Retraites: Le gouvernement insiste sur l'accompagnement «social» de sa réforme

L'ensemble des syndicats se réunissent mardi soir pour annoncer une date de mobilisation, le gouvernement misant lui sur la lassitude des Français (Photo, AFP).
L'ensemble des syndicats se réunissent mardi soir pour annoncer une date de mobilisation, le gouvernement misant lui sur la lassitude des Français (Photo, AFP).
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Publié le Mardi 10 janvier 2023

Retraites: Le gouvernement insiste sur l'accompagnement «social» de sa réforme

  • Parmi les derniers ajustements figure la progressivité de la réforme (trois ou quatre mois travaillés de plus par an, ndlr), selon un responsable de la majorité
  • Le gouvernement serait par ailleurs prêt à relever le minimum retraite à 1 200 euros pour l'ensemble des retraités et pas seulement pour les nouveaux entrants

PARIS: A la veille de la présentation de sa réforme des retraites, le gouvernement a procédé lundi aux derniers ajustements sans renoncer à reporter l'âge de départ, tout en insistant sur l'accompagnement "social" de son projet, pendant que les syndicats se préparaient à manifester.

Alors qu'un report de 62 à 64 ans de l'âge légal de départ reste l'hypothèse privilégiée par l'exécutif, il ne faut "pas rester bêta-bloqué sur l'âge" mais trouver "les moyens pour apporter plus d'accompagnement social, plus de pensions", a affirmé la ministre déléguée aux PME Olivia Grégoire.

Selon Sacha Houlié, président Renaissance de la commission des Lois de l'Assemblée, la piste reste un âge de départ porté progressivement à 64 ans, avec une accélération de la réforme Touraine sans toucher aux 43 années de cotisations.

Parmi les derniers ajustements figure la progressivité de la réforme (trois ou quatre mois travaillés de plus par an, ndlr), selon un responsable de la majorité.

La Première ministre Elisabeth Borne entend présenter mardi à 17H30 un projet "d'équilibre" financier du système par répartition, de "justice" pour ceux qui ont travaillé tôt ou qui ont des métiers pénibles, et de "progrès social" pour les plus modestes, selon son entourage.

Lundi soir elle a eu d'ultimes entretiens avec les représentants des députés indépendants Liot et avec la présidente de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet. "64 ans, c'est très violent, et on reste frustrés sans grand plan pour l'emploi des seniors", a dit Bertrand Pancher, patron du groupe Liot après son échange.

"On sait que cette réforme, elle va demander des efforts" mais "l'enjeu" c'est "de s'assurer que ces efforts soient justes", plaide M. Houlié.

«Fracassé»

Il ne "reste pas beaucoup de choix" autre que l'âge légal, a-t-il justifié, si "vous ne voulez pas baisser les pensions" ou "augmenter les cotisations", une piste écartée par le gouvernement mais évoquée par les syndicats et l'allié du MoDem François Bayrou, qui espère "des signes" du gouvernement pour que cette réforme soit "ressentie comme juste".

Plusieurs salariés exerçant un métier pénible, interrogés par l'AFP, s'inquiètent d'arriver déjà usés à leur retraite. Khemissa Khemissi, 52 ans, ouvrière dans un abattoir à Fleury-les-Aubrais (Loiret), témoigne d'un "travail difficile car on est toute la journée debout dans le froid, avec parfois des journées de dix heures. (...) On est fracassé et on n'a même pas le droit à la pénibilité".

Sur la pénibilité, le ministre du Travail Olivier Dussopt défend "un suivi médical renforcé" pour les "risques ergonomiques". Pour l'emploi des seniors, très bas en France, le gouvernement devrait mettre en place un index, avec obligation de négocier un accord en cas d'absence de cet outil.

Le gouvernement serait par ailleurs prêt à relever le minimum retraite à 1 200 euros pour l'ensemble des retraités et pas seulement pour les nouveaux entrants. Olivier Dussopt a dit à cet égard, lors d'un bureau exécutif du parti Renaissance lundi soir, que le gouvernement était "très à l'écoute de la majorité".

"Ceux qui refusent cette réforme se résignent à ce qu’il n’y ait plus de régime par répartition", a prévenu lors de la même réunion le ministre de l'Economie Bruno Le Maire désireux que "le travail paie plus".

Depuis 30 ans, une série de grandes réformes des retraites

Rappel des principales réformes précédentes:

1991: Livre blanc

La publication en 1991 du Livre blanc sur les retraites marque un tournant: il met en évidence les difficultés financières à venir des régimes, et préconise d'allonger la durée de cotisation de 150 à 168 trimestres pour bénéficier d'une retraite à taux plein. Les réformes qui suivront viseront à réduire les déficits des caisses ou à revoir leurs modalités de financement.

