Algérie-États-Unis: un rapprochement et des interrogations

Le ministre algérien des affaires étrangères, Sabri Boukadoum. (RYADKRAMDI/AFP)
Le ministre algérien des affaires étrangères, Sabri Boukadoum. (RYADKRAMDI/AFP)
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Publié le Jeudi 29 octobre 2020

Algérie-États-Unis: un rapprochement et des interrogations

  • Les deux parties ont évoqué de nombreux dossiers «d’intérêt commun» relatifs à la coopération militaire bilatérale
  • En matière d’armement, l’offre américaine n’a pas trouvé l’écho souhaité

PARIS: Les observateurs les plus avertis ont été surpris par la visite de Mark Esper en Algérie, au début d’octobre, dans le cadre d’une tournée nord-africaine. D’autant qu’elle intervient à la fin du mandat de Donald Trump, dont le «désintérêt» pour l’Afrique est notoire.

Le secrétaire américain à la Défense est lui-même partisan du désengagement des troupes américaines du théâtre africain et de leur redéploiement dans d’autres contrées, en prévision d’une confrontation potentielle avec la Chine et la Russie. En témoigne la décision de retirer 800 soldats d’Afrique de l’Ouest et de fermer la base de drones à Agadez (Niger).

Il est probable que Mark Esper se soit subitement rallié – par conviction ou par calcul – à la thèse du général Stephen Townsend, patron de l’AfriCom (Commandement des États-Unis pour l’Afrique). Ce dernier est plus favorable au maintien de forces substantielles en Afrique, pour mieux contrer les velléités d’expansion des Russes et des Chinois et lutter plus efficacement contre le terrorisme.

Stephen Townsend, dont la présence à Alger a précédé d’une semaine celle d’Esper, croit fermement que les intérêts de son pays en Afrique du Nord passent inévitablement par une coopération stratégique avec l’Algérie. «Nous avons beaucoup à apprendre et à partager les uns avec les autres. Renforcer cette relation est très important pour nous», a-t-il déclaré à l’issue de sa visite. 

Quelques jours plus tard, Mark Esper lui emboîte le pas en déclarant que son pays continuerait à «travailler main dans la main avec l’Algérie pour renforcer les liens militaires et promouvoir la sécurité et la stabilité régionales.»

Après un entretien avec le président Tebboune, également en charge du portefeuille de la Défense, le chef du Pentagone s’est réuni avec le chef d’État-Major algérien, Saïd Chengriha, entouré de la fine fleur de l’armée et du renseignement.  

Dossiers d’intérêt commun

Au cours de cette escale éclair d’environ cinq heures, déjeuner compris, les deux parties ont évoqué de nombreux dossiers «d’intérêt commun» relatifs à la coopération militaire bilatérale et à la sécurité en Afrique du Nord, au Sahel et en Méditerranée. 

Il a évidemment été question de la situation en Libye et au Mali, deux pays où l’Algérie tente une médiation politique entre les différents belligérants, en vue d’une solution pacifique. Les États-Unis apportent leur soutien à cette initiative, mais en apparence seulement. Car dans les faits, Washington n’a pas hésité, en avril dernier, à poser son veto à la candidature du diplomate algérien Ramtane Lamamra au poste d’envoyé spécial de l’Organisation des nations unies (ONU) en Libye, en remplacement du Libanais Ghassan Salamé. Et ce, contre l’avis des quatorze autres membres du Conseil de sécurité de l’ONU qui lui étaient favorables. Une attitude jugée inamicale par Alger. Ce blocage est d’autant plus surprenant qu’il n’a fait que retarder la médiation onusienne dans un pays plombé par une interminable guerre civile. 

L’autre point de désaccord, concerne les propos tenus – à partir de Tunis – par Mark Esper la veille de son arrivée à Alger à l’endroit de la Russie et de la Chine, deux partenaires stratégiques de l’Algérie. Il a clairement affirmé que «l’action diplomatique des États-Unis visait à contrer l’influence de ces deux pays», qualifiant leur comportement dans la région de «malveillant, coercitif et prédateur.»

