Le régime iranien poursuit clandestinement le développement d'armes nucléaires

Des travailleurs iraniens devant la centrale nucléaire de Bushehr, à environ 1 200 km au sud de Téhéran, le 26 octobre 2010. (Reuters)
Des travailleurs iraniens devant la centrale nucléaire de Bushehr, à environ 1 200 km au sud de Téhéran, le 26 octobre 2010. (Reuters)
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Publié le Vendredi 23 octobre 2020

Le régime iranien poursuit clandestinement le développement d'armes nucléaires

Le régime iranien poursuit clandestinement le développement d'armes nucléaires
  • Nombre de rapports et de déclarations crédibles de hauts fonctionnaires iraniens ont clairement montré que Téhéran faisait avancer son programme nucléaire même après la signature de l'accord nucléaire en 2015 par le P5+1
  • Selon un rapport publié la semaine dernière par le Conseil national de la Résistance iranienne (CNRI), Téhéran a menti au monde entier lorsqu'il a prétendu avoir cessé ses activités nucléaires dans le cadre du PA

Tout analyste politique, chercheur ou politicien qui continue de préconiser un retour à l'accord nucléaire iranien de 2015, aussi appelé Plan d'action global conjoint (PAGC), doit reconnaître que le régime iranien a utilisé cet accord comme couverture pour intensifier davantage ses projets nucléaires controversés.

Nombre de rapports et de déclarations crédibles de hauts fonctionnaires iraniens ont clairement montré que Téhéran faisait avancer son programme nucléaire même après la signature de l'accord nucléaire en 2015 par le P5+1 (États-Unis, Royaume-Uni, France, Russie, Chine et Allemagne) et l'Iran.

Selon un rapport publié la semaine dernière par le Conseil national de la Résistance iranienne (CNRI), Téhéran a menti au monde entier lorsqu'il a prétendu avoir cessé ses activités nucléaires dans le cadre du PAGC. Le rapport avance que le régime iranien a poursuivi le développement d'armes nucléaires, en particulier à travers l'Organisation de l'innovation et de la recherche défensives, qui opère dans le cadre du ministère de la Défense et qui est contrôlée par le Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI).

Le CNRI a été le premier à dévoiler les activités nucléaires clandestines de l'Iran sur deux sites majeurs, Natanz et Arak, en 2000. En raison des connexions qu'il entretient en Iran, les informations du CNRI seraient très crédibles. Frank Pabian, conseiller en matière de non-prolifération nucléaire au Laboratoire national de Los Alamos, a déclaré au New York Times en 2010 que le CNRI avait « raison dans 90 % des cas ».

Cette nouvelle révélation ne doit pas surprendre, car le régime iranien a l'habitude de dissimuler ses activités nucléaires à la communauté internationale.

Dans son discours à l'Assemblée générale des Nations unies en 2018, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a fait la une des journaux en déclarant que l'Iran disposait d'un « entrepôt atomique secret pour stocker des quantités massives d'équipement et de matériel provenant de (son) programme secret d'armes nucléaires ». Ces propos survenaient à un moment où Teheran prétendait respecter les termes de l'accord nucléaire. Si les dirigeants iraniens ont insisté sur le fait que l'entrepôt nucléaire était une installation de nettoyage de tapis, des traces d'uranium radioactif ont ensuite été détectées sur le site par les inspecteurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA).

En outre, en saisissant des documents provenant d'une archive nucléaire à Téhéran, également en 2018, Israël a apporté une réponse à certaines questions que l’Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) n'avait pas abordées depuis des décennies. L'Institut pour la science et la sécurité internationale (ISIS) a ensuite publié un rapport dans lequel il affirmait que « l'Iran prévoyait de construire cinq ogives nucléaires, chacune d'une puissance explosive de 10 kilotonnes et pouvant être lancée par missile balistique ».

Le directeur de l'Organisation iranienne de l'énergie atomique, Ali Akbar Salehi, a lui-même ouvertement admis avoir acheté discrètement des pièces de rechange pour le réacteur nucléaire d’Arak alors que l'Iran négociait le plan PAGC et que celui-ci exigeait la destruction des composants d'origine. Salehi a rappelé que « notre dirigeant (l'Ayatollah Ali Khamenei) nous a averti qu'ils (les P5+1) étaient des violateurs d'accords. Nous devions alors agir avec sagesse ». En ce qui concerne le cœur du réacteur nucléaire d'Arak, il a expliqué qu’ « il y a des tubes dans lesquels circule le combustible. Nous avons acheté des tubes similaires, mais je ne pouvais pas le déclarer à l'époque. Quand ils nous ont demandé de verser du ciment dans les tubes... nous avons dit : « Très bien. Nous le ferons ». Mais nous ne leur avons pas dit que nous avions d'autres tubes. Sinon, ils nous auraient demandé de verser du ciment dans ces tubes aussi. Maintenant, nous possédons les mêmes tubes ». 

Par ailleurs, le directeur général de l’Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Mariano Grossi, a fait état en mars de graves préoccupations concernant d'éventuels sites nucléaires clandestins et non déclarés en Iran. Il a indiqué que « l'agence se pose un nombre de questions concernant d'éventuelles matières nucléaires et activités liées au nucléaire non déclarées sur trois sites en Iran. L’AIEA a demandé à accéder à deux de ces sites. Toutefois, l'Iran n'a pas consenti et n'a même pas entamé des discussions de fond pour répondre aux questions de l'agence ».

Ces développements sont la preuve que l'accord nucléaire n'a fait que faciliter et intensifier les dangereuses activités nucléaires du régime iranien. Le PAGC a octroyé aux dirigeants iraniens des fonds supplémentaires considérables. La plus grande partie de ces fonds a été versée dans la trésorerie de la milice du Corps des gardiens de la révolution islamique pour ses projets nucléaires et ses missiles balistiques.

Aujourd'hui, le régime iranien estime que le délai de rupture - le temps nécessaire pour produire suffisamment d'uranium de qualité militaire pour produire une arme nucléaire - est de trois mois et demi. Il enfreint toutes les restrictions imposées par le PAGC, en particulier lorsqu'il a augmenté, à partir du 20 mai, son stock d'uranium faiblement enrichi de 1 020,9 kg à 1 571,6 kg. Cette quantité représente près de huit fois plus que ce que le régime était autorisé à maintenir dans le cadre de l'accord nucléaire.

Dans un rapport publié le mois dernier, l'ISIS (Institut pour la science et la sécurité internationale) a annoncé : « Un nouveau développement est que l'Iran pourrait avoir assez d'uranium faiblement enrichi pour produire assez d'uranium de qualité militaire destiné à une deuxième arme nucléaire. La deuxième pourrait être produite plus rapidement que la première ; au total, il ne faudrait pas plus de 5,5 mois pour produire assez d'uranium de qualité militaire pour deux armes nucléaires ".

Certes, les activités nucléaires clandestines de l'Iran prouvent qu'à force de jouer l’apaisement avec le régime et de le soulager, on ne fait que lui donner les moyens de poursuivre ses ambitions controversées en matière d'armes atomiques.

Dr. Majid Rafizadeh est un politologue irano-américain diplômé de Harvard. Twitter : @Dr_Rafizadeh.

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com