A la frontière turco-syrienne, l'aide humanitaire en sursis

L'ambassadrice américaine aux Nations Unies Linda Thomas-Greenfield (2e G) et l'ambassadeur américain en Turquie Jeff Flake (G) et le sous-gouverneur de Hatay Orhan Akturk (C) posent au poste frontière de Cilvegozu lors d'une visite au centre du Programme alimentaire mondial (PAM) de l'ONU dans le quartier Reyhanli de Hatay le 2 juin 2022. Ozan KOSE / AFP
L'ambassadrice américaine aux Nations Unies Linda Thomas-Greenfield (2e G) et l'ambassadeur américain en Turquie Jeff Flake (G) et le sous-gouverneur de Hatay Orhan Akturk (C) posent au poste frontière de Cilvegozu lors d'une visite au centre du Programme alimentaire mondial (PAM) de l'ONU dans le quartier Reyhanli de Hatay le 2 juin 2022. Ozan KOSE / AFP
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Publié le Lundi 06 juin 2022

A la frontière turco-syrienne, l'aide humanitaire en sursis

  • La Russie, soutien de Damas, a déjà réussi ces dernières années à réduire le passage transfrontalier de l'aide à ce seul point d'accès
  • Ce point de passage, le dernier permettant aux agences onusiennes et leurs partenaires d'atteindre la région d'Idleb, ultime bastion djihadiste et rebelle de Syrie, pourrait fermer le 10 juillet

CILVEGÖZÜ, Turquie: Les poids-lourds sont rangés sur la file de droite, au milieu d'un paysage de cailloux et d'oliviers. C'est par cette route, trait d'union entre la province turque d'Hatay et le nord-ouest syrien, que transitent chaque mois 800 camions d'aide humanitaire de l'ONU.

Ce point de passage, le dernier permettant aux agences onusiennes et leurs partenaires d'atteindre la région d'Idleb, ultime bastion djihadiste et rebelle de Syrie, pourrait fermer le 10 juillet, au risque d'"aggraver les souffrances" des trois millions d'habitants qui y vivent, a alerté jeudi sur place côté turc l'ambassadrice des Etats-Unis à l'ONU, Linda Thomas- Greenfield.

La Russie, soutien de Damas, a déjà réussi ces dernières années à réduire le passage transfrontalier de l'aide à ce seul point d'accès et menace désormais d'utiliser son droit de veto, début juillet, lors d'un vote au Conseil de sécurité de l'ONU pour obtenir sa fermeture.

Pour les observateurs, Moscou cherche à faire du maintien de cet accès humanitaire une monnaie d'échange dans le contexte de la guerre en Ukraine.

Venue dans le sud de la Turquie mesurer l'ampleur de la potentielle crise qui guette, Mme Thomas-Greenfield s'est inquiétée d'un possible afflux de réfugiés syriens, au moment où Ankara dit préparer le retour chez eux d'un million de réfugiés syriens sur les plus de 3,7 millions accueillis sur son sol.

«Pas d'alternative»

"Nous courons à la catastrophe si la résolution [sur l'accès humanitaire en Syrie] n'est pas renouvelée", estime Mark Cutts, coordinateur humanitaire régional adjoint pour la Syrie du département des Affaires humanitaires des Nations unies, depuis le centre de transbordement de l'ONU situé aux abords de la frontière, où des camions cul à cul sont chargés et déchargés chaque jour.

A l'intérieur des remorques, des couches pour bébés, des couvertures, des matelas, mais surtout de la nourriture: des sacs de farine de 15 kilos, du boulgour, du sucre, des pois chiches et des pâtes brunes à base d'arachide destinés aux enfants victimes de malnutrition aiguë.

"Il n'y pas d'alternative à ce mécanisme (...) L'aide à travers les lignes de front (de Damas) n'en est pas une", juge Ammar al Selmo, membre des Casques blancs, des secouristes engagés dans les zones rebelles en Syrie, venu témoigner de la difficile situation sur place auprès de l'ambassadrice américaine.

Dans le nord-ouest de la Syrie, plus de 4,1 millions de personnes sont dépendants de l'aide humanitaire, contre 3,4 millions l'an dernier, selon le Comité international de secours (IRC), rendant son acheminement plus important que jamais.

