La Jordanie salue un accord sur l’eau dans un contexte de craintes liées aux crises des réfugiés et du climat

Le projet national de transport de l’eau produira environ 300 millions de m3 d’eau dessalée par an à Aqaba. (Photo, AFP)
Le projet national de transport de l’eau produira environ 300 millions de m3 d’eau dessalée par an à Aqaba. (Photo, AFP)
Short Url
Publié le Lundi 02 janvier 2023

La Jordanie salue un accord sur l’eau dans un contexte de craintes liées aux crises des réfugiés et du climat

Le projet national de transport de l’eau produira environ 300 millions de m3 d’eau dessalée par an à Aqaba. (Photo, AFP)
  • La Jordanie a signé un accord de prêt à taux réduit avec un bailleur de fonds européen pour contribuer au financement d’un mégaprojet de transport d’eau
  • Considéré comme le «plus grand projet d’infrastructure» de l’histoire de la Jordanie, le projet national de transport de l’eau produira environ 300 millions de m3 d’eau dessalée par an

AMMAN: La Jordanie a signé un accord de prêt à taux réduit avec un bailleur de fonds européen pour contribuer au financement d’un mégaprojet de transport d’eau de 2,5 milliards de dollars (1 dollar = 0,94 euro), dans un contexte de pénurie persistante aggravée par le dérèglement climatique.

Le gouvernement a donné son accord à la Banque européenne d’investissement (BEI) pour l’octroi d’un prêt de 213 millions de dollars, qui viendra s’ajouter à une contribution totale de l’État de 352 millions de dollars au projet national de transport de l’eau (projet de dessalement et de transport de l’eau Aqaba-Amman).

Le prêt de la BEI coïncide avec des informations selon lesquelles Israël a l’intention de fournir de l’eau dessalée à la Cisjordanie, à Gaza et à la Jordanie.

Une station de radio israélienne a récemment déclaré que la Régie de l’eau du pays et la société Mekorot commenceraient à pomper de l’eau dessalée dans la mer Méditerranée, ainsi que des eaux souterraines, vers le lac de Tibériade par le biais d’un pipeline nouvellement construit. Dans le reportage, un responsable a affirmé qu’«Israël serait en mesure de résoudre ses problèmes d’eau pour les trente prochaines années, notamment en fournissant cette ressource à la Jordanie, à la Cisjordanie et à Gaza».

Un responsable jordanien a indiqué que le Royaume n’avait «rien reçu d’officiel d’Israël à ce sujet». «Israël pompe habituellement de l’eau en Jordanie, dans le cadre de l’accord de paix, depuis le lac de Tibériade et ce n’est pas nouveau, mais ce serait probablement la première fois qu’Israël envoie de l’eau dessalée de la Méditerranée», a précisé la source, qui a requis l’anonymat.

Considéré comme le «plus grand projet d’infrastructure» de l’histoire de la Jordanie, le projet national de transport de l’eau produira environ 300 millions de m3 d’eau dessalée par an, acheminée depuis la ville portuaire d’Aqaba, sur la mer Rouge, vers le nord jusqu’à la capitale Amman, densément peuplée, et d’autres villes.

Amman est décrite comme l’une des villes à la croissance la plus rapide au monde, avec une population qui augmente rapidement en raison de l’afflux de réfugiés en provenance des pays voisins en crise.

Selon les chiffres officiels, la population d’Amman est passée de 200 000 à quatre millions d’habitants au cours des cinquante dernières années en raison de l’afflux de réfugiés de Palestine, du Liban, d’Irak et de Syrie entre 1948 et 2013. Selon le HCR, la Jordanie reste le deuxième pays d’accueil de réfugiés par habitant dans le monde, avec environ 750 000 réfugiés de 57 nationalités différentes.

Toutefois, les chiffres officiels indiquent qu’environ 1,3 million de réfugiés syriens habitent en Jordanie, pays pauvre en ressources, la majorité d’entre eux vivant en dehors des camps de réfugiés. Pour le gouvernement, «la hausse spectaculaire du taux de croissance démographique et l’impact de la crise des réfugiés ont aggravé les problèmes d’eau de la Jordanie et l’ont placée sous le seuil de pauvreté en eau».

Selon les estimations officielles, les ressources annuelles en eau de la Jordanie étaient d’environ 90 m3 par personne, soit bien en deçà du seuil international de 500 m3 par personne.