Cette déclaration a été mal perçue par Saïd Chengriha qui recevait quarante-huit heures plus tôt Dmitry Shugaev, directeur de la Coopération militaire russe, accompagné d’une importante délégation d’experts. La volonté américaine de torpiller l’axe Alger-Moscou dans le domaine militaire et de l’armement est certainement à l’origine de la sortie intempestive d’Esper. 

En matière d’armement, l’offre américaine n’a pas trouvé l’écho souhaité. L’armée algérienne préfère s’équiper auprès de la Russie. Son partenaire historique lui fournit près de 90 % de son armement et lui permet d’acquérir des systèmes et équipements de haute précision et parfois de dernière génération. De surcroît, l’Algérie dispose d’un accès au système russe de géopositionnement, Glonass, équivalent au système américain GPS. Autant dire qu’elle n’est pas prête à sacrifier un allié aussi stratégique. 

Enfin, le point crucial de la visite de Mark Esper concerne un article introduit dans la nouvelle Constitution, permettant désormais à l’armée algérienne – parmi les plus puissantes d’Afrique – d’opérer à l’extérieur de ses frontières. 

Puissances concurrentes

Le chef du Pentagone s’est donc précipité à Alger pour sonder ses interlocuteurs locaux sur leurs intentions réelles et sur la portée de cette disposition, au cœur de toutes les spéculations. Autrement dit, le Pentagone craint que l’Algérie – pays officiellement neutre – ne devienne le bras armé de puissances concurrentes.  

Or, les autorités algériennes excluent d’emblée cette possibilité et n’hésitent pas à le faire savoir à leurs partenaires. Pour elles, il ne s’agit pas de changer de doctrine mais plutôt de permette à leurs armées d’anticiper toute menace extérieure, et d’exercer un «droit de poursuite» contre le terrorisme et le grand banditisme transfrontaliers. 

Cette démarche, qui pour certains intervient tardivement, trouve légitimement sa justification dans les nombreux conflits qui se déroulent chez ses voisins. Elle sera juridiquement encadrée par la Constitution qui n’autorise le président à y avoir recours qu’après approbation des deux tiers du Parlement. 

Cependant, l’Algérie reste attachée à ses principes fondamentaux de non-ingérence et de non-interférence. À cet égard, la mention de «missions de rétablissement de la paix» inscrite dans le projet initial a été retirée sous la pression de l’armée. 

Bien qu’il reconnaisse que la défense du pays ne se résume pas au contrôle des frontières, Saïd Chengriha a fait savoir au président qu’il ne souhaitait pas engager ses troupes dans des opérations extérieures qui pourraient être synonymes d’ingérence, d’agression ou d’occupation. D’autre part, il n’est pas question pour l’Algérie de prendre le risque de s’enliser dans un conflit extérieur qui, in fine, ne ferait qu’affaiblir son armée et grever ses finances. 

En résumé, la portée de la visite de Mark Esper a été quelque peu exagérée. Le développement des relations militaires entre l’Algérie et les Etats-Unis se limitera probablement au volet sécuritaire et au contreterrorisme. Une coopération qui a commencé au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, lorsque les services algériens ont fourni à leurs homologues américains de précieux renseignements sur les réseaux d’Al-Qaïda. Depuis, la CIA, le FBI et la NSA continuent de solliciter le concours des Algériens dans la lutte contre le terrorisme et inversement. Sur les autres questions internationales, les agendas des deux pays divergent complétement. 

 


Israël rejette une enquête de l'ONU l'accusant de «génocide» à Gaza

Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts dans la bande de Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire palestinien. (AFP)
Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts dans la bande de Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire palestinien. (AFP)
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  • "Israël rejette catégoriquement ce rapport biaisé et mensonger et appelle à la dissolution immédiate de cette commission d'enquête", a indiqué le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué
  • Une commission d'enquête internationale indépendante de l'ONU a accusé mardi Israël de commettre un "génocide" à Gaza depuis octobre 2023 avec l'intention de "détruire" les Palestiniens

JERUSALEM: Israël a "rejeté catégoriquement" mardi le rapport d'une commission d'enquête internationale indépendante des Nations unies qui l'accuse de commettre un "génocide" dans la bande de Gaza depuis octobre 2023.

