En Egypte, l'économie en chute libre et la classe moyenne avec elle

Avant la récente dévaluation, 60% des 104 millions d'Egyptiens étaient sous ou juste au-dessus du seuil de pauvreté, selon la Banque mondiale (Photo, AFP).
Avant la récente dévaluation, 60% des 104 millions d'Egyptiens étaient sous ou juste au-dessus du seuil de pauvreté, selon la Banque mondiale (Photo, AFP).
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Publié le Mardi 17 janvier 2023

En Egypte, l'économie en chute libre et la classe moyenne avec elle

  • Avec une livre égyptienne divisée par deux depuis mars, l'inflation a grimpé en décembre à 21,9% et les prix des denrées alimentaires ont pris 37.9% selon les chiffres officiels
  • Mais pour Steve Hanke, professeur à l'université John Hopkins aux Etats-Unis et spécialiste de l'hyperinflation, l'inflation atteint en réalité 101% selon ses calculs

LE CAIRE: "C'est arrivé comme un coup de tonnerre et on a dû rogner sur tout": en Egypte, entre dévaluation et inflation, la classe moyenne se rapproche du seuil de pauvreté.

Manar, mère de deux enfants, a fait une croix sur les vacances à l'étranger et s'interroge désormais sur l'avenir, dans un pays qui s'engage dans de douloureuses réformes réclamées par le Fonds monétaire international (FMI).

"Le semblant de vie qu'on avait a disparu, maintenant on ne pense plus qu'au prix du pain ou des œufs", affirme cette femme au foyer de 38 ans qui refuse de donner son nom de famille.

Avec une livre égyptienne divisée par deux depuis mars, l'inflation a grimpé en décembre à 21,9% et les prix des denrées alimentaires ont pris 37.9% selon les chiffres officiels, la plupart des biens étant importés.

Mais pour Steve Hanke, professeur à l'université John Hopkins aux Etats-Unis et spécialiste de l'hyperinflation, l'inflation atteint en réalité 101% selon ses calculs qui prennent en compte pouvoir d'achat et taux de change - officiel et au marché noir.

«Jamais connu ça»

Et, comme lors de la brutale dévaluation de 2016, là encore pour un prêt du FMI, la classe moyenne et les plus pauvres sont en première ligne.

A l'époque déjà, le président Abdel Fattah al-Sissi parlait du "plus dur programme de réforme économique en Egypte" et en appelait à la mère de famille et à ses sacrifices pour tenir les cordons de la bourse.

Mais pour Salma, traductrice de 41 ans qui préfère témoigner sous pseudonyme, la "discipline militaire" ne suffit pas.

"Le salaire de mon mari a perdu 40% de sa valeur en six mois", dit-elle. Et rogner sur les courses ne permet de gagner qu'à la marge face aux "mensualités pour la maison, la voiture et les frais de scolarité" de son fils de six ans.

Ahmed Hicham, qui aide de nombreuses familles avec l'association Abwab El Kheir, a vu arriver un nouveau public.

"Beaucoup avaient des économies pour leurs enfants ou pour plus tard. Aujourd'hui, ils piochent dedans pour des frais de santé ou les dépenses quotidiennes", explique-t-il.

La plupart, dit-il, sont des "employés du secteur privé", plus généreux sur les salaires que la fonction publique, "qui gagnent entre 4 000 et 6 000 livres par mois" (de 125 à 185 euros).

"Ils n'ont jamais connu ça et ça les mortifie de venir chez nous", raconte-t-il.

"Il y a même un homme qui nous a dit devoir choisir entre nourrir ses enfants ou leur payer l'école".

Avant la récente dévaluation, 60% des 104 millions d'Egyptiens étaient sous ou juste au-dessus du seuil de pauvreté, selon la Banque mondiale.

«Pas d'autre issue»

Au milieu des inégalités notoires en Egypte, la classe moyenne est "difficile à définir", concède Soha Abdelaty, de l'Université américaine du Caire.

Mais une chose est sûre: "avec la brusque montée de l'inflation, ceux qui étaient loin du seuil de pauvreté pourraient s'en rapprocher", le salaire moyen annuel atteignant officiellement 2 150 euros.

