Le gouvernement dévoile sa réforme contestée des retraites, manifestations en vue

Le gouvernement s'apprête à dévoiler mardi sa réforme explosive des retraites contre laquelle les syndicats prévoient déjà de manifester, ulcérés par le probable report de l'âge de départ à 64 ans et malgré des mesures d'accompagnement sur l'emploi des seniors ou la pénibilité. (AFP)
Le gouvernement s'apprête à dévoiler mardi sa réforme explosive des retraites contre laquelle les syndicats prévoient déjà de manifester, ulcérés par le probable report de l'âge de départ à 64 ans et malgré des mesures d'accompagnement sur l'emploi des seniors ou la pénibilité. (AFP)
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Publié le Dimanche 08 janvier 2023

Le gouvernement dévoile sa réforme contestée des retraites, manifestations en vue

  • La pierre d'achoppement reste la mesure d'âge. Plus de deux tiers des Français (68%) sont défavorables au report à 64 ans, selon un sondage Ifop-Fiducial
  • Le projet de loi doit passer en commission à l'Assemblée nationale à partir du 30 janvier, et dans l'hémicycle le 6 février, pour deux semaines, selon des sources parlementaires

PARIS: Le gouvernement s'apprête à dévoiler mardi sa réforme explosive des retraites contre laquelle les syndicats prévoient déjà de manifester, ulcérés par le probable report de l'âge de départ à 64 ans et malgré des mesures d'accompagnement sur l'emploi des seniors ou la pénibilité.

"Si Emmanuel Macron veut en faire sa mère des réformes (...) pour nous ce sera la mère des batailles", prévient le patron de FO Frédéric Souillot, opposé à cette réforme comme l'ensemble des organisations syndicales et l'essentiel des oppositions.

Lors d'une conférence de presse en présence de plusieurs ministres, Elisabeth Borne pourrait, selon plusieurs de ses interlocuteurs, proposer un report de l'âge légal de départ à 64 ans, au lieu de 62 actuellement, après avoir envisagé 65 ans.

Ce report serait associé à une accélération de de l'allongement de la durée de cotisation, qui passerait à 43 ans avant l'horizon 2035 fixé par la réforme Touraine.

Le gouvernement serait par ailleurs prêt à relever, lors du débat parlementaire, le minimum retraite à 1 200 euros pour l'ensemble des retraités et non seulement pour les nouveaux entrants.

Sur l'emploi des seniors, un "index" serait mis en place sur le modèle de l'égalité femme-homme, avec l'obligation de négocier un accord en cas "d'absence de communication" sur cet index.

Sur la pénibilité, le ministre du Travail Olivier Dussopt assure avoir "répondu" aux syndicats réformistes, évoquant "un suivi médical renforcé" pour les "risques ergonomiques".

Aurore Bergé, présidente des députés macronistes Renaissance, appelle aussi dans Le Parisien à la prise en compte des "trimestres d’apprentissage" entre 16 et 18 ans pour "un départ anticipé".

Retraites: les contre-propositions des syndicats pour combler le déficit

A l'opposé du report de l'âge légal de départ en retraite, que le gouvernement devrait confirmer mardi, les syndicats préconisent de jouer sur l'emploi, les salaires et les cotisations pour combler les déficits à venir.

Si l'urgence d'une réforme des retraites crée un débat, son contenu aussi. Pour Emmanuel Macron, cela ne fait pas de doute, "le seul levier que nous avons c'est de travailler plus longtemps", en l'occurrence en relevant l'âge légal de 62 à 64 voire 65 ans.

L'exécutif espère ainsi réduire les dépenses de 18 à 19 milliards à l'horizon 2030, assez pour éponger un déficit à deux chiffres et financer quelques droits nouveaux comme une hausse des petites pensions.

Mais les syndicats font valoir que d'autres sources de financement existent, à commencer par l'emploi. Les projections officielles en attestent: selon que le taux de chômage sera de 4,5% (soit le plein emploi visé par l'exécutif) ou de 7% comme aujourd'hui, le déficit variera de 13,5 à 19,5 milliards à la fin de la décennie.

Un meilleur taux d'emploi des seniors permettrait de "traiter une partie du problème", selon le numéro deux de l'Unsa Dominique Corona. En ajoutant aux 56% des 55-64 ans actuellement en activité "10% à 15% de seniors supplémentaires qui travaillent, c'est 10 milliards qui rentrent", affirme le leader de la CFTC Cyril Chabanier.

