Turquie: la loi sur les «quotas d'étrangers» fait craindre une montée de la violence

Des réfugiés syriens marchent dans une rue d'Ankara, en Turquie, le 29 septembre 2015 (Photo, Reuters).
Des réfugiés syriens marchent dans une rue d'Ankara, en Turquie, le 29 septembre 2015 (Photo, Reuters).
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Publié le Mercredi 23 février 2022

Turquie: la loi sur les «quotas d'étrangers» fait craindre une montée de la violence

  • Le ministre de l'Intérieur, Suleyman Soylu, a déclaré que la Turquie appliquera un quota de 25% d'étrangers dans chaque quartier
  • Dans les zones où les Syriens représentent un quart de la population, aucun nouvel étranger ne sera autorisé à entrer

ANKARA: La Turquie a annoncé un plan visant à limiter le nombre d'étrangers vivant dans les différents quartiers qui fait craindre une montée du sentiment anti-immigrés. Le ressentiment envers les réfugiés est déjà élevé dans un contexte de difficultés économiques croissantes.
Le ministre de l'Intérieur, Suleyman Soylu, a déclaré la semaine dernière que la Turquie appliquera un quota de 25% d'étrangers dans chaque quartier. Dans les zones où les Syriens représentent un quart de la population, aucun nouvel étranger ne sera autorisé à entrer.
«Si le nombre d'étrangers dans un quartier dépasse 25%, nous les transférerons dans d'autres quartiers», a affirmé Soylu.
Les étudiants, les familles brisées et les personnes ayant besoin de soins de santé seront exemptés de la nouvelle loi.
Plus de 4 500 Syriens risquent d’être relogés hors du quartier d’Altindag à Ankara, où ils ont été attaqués et harcelés par des foules en colère depuis le meurtre d'un adolescent local par un réfugié syrien en août dernier.
Aucune clarification officielle n'a été fournie sur l'endroit où les migrants seront réinstallés.
La réinstallation des Syriens d'Altindag servira de «projet pilote» pour les autorités turques prévoyant d'étendre le système de quotas à d'autres districts.
La déclaration de Soylu est intervenue le jour même où le ministère de l'Intérieur a annoncé que plus de 193 000 Syriens, dont 84 000 enfants, étaient devenus citoyens turcs à la fin de 2021. Le nombre de Syriens enregistrés sous protection temporaire s'élève à environ 3,7 millions de personnes.
Pour Sinem Adar, associée au Centre d'études appliquées sur la Turquie de l'Institut allemand pour les affaires internationales et la sécurité, la nouvelle réglementation s'inscrit dans un contexte d'une montée des attitudes anti-immigrés couplée à une colère croissante contre l'AKP au pouvoir en raison de la crise économique et de l'impasse de la gouvernance du pays.
«Depuis les élections municipales de 2019, nous observons un éloignement des politiques hospitalières antérieures de l'AKP à l’égard des réfugiés», a-t-elle déclaré à Arab News.
Selon Adar, les réfugiés syriens sont devenus un point focal dans les luttes identitaires ancestrales en Turquie, ce qui a conduit à un débat controversé contre l'immigration.
La police a arrêté des suspects turcs et afghans pour le meurtre d'un réfugié syrien à Istanbul. Le jeune homme a été poignardé alors qu'il dormait dans son appartement.
Les experts affirment également que la gestion des migrations a été systématiquement utilisée pour obtenir un soutien en vue des élections législatives et présidentielles prévues d'ici 2023.
Dans une interview accordée à Reuters lundi, le principal chef de l'opposition turque, Kemal Kilicdaroglu, a déclaré que «la Turquie renverra chez eux les millions de réfugiés syriens qu'elle accueille et rétablira les relations diplomatiques avec le président Bachar al-Assad si l'alliance de l'opposition remporte les élections.»
«L'immigration est devenue l'un des principaux moteurs de la compétition politique. Les principaux partis d'opposition, tels que le Parti républicain du peuple et le Bon parti, ont récemment réorienté leurs efforts vers la politique gouvernementale, et ils s'opposent fortement à l'accueil d'un nombre croissant de réfugiés et de migrants irréguliers par Ankara.» a-t-il ajouté.
Selon Adar, face aux vives critiques de l'opposition, le gouvernement a de plus reconnu le fardeau de l’opinion publique en critiquant davantage l'UE pour son soutien insuffisant, en intensifiant la discussion sur le rapatriement des réfugiés syriens dans le nord de la Syrie et en s'opposant à l’accueil de réfugiés afghans.
«La récente réglementation des quotas est une nouvelle tentative du gouvernement AKP de contenir le mécontentement populaire croissant dans le contexte d'une concurrence politique accrue», a-t-elle signalé.
Adar a révélé que face à la crise économique croissante que traverse la Turquie, le soutien public à l'AKP et à son principal allié, le Parti du mouvement nationaliste, est en forte baisse. Le taux d'approbation du président Recep Tayyip Erdogan sont également en baisse.
D'après Metin Corabatir, président du Centre de recherche sur l'asile et la migration à Ankara, les Syriens se concentrent dans certains quartiers car ils sont proches de leurs lieux de leur travail.
«Ils vivent dans le quartier d’Altindag à Ankara parce qu'il est proche du centre de fabrication de meubles de la capitale où ils travaillent de de manière officieuse», a-t-il déclaré à Arab News.
Les partis politiques ne devraient pas selon lui utiliser la «carte des réfugiés» à des fins électorales.
«S'ils veulent inclure les problèmes de gestion des migrations dans leur campagne électorale, ils devraient se concentrer sur les moyens d'intégrer davantage ces personnes dans la société. Mais jusqu'à présent, personne n'a proposé de solution» à ce sujet, a-t-il expliqué.
«Ces personnes, tant étrangères que réfugiées, devraient rester en Turquie même après les élections. La meilleure politique est de proposer de nouveaux moyens d'emploi, de santé et d'éducation plutôt que de s'engager à les renvoyer ou de leur donner seulement 48 heures pour quitter leur maison et en trouver une nouvelle dans un nouveau quartier», a-t-il ajouté.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


