Les diplomaties turques, russes et syriennes en quête d’apaisement des tensions

Les ministres des Affaires étrangères de la Turquie, de la Russie et de la Syrie devraient se réunir dans le courant du mois (Photo fournie).
Les ministres des Affaires étrangères de la Turquie, de la Russie et de la Syrie devraient se réunir dans le courant du mois (Photo fournie).
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Publié le Lundi 02 janvier 2023

Les diplomaties turques, russes et syriennes en quête d’apaisement des tensions

  • Selon un expert, la réunion serait une étape sur le long chemin de la résolution de la crise syrienne
  • La réconciliation en cours entre Ankara et Damas a le potentiel de renforcer le rôle de la Russie dans l'avenir de la Syrie

ANKARA: Les ministres des Affaires étrangères de la Turquie, de la Russie et de la Syrie devraient se réunir dans le courant du mois, à la suite d'entretiens historiques entre les ministres de la Défense des trois pays à Moscou qui ont réchauffé les relations entre Ankara et Damas.

La chaîne publique turque TRT a annoncé samedi que les ministres des Affaires étrangères russe et turc avaient discuté des préparatifs de la nouvelle réunion, qui devrait avoir lieu dans la seconde quinzaine du mois de janvier. Le lieu de la rencontre n'a pas encore été déterminé.

Les ministres de la Défense et les chefs des services de renseignement de trois pays se sont récemment rencontrés à Moscou dans le cadre du processus de réconciliation en cours entre Ankara et Damas. Ils ont également convenu de poursuivre leurs rencontres.

Joshua Landis, directeur du Centre d'études sur le Moyen-Orient de l'Université d'Oklahoma, a déclaré à Arab News que la réunion des ministres des Affaires étrangères serait «une étape importante sur la voie du retour à une certaine normalité dans la région». 

Elle «permettra de rétablir la confiance et la sécurité le long des 900 kilomètres de frontière entre les deux pays», a-t-il ajouté.

Ankara et Damas s'opposent d'une seule voix à la milice kurde des YPG dans le nord de la Syrie, considérée par la Turquie comme une branche du groupuscule illégal du PKK qui mène une guerre sanglante contre l'État turc depuis des décennies.

Damas considère les YPG comme une entrave à l'intégrité territoriale du pays.

Ankara a également menacé de lancer une offensive terrestre dans le nord de la Syrie pour assurer la «sécurité intérieure» à la suite d'un attentat suicide commis l'année dernière à Istanbul, qu'elle a imputé aux militants kurdes. 

La Turquie et la Syrie ont discuté de coopération en matière de lutte contre le terrorisme lors de la réunion des chefs de la défense. 

Selon M. Landis, la diplomatie est la seule alternative à la guerre et de nouvelles incursions et de nouveaux bombardements ne feraient que radicaliser les populations et porter atteinte à l'ordre public.

«La fin de la menace de Daech passe par la restauration de la souveraineté syrienne et par une force militaire et policière unifiée. Tant que la Syrie sera divisée en trois mini-États en conflit, Daech disposera d'une marge de manœuvre», a-t-il affirmé.

«Du point de vue de la Turquie, seul le régime syrien peut rétablir la sécurité le long de la frontière», a ajouté M. Landis.

«L'accord d'Adana de 1998 a été un grand succès dans le rétablissement de relations normales entre les deux pays. Il a permis la croissance rapide du commerce et des bonnes relations entre les deux pays», a-t-il ajouté.

L'accord d'Adana a été conclu entre la Turquie et la Syrie en 1998 pour expulser le PKK du sol syrien et régler les problèmes de sécurité intérieure de la Turquie.

Le ministre turc des Affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, a laissé entendre jeudi que la Turquie était prête à céder les zones syriennes sous son contrôle à Damas «lorsque la stabilité politique sera établie».

Ankara insiste sur l'établissement d'une «zone tampon» de 30 kilomètres de profondeur le long de ses frontières méridionales et sur le retrait des Forces démocratiques syriennes, un groupe de coordination dont les YPG sont un membre important. 