Un objectif que la hausse de l'âge légal permettrait d'atteindre mécaniquement mais qui pourrait aussi passer par davantage de formations et une meilleure gestion des fins de carrière, quitte à imposer une "obligation de négocier" dans les entreprises comme le réclame la CFDT.

La solution passe également par les salaires, comme le démontrent les excédents inattendus du système de retraite en 2021 et 2022: le rebond de l'économie post-Covid, puis la flambée de l'inflation, ont tiré vers le haut les rémunérations, donc dopé les cotisations.

Pour gonfler encore la manne, la CGT revendique "l'égalité professionnelle femmes-hommes", tout comme Solidaires qui assure que cela "rapporterait 14 milliards aux caisses de retraites".

A défaut, ou en complément, tous les syndicats défendent une hausse des cotisations patronales. Une hausse "de l'ordre d'un point" rapporterait ainsi 7,5 milliards, selon l'Unsa. La CFTC est même prête à "discuter de la répartition entre le salarié et l'employeur", la même somme pouvant être obtenue en prélevant trois euros de plus à chacun.

Certaines organisations lorgnent enfin du côté des exonérations dont bénéficient les entreprises et qui ont fortement réduit les cotisations sur les bas salaires.

«Impopulaire»

La pierre d'achoppement reste la mesure d'âge. Plus de deux tiers des Français (68%) sont défavorables au report à 64 ans, selon un sondage Ifop-Fiducial.

"Il n’y aura pas de deal avec la CFDT" en cas de report de l'âge légal et "on fera tout pour que le gouvernement recule", avertit son leader Laurent Berger.

Le gouvernement reste toutefois déterminé. "Ce n'est pas parce qu'une réforme est impopulaire qu'il ne faut pas la faire", assure son porte-parole Olivier Véran, faisant appel à "l'esprit de responsabilité".

Il reconnaît des désaccords sur les "solutions". La CFDT a des propositions pour relever le taux d'emploi des seniors qui permettra de combler le déficit. Tous les syndicats défendent une hausse des cotisations patronales, piste aussi évoquée par le Haut-commissaire au Plan François Bayrou, mais écartée par l'exécutif.

L'ancienne ministre du Travail (2017-2020) Muriel Pénicaud prévient que l'emploi des seniors, particulièrement bas en France, est "le premier sujet qu'il faut traiter", sinon "c'est les mêmes qui travaillent tard qui vont travailler plus tard, et les autres qui vont basculer au chômage ou au RSA".

Retraites: les points chauds et les leviers de la réforme

Age de départ, régimes spéciaux, emploi des seniors, carrières longues et pénibilité... Voici les points chauds d'une réforme des retraites très contestée avant même sa présentation prévue mardi, et les leviers que l'exécutif entend actionner pour la faire accepter.

Age de départ

C'est la mesure emblématique du projet gouvernemental, censée combler les déséquilibres à venir du système de retraites et unanimement critiquée: le relèvement progressif de l'âge légal de départ de deux ou trois ans, soit jusqu'à 64 ou 65 ans.

Emmanuel Macron a souhaité durant la campagne présidentielle que l'âge légal de départ soit repoussé de quatre mois par an jusqu'à 65 ans en 2031, relèvement qui pourrait commencer au 1er octobre 2023.

Mais d'autres options sont envisagées, notamment la formule mixte d'un report de l'âge de départ (par exemple à 64 ans, comme le veut le Sénat, avec relèvement de trois mois par an) couplé à une accélération de l'allongement de la durée de cotisation.

Celle-ci passerait alors à 43 ans (172 trimestres) avant l'horizon 2035 fixé par la réforme Touraine de 2014, à la faveur d'une augmentation de la durée minimum de cotisation d'un trimestre tous les deux ans, voire tous les ans.

L'exécutif s'est engagé à ne pas aller au-delà des 43 annuités requises pour obtenir le taux plein. En outre, le report de l'âge légal sera sans effet sur l'âge d'annulation de la décote, qui restera fixé à 67 ans. Ainsi les femmes, dont les carrières sont plus souvent hachées, auront une retraite à taux plein au même âge qu'aujourd'hui, fait valoir le gouvernement.

