Premier procès en France sur les crimes contre l'humanité commis au Liberia

Des membres nigérians de la force ouest-africaine envoyée au Liberia en 1990 pour empêcher la prise de la capitale Monrovia, ici en novembre 1992. (AFP)
Des membres nigérians de la force ouest-africaine envoyée au Liberia en 1990 pour empêcher la prise de la capitale Monrovia, ici en novembre 1992. (AFP)
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Publié le Samedi 08 octobre 2022

Premier procès en France sur les crimes contre l'humanité commis au Liberia

  • Ce sera un des défis de ce procès, filmé pour constituer des archives : permettre à un jury populaire, assisté de trois magistrats, de juger des faits commis il y a trente ans dans un conflit aux racines complexes
  • Pour les éclairer, des victimes libériennes, un expert ainsi qu'un photographe présent au Liberia pendant le conflit participeront aux débats, prévus jusqu'au 4 novembre

PARIS: Actes de barbarie, viols, exécutions sommaires: pour la première fois, une cour d'assises française va juger, à partir de lundi, des crimes contre l'humanité commis dans les années 90 pendant la guerre civile au Liberia, où ces exactions n'ont fait l'objet d'aucun procès.

Dans le box, à Paris, prendra place un commandant d'un des groupes rebelles ayant sévi dans ce petit pays d'Afrique de l'ouest. Agé de 47 ans, Kunti Kamara est accusé d'avoir perpétré lui-même ou supervisé des "actes inhumains" , allant du travail forcé à un assassinat accompagné de cannibalisme, dans le comté de Lofa (nord-ouest) entre 1993 et 1994. Il conteste les faits.

Interpellé en 2018 à Bobigny, M. Kamara comparaîtra à plus de 6.000 kilomètres de son Liberia natal en vertu de la "compétence universelle" de la France, qui lui permet de juger les crimes les plus graves où qu'ils aient été commis, dès lors que le suspect est arrêté sur son territoire.

Salué par les ONG comme un "pas important" contre l'impunité, ce procès va plonger dans la première des deux guerres civiles au Liberia (1989-1996), qui ont fait 250.000 morts et figurent parmi les plus atroces conflits du continent africain.

"Le Liberia est un pays où règne encore une impunité totale par rapport à ces crimes et ce procès est donc très important pour porter la voix des victimes", explique à l'AFP Me Sabrina Delattre, qui représente plusieurs Libériens et l'association Civitas Maximas, à l'origine de l'affaire.

Après avoir collecté des témoignages de victimes, cette ONG avait porté plainte contre Kunti Kamara en France en juillet 2018 - où il résidait depuis deux ans -  conduisant à la désignation d'un juge d'instruction du pôle parisien en charge des crimes contre l'humanité.

Son enquête l'a conduit à se rendre deux fois dans le comté de Lofa où a sévi le Mouvement de libération uni pour la démocratie au Liberia (Ulimo), dont M. Kamara était un "battlefield commander". Ce groupe rebelle était notamment aux prises avec la faction de Charles Taylor, qui purge une peine de 50 ans de prison au Royaume-Uni pour des crimes contre l'humanité dans le Sierra Leone voisin.

Connu des victimes sous l'alias "CO Kundi", Kunti Kamara s'est rendu complice d'une "pratique massive et systématique d'actes inhumains" perpétrés contre la population civile et inspirés "tant par des motifs politiques qu'ethniques", selon l'acte d'accusation.

Il aurait notamment fait subir à une de ses victimes le supplice du "Tabé" - qui consiste à attacher coudes et poignets dans le dos parfois jusqu'à la mort - avant de découper son coeur et de le manger.

M. Kamara aurait également "délibérément toléré" les viols collectifs de deux jeunes femmes, dont l'une s'est constituée partie civile.

Au Liberia, près de 14 ans de guerre civile et 250.000 morts

Des crimes commis pendant la guerre civile au Liberia seront pour la première fois jugés en France à partir de lundi, avec le procès d'un ancien commandant rebelle, Kunti Kamara.

Ce conflit a été l'un des plus atroces du continent africain, avec 250.000 morts entre 1989 et 2003. Il a été marqué par des massacres perpétrés par des combattants souvent drogués, des mutilations, des viols utilisés comme arme de guerre, des actes de cannibalisme et le recrutement forcé d'enfants soldats.