Les ministres des Affaires étrangères turc et syrien ont eu un bref entretien informel en 2021, en marge d'un sommet régional, et les services de renseignement turcs et syriens sont en constante communication.

Toutefois, M. Landis a déclaré qu'il ne s'attendait pas à ce que l'apparente détente mette fin au conflit syrien cette année.

«Il est optimiste de penser que les nombreux problèmes frontaliers peuvent être résolus en un an, mais une réunion des ministres des Affaires étrangères, puis des présidents turc et syrien, peuvent constituer un bon début», a-t-il indiqué.

La réconciliation en cours entre Ankara et Damas a également le potentiel de renforcer le rôle de la Russie dans l'avenir de la Syrie, alors que Moscou fait actuellement pression pour des négociations tripartites afin d'empêcher toute escalade de l'avancée militaire turque en Syrie.

Selon Sinan Ulgen, directeur du groupe de réflexion EDAM basé à Istanbul, une réunion des ministres des Affaires étrangères marquerait une nouvelle étape dans le rapprochement récemment amorcé entre Ankara et Damas.

«Les attentes de cette première réunion doivent rester relativement faibles car les conditions requises pour progresser dans ces pourparlers sont considérables», a-t-il déclaré à Arab News.

Il a ajouté qu'il restait un long chemin à parcourir avant que la Turquie n’accepte de mettre fin à son soutien aux groupes d'opposition qui combattent le régime syrien, et de se retirer du nord du pays.

«Ces premières délibérations pourraient aboutir à l'adoption d'une feuille de route pour une normalisation complète, dans laquelle les deux parties s'acquitteraient de certaines conditions et Damas fournirait des garanties de sécurité à la Turquie, rappelant l'accord d'Adana», a-t-il déclaré.

Il a toutefois précisé qu'Ankara n'a actuellement aucune raison de retirer ses troupes. Selon l'expert, la Turquie aurait besoin de garanties que le régime syrien puisse contrôler ces zones et empêcher leur utilisation contre les intérêts sécuritaires de la Turquie.

Le processus de normalisation avec Damas pourrait accélérer le retour de millions de réfugiés syriens installés en Turquie, ce qui renforcerait le soutien interne du président Recep Tayyip Erdogan dans un contexte de tensions anti-immigration.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Liban: quatre morts dans un raid israélien, riposte du Hezbollah et des factions alliées

Cette photo prise depuis le kibboutz de Malkia, au nord d'Israël, le long de la frontière avec le sud du Liban, montre de la fumée s'échappant du village libanais de Mays al-Jabal lors des bombardements israéliens le 5 mai 2024 (Photo, AFP).
Cette photo prise depuis le kibboutz de Malkia, au nord d'Israël, le long de la frontière avec le sud du Liban, montre de la fumée s'échappant du village libanais de Mays al-Jabal lors des bombardements israéliens le 5 mai 2024 (Photo, AFP).
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  • Les blessés ont été transportés vers des hôpitaux de la région
  • En près de sept mois de violences transfrontalières, au moins 389 personnes parmi lesquelles 255 combattants du Hezbollah et plus de 70 civils ont été tuées au Liban

BEYROUTH: «Quatre personnes d'une même famille» ont été tuées dans un «raid de l'armée israélienne» sur le village de Mays al-Jabal, a déclaré l'agence officielle d'information libanaise (ANI), actualisant un précédent bilan faisant état de trois victimes.

Il s'agit d'un homme, d'une femme et de leurs enfants âgés de 12 et 21 ans, d'après l'ANI, qui a précisé que deux autres personnes ont été blessées.

Depuis le début de la guerre à Gaza, le Hezbollah libanais, un allié du Hamas palestinien, échange quasi-quotidiennement avec l'armée israélienne des tirs à la frontière libano-israélienne. Des factions palestiniennes et autres groupes alliés ont aussi revendiqué des attaques depuis le Liban contre Israël.