Selon la Jordanie, le projet national de transport de l’eau serait basé sur le système «construction-exploitation-transfert» et serait prêt en 2027. Selon le ministère de l’Eau, le projet consistera en un système de prélèvement d’eau de mer, une usine de dessalement basée sur la rive sud d’Aqaba, des stations de pompage et des réservoirs, ainsi qu’un pipeline de 450 km.

La Jordanie est le deuxième pays le plus pauvre en eau au monde. En 2021, la population totale de la Jordanie était estimée à 11,1 millions de personnes, avec un taux de croissance de 1,23%, selon les chiffres officiels.

En octobre 2021, la Jordanie a annoncé qu’elle avait acheté 50 millions de m3 d’eau supplémentaires à Israël en dehors du cadre de l’accord de paix de 1994 et de ce qu’il stipule en termes de quantités d’eau.

En vertu du traité de paix israélo-jordanien de 1994, Israël s’est engagé à fournir à la Jordanie 55 millions de m3 d’eau par an. En novembre 2021, la Jordanie, Israël et les États arabes unis (EAU) ont signé une déclaration d’intention afin d’entamer des délibérations sur la faisabilité d’un projet d’échange «énergie contre eau».

Le gouvernement jordanien, qui a été critiqué par le Parlement, les partis politiques et d’autres forces civiles pour avoir signé l’accord, a affirmé que la Jordanie recevrait 200 millions de m3 d’eau par an dans le cadre du projet.

Les médias internationaux ont rapporté qu’un immense parc d’énergie solaire sera construit dans le désert jordanien dans le cadre d’un projet visant à produire de l’énergie propre qui serait vendue à Israël en échange d’eau dessalée.

Le prêt de la BEI s’inscrit dans le cadre de l’engagement pris par le bailleur de fonds européen lors d’une conférence des donateurs en mars 2022, selon un communiqué du gouvernement, où un total de 1,83 milliard de dollars de subventions et de prêts a été annoncé.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L’Arabie saoudite et ses partenaires régionaux rejettent tout déplacement forcé des Palestiniens de Gaza

Les ministres des Affaires étrangères d'Arabie saoudite, d'Égypte, de Jordanie, des Émirats arabes unis, d'Indonésie, du Pakistan, de Turquie et du Qatar ont exprimé vendredi leur profonde inquiétude face aux déclarations israéliennes concernant l'ouverture du passage de Rafah dans un seul sens. (AFP)
Les ministres des Affaires étrangères d'Arabie saoudite, d'Égypte, de Jordanie, des Émirats arabes unis, d'Indonésie, du Pakistan, de Turquie et du Qatar ont exprimé vendredi leur profonde inquiétude face aux déclarations israéliennes concernant l'ouverture du passage de Rafah dans un seul sens. (AFP)
Short Url
  • Les ministres ont exprimé une profonde inquiétude face aux déclarations israéliennes sur l’ouverture du passage de Rafah dans un seul sens

RIYAD : Les ministres des Affaires étrangères d’Arabie saoudite, d’Égypte, de Jordanie, des Émirats arabes unis, d’Indonésie, du Pakistan, de Turquie et du Qatar ont exprimé vendredi une profonde inquiétude face aux déclarations israéliennes concernant l’ouverture du passage de Rafah dans un seul sens, rapporte l’Agence de presse saoudienne.

Dans une déclaration conjointe, les ministres ont estimé que cette mesure pourrait faciliter le déplacement des Palestiniens de la bande de Gaza vers l’Égypte.

Ils ont fermement rejeté toute tentative de forcer les Palestiniens à quitter leurs terres, soulignant la nécessité d’une pleine application du plan proposé par le président américain Donald Trump, qui prévoyait l’ouverture du passage de Rafah dans les deux sens et garantissait la liberté de circulation sans coercition.

Les ministres ont insisté sur la création de conditions permettant aux Palestiniens de rester sur leurs terres et de participer à la reconstruction de leur pays, dans le cadre d’un plan global visant à restaurer la stabilité et à répondre à la crise humanitaire à Gaza.

Ils ont réitéré leur appréciation pour l’engagement de Trump en faveur de la paix régionale et ont souligné l’importance de la mise en œuvre complète de son plan, sans entrave.

La déclaration a également mis en avant l’urgence d’un cessez-le-feu durable, de la fin des souffrances des civils, de l’accès humanitaire sans restriction à Gaza, ainsi que du lancement d’efforts de relèvement et de reconstruction précoces.

Les ministres ont en outre demandé la mise en place de conditions permettant à l’Autorité palestinienne de reprendre ses responsabilités dans l’enclave.