Au poste-frontière turco-syrien de Cilvegözü-Bab al-Hawa, où les camions d'aide d'humanitaire sont scannés un à un, le gouverneur-adjoint de la province d'Hatay, Orhan Aktürk, s'est toutefois voulu rassurant jeudi face à l'ambassadrice américaine.

"Nos ONG locales continueront dans tous les cas d'acheminer de l'aide", a-t-il assuré, les organisations turques n'entrant pas dans le cadre de la résolution des Nations Unies que la Russie menace de bloquer.

«Désastre»

Un travailleur humanitaire qui suit le dossier de près, et a requis l'anonymat, affirme que le Croissant Rouge turc a proposé à l'ONU d'assurer le passage côté syrien de l'ensemble de l'aide et juge ainsi peu probable le scénario d'une nouvelle crise migratoire.

L'organisation turque achemine en moyenne 500 camions d'aide humanitaire en Syrie chaque mois depuis 2011, selon son président, Kerem Kinik, ce qui en fait un acteur incontournable sur le terrain.

Contacté par l'AFP, M. Kinik n'avait pas répondu dans l'immédiat.

"Il existe très peu d'alternatives viables au mécanisme transfrontalier de l'ONU", juge cependant Sara Kayyali, chercheuse pour Human Rights Watch (HRW), pour qui l'étendue de l'opération transfrontalière de l'ONU et la confiance dont elle bénéficie chez les donateurs la rendent difficilement remplaçable.

Dans son camp de déplacés de la région d'Idleb, Mohammad Harmoush s'inquiète pour son devenir et celui de ses six enfants: "Les livraisons d'aide sont essentielles pour nous. Leur interruption serait un désastre", redoute-t-il.

De l'autre côté de la frontière, à Hatay, Mohammad, quasi-septuagénaire syrien réfugié en Turquie depuis 2015, se préoccupe du sort de ses neveux restés à Idleb.

L'ex-ingénieur originaire d'Homs, fines lunettes et cheveux tirés, se dit incapable de les aider directement. Sans l'aide humanitaire de l'ONU, lâche-t-il, "on peut les considérer comme morts".


L'Égypte coordonne avec la Grèce le retour des victimes du bateau de migrants et met en garde contre les itinéraires irréguliers

L'Égypte a intensifié ses efforts pour freiner la migration irrégulière depuis le lancement d'une stratégie nationale en 2016. (File/AFP)
L'Égypte a intensifié ses efforts pour freiner la migration irrégulière depuis le lancement d'une stratégie nationale en 2016. (File/AFP)
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  • Le ministère a ajouté que l'ambassade était en contact avec les familles des personnes décédées afin d'organiser le transfert des dépouilles dans leur pays d'origine
  • Présentant ses condoléances aux familles des victimes, le ministère a renouvelé son avertissement aux citoyens concernant les risques de la migration irrégulière, exhortant les Égyptiens à protéger leur vie en utilisant des moyens de transport légaux

DUBAI: Les mesures prises par l'Égypte ont reçu le soutien de la communauté internationale, l'Union européenne s'étant engagée à verser 200 millions d'euros de subventions en mars 2024 pour renforcer la gestion des frontières.
Le ministre égyptien des Affaires étrangères, Badr Abdelatty, a demandé à l'ambassade égyptienne à Athènes de renforcer la coordination avec les autorités grecques, a rapporté Ahram Online mardi.

Cette mesure vise à soutenir les survivants et à accélérer le rapatriement des corps des victimes une fois les procédures légales achevées.

Le ministère a ajouté que l'ambassade était en contact avec les familles des personnes décédées afin d'organiser le transfert des dépouilles dans leur pays d'origine.

Présentant ses condoléances aux familles des victimes, le ministère a renouvelé son avertissement aux citoyens concernant les risques de la migration irrégulière, exhortant les Égyptiens à protéger leur vie en utilisant des moyens de transport légaux et réglementés.

L'Égypte a intensifié ses efforts pour freiner la migration irrégulière depuis le lancement d'une stratégie nationale en 2016, les responsables soulignant que le pays ne sera pas utilisé comme voie de transit vers l'Europe.