1993: réforme Balladur

En 1993, sous la présidence de François Mitterrand, le Premier ministre de cohabitation Edouard Balladur décide de porter progressivement de 37,5 ans à 40 ans (de 150 à 165 trimestres) la durée de cotisation dans le régime général pour une retraite à taux plein.

Le montant des retraites est désormais calculé sur les 25 meilleures années de la vie active dans le privé au lieu des 10 meilleures. Mise en oeuvre au coeur de l'été, la réforme provoque peu de remous.

1995: plan Juppé

En novembre 1995, sous la présidence de Jacques Chirac, le Premier ministre Alain Juppé présente un plan de redressement de la Sécurité sociale comportant une réforme des retraites des agents de l'État et des services publics.

Les fonctionnaires observent plusieurs semaines de grève. Trains et métros sont paralysés pendant plus de trois semaines. Alain Juppé renonce aux mesures sur les retraites mais maintient le reste de son plan.

2003: réforme Fillon

La réforme de François Fillon, ministre des Affaires sociales du gouvernement Raffarin, complète celle de Balladur, portant la durée de cotisation à 40 ans pour les fonctionnaires.

Elle fixe les règles d'allongement futur des durées de cotisation pour le privé et la fonction publique, incite à rester dans l'emploi après 60 ans, créant une surcote et limitant l'accès aux pré-retraites.

Bien que négociée avec les syndicats, la réforme provoque grèves et manifestations. Elle n'est acceptée que par la CFDT.

2007: régimes spéciaux

La  première réforme des retraites du quinquennat de Nicolas Sarkozy concerne les régimes spécifiques des sociétés de service public (EDF, GDF, SNCF, RATP, Banque de France, etc.) ainsi que les professions à statut particulier (clercs de notaires, élus et employés parlementaires).

Pour ces personnes, la durée de cotisation passe à 40 ans. La réforme est menée avec diplomatie pour ne pas répéter l'échec de 1995, ce qui n'empêche pas des grèves.

2010: réforme Woerth

Du nom d'Éric Woerth, ministre du Travail, cette réforme met fin au principe de la retraite à 60 ans, héritage de François Mitterrand. Très impopulaire, la seconde réforme des retraites de la présidence Sarkozy provoque manifestations massives et blocages.

L'âge légal de départ est reculé de deux ans, passant progressivement à 62 ans.

La réforme étend le dispositif carrières longues à ceux qui ont commencé à travailler à 17 ans, permettant des départs anticipés.

2014: réforme Touraine

Portée par la ministre des Affaires sociales Marisol Touraine, sous la présidence de François Hollande, cette réforme inscrit dans le temps le principe de l'allongement de la durée de cotisation pour l'obtention d'une retraite à taux plein.

Cette durée est relevée d'un trimestre tous les trois ans de 2020 à 2035 pour atteindre 172 trimestres (43 ans) pour les générations 1973 et suivantes.

Un compte personnel de pénibilité est instauré pour permettre à ceux qui exercent des métiers difficiles d'anticiper leur départ.

«Guerre sociale»

Mais pour le patron de la CGT, Philippe Martinez, avec cette réforme, "on revient à ce qu'ont connu nos anciens, c'est-à-dire qu'après le travail c’est le cimetière", alors qu'un quart des hommes les plus pauvres selon l'Insee sont déjà morts à 62 ans.

"La mesure d'âge est la plus dure de ces 30 dernières années", dénonce pour la CFDT Laurent Berger, résolu à la contester "même avec des mesures positives sur les carrières longues ou la pénibilité".

L'ensemble des syndicats se réunissent mardi soir pour annoncer une date de mobilisation, le gouvernement misant lui sur la lassitude des Français.

A l'extrême droite, la cheffe de file des députés RN Marine Le Pen combattra "cette énième entente entre la macronie et LR", le chef du RN Jordan Bardella dénonçant une "guerre sociale".

L'exécutif veut "rendre la vie des gens toujours plus difficile", fustige le coordinateur de LFI Manuel Bompard.

Au Parlement, le gouvernement compte sur le ralliement de la droite pour ne pas recourir au 49.3, après que le président de LR Eric Ciotti s'est dit dimanche prêt à "voter une réforme juste" des retraites.


