En Cisjordanie, scènes de guérilla urbaine entre Palestiniens

Huda al-Nabulsi, la mère d'Ibrahim al-Nabulsi, qui a été tué lors d'affrontements avec l'armée israélienne dans la ville de Naplouse le 9 août, s'exprime lors d'un entretien à son domicile, le 20 septembre 2022, à Naplouse en Israël Cisjordanie occupée. (AFP)
Huda al-Nabulsi, la mère d'Ibrahim al-Nabulsi, qui a été tué lors d'affrontements avec l'armée israélienne dans la ville de Naplouse le 9 août, s'exprime lors d'un entretien à son domicile, le 20 septembre 2022, à Naplouse en Israël Cisjordanie occupée. (AFP)
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Publié le Mercredi 21 septembre 2022

En Cisjordanie, scènes de guérilla urbaine entre Palestiniens

  • Mardi matin, les commerces avaient baissé leur rideau dans la Vieille Ville en proie à des affrontements au parfum de guérilla urbaine
  • En cause: l'arrestation de Moussab Shtayyeh, jeune leader en vogue des islamistes du Hamas, mouvement rival du Fatah laïc du président Mahmoud Abbas, non par les forces israéliennes, mais palestiniennes

NAPLOUSE: Des jeunes qui caillassent des blindés de la police locale, des tirs nourris à balles réelles et des rues incendiées. A Naplouse, des affrontements entre Palestiniens témoignent du chaos croissant dans le nord de la Cisjordanie sur fond d'une multiplication des raids israéliens.

Mardi matin, les commerces avaient baissé leur rideau dans la Vieille Ville en proie à des affrontements au parfum de guérilla urbaine.

En cause: l'arrestation de Moussab Shtayyeh, jeune leader en vogue des islamistes du Hamas, mouvement rival du Fatah laïc du président Mahmoud Abbas, non par les forces israéliennes, mais palestiniennes.

Sur place, des centaines de jeunes palestiniens survoltés menacent les rares journalistes, craignant que leurs images ne permettent aux autorités de les appréhender par la suite.

Dans une tour surplombant les combats mais au creux de cette ville de près de 200 000 habitants tout en collines, les vitres extérieures des studios de la radio al-Hayat et de la télévision publique Palestine TV sont criblées d'impacts de balles.

"Il y a des raisons plus profondes à ces affrontements que Moussab Shtayyeh", note un journaliste palestinien sur place qui a requis l'anonymat.

"Ces jeunes ne sont ni Fatah ni Hamas ni Jihad islamique, ce sont des jeunes Palestiniens d'une nouvelle génération qui ne tombe sous la coupe de personne et qui enrage à la fois contre Israël et l'Autorité palestinienne", ajoute-t-il.

"Israël et l'Autorité palestinienne, c'est le même logiciel", renchérit dans la rue Mohammed Mhawe, manifestant qui écoute du hip-hop pourfendant les "collaborateurs" de l'AP et rendant hommage au "héros de l'islam" Ibrahim al-Nabulsi.

Le «lion» de Tik Tok 

Dans la foulée d'une vague d'attaques anti-israéliennes au printemps, fatales à 20 personnes, les forces israéliennes ont multiplié les raids dans le nord de la Cisjordanie, notamment à Jénine, d'où étaient originaires les auteurs de certains attentats, mais aussi à Naplouse.

Ces deux villes sont situées dans la zone "A" de la Cisjordanie, territoire palestinien occupé depuis 1967 par Israël, où la sécurité est normalement la prérogative des forces palestiniennes et non israéliennes.

A Jénine, plus d'une trentaine de personnes ont été tuées et 200 blessées dans environ 500 opérations, contre une vingtaine de morts, 2 000 blessés et 900 raids à Naplouse, selon les données obtenues par l'AFP auprès d'organisations internationales. Au total, 95 Palestiniens ont été tués cette année dans des affrontements en Cisjordanie, plus haut bilan depuis 2016, selon ces données.

En filigrane de ces tensions, Ibrahim al-Nabulsi, un combattant âgé de 18 ans, a fédéré des centaines, voire des milliers, de jeunes Palestiniens par sa rhétorique musclée contre les forces israéliennes et son appel à fédérer les "résistants" par delà les factions.