Presque 14 ans de guerre civile 

En décembre 1989, le Front national patriotique du Liberia (NPFL) du chef rebelle Charles Taylor déclenche une guerre civile pour renverser le président Samuel Doe, qui avait installé un régime fonctionnant par la terreur, la corruption et alimentant les haines ethniques.

Charles Taylor s'empare rapidement de la quasi-totalité du territoire. En 1990, une force ouest-africaine empêche la prise de la capitale Monrovia. En 1997, après un accord de paix, Charles Taylor est élu président du Liberia.

En 1999, une nouvelle rébellion des Libériens unis pour la réconciliation et la démocratie (Lurd) éclate au Nord, puis progresse vers Monrovia, soutenue par plusieurs pays voisins. La guerre s'achève par trois mois de siège de la capitale (juin-août 2003). Charles Taylor est contraint de quitter le pouvoir le 11 août 2003.

Un "accord général de paix" est signé, après plus de 13 ans de guerre civile quasi ininterrompue qui ont fait 250.000 morts et des centaines de milliers de déplacés.

Pas de procès au Liberia 

Jusqu'à présent, personne n'a été poursuivi ni condamné au Liberia pour les crimes commis pendant la guerre civile. De nombreuses personnalités impliquées dans le conflit occupent toujours des postes économiques et politiques importants.

Les recommandations de la Commission vérité et réconciliation (TRC) en 2009 sont restées largement lettre morte, notamment au nom du maintien de la paix, certains des chefs de guerre incriminés étant considérés comme des "héros" par leurs communautés.

Taylor condamné pour la Sierra Leone 

Charles Taylor, qui n'a pas été inquiété pour les atrocités commises au Liberia, a en revanche été condamné en 2012 pour des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre perpétrés en Sierra Leone voisine. Sa condamnation à 50 ans de prison a été confirmée en 2013, peine qu'il purge au Royaume-Uni.

Procès à l'étranger 

Quelques procès ont eu lieu à l'étranger.

En 2009 "Chuckie" Taylor, fils de Charles Taylor, a été condamné aux Etats-Unis à 97 ans de prison pour tortures et assassinats commis au Liberia entre 1999 et 2003.

Le trafiquant d'armes néerlandais Guus Kouwenhoven a lui été condamné en 2017 par contumace dans son pays à 19 ans de prison pour trafic d'armes et complicité de crimes de guerre en Guinée et au Liberia.

Mohammed Jabateh, ancien chef de guerre libérien, a été condamné en avril 2018 à trente ans de prison aux Etats-Unis pour avoir caché son passé violent aux autorités américaines lors de sa demande d'asile en 1998, puis pour sa demande de résidence permanente.

En Suisse, un ex-commandant rebelle libérien, Alieu Kosiah, a été condamné en juin 2021 à 20 ans de prison pour des crimes de guerre.

L'ancien chef rebelle Gibril Massaquoi, citoyen sierra-léonais qui vit en Finlande depuis 2008, a été jugé en 2021 pour meurtres, viols et actes de torture, lors d'un procès marqué par une délocalisation inédite sur le sol libérien. Il a été acquitté en avril 2022, le parquet a fait appel.

Défi 

"Kunti Kamara conteste les faits. Il a indiqué qu’il avait été un soldat de l’Ulimo mais a toujours nié avoir commis des exactions contre les civils", affirme à l'AFP une des ses avocates, Marlyne Secci, ajoutant que son client "aborde ce procès comme quelqu'un qui va se faire juger dans un pays qui n’est pas le sien".

Ce sera un des défis de ce procès, filmé pour constituer des archives : permettre à un jury populaire, assisté de trois magistrats, de juger des faits commis il y a trente ans dans un conflit aux racines complexes. Pour les éclairer, des victimes libériennes, un expert ainsi qu'un photographe présent au Liberia pendant le conflit participeront aux débats, prévus jusqu'au 4 novembre.

"Il faudra qu’on soit tous bien attentifs à ce que les jurés comprennent bien le contexte historique, culturel et politique de ce conflit", observe Me Secci.