A Sciences Po Paris, la mobilisation pro-palestinienne se poursuit

Des manifestants participent à un rassemblement devant l'Institut d'études politiques (Sciences Po Paris) alors que des étudiants occupent un bâtiment, avec une barricade bloquant l'entrée, en soutien aux Palestiniens, à Paris le 26 avril 2024. (AFP)
Des manifestants participent à un rassemblement devant l'Institut d'études politiques (Sciences Po Paris) alors que des étudiants occupent un bâtiment, avec une barricade bloquant l'entrée, en soutien aux Palestiniens, à Paris le 26 avril 2024. (AFP)
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  • «Le débat, oui. Le blocage, non», a déploré la ministre de l'Enseignement supérieur sur BFMTV qui a tiré à boulets rouges sur le rôle joué par LFI dans la mobilisation
  • «Qu’on fasse preuve de solidarité à l'égard des Palestiniens, qu’on montre le rejet des crimes qui sont commis à Gaza, c'est naturel, c’est même digne et noble», a jugé Raphaël Glucksmann

PARIS: La mobilisation pro-palestinienne se poursuit vendredi à Sciences Po Paris avec l'occupation et le blocage de locaux historiques par des étudiants dont les revendications font écho aux contestations qui agitent certains prestigieux campus américains.

Quelques dizaines d'étudiants du comité Palestine de Sciences Po ont occupé dans la nuit de jeudi à vendredi les locaux, rue Saint-Guillaume, au coeur du huppé 7e arrondissement.

Mercredi soir, une dizaine de tentes avaient été installées dans la cour d'un autre bâtiment, avant que la police ne vienne déloger les étudiants favorables à la cause palestinienne.

Keffiehs sur la tête, drapeaux palestiniens accrochés aux balustrades, slogans fustigeant Israël, plusieurs dizaines étudiants bloquaient encore vendredi en début d'après-midi dans et en dehors le bâtiment nouvellement occupé.

ils ont reçu le soutien de plusieurs figures de LFI dont la militante franco-palestinienne Rima Hassan, candidate sur la liste "insoumise" pour les élections européennes.

"Ces étudiants sont en train véritablement de porter l'honneur de la France", a déclaré à la presse, Mme Hassan reprenant peu ou prou les propos du leader insoumis Jean-Luc Mélenchon qui a adressé un message audio de soutien aux manifestants.

La direction, qui chiffre à une soixantaine le nombre d'occupants du principal bâtiment, a décidé de fermer plusieurs locaux de son campus parisien. Elle "condamne fermement ces actions étudiantes".

La direction, à qui une partie de la communauté éducative reproche d'avoir laissé les forces de l'ordre intervenir sur le campus, a organisé une rencontre avec des représentants des étudiants vendredi matin.

"Le débat, oui. Le blocage, non", a déploré la ministre de l'Enseignement supérieur Sylvie Retailleau sur BFMTV qui a tiré à boulets rouges sur le rôle joué par LFI dans la mobilisation.

Fustigeant "le jeu dangereux" de LFI à des "fins électorales", elle a accusé les leaders du mouvement d'être des "irresponsables" faisant la promotion de "l'anarchie" sur les campus.

Le comité Palestine revendique lui "la condamnation claire des agissements d'Israël par Sciences Po" et "la fin des collaborations" avec toutes "les institutions ou entités" jugées complices "de l'oppression systémique du peuple palestinien". Il demande en outre l'arrêt de "la répression des voix propalestiniennes sur le campus".

Comme aux Etats-Unis où la mobilisation d'étudiants pro-Gaza enflamme le débat politique, le militantisme des étudiants pro-Gaza à Sciences Po est accusé d'alimenter l'antisémitisme sur le campus.

Fin des cours

"Qu’on fasse preuve de solidarité à l'égard des Palestiniens, qu’on montre le rejet des crimes qui sont commis à Gaza, c'est naturel, c’est même digne et noble", a jugé Raphaël Glucksmann, tête de liste du Parti socialiste et de Place publique aux européennes, sur BFMTV.

"Après, dans quelle atmosphère on le fait? (...) Est-ce qu'on est capable d'organiser des discussions avec ceux qui ne partagent pas le point de vue? Et jusqu'ici, jusqu'à preuve du contraire, ce n'est pas le cas. Donc on a un problème et la direction de Sciences Po a le droit de décider d'évacuer", a complété M. Glucksmann.

Pour le président du Conseil représentatif des institutions juives de France, Yonathan Arfi, qui s'exprimait sur LCI, "il n'y a rien de massif" mais "ça fonctionne, ça prend en otage le campus entier, ça empêche la liberté académique et fait peser un climat de terreur intellectuelle sur une partie des étudiants juifs".