La reconnaissance de la Palestine, message à Israël sur «les illusions de l'occupation» 

La prochaine reconnaissance de la Palestine par plusieurs Etats dont la France en marge de l'Assemblée générale de l'ONU adresse un message claire à Israël sur les "illusions" de l'occupation, a déclaré mercredi à l'AFP la ministre des Affaires étrangères palestinienne Varsen Aghabekian.(AFP)
La prochaine reconnaissance de la Palestine par plusieurs Etats dont la France en marge de l'Assemblée générale de l'ONU adresse un message claire à Israël sur les "illusions" de l'occupation, a déclaré mercredi à l'AFP la ministre des Affaires étrangères palestinienne Varsen Aghabekian.(AFP)
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  • "La reconnaissance n'est pas symbolique. C'est quelque chose de très important car cela envoie un message très clair aux Israéliens sur leurs illusions de [vouloir] continuer leur occupation pour toujours"
  • Cela envoie aussi "un message clair aux Palestiniens : 'nous soutenons votre droit à l'autodétermination'" et "cela nous donne un élan pour l'avenir, car nous allons construire dessus"

RAMALLAH: La prochaine reconnaissance de la Palestine par plusieurs Etats dont la France en marge de l'Assemblée générale de l'ONU adresse un message claire à Israël sur les "illusions" de l'occupation, a déclaré mercredi à l'AFP la ministre des Affaires étrangères palestinienne Varsen Aghabekian.

"La reconnaissance n'est pas symbolique. C'est quelque chose de très important car cela envoie un message très clair aux Israéliens sur leurs illusions de [vouloir] continuer leur occupation pour toujours", a déclaré Mme Aghabekian, en référence à l'occupation de la Cisjordanie et de la bande de Gaza par Israël.

Cela envoie aussi "un message clair aux Palestiniens : 'nous soutenons votre droit à l'autodétermination'" et "cela nous donne un élan pour l'avenir, car nous allons construire dessus", a-t-elle ajouté.