"Israël rejette catégoriquement ce rapport biaisé et mensonger et appelle à la dissolution immédiate de cette commission d'enquête", a indiqué le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué.

Une commission d'enquête internationale indépendante de l'ONU a accusé mardi Israël de commettre un "génocide" à Gaza depuis octobre 2023 avec l'intention de "détruire" les Palestiniens, mettant en cause le Premier ministre Benjamin Netanyahu et d'autres responsables israéliens.

En riposte à une attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre 2023, Israël a lancé une offensive dans la bande de Gaza qui a fait des dizaines de milliers de morts et détruit une grande partie du territoire palestinien, où le mouvement islamiste palestinien a pris le pouvoir en 2007.

La commission, qui ne s'exprime pas au nom de l'ONU et est vivement critiquée par Israël, est arrivée "à la conclusion qu'un génocide se produit à Gaza et continue de (s'y) produire", a déclaré à l'AFP sa présidente, Navi Pillay.

Elle a conclu que les autorités et les forces de sécurité israéliennes avaient commis "quatre des cinq actes génocidaires" définis par la Convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime du génocide.

A savoir: "meurtre de membres du groupe; atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe; soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle; et mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe".

Cette commission a conclu que le président israélien, Isaac Herzog, Benjamin Netanyahu et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, avaient "incité à commettre un génocide et que les autorités israéliennes (n'avaient) pas pris de mesures" pour les en empêcher.

Le ministère des Affaires étrangères israélien a accusé les auteurs du rapport de "servir de relais au Hamas", affirmant qu'ils étaient "connus pour leurs positions ouvertement antisémites — et dont les déclarations horribles à l'égard des Juifs ont été condamnées dans le monde entier."

L'attaque du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts dans la bande de Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire palestinien.

L'ONU y a déclaré la famine, ce qu'Israël dément.


«Gaza brûle», déclare le ministre israélien de la Défense après des frappes intenses

Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza. (AFP)
Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza. (AFP)
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  • "Gaza brûle. Tsahal frappe d'une main de fer les infrastructures terroristes, et les soldats de Tsahal se battent vaillamment pour créer les conditions nécessaires à la libération des otages et à la défaite du Hamas"
  • "Nous ne céderons pas et ne reculerons pas jusqu'à ce que la mission soit achevée"

JERUSALEM: Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza.

"Gaza brûle. Tsahal frappe d'une main de fer les infrastructures terroristes, et les soldats de Tsahal se battent vaillamment pour créer les conditions nécessaires à la libération des otages et à la défaite du Hamas", a déclaré M. Katz sur X.

"Nous ne céderons pas et ne reculerons pas jusqu'à ce que la mission soit achevée", a-t-il ajouté.

 


Le Qatar est le seul pays capable d'être un médiateur concernant Gaza, souligne Rubio

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  • Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a estimé mardi que le Qatar était le seul pays capable de jouer le rôle de médiateur pour Gaza
  • "Evidemment, ils doivent décider s'ils veulent le faire après la semaine dernière ou non, mais nous voulons qu'ils sachent que, s'il existe un pays dans le monde qui pourrait aider à mettre fin à cela par une négociation, c'est le Qatar"

TEL-AVIV: Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a estimé mardi que le Qatar était le seul pays capable de jouer le rôle de médiateur pour Gaza, malgré une frappe israélienne ciblant des dirigeants du Hamas dans l'émirat.

"Evidemment, ils doivent décider s'ils veulent le faire après la semaine dernière ou non, mais nous voulons qu'ils sachent que, s'il existe un pays dans le monde qui pourrait aider à mettre fin à cela par une négociation, c'est le Qatar," a déclaré M. Rubio aux journalistes alors qu'il se rendait à Doha depuis Israël.