)
Le président turc, Recep Tayyip Erdogan (à gauche), et le président israélien, Isaac Herzog. (Photo, AFP/AP)
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Publié le Vendredi 28 janvier 2022

Visite du président israélien à Ankara: Erdogan prédit une «nouvelle ère»

  • Selon Arab News, l'annonce de la nomination d'ambassadeurs est possible avant le voyage du président israélien
  • «Ce sera un bon rappel qu'Ankara est capable de jouer un rôle plus équilibré en ce qui concerne le conflit israélo-palestinien, et les avantages d'une telle position plus impartiale»

ANKARA: Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a prédit le début d'une «nouvelle période» positive dans les relations avec Israël lorsque son homologue israélien, Isaac Herzog, se rendra en Turquie le mois prochain.

Au cours d'une interview télévisée, le dirigeant turc a annoncé que Herzog se rendrait à Ankara avant la mi-février, ce qui a suscité des spéculations parmi les analystes quant à l'imminence de la nomination d'ambassadeurs dans les deux pays.

Bien que les dates précises de la visite n'aient pas encore été révélées, il s'agira du voyage de plus haut niveau d'un responsable israélien en Turquie depuis des années, lorsque le président israélien de l'époque, Shimon Peres, s'est rendu à Ankara à l'invitation d’Erdogan, qui était Premier ministre à cette époque.

Dans son annonce télévisée nocturne, Erdogan a affirmé: «Avec cette visite, une nouvelle période peut commencer dans les relations israélo-turques.»

Selon les experts, tout succès à tourner une nouvelle page dans la relation fragile entre les deux nations dépendra de plusieurs facteurs, notamment la nomination réciproque d'émissaires, et les restrictions sur les activités du Hamas en Turquie.

Herzog et Erdogan se sont entretenus trois fois par téléphone depuis juillet, transmettant tous deux des messages amicaux. La semaine dernière, le ministre turc des Affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, a appelé son homologue israélien, Yair Lapid, la première fois en treize ans qu'une telle communication a eu lieu entre les ministres des Affaires étrangères des deux pays.

Gallia Lindenstrauss, chercheuse principale à l'Institut d'études sur la sécurité nationale en Israël, a déclaré à Arab News que la nomination d'ambassadeurs serait un premier pas concret vers la normalisation des relations turco-israéliennes.

«Il y a une certaine inquiétude israélienne quant au choix de l’ambassadeur du côté turc, mais c’est une question qui peut être résolue», a-t-elle déclaré.

Elle a noté que toute amélioration significative de la situation de la Covid-19 pourrait potentiellement causer des désaccords concernant l'entrée de certains citoyens turcs en Israël.

«Israël pourrait refuser l'entrée à ceux qu'il soupçonne de contribuer à attiser les tensions en Cisjordanie, à Jérusalem-Est et parmi les Palestiniens ayant la nationalité israélienne, et la Turquie pourrait prétendre que ces personnes sont des visiteurs innocents.

«Alors que le rapport qui a fait surface cette semaine sur la volonté turque de freiner certaines des activités militaires orchestrées par le Hamas depuis son territoire est une bonne nouvelle en Israël, un développement négatif dans ce domaine sera une cause supplémentaire de désaccord entre Tel Aviv et Ankara», a ajouté Lindenstrauss.

On ne sait toujours pas dans quelle mesure le soutien vocal de la Turquie à la cause palestinienne, notamment les colonies en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, sera concilié avec le processus de rapprochement.

Des projets énergétiques potentiels entre les deux pays sont également sur la table des négociations, surtout après la décision de Washington de retirer son soutien au gazoduc israélo-grec East Med. Suite à cette décision, Erdogan a déclaré que la Turquie était prête à travailler avec Israël pour relancer le transfert de gaz vers l'Europe via le sol turc.

Ankara est désireuse de diversifier ses ressources énergétiques à la suite de la décision soudaine de l'Iran de couper les flux de gaz vers la Turquie et face à la menace que représente la crise ukrainienne actuelle pour les importations de gaz.

«En ce qui concerne les déclarations turques sur le renouvellement de l'option d'Israël d'exporter du gaz naturel vers la Turquie et de là vers l'Europe, il n'est pas clair si les développements depuis 2016 liés aux exportations de gaz d'Israël vers et à travers l'Égypte, ainsi que les récents développements autour du gazoduc arabe, n’excluent pas un tel gazoduc», a éclairci Lindenstrauss.

Sur l'importance de la visite d'Herzog, elle a ajouté: «Lorsque Shimon Peres s'est rendu en Turquie en 2007, lui et son homologue palestinien, Mahmoud Abbas, ont prononcé des discours l'un après l'autre devant le Parlement turc. C’était le premier discours d'un dirigeant israélien devant le Parlement d'un pays à majorité musulmane.

«Ainsi, ce sera un bon rappel qu'Ankara est capable de jouer un rôle plus équilibré en ce qui concerne le conflit israélo-palestinien, et les avantages d'une telle position plus impartiale.»