Sur les réseaux sociaux, notamment Tik Tok, les comptes de jeunes Palestiniens rendant hommage à Nabulsi, surnommé le "lion de Naplouse" et tué dans un raid israélien début août, ont pullulé ces derniers mois.

Dans le souk, des commerçants vendent effigies, bracelets et pendentifs ornés de la photo de Nabulsi, mâchoire carré, barbe charbonneuse et fusil d'assaut M-16 en main.

"Plus jeune, Ibrahim était un doux. Il aimait le design et la décoration, mais l'injustice tout autour de lui l'a amené de l'autre côté", explique à l'AFP sa mère, Huda, le visage ceint d'un foulard opalin devant des photos de son fils armé.

"La jeune génération qu'il fédérait n'est pas folle. Ce sont des jeunes qui ont grandi sous l'occupation, qui ne connaissent que les raids et l'injustice et tout cela les rend profondément en colère", ajoute son père, Alaa, sans vouloir critiquer l'Autorité palestinienne, accusée par de jeunes Palestiniens d'impassibilité, voire d'être de mèche avec les Israéliens.

"Cette multiplication des raids israéliens à Jénine et Naplouse affaiblit l'Autorité palestinienne", pense-t-il.

«Le jour d'après»

Israël dit de son côté multiplier les raids en Cisjordanie pour "empêcher" de nouveaux attentats en Israël, le Premier ministre Yaïr Lapid affirmant qu'il "n'hésiterait pas à agir partout où l'Autorité palestinienne ne maintient pas l'ordre".

Dans un article évoquant une "Intifada 3.0", en référence aux soulèvements palestiniens de 1987-93 et 2000-2005, le commentateur militaire israélien Alon Ben David estime que la multiplication des raids israéliens "érode le statut déjà contesté de l'Autorité palestinienne".

"Les responsables israéliens disent depuis des années qu'ils doivent se préparer au +jour après Abou Mazen+ (...) Or ce jour est déjà arrivé", écrit-il dans les pages du quotidien Maariv en référence aux craintes de conflits intra-palestiniens pour la succession de Mahmoud Abbas.

A Naplouse, devant les violences qui opposent jeunes palestiniens et forces locales, Abou Saada, 67 ans, lui, craint le pire. "Voir les Palestiniens s'affronter me brise le coeur. Ce n'est pas bon du tout pour nous, Palestiniens".


Israël: le ministre de la Défense avertit qu'il n'y aura "pas de calme" au Liban sans sécurité pour son pays

Un an après le cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne maintient toujours cinq positions dans le sud du Liban, avec des fortifications et des voies d'accès élargies, selon des images satellites analysées par l'AFP. (AFP)
Un an après le cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne maintient toujours cinq positions dans le sud du Liban, avec des fortifications et des voies d'accès élargies, selon des images satellites analysées par l'AFP. (AFP)
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  • Israël avertit qu’aucun calme ne reviendra au Liban tant que sa propre sécurité ne sera pas garantie, intensifiant ses frappes malgré la trêve et affirmant vouloir désarmer le Hezbollah
  • L’Égypte tente de désamorcer les tensions, tandis que l’application du cessez-le-feu reste bloquée : l’armée libanaise dit vouloir démanteler les positions du Hezbollah, mais Israël et les États-Unis accusent Beyrouth de traîner

JERUSALEM: Le ministre de la Défense israélien a averti mercredi qu'il n'y aura "pas de calme" au Liban sans sécurité pour son pays, alors qu'Israël a intensifié ses opérations militaires au Liban ces dernières semaines, en dépit d'un accord de cessez-le-feu.

"Nous ne permettrons aucune menace contre les habitants du nord, et une pression maximale continuera à être exercée et même s'intensifiera", a déclaré Israël Katz lors d'une intervention devant le parlement israélien, avançant pour preuve "l'élimination" dimanche à Beyrouth du chef militaire du Hezbollah.

"Il n'y aura pas de calme à Beyrouth ni d'ordre et de stabilité au Liban tant que la sécurité de l'Etat d'Israël ne sera pas garantie", a ajouté M. Katz en affirmant que son pays allait désarmer le Hezbollah.

Le ministre égyptien des Affaires étrangères a déclaré mercredi que son pays oeuvrait à la désescalade des tensions entre Israël et le mouvement armé libanais soutenu par l'Iran.