Les autorités affirment qu'aucun bateau de migrants n'a quitté les côtes égyptiennes depuis l'introduction de la stratégie, bien que l'Égypte accueille près de 10 millions de ressortissants étrangers, y compris des réfugiés, des demandeurs d'asile et des migrants de 133 pays.

L'approche a continué à évoluer au fil des ans, tout récemment avec l'adoption du plan d'action national 2024-2026 par le Comité national pour la lutte et la prévention de la migration illégale et de la traite des personnes.

Des initiatives antérieures ont également soutenu ces efforts, notamment le programme "Lifeboats" de 2019, qui a alloué 250 millions EGP pour créer des opportunités d'emploi dans les villages considérés comme les plus vulnérables à la migration irrégulière.

Les mesures prises par l'Égypte ont bénéficié d'un soutien international, l'Union européenne s'étant engagée à verser 200 millions d'euros de subventions en mars 2024 pour renforcer la gestion des frontières, les capacités de recherche et de sauvetage et les efforts de lutte contre le trafic de migrants.


Explosion du port de Beyrouth: un juge libanais en Bulgarie pour l'enquête

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  • Un tribunal bulgare avait refusé le 10 décembre d'extrader Igor Grechushkin, un citoyen russo-chypriote de 48 ans, faute d'assurances suffisantes du Liban qu'il n'appliquerait pas la peine de mort
  • Arrêté à l'aéroport de Sofia en septembre sur la base d'une notice rouge d'Interpol, il est accusé par les autorités judiciaires libanaises d'"introduction d'explosifs au Liban"

BEYROUTH: Le juge libanais Tarek Bitar s'est déplacé mercredi en Bulgarie pour interroger le propriétaire du navire lié à l'explosion meurtrière dans le port de Beyrouth en 2020, a indiqué un responsable judiciaire à l'AFP.

Un tribunal bulgare avait refusé le 10 décembre d'extrader Igor Grechushkin, un citoyen russo-chypriote de 48 ans, faute d'assurances suffisantes du Liban qu'il n'appliquerait pas la peine de mort.

M. Grechushkin est désigné par les autorités libanaises comme le propriétaire du Rhosus, le navire qui transportait le nitrate d'ammonium débarqué dans le port de Beyrouth dans un entrepôt, où il avait explosé suite à un incendie, faisant plus de 200 morts, des milliers de blessés et d'importants dégâts.

Arrêté à l'aéroport de Sofia en septembre sur la base d'une notice rouge d'Interpol, il est accusé par les autorités judiciaires libanaises d'"introduction d'explosifs au Liban, acte terroriste ayant entraîné la mort d'un grand nombre de personnes et désactivation de machines dans le but de faire couler un navire", selon le parquet bulgare.

"M. Bitar est parti pour Sofia mercredi" et doit interroger M. Grechushkin jeudi, a précisé sous couvert d'anonymat un responsable de la justice libanaise à l'AFP.

L'ambassade libanaise à Sofia s'est occupée de trouver un traducteur et un huissier chargé de prendre en note l'interrogatoire, qui se fera en présence d'autorités judiciaires bulgares, a précisé la même source.

La justice libanaise espère obtenir des informations sur la cargaison de nitrate d'ammonium et en particulier son commanditaire. Elle veut aussi savoir si Beyrouth était la destination finale du navire.

Le juge indépendant Tarek Bitar avait repris en début d'année l'enquête qu'il avait dû interrompre en janvier 2023, se heurtant à l'hostilité d'une grande partie de la classe politique, notamment du Hezbollah qui l'accusait d'impartialité, avant d'être poursuivi pour insubordination.

Son enquête a pu reprendre après l'entrée en fonction du président Joseph Aoun et de son Premier ministre, qui ont promis de préserver l'indépendance de la justice, à la suite de la guerre entre Israël et le Hezbollah dont le mouvement chiite soutenu par l'Iran est sorti très affaibli à l'automne 2024.