Le Dr Selin Nasi, représentante à Londres du Centre de politique d'Ankara et chercheuse respectée sur les relations turco-israéliennes, a déclaré à Arab News que la visite de Herzog serait importante pour la Turquie afin de surmonter son isolement diplomatique actuel et d’améliorer ses relations avec les pays de la région.

Elle a déclaré: «On peut s’attendre à une annonce concernant la nomination des ambassadeurs avant la visite d’Herzog. En fait, ce n'est qu'un détail technique. Les deux pays n'ont pas rétrogradé leurs relations diplomatiques, ils ont juste rappelé leurs ambassadeurs.»

Lors de la prochaine réunion à Ankara, Nasi s'attend à ce que la question palestinienne, l'énergie, le commerce, le tourisme et la sécurité régionale, notamment les équilibres de la Méditerranée orientale, la Syrie, l'Iran et la Libye, soient à l'ordre du jour.

«Ankara préférerait conditionner son rapprochement avec Israël à l'amélioration des conditions de vie du peuple palestinien. En même temps, Israël attendrait de la Turquie un pas en avant en termes d'activités du Hamas dans le pays», a-t-elle ajouté.

Nasi a souligné qu'Israël n'avait jamais fermé sa porte à toute possibilité de dialogue avec la Turquie. «Mais sa condition préalable est clairex: la Turquie doit cesser son soutien au Hamas. Tel Aviv attend donc des assurances claires de la part d’Ankara.»

Pendant ce temps, les experts estiment qu'une résolution de la question chypriote sera la clé pour faire avancer tout projet énergétique entre les deux pays.

Nasi a souligné: «Le sujet de l'énergie est préféré par les politiciens car il crée un agenda positif dans l'opinion publique des deux pays.»

Erdogan devrait se rendre aux Émirats arabes unis le 14 février, une autre étape vers le rétablissement des liens dégradés de son pays avec les pays de la région.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

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Israël: des élus favorables à une loi instaurant la peine de mort pour les «terroristes»

 La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir. (AFP)
La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir. (AFP)
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  • Selon le médiateur israélien chargé des otages, Gal Hirsch, le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient cette initiative
  • La commission a approuvé un amendement au Code pénal, qui sera maintenant transmis au Parlement pour un vote en première lecture, une loi étant instaurée en Israël après une vote en troisième lecture

JERUSALEM: La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir.

La commission a approuvé un amendement au Code pénal, qui sera maintenant transmis au Parlement pour un vote en première lecture, une loi étant instaurée en Israël après une vote en troisième lecture.

Selon le médiateur israélien chargé des otages, Gal Hirsch, le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient cette initiative.

Dans une note explicative de la commission, il est indiqué que "son objectif est de couper le terrorisme à sa racine et de créer une forte dissuasion".

Le texte propose qu'un "terroriste reconnu coupable de meurtre motivé par le racisme ou la haine (...) soit condamné à la peine de mort - de manière obligatoire", ajoutant que cette peine serait "non optionnelle".

La proposition de loi a été présentée par une élue du parti Otzma Yehudit (Force Juive) d'Itamar Ben Gvir.

Ce dernier a menacé de cesser de voter avec la coalition de droite de Benjamin Netanyahu si ce projet de loi n'était pas soumis à un vote parlementaire d'ici le 9 novembre.

"Tout terroriste qui se prépare à commettre un meurtre doit savoir qu'il n'y a qu'une seule punition: la peine de mort", a dit le ministre lundi dans un communiqué.

M. Ben Gvir avait publié vendredi une vidéo de lui-même debout devant une rangée de prisonniers palestiniens allongés face contre terre, les mains attachées dans le dos, dans laquelle il a appelé à la peine de mort.

Dans un communiqué, le Hamas a réagi lundi soir en affirmant que l'initiative de la commission "incarne le visage fasciste hideux de l'occupation sioniste illégitime et constitue une violation flagrante du droit international".

"Nous appelons les Nations unies, la communauté internationale et les organisations pertinentes des droits de l'Homme et humanitaires à prendre des mesures immédiates pour arrêter ce crime brutal", a ajouté le mouvement islamiste palestinien.

Le ministère palestinien des Affaires étrangères et des expatriés, basé à Ramallah, a également dénoncé cette décision, la qualifiant de "nouvelle forme d'extrémisme israélien croissant et de criminalité contre le peuple palestinien".

"C'est une étape dangereuse visant à poursuivre le génocide et le nettoyage ethnique sous le couvert de la légitimité", a ajouté le ministère.


Frappes israéliennes sur le sud du Liban: deux morts 

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah. (AFP)
Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah. (AFP)
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  • Selon un bilan provisoire, "une frappe ennemie d'Israël" dans la région de Nabatiyé a fait lundi "un mort et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé
  • Un drone a visé une voiture à Doueir, a rapporté l'agence nationale d'information Ani

BEYROUTH: Des frappes israéliennes sur le sud du Liban ont tué lundi deux personnes et blessé sept autres, a indiqué le ministère libanais de la Santé, au lendemain de la menace d'Israël d'intensifier ses attaques contre le Hezbollah pro-iranien.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024, Israël continue de mener des attaques régulières contre les bastions du Hezbollah. Et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a accusé dimanche le Hezbollah de tenter de se "réarmer".