"Nous craignons toute escalade et nous sommes inquiets pour la sécurité et la stabilité du Liban", a déclaré ce ministre, Badr Abdel Ati, après sa rencontre avec le président libanais Joseph Aoun à Beyrouth mercredi.

"Nous engageons des efforts considérables pour épargner au Liban tout risque, ou toute atteinte, concernant sa sécurité", a-t-il ajouté.

Israël a frappé le Liban à plusieurs reprises malgré la trêve, affirmant régulièrement cibler les membres et les infrastructures du Hezbollah pour empêcher le groupe de se réarmer, ce qu'il nie être en train de faire.

En vertu de l'accord de cessez-le-feu, l'armée libanaise doit démanteler la présence militaire du Hezbollah sur une bande d'une trentaine de kilomètres entre la frontière avec Israël et le fleuve Litani, plus au nord.

L'armée a soumis un plan au gouvernement, dans lequel elle s'engage à accomplir cette tâche titanesque, avant de procéder par étapes sur le reste du territoire libanais. Mais les Etats-Unis et Israël accusent les autorités libanaises de tarder, face à la ferme opposition du Hezbollah.

Ce dernier invoque notamment le maintien par Israël de cinq postes dans le sud du Liban, dont l'accord de cessez-le-feu stipule pourtant que l'armée israélienne doit se retirer.


Soudan: le chef de l'armée exhorte Trump à mettre fin à la guerre

Des filles soudanaises qui ont fui El-Fasher reçoivent une aide humanitaire au camp de déplacés d'Al-Afad, à Al-Dabba, dans le nord du Soudan, mardi. (AFP)
Des filles soudanaises qui ont fui El-Fasher reçoivent une aide humanitaire au camp de déplacés d'Al-Afad, à Al-Dabba, dans le nord du Soudan, mardi. (AFP)
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  • Abdel Fattah al-Burhane appelle Donald Trump à intervenir pour imposer la paix au Soudan
  • Alors que les violences s’intensifient, les initiatives internationales peinent à avancer

PORT-SOUDAN : Le chef de l’armée soudanaise, Abdel Fattah al-Burhane, en guerre depuis avril 2023 contre un groupe paramilitaire rival, a appelé mercredi le président américain Donald Trump à instaurer la paix.

« Le peuple soudanais se tourne désormais vers Washington pour la prochaine étape : s’appuyer sur l’honnêteté du président américain et travailler avec nous — ainsi qu’avec ceux dans la région qui recherchent sincèrement la paix — pour mettre fin à cette guerre », écrit le dirigeant de facto du Soudan dans une tribune publiée dans The Wall Street Journal.

Les tentatives de paix entre Burhane et son ancien adjoint, le chef des Forces de soutien rapide (FSR), Mohamed Hamdan Dagalo, ont échoué à maintes reprises au fil d’un conflit ayant fait des dizaines de milliers de morts, déplacé 12 millions de personnes et provoqué les pires crises de faim et de déplacement au monde.

Trump s’est intéressé pour la première fois à cette guerre la semaine dernière, promettant d’y mettre fin après avoir été exhorté à s’impliquer par le prince héritier saoudien, Mohammed ben Salmane.

« Le consensus parmi les Soudanais est que M. Trump est un dirigeant qui parle directement et agit avec détermination. Beaucoup estiment qu’il a la capacité de s’opposer aux acteurs étrangers qui prolongent notre souffrance », écrit Burhane.

Les États-Unis et les Émirats arabes unis, aux côtés de l’Arabie saoudite et de l’Égypte, tentent actuellement de négocier une trêve.

Dans son texte de 1 200 mots publié mercredi, Burhane affirme qu’il s’agit de choisir « entre un État souverain qui tente de protéger ses citoyens et une milice génocidaire déterminée à détruire des communautés ».

Le gouvernement de Burhan est reconnu au niveau international, et en janvier, les États-Unis ont déterminé que la RSF avait commis un génocide dans la région occidentale du Darfour.

Mais ses propres forces ont également été accusées d’exactions depuis le début de la guerre, notamment d’avoir visé des civils et bombardé sans discrimination des zones résidentielles.