Les huit pays ont réaffirmé leur volonté de continuer à coordonner leurs actions avec les États-Unis et les partenaires internationaux pour assurer la pleine mise en œuvre de la résolution 2803 du Conseil de sécurité de l’ONU et des autres résolutions pertinentes, en vue d’une paix juste et durable fondée sur le droit international et la solution à deux États, incluant la création d’un État palestinien indépendant selon les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Nouveaux bombardements israéliens au Liban malgré des discussions «positives»

Israël a de nouveau bombardé jeudi le sud du Liban, disant viser des sites du Hezbollah pro-iranien qu'elle accuse de se réarmer, au lendemain des premières discussions directes depuis plusieurs décennies entre des représentants des deux pays. (AFP)
Israël a de nouveau bombardé jeudi le sud du Liban, disant viser des sites du Hezbollah pro-iranien qu'elle accuse de se réarmer, au lendemain des premières discussions directes depuis plusieurs décennies entre des représentants des deux pays. (AFP)
Short Url
  • Le président libanais Joseph Aoun, saluant les réactions "positives" à la réunion de mercredi, a annoncé que les discussions reprendraient le 19 décembre afin d'éloigner "le spectre d'une deuxième guerre" au Liban
  • "Il n'y a pas d'autre option que la négociation", a-t-il ajouté

JBAA: Israël a de nouveau bombardé jeudi le sud du Liban, disant viser des sites du Hezbollah pro-iranien qu'elle accuse de se réarmer, au lendemain des premières discussions directes depuis plusieurs décennies entre des représentants des deux pays.

L'armée israélienne, qui a multiplié ses frappes ces dernières semaines, a encore frappé jeudi le sud du Liban après avoir appelé des habitants de plusieurs villages à évacuer.

Les bombardements ont touché quatre localités, où des photographes de l'AFP ont vu de la fumée et des maisons en ruines.

Dans le village de Jbaa, Yassir Madir, responsable local, a assuré qu'il n'y avait "que des civils" dans la zone. "Quant aux dégâts, il n'y a plus une fenêtre à 300 mètres à la ronde. Tout le monde est sous le choc", a-t-il ajouté. 


« La Syrie n’est pas condamnée » : les leçons d’un an de transition, selon Hakim Khaldi

Short Url
  • Parmi les scènes les plus marquantes, Khaldi se souvient d’une vieille dame de Homs qui, voyant les portraits d’Assad retirés des bâtiments officiels, murmure : « On peut respirer ? Est-ce que c’est vrai ? »
  • Mais ce soulagement intense laisse rapidement place à une inquiétude plus sourde : celle du vide

PARIS: La Syrie post-Assad, carnets de bord, de Hakim Khaldi, humanitaire chez Médecins sans frontières, publié chez L’Harmattan, n’est pas seulement un récit de témoins, mais une immersion dans la réalité d’un pays brisé mais pas vaincu, où la chute d’un pouvoir omnipotent n’a pas suffi à étouffer l’exigence de dignité.
Ce qu’il raconte, c’est l’envers des discours diplomatiques, la géographie vécue d’une société projetée brutalement hors d’un demi-siècle d’autoritarisme dans un vide politique, économique et moral.

Les premiers jours après la chute du régime de Bachar Al-Assad ressemblent, selon Khaldi, à un moment de bascule irréel.

Dans ses carnets, comme dans ses réponses à Arab News en français, revient une même conviction : la chute d’un régime ne signifie pas la naissance immédiate d’un pays. La Syrie, aujourd’hui, est entre les deux, « en état de transformation ».

Les premiers jours après la chute du régime de Bachar Al-Assad ressemblent, selon Khaldi, à un moment de bascule irréel : « On ne savait pas si c’était la fin d’une époque ou le début d’une autre tragédie », confie-t-il.
Dans les villes « libérées », les scènes oscillent entre euphorie et sidération ; la population découvre, sans y croire encore, la possibilité de parler librement, de respirer autrement.

Il raconte ces familles qui, pendant quarante ans, n’avaient jamais osé prononcer le mot « moukhabarat » (services secrets en arabe), ne serait-ce qu’à voix basse chez elles.
Et brusquement, les voilà qui se mettent à raconter : les disparitions, les tortures, les humiliations, et la peur devenue routine.
Des parents ressortent des photos d’adolescents morts sous la torture, des certificats de décès maquillés, des lettres écrites depuis la prison mais jamais envoyées.