Les groupes de défense des droits exhortent le Liban à protéger la liberté d'expression dans la nouvelle loi sur les médias

Le Parlement libanais devrait s'assurer que le projet de loi sur les médias qu'il examine respecte le droit à la liberté d'expression, ont demandé mardi 14 organisations libanaises et internationales de défense des droits de l'homme. (AFP)
Le Parlement libanais devrait s'assurer que le projet de loi sur les médias qu'il examine respecte le droit à la liberté d'expression, ont demandé mardi 14 organisations libanaises et internationales de défense des droits de l'homme. (AFP)
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  • Les amendements proposés risquent de saper les efforts de réforme, selon les critiques
  • Les ONG demandent au Parlement d'abolir la diffamation criminelle et de mettre fin à la détention préventive

BEYROUTH: Le Parlement libanais devrait s'assurer que le projet de loi sur les médias qu'il examine respecte le droit à la liberté d'expression, ont demandé mardi 14 organisations libanaises et internationales de défense des droits de l'homme.

Il s'agit notamment de décriminaliser la diffamation, le blasphème, l'insulte et la critique des fonctionnaires, d'interdire la détention provisoire en cas d'infractions liées à la liberté d'expression et de supprimer les restrictions onéreuses imposées à la création de médias.

Ces appels interviennent alors que la commission parlementaire de l'administration et de la justice doit reprendre mardi l'examen du projet de loi.

Le 31 août, les membres du Parlement ont reçu des propositions d'amendements au texte du projet de loi qui, selon les organisations, comprenaient la réintroduction de la détention préventive et des dispositions qui criminalisent l'insulte et la diffamation.

Les groupes de défense des droits, dont Amnesty International, le Comité pour la protection des journalistes, Human Rights Watch et Reporters sans frontières, ont prévenu que les amendements proposés limiteraient davantage le travail des organisations de médias qui font l'objet d'une plainte en leur interdisant de publier des documents sur le plaignant tant que la procédure judiciaire est en cours.

Les lois libanaises sur la diffamation criminelle ont été utilisées à maintes reprises pour cibler et réduire au silence les critiques du gouvernement, les activistes et les journalistes au Liban, ces derniers étant régulièrement convoqués devant les agences de sécurité pour leur travail.

"Le Parlement devrait veiller à ce que ces pratiques cessent en adoptant une loi sur les médias qui soit entièrement conforme aux normes internationales en matière de droits de l'homme, notamment en ce qui concerne le droit à la liberté d'expression et à la liberté des médias", ont déclaré les organisations dans un communiqué.

"Le Parlement libanais devrait adopter une loi sur les médias qui inclue les protections des droits pour lesquelles les groupes de défense des droits et des médias libanais se battent depuis longtemps", ont-elles ajouté.

Les groupes de défense des droits, qui ont examiné les amendements proposés, se sont opposés à la réintroduction de la détention provisoire, y compris "dans des circonstances aggravées, telles que l'atteinte à la dignité ou à la vie privée des individus".

La détention provisoire n'est autorisée au Liban que pour les délits passibles de plus d'un an de prison. Elle est expressément interdite pour les délits liés aux médias dans les lois libanaises existantes sur les médias.

"S'il était adopté, cet amendement constituerait un recul significatif pour la protection du droit à la liberté d'expression et à la liberté des médias au Liban", ont déclaré les organisations.

Elles notent que l'amendement proposé ne précise pas ce que signifie "porter atteinte à la dignité ou à la vie privée des individus".

"Une loi vague qui laisse les gens dans l'incertitude quant à l'expression qui peut la violer a un effet dissuasif sur la liberté d'expression, car les gens peuvent s'autocensurer de peur de faire l'objet d'une convocation, d'une détention provisoire ou d'éventuelles poursuites judiciaires", ont-elles ajouté.

"Les dispositions vagues laissent également la loi sujette à des abus de la part des autorités, qui peuvent les utiliser pour faire taire les dissidents pacifiques.

Une telle interdiction législative générale constituerait "une atteinte grave au droit à la liberté d'expression".

