L'instabilité politique en Afrique, une aubaine pour les djihadistes

Des partisans du nouveau chef de la junte burkinabé Ibrahim Traoré tiennent les drapeaux nationaux du Burkina Faso et de la Russie lors d'une manifestation près du siège national de la radio et de la télévision (RTB) à Ouagadougou le 6 octobre 2022. (AFP)
Des partisans du nouveau chef de la junte burkinabé Ibrahim Traoré tiennent les drapeaux nationaux du Burkina Faso et de la Russie lors d'une manifestation près du siège national de la radio et de la télévision (RTB) à Ouagadougou le 6 octobre 2022. (AFP)
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Publié le Vendredi 07 octobre 2022

L'instabilité politique en Afrique, une aubaine pour les djihadistes

  • Juste après le coup au Burkina, l'expert Yvan Guichaoua constate que «les grands vainqueurs ne sont ni les Russes, ni les Français mais le JNIM et EI-Sahel. Quel désastre»
  • D'autant que l'insécurité est souvent l'argument majeur des putschistes et que l'arrivée d'un homme fort peut séduire une partie de l'opinion

PARIS: A chaque putsch, c'est l'image et l'efficacité de l'Etat qui vacille un peu plus. Le coup d'Etat au Burkina Faso, énième avatar de l'instabilité politique en Afrique de l'Ouest, sert avant tout les intérêts des groupes jihadistes.

Le Burkina vient de connaître deux coups en neuf mois, comme le Mali en 2020 puis 2021. La Guinée a changé de régime en 2021 et un coup d'Etat a échoué au Bénin l'année précédente. Quant au président tchadien tué en 2020 par des rebelles, il a été remplacé par son fils au mépris des règles constitutionnelles.

Un tourbillon effarant alors que sévissent les groupes jihadistes, dont la "province" sahélienne du groupe Etat islamique (EI) et le Groupe de soutien à l'Islam et aux musulmans (GSIM), affilié à Al-Qaïda.

D'où ce constat d'Yvan Guichaoua, expert de l'université de Kent à Bruxelles, juste après le coup au Burkina. "Les grands vainqueurs ne sont ni les Russes, ni les Français mais le JNIM et EI-Sahel. Quel désastre".

D'autant que l'insécurité est souvent l'argument majeur des putschistes et que l'arrivée d'un homme fort peut séduire une partie de l'opinion.

Mais l'offre sécuritaire est un leurre. Un putsch "déstabilise la structure de l'armée et divise les militaires entre partisans et adversaires du coup", explique Djallil Lounnas, chercheur à l'université marocaine d'Al Akhawayn. "Ca veut dire instabilité, division, purges".

«militaire éclairé»

Par ailleurs, les armées africaines ne sont ni des parangons d'efficacité, ni des modèles de gestion. Alain Antil, spécialiste du Mali à l'Institut français des relations internationales (Ifri), évoque ces gendarmes burkinabè tués par des jihadistes fin 2021 et qui n'étaient plus ravitaillés. "Ils allaient chasser de la gazelle en brousse pour manger. On ne va pas à la lutte contre des adversaires aussi résolus avec ce genre de problème logistique", constate le chercheur.

La junte sortante n'a rien réglé et rien ne permet d'assurer que la nouvelle aura plus de résultats. "Le mythe du militaire éclairé qui règle les problèmes (...) ne se vérifie que très rarement", explique-t-il à l'AFP. Notamment parce que les soldats sont "souvent moins bien outillés que les civils qu'ils remplacent pour comprendre les aspects non-sécuritaires" de la crise.

Au delà, c'est l'idée même de l'Etat qui vacille à chaque fois qu'il change de main. Un Etat déjà accusé d'enrichir les élites de la capitale et de délaisser les vastes zones désertiques dans lesquelles s'engouffrent les groupes jihadistes avec des alternatives de justice et de sécurité.

Dans un communiqué cette semaine, le GSIM a raillé le putsch de Ouagadougou. "Faites savoir aux tyrans que les coups répétés ne leur profiteront pas", a-t-il affirmé, leur conseillant de "trouver la satisfaction dans l'application de la charia".

Les narratifs jihadistes surfent ainsi sur l'impotence des Etats, souligne Lémine Ould Salem, auteur et documentariste mauritanien. "Ils disent: + pas de démocratie, pas d'Etat, pas de constitution", souligne-t-il, décrivant "un discours de délégitimation des institutions étatiques".

De facto, c'est souvent moins l'Etat qui agit face aux djhadistes que l'échelon inférieur. Au Niger, "c'est de la gestion locale (...) et ça ne peut pas tenir", assure Djallil Lounnas. "Il y a un cessez-le-feu dans un village X, mais pas dans le village Y".