Parmi les scènes les plus marquantes, Khaldi se souvient d’une vieille dame de Homs qui, voyant les portraits d’Assad retirés des bâtiments officiels, murmure : « On peut respirer ? Est-ce que c’est vrai ? »
Ce qui l’a le plus frappé, c’est « ce sentiment presque physique d’un poids qui tombe. C’est ce que j’ai le plus entendu », affirme-t-il.

Mais ce soulagement intense laisse rapidement place à une inquiétude plus sourde : celle du vide. En quelques jours, l’État s’est évaporé : plus de police, plus d’électricité, plus d’école, plus de justice.
Les anciens bourreaux disparaissent dans la nature, mais les réseaux de corruption se reconstituent, et les premières milices locales émergent, prêtes à occuper le terrain déserté par les institutions.

Pourtant, au fil de ses déplacements, Khaldi est frappé par la force de résilience et d’auto-organisation de la population : « Les Syriens n’ont jamais cessé d’exister comme société, même quand l’État les avait réduits au silence », assure-t-il.
Dans les villages, des comités improvisés se forment et organisent la distribution alimentaire, la remise en marche d’une station d’eau, la sécurité ou la scolarisation d’urgence.

Un an après la chute du régime (le 8 décembre 2024), la Syrie tente de se relever lentement, mais elle demeure une mosaïque de composants hybrides.

Cette responsabilité populaire est, pour Khaldi, l’un des rares points lumineux du paysage syrien, la preuve qu’une société peut exister en dehors de l’appareil répressif qui prétendait être l’État.

Un an après la chute du régime (le 8 décembre 2024), la Syrie tente de se relever lentement, mais elle demeure une mosaïque de composants hybrides, de milices rivales, de zones d’influence et d’ingérences étrangères. « Une mosaïque qui ne ressemble plus au pays d’avant », estime Khaldi.
Le territoire est éclaté entre forces locales, groupes armés (notamment les milices druzes à Soueida, au nord-est du pays), gouvernances provisoires ou structures étrangères. Les routes sont coupées, les administrations doublées ou contradictoires.

Avec des infrastructures détruites, une monnaie en chute libre et un secteur productif quasi paralysé, la survie quotidienne est devenue un exercice d’équilibriste.
Les Syriens ne nourrissent plus d’illusions sur l’arrivée immédiate d’un modèle démocratique idéal : il s’agit d’abord de survivre, de reconstruire, de retrouver un minimum de continuité.

Le traumatisme est profond, à cause des disparitions massives, de l’exil et des destructions psychologiques. Pourtant, affirme Khaldi, « jamais je n’ai entendu un Syrien regretter que la dictature soit tombée ».

De ses observations et des témoignages qu’il a collectés en arpentant le pays, Khaldi tire les priorités pour éviter que la Syrie ne devienne ni un conflit gelé ni un espace livré aux milices.
De son point de vue, la reconstruction politique ne peut se réduire à remplacer un gouvernement par un autre : il faut rebâtir les fondations, à savoir une justice indépendante, une police professionnelle et des administrations locales.

Des dizaines de groupes armés contrôlent aujourd’hui une partie du territoire, et une transition politique sérieuse est impensable sans un processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration, soutenu par une autorité légitime et par un cadre international solide.
Au-delà des aides internationales, la Syrie a besoin d’un cadre empêchant la capture des fonds par les anciens réseaux de corruption ou les factions armées.
Elle doit donner la priorité à la relance de l’agriculture, au rétablissement de l’électricité, des réseaux routiers et des petites industries, les seules capables à court terme de soutenir la vie quotidienne.

Le pays porte une blessure immense : celle des prisons secrètes, des fosses communes, des disparitions et des exactions documentées. « Sans justice, il n’y aura pas de paix durable », affirme Khaldi.
Il ne s’agit ni de vengeance ni de tribunaux-spectacle, mais de vérité et de reconnaissance, conditions indispensables à une réconciliation nationale.

De cet entretien se dégage une idée forte : malgré la faim, la peur, les ruines, malgré la fragmentation politique et l’ingérence étrangère, les Syriens n’ont pas renoncé à eux-mêmes.
Ils ouvrent des écoles improvisées, réparent des routes avec des moyens dérisoires, organisent l’entraide, résistent au chaos. « La Syrie n’est plus la Syrie d’avant, mais elle n’est pas condamnée pour autant », affirme Khaldi.
Son témoignage rappelle qu’un pays ne meurt pas quand un régime tombe ; il meurt lorsque plus personne ne croit possible de le reconstruire. Et les Syriens, eux, y croient encore.