"On n'a rien contre les étudiants de confession juive, il y a des étudiants juifs qui militent avec nous", a plaidé Hubert Launois, 19 ans, étudiant en deuxième année et membre du comité Palestine. "Ce qui nous pose problème, c'est la politique coloniale et génocidaire du gouvernement d’extrême droite israélien", a-t-il ajouté.

Nouvel élan ou chant du cygne alors que ce vendredi marque, pour une majorité des élèves, la fin des cours et le début des révisions des examens?

"On sait aussi que c'est la fin de l'année. On ne veut pas que ce mouvement meure", a résumé une étudiante de 21 ans, mobilisée, qui n'a pas souhaité donner son nom.

"Les revendications sont légitimes" mais "le blocus reste assez radical comme mode d'action", a observé un autre étudiant. "Il faut trouver un moyen d'apaiser le dialogue (...) "La plupart des étudiants ont en tête la fin de l'année."


Européennes : pour Macron, une victoire du RN relèverait d'une «responsabilité collective»

Le président français Emmanuel Macron prononce un discours sur l'Europe devant le slogan «Une Europe puissante» dans un amphithéâtre de la Sorbonne à Paris, le 25 avril 2024. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron prononce un discours sur l'Europe devant le slogan «Une Europe puissante» dans un amphithéâtre de la Sorbonne à Paris, le 25 avril 2024. (AFP)
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  • L'opposition accuse Macron d'avoir tenu un discours électoraliste et demande qu'il soit pris en compte dans le temps de parole de la tête de liste du camp présidentiel, Valérie Hayer
  • Le chef de l'Etat a semblé écarter toute incidence politique directe en France en cas de victoire de la liste du Rassemblement national le 9 juin

STRASBOURG: Emmanuel Macron a jugé vendredi qu'il était "légitime" en tant que président à parler d'Europe, réfutant tout discours électoraliste la veille à la Sorbonne, et il a estimé qu'une victoire de l'extrême droite aux européennes le 9 juin relèverait d'une "responsabilité collective".

"La voix de la France en Europe c’est au cœur de notre diplomatie, de notre politique. Comme chacun de mes prédécesseurs, je suis légitime à aussi, en tant que président, dire un mot de ce qu'il s’y passe, de ce qui s’y joue", a-t-il déclaré à des journalistes en marge d'un déplacement à Strasbourg.

"C’était une parole de président de la République hier (..) Il ne faut pas être hypocrite sur le sujet", a-t-il affirmé. "Il faut assumer la politique qu'on a conduite, le rôle que la France a mené ces dernières années et le fait que j’ai mis l’Europe au cœur aussi du projet".

L'opposition l'accuse d'avoir tenu un discours électoraliste et demande qu'il soit pris en compte dans le temps de parole de la tête de liste du camp présidentiel, Valérie Hayer.

"Les temps de campagne, si je devais participer à certains d’entre eux -  je n'ai pas encore décidé -  je le ferai à ce moment-là à part, comme je l’avais fait il y a cinq ans", a ajouté Emmanuel Macron.

Le chef de l'Etat a par ailleurs semblé écarter toute incidence politique directe en France en cas de victoire de la liste du Rassemblement national le 9 juin.

"C'est une élection européenne", a-t-il pointé. A la question de savoir si une arrivée en tête de la liste RN emmenée par Jordan Bardella serait une forme de désaveu, il a répondu : "Bien sûr. Surtout ça représenterait un responsabilité collective".

Jordan Bardella, en tête d'une quinzaine de points dans les intentions de vote devant Valérie Hayer, a annoncé qu'il réclamerait une dissolution de l'Assemblée nationale s'il l'emporte le 9 juin.

"On voit bien toute cette stratégie, d'ailleurs des extrêmes, qui consiste à nationaliser le débat (...) Au moins parlons d’Europe quand on parle des élections européennes parce que c’est ça dont il s’agit", a relevé Emmanuel Macron.


JO: à l'Institut Pasteur, une équipe dans les starting-block pour traquer les virus

Un ingénieur travaille sur un échantillon à la Cellule d'intervention biologique d'urgence (CIBU) de l'institut Pasteur à Paris, le 23 avril 2024. (AFP)
Un ingénieur travaille sur un échantillon à la Cellule d'intervention biologique d'urgence (CIBU) de l'institut Pasteur à Paris, le 23 avril 2024. (AFP)
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  • Dans le cas d'un agent infectieux potentiellement très dangereux pour l'homme, les analyses sont menées dans un laboratoire de type P3, «quelque part dans l'Institut Pasteur»
  • Dernier virus identifié dans ses murs: celui de la rage, après la mort d'orpailleurs dans la forêt guyanaise, «mordus par des chauves-souris vampires», rapporte le chef de la cellule

PARIS: Avec les millions de visiteurs attendus cet été en France, les JO vont brasser potentiellement autant de personnes que d'agents pathogènes: bactéries, virus et autres parasites... A l'Institut Pasteur, une équipe est sur le pied de guerre pour les traquer, si nécessaire.