La France «épouvantail»

Alain Antil observe pour sa part le piège dans lequel sombrent certains "villages qui, après avoir été menacés par le GSIM, signent un accord de non-agression ce qui les rend, aux yeux du gouvernement et de son armée, complices des jihadistes".

Dans ce tourbillon qui mine ce qui reste de l'Etat-Nation au profit d'allégeances tribales, ethniques, claniques, confessionnelles, la coopération internationale prend l'eau, ouvrant un peu plus les espaces frontaliers aux prédations des groupes armés.

En quittant le G5 Sahel - avec Mauritanie, Tchad, Burkina et Niger - le Mali se prive du droit de poursuite dès que les jihadistes qu'il pourchasse franchissent une frontière.

Et devant l'assemblée générale de l'ONU, son Premier ministre, le colonel Abdoulaye Maïga, a délivré un discours très dur sur ses voisins. Bamako a même arrêté quelques jours des soldats ivoiriens. Bamako "risque d'abîmer toute coopération, y compris sécuritaire", s'alarme Alain Antil.

Dans le même temps, la France, ex-puissance coloniale, est accusée de tous les maux en Afrique de l'ouest au profit de nouveaux partenaires étrangers, Russie en tête.

Si le bilan de Paris est discutable, l'accuser ne sert à rien, estime le Soufan Center, un centre de réflexion sur les questions de sécurité basé à new-York. "La France fait office d'épouvantail ou d'excuse pour justifier la force grandissante des jihadistes". Mais la solution russe n'offre aucune garantie pour s'y substituer.

Michael Shurkin, historien américain spécialiste de l'armée française, pointe pour sa part les "théories du complot selon lesquelles les Français arment en fait les jihadistes".

"Ces théories (...) évitent aux habitants d'avoir à comprendre leur propre responsabilité et à trouver leurs propres solutions", explique-t-il dans une interview au site Atlantico.


Réunion sur Gaza vendredi à Miami entre Etats-Unis, Qatar, Egypte et Turquie

L'émissaire américain Steve Witkoff se réunira vendredi à Miami (Floride, sud-est) avec des représentants du Qatar, de l'Egypte et de la Turquie pour discuter des prochaines étapes concernant la bande de Gaza, a appris l'AFP jeudi auprès d'un responsable américain. (AFP)
L'émissaire américain Steve Witkoff se réunira vendredi à Miami (Floride, sud-est) avec des représentants du Qatar, de l'Egypte et de la Turquie pour discuter des prochaines étapes concernant la bande de Gaza, a appris l'AFP jeudi auprès d'un responsable américain. (AFP)
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  • Le Qatar et l'Egypte, qui font office de médiateurs autant que de garants du cessez-le-feu dans le territoire palestinien ravagé par deux ans de guerre, ont récemment appelé à passer à la prochaine phase du plan de Donald Trump
  • Celle-ci prévoit le désarmement du Hamas, le retrait progressif de l'armée israélienne de tout le territoire, la mise en place d'une autorité de transition et le déploiement d'une force internationale

WSAHINGTON: L'émissaire américain Steve Witkoff se réunira vendredi à Miami (Floride, sud-est) avec des représentants du Qatar, de l'Egypte et de la Turquie pour discuter des prochaines étapes concernant la bande de Gaza, a appris l'AFP jeudi auprès d'un responsable américain.

Le Qatar et l'Egypte, qui font office de médiateurs autant que de garants du cessez-le-feu dans le territoire palestinien ravagé par deux ans de guerre, ont récemment appelé à passer à la prochaine phase du plan de Donald Trump.

Celle-ci prévoit le désarmement du Hamas, le retrait progressif de l'armée israélienne de tout le territoire, la mise en place d'une autorité de transition et le déploiement d'une force internationale.

Le cessez-le-feu à Gaza, entré en vigueur en octobre entre Israël et le Hamas, demeure précaire, les deux camps s'accusant mutuellement d'en violer les termes, tandis que la situation humanitaire dans le territoire reste critique.

Le président américain n'en a pas moins affirmé mercredi, dans une allocution de fin d'année, qu'il avait établi la paix au Moyen-Orient "pour la première fois depuis 3.000 ans."

La Turquie sera représentée à la réunion par le ministre des Affaires étrangères Hakan Fidan.

Dans un discours, le président turc Recep Tayyip Erdogan a quant à lui affirmé que son pays se tenait "fermement aux côtés des Palestiniens".