Blessés transportés 

Selon ANI, des habitants du village inspectaient leurs maisons et magasins endommagés dans de précédents bombardements au moment du raid.

Les blessés ont été transportés vers des hôpitaux de la région.

Samedi soir, le Hezbollah a revendiqué des tirs sur des positions militaires dans le nord d'Israël.

Le Hezbollah a déclaré dans un communiqué avoir tiré « des dizaines de roquettes de types Katioucha et Falaq » sur Kiryat Shmona, dans le nord d'Israël, «en réponse au crime horrible que l'ennemi israélien a commis à Mays al-Jabal », qui, selon lui, a tué et blessé des civils.

En près de sept mois de violences transfrontalières, au moins 389 personnes parmi lesquelles 255 combattants du Hezbollah et plus de 70 civils ont été tuées au Liban, selon un décompte de l'AFP. Au moins 11 combattants du Hamas ont été tués selon ce même décompte.

Côté israélien, 11 soldats et neuf civils ont été tués, selon un bilan officiel.


Le forum de Riyad examine le rôle de la traduction dans la promotion de l'identité saoudienne

L'Université Princesse Noura bent Abdelrahman accueillera le 15 mai une conférence intitulée « Traduire l'identité saoudienne à travers d'autres langues et cultures ». (SPA)
L'Université Princesse Noura bent Abdelrahman accueillera le 15 mai une conférence intitulée « Traduire l'identité saoudienne à travers d'autres langues et cultures ». (SPA)
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  • La conférence vise à contribuer à un objectif clé de la Vision 2030 du Royaume, à savoir la promotion des valeurs islamiques et de l'identité nationale, en encourageant les Saoudiens à traduire ces concepts dans d'autres langues et cultures
  • Le rôle de la traduction dans la promotion d'une image positive du Royaume sera également discuté, ainsi que la promotion de la reconnaissance internationale et la mise en évidence de l'impact culturel du Royaume

RIYAD : Le Collège des langues de l'Université Princesse Noura bent Abdelrahman de Riyad accueillera le 15 mai une conférence intitulée « Traduire l'identité saoudienne à travers d'autres langues et cultures ».

L'événement, dont le slogan est « Nous traduisons notre identité », aura lieu au département des conférences et des séminaires et est parrainé par le ministre saoudien de l'Éducation, Yousef Al-Benyan.

Il se concentrera sur le partage du patrimoine culturel, historique, littéraire et intellectuel du Royaume avec un public mondial, a rapporté l'agence de presse saoudienne.


L'interminable attente des proches de jeunes migrants tunisiens perdus en mer

El Hencha fait actuellement face à un exode de jeunes en quête de mieux comme en Europe. (X : @ClimateActionG1)
El Hencha fait actuellement face à un exode de jeunes en quête de mieux comme en Europe. (X : @ClimateActionG1)
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  • Les occupants du bateau étaient surtout des jeunes de 17 à 30 ans, originaires d'El Hencha, bourgade agricole de 6.000 habitants
  • Inès Lafi n'avait aucune idée des intentions de son frère Mohamed, presque 30 ans

EL HENCHA: La plupart avaient gardé le secret: une quarantaine de migrants tunisiens, très jeunes, ont embarqué clandestinement en janvier en quête du "paradis européen" et depuis plus de quatre mois, leurs proches désespèrent de recevoir des nouvelles des disparus.

Ils sont partis vraisemblablement de Sfax (centre), épicentre en Tunisie de l'émigration irrégulière vers l'Italie, la nuit du 10 au 11 janvier sur une mer démontée, selon les familles.

Les occupants du bateau étaient surtout des jeunes de 17 à 30 ans, originaires d'El Hencha, bourgade agricole de 6.000 habitants à 40 kilomètres au nord de Sfax. Une mère et son bébé de quatre mois étaient aussi du voyage.

Inès Lafi n'avait aucune idée des intentions de son frère Mohamed, presque 30 ans, qui gagnait sa vie en conduisant la camionnette familiale de "louage" (taxi collectif).