La France, dont la "compétence universelle" fait actuellement l'objet d'une bataille juridique, n'est pas le premier pays à juger les crimes au Liberia. En juin 2021, la justice suisse a condamné l'ex-commandant de l'Ulimo Alieu Kosiah à 20 ans de prison tandis qu'un autre cadre de ce groupe, Mohammed Jabateh, purge 30 ans de prison aux Etats-Unis pour parjure.

"Les victimes, encore très traumatisées, ont besoin de cette justice, souligne Me Delattre, mais elles craignent les pressions d’anciens rebelles dont les réseaux restent très puissants au Liberia".


Un homme tué par balles près de Grenoble

Un homme non identifié et porteur de deux impacts de balles a été retrouvé mort dans la nuit de mardi à mercredi à Echirolles, en périphérie de Grenoble, a indiqué la police. (AFP)
Un homme non identifié et porteur de deux impacts de balles a été retrouvé mort dans la nuit de mardi à mercredi à Echirolles, en périphérie de Grenoble, a indiqué la police. (AFP)
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  • L'homme a été retrouvé par une passante, vers 02H00, gisant inanimé au sol dans une mare de sang
  • La Division de la criminalité organisée et spécialisée (DCOS, ex-PJ) a été saisie de l'enquête

GRENOBLE: Un homme non identifié et porteur de deux impacts de balles a été retrouvé mort dans la nuit de mardi à mercredi à Echirolles, en périphérie de Grenoble, a indiqué la police.

L'homme a été retrouvé par une passante, vers 02H00, gisant inanimé au sol dans une mare de sang, la mâchoire brisée, avec une trottinette à ses pieds. En arrêt cardio-respiratoire, il a été déclaré décédé sur place par le SAMU.

Deux impacts de balles dans son dos et dans sa mâchoire ont été relevés par la suite par le médecin légiste, selon même la source.

La Division de la criminalité organisée et spécialisée (DCOS, ex-PJ) a été saisie de l'enquête.


«Mieux vaut être un homme en politique»: quand les députés testent le programme Evars

En plein débat budgétaire, les associations veulent convaincre les élus de débloquer des moyens pour ces séances, qu'elles évaluent à 620 millions d’euros par an. (AFP)
En plein débat budgétaire, les associations veulent convaincre les élus de débloquer des moyens pour ces séances, qu'elles évaluent à 620 millions d’euros par an. (AFP)
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  • Prévu dans la loi depuis 2001 et doté d'un contenu depuis la rentrée, le programme d'Education à la vie affective, relationnelle et sexuelle (Evars) aborde, de façon adaptée à chaque âge, la santé reproductive, la prévention, l’égalité filles-garçons
  • A l'Assemblée, une petite vingtaine de députés, sur 577, ont répondu mardi après-midi à l'invitation de Marie-Charlotte Garin (écologiste), Véronique Riotton (EPR) et le Collectif pour une véritable éducation à la sexualité

PARIS: "Mieux vaut être un homme, en politique, qu’une femme". Comme des collégiens ou des lycéens, des députés ont suivi une séance d'Evars, un programme proposé aux élèves pour notamment remettre en cause les stéréotypes sexistes.

Prévu dans la loi depuis 2001 et doté d'un contenu depuis la rentrée, le programme d'Education à la vie affective, relationnelle et sexuelle (Evars) aborde, de façon adaptée à chaque âge, la santé reproductive, la prévention, l’égalité filles-garçons, la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, ainsi que les questions d’orientation et d’identité sexuelles.

A l'Assemblée, une petite vingtaine de députés, sur 577, - principalement de la gauche au centre-droit - ont répondu mardi après-midi à l'invitation de Marie-Charlotte Garin (écologiste), Véronique Riotton (EPR) et le Collectif pour une véritable éducation à la sexualité (Planning familial, Sidaction, Fédération des centres d' information sur les droits des femmes et des familles...) qui milite depuis 2023 pour la généralisation de ces séances.

"Nous voulons faire de la pédagogie auprès des députés pour qu’ils deviennent nos ambassadeurs dans les territoires", explique Marie-Charlotte Garin, en signalant que les députés reçoivent des courriers de parents opposés au programme, notamment de l'association Parents vigilants.