Régimes spéciaux

A la RATP comme chez les électriciens et gaziers, les régimes spéciaux seront fermés pour les nouveaux entrants, comme c'est déjà le cas à la SNCF. Et ces professions, de même que les cheminots et les fonctionnaires (y compris ceux de la catégorie active), devront elles aussi partir deux ou trois ans plus tard qu'aujourd'hui. Une perspective qui annonce une forte mobilisation dans ces bastions syndicaux.

La hausse de l'âge de départ pourrait cependant démarrer un peu plus tard dans ces régimes spéciaux, car la réforme Woerth de 2010, qui l'a déjà relevé de deux ans, n'y sera pleinement effective qu'en 2024.

Emploi des seniors

Alors que les syndicats s'élèvent contre le report de l'âge de départ en faisant valoir que trop peu de seniors ont un travail (35,5% des 60-64 ans, fin 2021), le gouvernement reconnaît que la réussite de sa réforme passe par le maintien dans l'emploi en fin de carrière.

Pour cela, il prévoit que les trimestres effectués dans le cadre d'un cumul emploi-retraite comptent désormais pour la pension, mais aussi que l'accès à la retraite progressive soit facilité et ouvert aux fonctionnaires.

L'exécutif entend également empêcher qu'une reprise d'activité puisse se traduire, pour les seniors, par une perte de rémunération. Dans ce but, le gouvernement envisage un bonus qui pourrait voir le jour dans le cadre du régime d'assurance-chômage mis en œuvre au 1er janvier 2024.

Enfin, le gouvernement veut créer un index seniors négocié dans chaque branche et publié par les entreprises de plus de 50 salariés, assorti d'une pénalité pour celles qui ne rempliraient pas cette obligation de publicité. Cette option suscite l'hostilité du patronat.

Carrières longues et pénibilité

Au titre des mesures de justice sociale, l'exécutif prévoit le relèvement du minimum de pension à 85% du Smic pour une carrière complète: les syndicats réclament que la mesure concerne aussi les pensionnés actuels, et non les seuls nouveaux entrants.

Le gouvernement veut en outre permettre à ceux qui ont commencé à travailler jeune de partir plus tôt. Le départ sera toujours anticipé de deux ans pour ceux qui ont validé cinq trimestres avant l'âge de 20 ans, et pourrait l'être de quatre ans pour ceux qui en ont accumulé dix.

Au chapitre pénibilité, la réforme pourrait reprendre certains critères abandonnés en 2017 mais chers aux syndicats: port de charges lourdes, postures pénibles et vibrations mécaniques.

Enfin, la création d'un congé de reconversion pour les bénéficiaires d'un compte professionnel de prévention (C2P) est à l'étude, de même que la mise sur pied d'un fonds de prévention de l'usure professionnelle pour les métiers identifiés comme difficiles.

«Pas rationnel»

A défaut de convaincre les syndicats, reçus comme les forces politiques à plusieurs reprises à Matignon depuis octobre, le gouvernement espère rallier les élus LR, divisés sur cette réforme pourtant proche de ce que vote chaque année le Sénat, à majorité de droite.

Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire ne peut "pas imaginer que les Républicains ne restent pas fidèles à leurs promesses de campagne".

Le patron de LR Eric Ciotti se dit prêt, dans le JDD, à "voter une réforme juste" et étalée dans le temps, avec un âge de départ relevé à 64 ans en 2032 et un minimum à 1 200 euros y compris pour les retraités actuels.

Un vote LR permettrait à l'exécutif de ne pas dégainer le 49.3 pour faire adopter par l'Assemblée sa réforme qui devrait passer par un projet de loi de financement rectificative de la Sécu.

Le texte sera examiné en Conseil des ministres le 23 janvier mais les syndicats, qui se réunissent mardi soir, envisagent de mobiliser avant cette date, alors qu'à gauche la Nupes tient meeting les 10 et 17 janvier et que LFI manifeste le 21.

Le projet de loi doit passer en commission à l'Assemblée nationale à partir du 30 janvier, et dans l'hémicycle le 6 février, pour deux semaines, selon des sources parlementaires.

Le patron de la CGT Philippe Martinez ironise sur l'"exploit" de l'exécutif qui unit les syndicats dans l'action pour la première fois depuis douze ans.