"Il est sorti vers 22H00 avec son téléphone, sans rien dire à mes parents, sans vêtements de rechange ni sac, comme s'il allait retrouver ses amis", raconte à l'AFP cette ouvrière de 42 ans, qui souffre d'insomnies depuis.

Yousri, 22 ans, est aussi parti en cachette. "La majorité des jeunes n'ont pas informé leur famille, ils se sont débrouillés pour avoir un peu d'argent", confirme M. Henchi, son oncle instituteur.

Meftah Jalloul, poissonnier de 62 ans, savait lui "depuis un certain temps" que son fils Mohamed, 17 ans, "voulait migrer en Europe" et le lui avait déconseillé "mais c'est devenu une idée fixe".

La nuit fatidique, il a tenté d'empêcher son unique garçon de sortir, l'implorant d'attendre une meilleure météo, mais "il m'a embrassé sur la tête et il est parti", relate M. Jalloul.

«Désespérance»

Le commerçant culpabilise: "chaque jour, il créait des problèmes à la maison, il voulait de l'argent pour migrer. C'est moi qui lui ai donné l'argent, donc je suis responsable".

Les Tunisiens ont représenté la deuxième nationalité des migrants illégaux arrivés en Italie (17.304) en 2023, après les Guinéens, selon des statistiques officielles.

"Cette immigration irrégulière ne s'explique pas seulement par des motifs économiques et sociaux", analyse Romdhane Ben Amor, porte-parole de l'ONG FTDES. Il y a aussi "le facteur politique (le coup de force du président Kais Saied à l'été 2021, NDLR) et le sentiment de désespérance des Tunisiens qui ne croient pas dans l'avenir du pays".

Les disparus d'El Hencha, issus de la classe moyenne, pas particulièrement pauvres, partageaient cette "sensation d'horizon bouché".

Le frère d'Inès avait un travail mais "avec 20 dinars par jour (trois euros environ), une fois payé ses cigarettes, il disait qu'il ne pouvait pas faire de projets, ni construire une maison, ni se marier".

Mohamed l'instituteur pointe du doigt "les jeunes déjà en Italie qui publient sur les réseaux sociaux (...) leur quotidien". Les autres "voient ça et veulent changer leur avenir. Ils imaginent l'Europe comme un paradis", souligne-t-il. C'était, pense-t-il, le cas de Yousri qui travaillait dans un café internet pour 10/15 dinars par jour après avoir quitté le lycée avant le bac.

Meftah Jalloul était lui d'accord pour que son fils, également décrocheur scolaire, émigre, mais légalement et seulement après avoir fait une formation. "Il pouvait apprendre un métier: plombier, menuisier, mécanicien", souligne le père de famille.

Aujourd'hui, M. Jalloul lutte pour garder espoir.

«Temps très mauvais»

"Quatre mois se sont écoulés et je pleure mon fils. Ma famille et moi, nous sommes épuisés", dit-il en fondant en larmes.

Lui et d'autres familles se raccrochent à l'idée que l'embarcation aurait pu dériver vers la Libye voisine. Des contacts ont été pris, des recherches menées, en vain.

Inès Lafi et Mohamed Henchi redoutent le pire. Plus de 1.300 migrants sont morts ou ont disparu dans des naufrages l'an passé près des côtes tunisiennes, selon le FTDES.

"Le temps était très mauvais. Même les pêcheurs qui connaissent la mer sont rentrés, lui est sorti", explique Inès, furieuse contre le passeur, connu de tous pour son activité clandestine, qui n'est pas non plus revenu de cette dernière traversée.

Aux autorités, les familles demandent la poursuite des recherches et davantage d'opportunités à El Hencha.

"Il faut enrichir la zone industrielle avec d'autres unités de production, fournir des emplois aux jeunes", estime M. Henchi.

Il faudrait aussi, dit l'instituteur, "construire un état d'esprit différent" avec des programmes éducatifs pour donner envie de bâtir son avenir en Tunisie. Sinon les jeunes "se contentent d'un tour au café, d'un peu de ping-pong ou volley-ball".