"Nous voulons faire vivre ces séances aux députés pour leur donner des arguments, il y a beaucoup de fantasmes autour de ce programme", observe Mme Riotton, présidente de la Délégation aux droits des femmes.

"On galère" 

Après une première partie sur des sujets à destination des CP (vocabulaire des parties intimes, prévention des violences sexuelles), le Planning familial propose ensuite aux élus de tester "la rivière du doute", outil utilisé cette fois au collège pour réfléchir aux stéréotypes sexistes.

"Je vais vous dire une affirmation et ceux qui sont d'accord se placent à gauche, ceux qui sont contre à droite: +Il vaut mieux être un homme en politique qu’une femme+, lance sa présidente Sarah Durocher.

Chez les députés présents, six sont d'accord. Et comme en classe, le dialogue s’engage.

"Je dis oui, mais c’est ce qu’il faut changer", commence Jean-Francois Rousset (EPR).

"C'est plus difficile d'être une femme, on galère, c'est difficile de se faire entendre", confirme Soumya Bourouaha (GDR). "Il y a beaucoup à changer et ça ne viendra pas des hommes" , renchérit une autre élue.

Second stéréotype: "Les hommes savent naturellement prendre la parole en public. D'accord ou pas?"

"Qu'ils soient compétents ou pas, la réalité montre qu’ils osent plus", remarque Anne-Cécile Violland (Horizons). "Tout à l'heure, j’ai pris spontanément la parole et je ne m’en suis même pas aperçu", constate Jean-Francois Rousset.

 "Sujet politique" 

"Nous voulons que ce programme devienne un sujet politique, dont s'emparent les députés. Il permet d'éviter les LGBTphobies, les féminicides, les maladies sexuellement transmissibles, c'est bénéfique pour les individus et collectivement", plaide Sarah Durocher.

En plein débat budgétaire, les associations veulent convaincre les élus de débloquer des moyens pour ces séances, qu'elles évaluent à 620 millions d’euros par an.

Depuis 2001, la loi impose trois séances annuelles d’information et d’éducation à la sexualité dans les écoles, collèges et lycées, mais elles n’ont jamais été généralisées.

Saisi par le Planning familial, Sidaction et SOS Homophobie, le tribunal administratif de Paris a reconnu mardi que l’État avait manqué à ses obligations, en tardant jusqu'en février dernier pour adopter le programme Evars. Dans son jugement, il écarte les arguments avancés par le ministère de l'Education qui avait fait valoir "la sensibilité du sujet et les controverses qu'il suscite" pour expliquer ce retard.

Les trois associations demandent "la reconnaissance" du "rôle central des associations" dans sa mise en œuvre". "Nous avons formé 150.000 jeunes dans 3.600 établissements, mais nous avons refusé autant de demandes faute de moyens", explique la présidente du Planning.

Pour Sandrine Josso (Horizons), "les députés devraient aussi suivre une formation sur les violences sexistes et sexuelles. Il en existe une depuis 2022 et personne n’y va".


Ukraine: Zelensky accueilli par Macron à Paris pour faire le point sur les négociations

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a été accueilli lundi par son homologue français Emmanuel Macron au palais présidentiel de l'Elysée pour faire le point sur les intenses négociations en cours pour tenter de mettre fin à la guerre en Ukraine. (AFP)
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a été accueilli lundi par son homologue français Emmanuel Macron au palais présidentiel de l'Elysée pour faire le point sur les intenses négociations en cours pour tenter de mettre fin à la guerre en Ukraine. (AFP)
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  • Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a été accueilli lundi par son homologue français Emmanuel Macron au palais présidentiel de l'Elysée
  • Cette nouvelle visite en France, la dixième depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine en février 2022, intervient au lendemain de discussions entre délégations américaine et ukrainienne en Floride

PARIS: Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a été accueilli lundi par son homologue français Emmanuel Macron au palais présidentiel de l'Elysée pour faire le point sur les intenses négociations en cours pour tenter de mettre fin à la guerre en Ukraine, a constaté un journaliste de l'AFP.

Cette nouvelle visite en France, la dixième depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine en février 2022, intervient au lendemain de discussions entre délégations américaine et ukrainienne en Floride, et à la veille d'une rencontre à Moscou entre l'émissaire de Donald Trump, Steve Witkoff, et le président russe Vladimir Poutine.