«Des habitants meurent de froid»: Gaza frappé par de nouvelles intempéries

Selon le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le Hamas, un nouveau-né est décédé lundi des suites d'une hypothermie sévère causée par un froid extrême. Le ministère ajoute qu'il avait été admis à l'hôpital il y a deux jours et placé en soins intensifs. (AFP)
Selon le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le Hamas, un nouveau-né est décédé lundi des suites d'une hypothermie sévère causée par un froid extrême. Le ministère ajoute qu'il avait été admis à l'hôpital il y a deux jours et placé en soins intensifs. (AFP)
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  • "Avec les fortes pluies et le froid apportés par la tempête Byron, des habitants de la bande de Gaza meurent de froid", a écrit lundi sur X Philippe Lazzarini, le chef de l'agence de l'ONU chargée des réfugiés palestiniens (Unrwa)
  • "Nos aides attendent depuis des mois d'entrer à Gaza. Elles permettraient de couvrir les besoins de centaines de milliers de personnes en détresse", a-t-il déploré

GAZA: De nouvelles pluies hivernales se sont abattues cette semaine sur la bande de Gaza, déjà ravagée par la guerre, faisant au moins 18 morts depuis le début des intempéries.

Des Palestiniens poussant une voiture dans une rue inondée, une charrette tirée par un âne progressant difficilement à travers les eaux, des tentes et des abris de fortune de déplacés inondés: la situation s'aggrave dans un territoire palestinien en ruines.

"Avec les fortes pluies et le froid apportés par la tempête Byron, des habitants de la bande de Gaza meurent de froid", a écrit lundi sur X Philippe Lazzarini, le chef de l'agence de l'ONU chargée des réfugiés palestiniens (Unrwa).

"Nos aides attendent depuis des mois d'entrer à Gaza. Elles permettraient de couvrir les besoins de centaines de milliers de personnes en détresse", a-t-il déploré.

Si un cessez-le-feu est entré en vigueur en octobre après deux années de guerre entre Israël et le mouvement islamiste Hamas, l'ONU estime que l'aide humanitaire arrive en quantité insuffisante face à l'ampleur des besoins de la population démunie.

Nourrissons «en danger»

Selon le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le Hamas, un nouveau-né est décédé lundi des suites d'une hypothermie sévère causée par un froid extrême. Le ministère ajoute qu'il avait été admis à l'hôpital il y a deux jours et placé en soins intensifs.

Trois enfants étaient décédés dans des conditions similaires la semaine dernière, d'après la Défense civile, organisation de premiers secours opérant sous l'autorité du mouvement islamiste.

Si un cessez-le-feu est entré en vigueur en octobre, l'ONU estime que l'aide humanitaire arrive en quantité insuffisante face à l'ampleur des besoins de la population démunie.

Environ 1,3 million de personnes, sur une population de plus de deux millions d'habitants dans le territoire, ont actuellement besoin d'un hébergement d'urgence, selon les Nations unies, qui mettent en garde contre un risque croissant d'hypothermie.

Les nourrissons encourent particulièrement un "grand danger" avec les conditions hivernales, avertit l'organisation.

«Reconstruire le territoire»

La Défense civile de Gaza avait indiqué vendredi qu'au moins 16 personnes étaient mortes en 24 heures des suites de l'effondrement de bâtiments ou des effets du froid.

Outre le nourrisson, le porte-parole de l'organisation, Mahmoud Bassal, a fait état mardi d'un autre décès après l'effondrement du toit d'un bâtiment à la suite de fortes pluies dans le nord-ouest de la ville de Gaza.

Il a précisé que la maison avait déjà été endommagée par des frappes aériennes pendant la guerre.

Des images de l'AFP montrent des secouristes extraire le corps d'un Palestinien des décombres d'un bâtiment. Non loin, des proches en deuil pleurent.

"Nous appelons le monde à résoudre nos problèmes et à reconstruire le territoire afin que nous puissions avoir des maisons au lieu (...) de vivre dans la rue", a déclaré Ahmed al-Hossari, qui a perdu un membre de sa famille.

La bande de Gaza connaît généralement un épisode de fortes pluies à la fin de l'automne et en hiver, mais l'état de dévastation du territoire, des conséquences de la guerre, a rendu ses habitants plus vulnérables.