"On sait qu'on risque d'être mobilisés beaucoup plus que d'habitude, mais on s'y prépare depuis 18 mois" : Jean-Claude Manuguerra en a vu d'autres.

Ce virologue à l'Institut Pasteur dirige la Cellule d’intervention biologique d’urgence (Cibu), en première ligne depuis 20 ans face aux nouveaux pathogènes.

"La cellule est née en septembre 2002, un an après les attaques du 11 septembre aux Etats-Unis, sous l'impulsion de la Direction générale de la santé", rembobine-t-il.

Cette structure fonctionnant sept jours sur sept et 24 heures sur 24 avait été lancée à l'époque après l'envoi d'enveloppes contaminées à l’anthrax aux États-Unis et différentes alertes en France - qui s'étaient révélées être des canulars.

Son rôle : surveiller et détecter tous les risques infectieux (épidémies, accidents ou utilisation potentielle d'armes d'origine biologique) pouvant menacer la sécurité sanitaire de la France.

Sars, grippe H1N1, chikungunya, Covid-19... un grand nombre de virus ont déjà circulé dans ses labos pour y être scrutés et analysés.

Les prélèvements empruntent différents "circuits" selon la nocivité supposée de l'échantillon.

Grippe ou dengue 

Dans le cas d'un agent infectieux potentiellement très dangereux pour l'homme, les analyses sont menées dans un laboratoire de type P3, "quelque part dans l'Institut Pasteur", explique M. Manuguerra, volontairement imprécis car il doit garder sa localisation secrète.

Combinaison intégrale, masque FFP3, gants et surbottes sont alors de rigueur.

Dernier virus identifié dans ses murs: celui de la rage, après la mort d'orpailleurs dans la forêt guyanaise, "mordus par des chauves-souris vampires", rapporte le chef de la cellule. Les analyses faites à Pasteur ont permis de comprendre la cause de leurs décès.

En vue des Jeux olympiques, la Cibu s'est préparée à changer d'échelle pour "diagnostiquer un éventail de virus et de bactéries beaucoup plus large que d'ordinaire".

En raison du brassage attendu de populations qui arriveront de tous les points du globe, certaines maladies pourraient en effet se propager à la faveur de l'événement sportif. Par exemple la grippe, "puisque ce sera l'hiver de l'hémisphère sud", ou la dengue, qui sévit actuellement en Amérique du Sud et aux Caraïbes.

Tests PCR, séquençage haut débit, métagénomique sont autant de techniques utilisées par la vingtaine de personnes - scientifiques, techniciens et ingénieurs - qui travaillent dans la cellule.

Séquençage d'urgence 

Pour remplir leur rôle de vigie face aux menaces infectieuses, le Covid-19 a clairement été un accélérateur.

"Quand (le variant) Omicron a pointé le bout de son nez dans le monde, les autorités sanitaires françaises voulaient savoir le plus vite possible quand il arrivait et où", se rappelle Jean-Claude Manuguerra. "En novembre 2022, on leur a proposé de mettre en place un système de séquençage d'urgence, y compris la nuit et les week-ends".

En cas de risque épidémique pendant les JO, la cellule se prépare à devoir rendre des diagnostics le plus rapidement possible.

"On a développé des tests dits +multiplex+ : à partir d'un seul échantillon, on est désormais en mesure de rechercher jusqu'à une quarantaine de virus ou bactéries et d'avoir une réponse en quelques heures", se félicite Jessica Vanhomwegen, responsable du pôle d'identification virale à la Cibu.

Parmi les plus risqués : une grippe aviaire hautement pathogène ou des cas importés d'un virus tropical comme Ebola par exemple, illustre-t-elle.

"On a ciblé les agents pathogènes les plus mortels et les plus transmissibles pour être en mesure de les détecter", rassure-t-elle.

Pour la période, la cellule a revu son organisation : quatre personnes seront mobilisées le week-end, contre deux habituellement.

Si besoin, un laboratoire mobile - une hotte entièrement hermétique dans laquelle il est possible de manipuler un prélèvement potentiellement dangereux - pourra aussi être déployée sur le terrain.

"Si une grosse épidémie apparaît, il faut qu'on soit prêt", résume Jean-Claude Manuguerra.