Il sauve six personnes d'un incendie: Fousseynou Cissé, nouveau "héros" du 18e arrondissement

Cette photo montre la Tour Eiffel illuminée (à droite) et la basilique du Sacré-Cœur au sommet de la colline de Montmartre, à Paris, le 11 juin 2025. (AFP)
Cette photo montre la Tour Eiffel illuminée (à droite) et la basilique du Sacré-Cœur au sommet de la colline de Montmartre, à Paris, le 11 juin 2025. (AFP)
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  • Fousseynou Cissé n'a "pas hésité" à sauver vendredi six personnes piégées dans leur appartement par un incendie dans le 18e arrondissement de Paris
  • Même Emmanuel Macron y est allé de ses félicitations lors d'un appel à M. Cissé

PARIS: Fousseynou Cissé n'a "pas hésité" à sauver vendredi six personnes piégées dans leur appartement par un incendie dans le 18e arrondissement de Paris. Celui qui s'apprête à être décoré est désormais vu comme un "héros" dans son quartier.

Résidents, riverains, cousins... Dans la cour de l'immeuble du 18e arrondissement, dans le nord de la capitale, tous se succèdent pour saluer Fousseynou Cissé lundi, trois jours après son acte héroïque. Un homme qui le connaît se filme en selfie avec lui.

Cet agent d'accueil contractuel dans les collèges accepte timidement les sollicitations: "On me parle de héros, mais moi... avec l'humilité que j'ai...même aujourd'hui, ce mot-là ne me fait pas grand chose", confie-t-il à l'AFP.

Même Emmanuel Macron y est allé de ses félicitations lors d'un appel à M. Cissé, filmé par le média Brut: "Bravo à vous, parce que la vidéo est impressionnante", a salué le chef de l'Etat, saluant le "courage" du père de famille.

Le président de la République a également invité Fousseynou Cissé, d'origine sénégalaise, et sa famille aux festivités du 14 juillet.

- En équilibre -

Fousseynou Cissé, 39 ans, sera aussi décoré par le préfet de police de Paris Laurent Nuñez "pour acte de courage et de dévouement" le 13 juillet.

Tout commence vendredi, lorsqu'un incendie se déclare au deuxième étage de l'immeuble de ce foyer Adoma, bailleur du logement accompagné en France. L'explosion d'une batterie de vélo en train de recharger dans un appartement pourrait en être la cause.

Au sixième étage, deux mères de famille se retrouvent bloquées par les fumées. Elles craignent pour leurs bébés, qu'elles tiennent à bout de bras aux fenêtres pour les protéger de la fumée.

"Quand j'ai vu la femme tendre son bébé, j'ai compris qu'il fallait faire quelque chose tout de suite", raconte Fousseynou Cissé.

Filmé par un habitant de l'immeuble, la vidéo de son sauvetage risqué est devenue virale sur les réseaux sociaux.

On le voit, s'avançant sur une corniche, puis en équilibre dans l'angle entre les deux bâtiments de la résidence, faisant passer deux bébés, deux enfants et deux mères de famille de la fenêtre de l'appartement à un autre.

"Je ne regardais même pas en bas. Je me concentrais pour ne pas avoir le vertige et pour ne pas glisser", décrit celui qui habite depuis deux ans dans l'immeuble.

"J'ai pensé qu'on allait mourir. Mais quand j'ai vu le monsieur prendre le bébé, là, j'ai dit, voilà, on va y arriver", témoigne auprès de l'AFP Zaoidi Ali, 37 ans, secourue par Fousseynou Cissé avec ses deux enfants.

- "Grande, grande personne" -

La mère de famille, les yeux humides, se dit "reconnaissante". "Je vais le remercier. Je vais le remercier encore parce que c'est quelqu'un de volontaire".

Au final, le sinistre a fait douze blessés, la plupart provoqués par de légères intoxications, dont cinq enfants, a appris l'AFP de source policière.

Dans la résidence et le quartier, le trentenaire apparaît comme un "héros". "Je me suis dit, +il y a encore des gens qui sont humains+", relate Abdul (le prénom a été modifié), 30 ans, gérant d'un commerce voisin.

"J'ai vu la vidéo. Je ne sais pas si tout le monde aurait fait ça. Ça aurait pu être nous, juste en face", réagit Moussa (il n'a pas souhaité donné son nom de famille), 20 ans, employé d'un restaurant situé face la résidence.

Nougaoui Hichame, directeur territorial d'Adoma, le bailleur de la résidence, salue de son côté une action "hors norme". "Ma première réaction ça a été de dire, +on souhaite le rencontrer+", raconte M. Hichame, qui salue une "grande, grande personne".