Le militaire de carrière, qui avait collaboré avec Dagalo en 2021 pour écarter les civils d’un gouvernement de transition, écrit mercredi : « J’ai longtemps reconnu que les FSR étaient une poudrière. »

Le chef des FSR, Dagalo, dont les combattants avaient été initialement recrutés par Khartoum pour mener ses guerres dans les périphéries du Soudan, était devenu le bras droit de Burhane après le soulèvement de 2018-2019.

Un long conflit de pouvoir, resté latent, a finalement explosé en guerre ouverte le 15 avril 2023.


Tunisie: l'ambassadeur UE convoqué par le président Saied pour «non respect des règles du travail diplomatique» 

Le président tunisien Kais Saied a convoqué mardi Giuseppe Perrone, ambassadeur de l'Union européenne, pour "lui exprimer une protestation ferme concernant le non-respect des règles diplomatiques", selon un bref communiqué officiel diffusé mercredi à l'aube qui ne précise pas les faits reprochés. (AFP)
Le président tunisien Kais Saied a convoqué mardi Giuseppe Perrone, ambassadeur de l'Union européenne, pour "lui exprimer une protestation ferme concernant le non-respect des règles diplomatiques", selon un bref communiqué officiel diffusé mercredi à l'aube qui ne précise pas les faits reprochés. (AFP)
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  • Le président Saied a exprimé à son interlocuteur son rejet du "recours à des pratiques en dehors des cadres officiels reconnus par les usages diplomatiques"
  • L'UGTT, ancienne co-lauréate du Prix Nobel de la Paix en 2015 pour sa contribution à la phase de démocratisation de la Tunisie, après la révolution de 2011 et la chute du président Zine El Abidine Ben Ali, revendique plus de 700.000 adhérents

TUNISIE: Le président tunisien Kais Saied a convoqué mardi Giuseppe Perrone, ambassadeur de l'Union européenne, pour "lui exprimer une protestation ferme concernant le non-respect des règles diplomatiques", selon un bref communiqué officiel diffusé mercredi à l'aube qui ne précise pas les faits reprochés.

Le président Saied a également exprimé à son interlocuteur son rejet du "recours à des pratiques en dehors des cadres officiels reconnus par les usages diplomatiques".

Lundi, M. Perrone avait reçu Noureddine Taboubi, chef du principal syndicat tunisien UGTT -- qui a récemment menacé de déclencher une grève générale pour obtenir des hausses salariales -- et avait salué "le rôle important" de l'organisation "en faveur du dialogue social et du développement économique" en Tunisie, selon un communiqué de la délégation européenne à Tunis.

L'UGTT, ancienne co-lauréate du Prix Nobel de la Paix en 2015 pour sa contribution à la phase de démocratisation de la Tunisie, après la révolution de 2011 et la chute du président Zine El Abidine Ben Ali, revendique plus de 700.000 adhérents.

Le diplomate européen avait "réaffirmé sa volonté de poursuivre le dialogue avec l'UGTT et de continuer à soutenir la Tunisie sur les plans social et économique, dans divers secteurs", selon la même source. De son côté, le secrétaire général de l'UGTT avait appelé à renforcer et développer la coopération entre la Tunisie et l'Union européenne.

La semaine passée, M. Taboubi a présidé une réunion de l'UGTT où il a apporté son soutien à différents mouvements de grève en cours dans le secteur privé pour réclamer des augmentations de salaires. Il a salué le succès d'une grève générale ayant eu lieu dans la grande ville de Sfax (centre-est) et menacé d'organiser prochainement une grande grève au niveau national.

"L'organisation se dirige vers une grève générale pour défendre les acquis matériels et sociaux des travailleurs face aux difficultés quotidiennes".

M. Taboubi a dénoncé "une baisse du pouvoir d'achat" des Tunisiens face à "des conditions de vie précaires sur le plan des transports, de la santé et de la maladie", défendant "leur droit syndical à se défendre" afin d'obtenir "un salaire décent qui leur fait défaut actuellement".

Le salaire minimum en Tunisie est d'environ 520 dinars (150 euros) pour 48 heures par semaine. Le taux d'inflation reste très élevé notamment pour les produits alimentaires. Il est récemment revenu à environ 5% après avoir atteint un pic de 10% en 2023.