Selon un bilan provisoire, "une frappe ennemie d'Israël" dans la région de Nabatiyé a fait lundi "un mort et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé.

Un drone a visé une voiture à Doueir, a rapporté l'agence nationale d'information Ani.

Sur place, un photographe de l'AFP a vu des pompiers tenter d'éteindre l'incendie de la voiture visée qui s'est propagé à d'autres véhicules à proximité. Des ouvriers ramassaient les bris de verre des devantures de commerces endommagées, a-t-il également constaté.

Une autre frappe sur un village de la région de Bint Jbeil a fait un mort, selon le ministère de la Santé.

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah.

Des centaines de personnes ont participé à leurs funérailles dimanche dans la ville de Nabatiyé, scandant "Mort à Israël".

Le Hezbollah a été fortement affaibli par la guerre, avec notamment l'assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah, par une frappe israélienne en septembre 2024 à Beyrouth, mais il demeure financièrement résilient et armé.

Les États-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe, ce que le Hezbollah refuse.

"Nous attendons du gouvernement libanais qu'il fasse ce qu'il s'est engagé à faire, c'est-à-dire désarmer le Hezbollah, mais il est clair que nous exercerons notre droit à l'autodéfense comme convenu dans les termes du cessez-le-feu", avait averti le Premier ministre israélien dimanche.


La Turquie mobilise ses partenaires musulmans autour de Gaza

La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien. (AFP)
La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien. (AFP)
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  • Devant le Comité permanent pour la coopération économique de l'OCI, réuni lundi à Istanbul, le président turc Recep Tayyip Erdogan a critiqué l'attitude "très médiocre" d'Israël
  • "Nous devons apporter davantage d'aide humanitaire aux habitants de Gaza, puis commencer les efforts de reconstruction" a poursuivi le chef de l'Etat en appelant la Ligue arabe et l'OCI à jouer "un rôle moteur" en ce sens

ISTANBUL: La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien.

Les ministres de ces sept pays (Turquie, Arabie saoudite, Qatar, Emirats arabes unis, Jordanie, Pakistan et Indonésie), tous membres de l'organisation de la coopération islamique (OCI), avaient été reçus par Donald Trump fin septembre à New York en marge de l'Assemblée générale de l'ONU, avant la présentation du plan de paix américain six jours plus tard.

Devant le Comité permanent pour la coopération économique de l'OCI, réuni lundi à Istanbul, le président turc Recep Tayyip Erdogan a critiqué l'attitude "très médiocre" d'Israël depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu le 10 octobre, alors que "le Hamas semble déterminé" à respecter l'accord, estime-t-il.

"Nous devons apporter davantage d'aide humanitaire aux habitants de Gaza, puis commencer les efforts de reconstruction" a poursuivi le chef de l'Etat en appelant la Ligue arabe et l'OCI à jouer "un rôle moteur" en ce sens.

En amont de cette réunion, le chef de la diplomatie turque Hakan Fidan a reçu samedi une délégation du bureau politique du Hamas emmenée par Khalil al-Hayya, le négociateur en chef du mouvement islamiste palestinien.

Selon des responsables du ministère des Affaires étrangères, M. Fidan doit appeler à la mise en place de mécanismes permettant aux Palestiniens d'assurer la sécurité et la gouvernance de Gaza.

"Agir avec prudence" 

"Nous devons mettre fin au massacre à Gaza. Un cessez-le-feu à lui seul ne suffit pas", a insisté M. Fidan lors d'un forum à Istanbul.

"Nous devons reconnaître que Gaza doit être gouvernée par les Palestiniens et agir avec prudence", a encore souligné le ministre turc, plaidant de nouveau pour une solution à deux Etats.

Le chef de la diplomatie turque accuse Israël de chercher des prétextes pour rompre le cessez-le-feu.

Mais les efforts d'Ankara, qui multiplie les contacts diplomatiques avec les pays de la région et cherche à infléchir la position pro-israélienne des Etats-Unis, sont vus d'un mauvais œil par Israël qui juge Ankara trop proche du Hamas.

Les dirigeants israéliens ont exprimé à plusieurs reprises leur refus de voir la Turquie participer à la force internationale de stabilisation à Gaza.

En vertu du plan de Donald Trump, sur lequel est basé l'accord de cessez-le-feu, cette force de stabilisation, formée principalement de troupes de pays arabes et musulmans, doit se déployer à Gaza à mesure que l'armée israélienne s'en retirera.

Seuls des pays jugés "impartiaux" pourront rejoindre cette force, a cependant prévenu le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar.

Autre signe de la méfiance du gouvernement israélien : une équipe de secouristes turcs dépêchée pour participer à la recherche de corps, y compris israéliens, dans les ruines de Gaza, attendait toujours en fin de semaine dernière le feu vert israélien pour entrer dans le territoire palestinien, selon Ankara.