Nouveau conseil de défense sur «l'entrisme» des Frères musulmans

Emmanuel Macron a convoqué lundi un nouveau conseil de défense sur "l'entrisme" des Frères musulmans, après une première réunion fin mai jugée insatisfaisante par le chef de l'Etat, qui avait demandé au gouvernement "de nouvelles propositions". (AFP)
Emmanuel Macron a convoqué lundi un nouveau conseil de défense sur "l'entrisme" des Frères musulmans, après une première réunion fin mai jugée insatisfaisante par le chef de l'Etat, qui avait demandé au gouvernement "de nouvelles propositions". (AFP)
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  • Le précédent conseil de défense consacré à "l'entrisme" des Frères musulmans avait tourné au recadrage, M. Macron s'étant agacé que le rapport qu'il avait commandé sur le sujet ait fuité dans la presse avant cette réunion
  • "Compte tenu de l'importance du sujet et de la gravité des faits établis, il a demandé au gouvernement de formuler de nouvelles propositions", s'était alors contenté d'indiquer l'Elysée

PARIS: Emmanuel Macron a convoqué lundi un nouveau conseil de défense sur "l'entrisme" des Frères musulmans, après une première réunion fin mai jugée insatisfaisante par le chef de l'Etat, qui avait demandé au gouvernement "de nouvelles propositions".

Ce conseil de défense et de sécurité nationale se tiendra lundi en fin de matinée à l'Elysée, a indiqué l'entourage du président à l'AFP, confirmant une information du Figaro, sans autre précision.

D'après le quotidien, y sont attendus le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, sa collègue de l'Education Elisabeth Borne, mais aussi celle des Sports Marie Barsacq.

Le précédent conseil de défense consacré à "l'entrisme" des Frères musulmans avait tourné au recadrage, M. Macron s'étant agacé que le rapport qu'il avait commandé sur le sujet ait fuité dans la presse avant cette réunion.

"Compte tenu de l'importance du sujet et de la gravité des faits établis, il a demandé au gouvernement de formuler de nouvelles propositions", s'était alors contenté d'indiquer l'Elysée.

Le rapport faisait état d'une "menace pour la cohésion nationale" avec le développement d'un islamisme "par le bas" de la part des Frères musulmans.

Née en 1928 en Egypte, la confrérie des Frères musulmans porte le projet d'un islam politique conservateur. Le mouvement a été interdit dans plusieurs pays, comme l'Arabie saoudite, l'Egypte et plus récemment la Jordanie.

En France, il existe "dans certains quartiers" des phénomènes d'entrisme "identifiés", avait affirmé M. Macron dans la foulée du premier conseil de défense, tout en appelant à ne pas "penser qu'il y en a partout, parce que ça peut rendre complotiste ou paranoïaque".

C'est précisément ce que lui reproche à gauche La France insoumise, dont le coordinateur national Manuel Bompard a encore dénoncé lundi sur TF1 une volonté de "pointer du doigt les Français de confession musulmane".

En pratique, les pistes avancées par M. Retailleau pour "s'attaquer aux écosystèmes islamistes" ont principalement pris la forme d'une réorganisation administrative, avec la création d'un rôle de "chef de file" en matière de renseignement, ou encore d'un "parquet administratif" capable par exemple de prononcer des dissolutions.

Des "mesurettes administratives" rejetées en bloc par la cheffe de file du Rassemblement national, Marine Le Pen, qui avait réclamé d'aller "chercher, dénoncer, débusquer, couper les financements, interdire les publications" de cette "idéologie totalitaire".

Les décisions actées par ce nouveau conseil de défense pourraient faire l'objet d'un communiqué, a fait savoir l'Elysée.

 


France: entre protection et surtourisme, les menhirs de Carnac aux portes de l'Unesco

Ce site n'est qu'une petite partie d'un ensemble beaucoup plus vaste représentant un territoire de 1.000 km2 avec plus de 550 monuments répartis dans 28 communes bretonnes qui pourrait rejoindre le Machu Picchu, le Taj Mahal ou le Colisée sur la prestigieuse liste. (AFP)
Ce site n'est qu'une petite partie d'un ensemble beaucoup plus vaste représentant un territoire de 1.000 km2 avec plus de 550 monuments répartis dans 28 communes bretonnes qui pourrait rejoindre le Machu Picchu, le Taj Mahal ou le Colisée sur la prestigieuse liste. (AFP)
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  • "Un classement à l'Unesco a un côté schizophrène": la possible inscription ce weekend au patrimoine mondial des mégalithes de Bretagne, dans l'ouest de la France, a comme objectif de mieux protéger ces sites néolithiques
  • Ce site n'est qu'une petite partie d'un ensemble beaucoup plus vaste représentant un territoire de 1.000 km2 avec plus de 550 monuments répartis dans 28 communes bretonnes qui pourrait rejoindre le Machu Picchu, le Taj Mahal ou le Colisée