 

 


Zelensky dit que l'Ukraine a besoin d'une décision sur l'utilisation des avoirs russes avant la fin de l'année

ze;"Nos partenaires ont été informés que la décision doit être prise d'ici la fin de cette année", a déclaré Zelensky. (AFP)
ze;"Nos partenaires ont été informés que la décision doit être prise d'ici la fin de cette année", a déclaré Zelensky. (AFP)
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  • Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a estimé jeudi que l'Ukraine avait besoin d'une décision européenne sur l'utilisation des avoirs russes gelés avant la fin de l'année
  • "Nos partenaires ont été informés que la décision doit être prise d'ici la fin de cette année", a-t-il déclaré. Il avait indiqué auparavant que Kiev aurait un "gros problème" si les dirigeants européens ne parvenaient pas à un accord

BRUXELLES: Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a estimé jeudi que l'Ukraine avait besoin d'une décision européenne sur l'utilisation des avoirs russes gelés avant la fin de l'année, lors d'une conférence de presse à Bruxelles en marge d'un sommet des dirigeants de l'UE sur le sujet.

"Nos partenaires ont été informés que la décision doit être prise d'ici la fin de cette année", a-t-il déclaré. Il avait indiqué auparavant que Kiev aurait un "gros problème" si les dirigeants européens ne parvenaient pas à un accord sur l'utilisation de ces avoirs pour financer l'Ukraine. En l'absence d'accord, Kiev sera à court d'argent dès le premier trimestre 2026.

 

 


Trump impose des restrictions d'entrée à sept autres pays et aux Palestiniens

Des personnes arrivent à l'aéroport international John F. Kennedy de New York, le 9 juin 2025. (AFP)
Des personnes arrivent à l'aéroport international John F. Kennedy de New York, le 9 juin 2025. (AFP)
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  • Donald Trump élargit les interdictions d’entrée aux États-Unis à sept pays supplémentaires, dont la Syrie, et inclut les Palestiniens munis de documents de l’Autorité palestinienne
  • La Maison Blanche invoque la sécurité nationale, tout en prévoyant des exceptions limitées, dans le cadre d’un durcissement général de la politique migratoire

WASHINGTON: Donald Trump a étendu mardi les interdictions d'entrée aux Etats-Unis aux ressortissants de sept pays, dont la Syrie, ainsi qu'aux Palestiniens.

Le président américain a signé une proclamation "restreignant et limitant davantage l'entrée des ressortissants étrangers afin de protéger la sécurité des Etats-Unis", a indiqué la Maison Blanche.

Les nouveaux pays concernés par cette mesure sont le Burkina Faso, le Niger, le Mali, le Soudan du Sud et la Syrie, tandis que le Laos et la Sierra Leone passent de restrictions partielles à totales.

Les Palestiniens disposant de documents de voyage émis par l'Autorité palestinienne sont également visés.

L'administration Trump avait déjà imposé des restrictions totales visant les ressortissants de douze pays et des dizaines d'autres pays se sont vus imposer des restrictions partielles.

S'agissant de la Syrie, la mesure intervient quelques jours après une attaque meurtrière contre des soldats américains dans le centre de ce pays.

L'administration Trump dit avoir identifié des pays où les vérifications sont "tellement insuffisantes qu'elles justifiaient une suspension totale ou partielle de l'admission des ressortissants de ces pays".

La proclamation prévoit cependant des exceptions pour les résidents permanents légaux, les titulaires de visas existants, certaines catégories de visas comme les athlètes et les diplomates, et les personnes dont "l'entrée sert les intérêts nationaux des Etats-Unis".

Depuis son retour au pouvoir en janvier, Donald Trump mène une vaste campagne contre l'immigration illégale et a considérablement durci les conditions d'entrée aux Etats-Unis et l'octroi de visas, arguant de la protection de la sécurité nationale.

Ces mesures visent ainsi à interdire l'entrée sur le territoire américain aux étrangers qui "ont l'intention de menacer" les Américains, selon la Maison Blanche.

De même, pour les étrangers qui "pourraient nuire à la culture, au gouvernement, aux institutions ou aux principes fondateurs" des Etats-Unis.

Le président américain s'en est récemment pris avec virulence aux Somaliens, disant qu'il "ne voulait pas d'eux chez nous".

En juin, il avait annoncé des interdictions d'entrée sur le territoire américain aux ressortissants de douze pays, principalement en Afrique et au Moyen-Orient (Afghanistan, Birmanie, Tchad, Congo-Brazzaville, Guinée équatoriale, Erythrée, Haïti, Iran, Libye, Somalie, Soudan, Yémen).

En revanche, le Turkménistan, pays qui figure parmi les plus reclus au monde, se voit accorder un satisfécit, la Maison Blanche évoquant mardi des "progrès significatifs" dans cet Etat d'Asie centrale.

Du coup, les ressortissants de ce pays pourront à nouveau obtenir des visas américains, mais uniquement en tant que non-immigrants.

Lors de son premier mandat (2017-2021), Donald Trump s'en était pris de façon similaire à certains pays, ciblant principalement des pays musulmans.