Les amendements proposés obligeraient les stations de télévision titulaires d'une licence à fournir au ministère de l'information et au Conseil national de l'audiovisuel des rapports réguliers, y compris des informations détaillées sur la programmation des émissions, et impliqueraient que les médias électroniques soient soumis à un régime d'autorisation préalable plutôt qu'à un régime de notification.

"Si elles ne sont pas élaborées avec soin, ces exigences en matière d'autorisation risquent de permettre une prise de décision arbitraire quant à l'établissement et à l'exploitation des médias et pourraient faciliter les violations du droit à la liberté d'expression et à la liberté des médias", indique la déclaration.

Le Parlement libanais a commencé à discuter d'une nouvelle loi sur les médias en 2010 après qu'un ancien membre du Parlement, Ghassan Moukheiber, et la Fondation Maharat, une organisation non gouvernementale basée à Beyrouth et spécialisée dans les questions relatives aux médias et à la liberté d'expression, ont soumis une proposition visant à modifier la loi sur les publications du Liban, qui est dépassée.

En janvier 2023, le Parlement a créé une sous-commission chargée d'étudier et de modifier le projet de loi sur les médias, dont la version finale a été soumise à la Commission de l'administration et de la justice le 27 mai.

Le projet de loi soumis à la commission en mai comprenait des avancées dans la protection du droit à la liberté d'expression au Liban, notamment l'abolition de la détention provisoire et des peines de prison pour toutes les violations liées à l'expression. Il abroge également les dispositions relatives à la diffamation et à l'insulte du code pénal libanais et de la loi sur le système judiciaire militaire.

La commission de l'administration et de la justice a entamé les discussions sur le dernier projet de loi sur les médias le 29 juillet et a tenu trois réunions sur la question.

Cependant, les amendements proposés, présentés aux membres du Parlement le 31 août, ont été largement contestés par les groupes internationaux de défense des droits pour des dispositions considérées comme restreignant la liberté des médias.

Les groupes de défense des droits ont demandé à la commission de rendre ses discussions publiques afin de garantir la transparence des débats législatifs et de faciliter la participation effective du public.


L'Arabie saoudite, le Qatar et la Chine condamnent l'attaque terrestre israélienne à Gaza

De la fumée s'élève de Gaza après une explosion, vue d'Israël le 17 septembre 2025. (REUTERS)
De la fumée s'élève de Gaza après une explosion, vue d'Israël le 17 septembre 2025. (REUTERS)
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  • L'Arabie saoudite a critiqué la communauté internationale pour son incapacité à mettre fin à l'escalade
  • Le Qatar a réitéré son soutien à la création d'un État palestinien indépendant

RIYADH : L'Arabie saoudite, la Chine et le Qatar ont condamné mercredi l'extension des opérations militaires israéliennes à Gaza, avertissant que l'assaut violait le droit international et menaçait la stabilité régionale.

Dans une déclaration, le ministère saoudien des affaires étrangères a dénoncé ce qu'il a appelé "la poursuite des crimes" par les forces d'occupation israéliennes et a critiqué la communauté internationale pour son incapacité à prendre des mesures efficaces pour mettre fin à l'escalade.

Le Royaume a réaffirmé son rejet des actions qui portent atteinte au droit humanitaire international et a appelé à des efforts internationaux urgents pour mettre fin à la violence et assurer la protection des civils à Gaza.

Le ministère des affaires étrangères du Qatar a également condamné l'opération terrestre israélienne "dans les termes les plus forts", la qualifiant d'extension de la guerre contre le peuple palestinien et de "violation flagrante du droit international".

Il a averti que les actions d'Israël compromettaient les perspectives de paix par des politiques de "colonisation, d'agression et de racisme", et a exhorté la communauté internationale à prendre des mesures décisives pour garantir le respect des résolutions internationales.

Le Qatar a réitéré son soutien à la cause palestinienne et à la création d'un État palestinien indépendant sur les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale.

À Pékin, le porte-parole du ministère chinois des affaires étrangères, Lin Jian, a déclaré que la Chine "s'oppose fermement à l'escalade des opérations militaires d'Israël à Gaza et condamne tous les actes qui portent atteinte aux civils et violent le droit international", en référence au bombardement de la ville de Gaza.