CARNAC: "Un classement à l'Unesco a un côté schizophrène": la possible inscription ce weekend au patrimoine mondial des mégalithes de Bretagne, dans l'ouest de la France, a comme objectif de mieux protéger ces sites néolithiques mais pose la question d'un éventuel afflux touristique.

Écoutant une guide conférencière, une vingtaine de touristes suivent une visite au Ménec, un des célèbres alignements de Carnac et des rives du Morbihan, avec ses longues allées rectilignes de menhirs ("pierre longue" en breton) de toute taille dont l'origine et la fonction restent un mystère.

Ce site n'est qu'une petite partie d'un ensemble beaucoup plus vaste représentant un territoire de 1.000 km2 avec plus de 550 monuments répartis dans 28 communes bretonnes qui pourrait rejoindre le Machu Picchu, le Taj Mahal ou le Colisée sur la prestigieuse liste.

L'estimation du nombre de visiteurs annuels pour Carnac avoisine les 300.000 personnes.

Au-delà de la fierté de devenir le premier site intégralement breton inscrit (la tour Vauban dans le Finistère fait partie des 12 fortifications Vauban classés à travers la France), une crainte grandit: l'apparition du célèbre logo de l'Unesco ne peut-il pas engendrer un tourisme de masse ?

"Il y a une autre tarte à la crème qu'on entend un petit peu avec des gens qui ne connaissent pas forcément les dossiers et qui disent +l'inscription Unesco c'est 30% de visiteurs+" de plus, explique Olivier Lepick, maire de Carnac et président de l'association Paysage de mégalithes qui a porté le projet depuis 2013.

"Pour les sites peu connus, oui parce que ça les met en lumière. Mais pour les sites qui ont déjà beaucoup de visiteurs l'augmentation est plutôt de 2% à 5%", observe le maire.

Venu de Belgique admirer quelques uns des 3.000 menhirs, "l'une des meilleures attractions historiques en Bretagne", Luka Pachta, 43 ans, ne croit guère au risque du surtourisme car le site, "très grand", est "déjà très connu".

"Circulation douce" 

En outre, des aménagements ont été entrepris pour répondre au mieux à l'afflux de visiteurs, notamment des travaux sur la route qui conduit au site.

Celle-ci était comme "une autoroute au bord de la Joconde", lance Olivier Lepick, évoquant également une photo des années 1950 où l'on voit des voitures circuler au milieu des alignements.

Pour Véronique André, retraitée venue de Marseille, cette inscription serait "à double tranchant" pour ces mégalithes vieux de 6.000 ans qui "dégagent un sentiment de puissance, de force, de surnaturel", étonnée qu'ils n'aient pas été déjà intégrés au patrimoine Unesco.

"Il est important qu'un tel site soit protégé et classé" mais "quand un lieu devient patrimoine de l'Unesco, ça amène encore plus de touristes. Moi-même quand je vais à l'étranger, si je vois qu'un monument est au patrimoine de l'Unesco, j'y vais!".

Pour Olivier Agogué, il est possible qu'il y ait "un surcroît de fréquentation d'un public lointain. On n'a pas beaucoup d'Asiatiques aujourd'hui or il semblerait qu'ils soient assez férus de sites Unesco".

Interrogée sur les conséquences de l'inscription, Victoire Dorise, directrice des Paysages de mégalithes, distingue les quatre sites disposant d'une billetterie, les monuments appartenant à des propriétaires privés (qui représentent les trois quarts des monuments) et enfin la cinquantaine de tailles intermédiaires.

Pour ces derniers, "on essaye de donner des éléments de compréhension archéologique et de paysage, mais aussi d'accessibilité très pratico-pratiques avec effectivement des études d'aménagement pour les cheminements ou les parkings".

Car, "on s'est collectivement donné pour objectif de ne pas accueillir plus mais d'accueillir mieux, et de faire connaître l'ensemble des sites et du paysage", plaide Mme Dorise, qui rappelle que l'objectif "principal, ultime, final" d'un classement Unesco est la "préservation des monuments".