"Ce sont ces gens qui n'arrivent plus à joindre les deux bouts mais ils ne sont toujours pas éligibles aux aides" gouvernementales, poursuit la spécialiste.

Pour les diplômés, "il n'y a pas d'autre issue qu'un travail à l'étranger", assure Salma, la traductrice, alors que fleurissent sur les réseaux sociaux offres d'emploi dans le Golfe ou explications sur les équivalences de diplômes en Europe.

Ceux qui y parviennent rejoignent les rangs des émigrés qui envoient chaque année près de 30 milliards d'euros en Egypte.

Pour ceux qui ne peuvent pas partir comme Manar, la priorité c'est l'instruction – dans le privé, la qualité de l'enseignement dans le public étant faible.

"Pour être sûr que son enfant apprenne quelque chose, il faut payer au minimum 20 000 à 40 000 livres (entre 625 et 1 250 euros) chaque année en primaire", assure Manar.

"Le problème c'est qu'on ne sait pas si ça s'arrêtera là", poursuit-elle.

"Il faut être prêt à tout vendre... en espérant que nos enfants aient un avenir meilleur".


Bombardements israéliens à Gaza, la population face à une «famine imminente»

Des Palestiniens passent devant des bâtiments endommagés et détruits dans le camp de Maghazi pour les réfugiés palestiniens dans le centre de la bande de Gaza, le 29 mars 2024. (AFP)
Des Palestiniens passent devant des bâtiments endommagés et détruits dans le camp de Maghazi pour les réfugiés palestiniens dans le centre de la bande de Gaza, le 29 mars 2024. (AFP)
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  • Le ministère de la Santé du Hamas a fait état en matinée de dizaines de morts lors de combats et de raids aériens notamment à Rafah
  • Face à l'urgence humanitaire, plusieurs pays organisent des parachutages et des expéditions d'aide par voie maritime

TERRITOIRES PALESTINIENS: Des bombardements israéliens ont de nouveau frappé vendredi la bande de Gaza, territoire palestinien assiégé dont la population fait face à une "famine imminente" selon le Programme alimentaire mondial (PAM), près de six mois après le début de la guerre avec le Hamas.

Le ministère de la Santé du Hamas a fait état en matinée de "dizaines de morts" lors de combats et de raids aériens notamment à Rafah (sud), ville considérée par Israël comme le dernier grand bastion du Hamas et où s'entassent 1,5 million de Palestiniens, en grande majorité déplacés par les hostilités.

Outre le bilan humain et les destructions, la guerre a provoqué une catastrophe humanitaire dans le territoire palestinien assiégé, où la majorité des 2,4 millions d'habitants sont désormais menacés de famine selon l'ONU qui déplore une aide largement insuffisante pour répondre aux besoins de la population.

"Il n'y a pas un autre endroit dans le monde où un aussi grand nombre de personnes font face à une famine imminente", a déploré jeudi sur X Matthew Hollingworth, chargé des territoires palestiniens au PAM.

Sans délai

Israël doit "veiller sans délai" à ce que soit assurée "sans restriction et à grande échelle, la fourniture par toutes les parties intéressées des services de base et de l'aide humanitaire requis de toute urgence", a déclaré jeudi la Cour internationale de justice (CIJ) basée à La Haye.

Saisie par l'Afrique du Sud, la juridiction avait ordonné en janvier à Israël de faire tout son possible pour empêcher un "génocide" dans le territoire palestinien, Israël jugeant "scandaleuses" de telles accusations.

Dans la nuit, le Hamas s'est félicité de la décision de la CIJ et a demandé sa "mise en œuvre immédiate".

Face à l'urgence humanitaire, plusieurs pays organisent des parachutages et des expéditions d'aide par voie maritime, mais tous soulignent que ces voies d'approvisionnement ne peuvent se substituer aux routes terrestres.

La guerre a été déclenchée par une attaque sans précédent menée depuis la bande de Gaza par le Hamas le 7 octobre en Israël qui a entraîné la mort d'au moins 1.160 personnes, essentiellement des civils, selon un décompte de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes.

D'après Israël, environ 250 personnes ont également été enlevées et 130 d'entre elles sont toujours otages à Gaza, dont 34 sont mortes.

En représailles, Israël a juré d'anéantir le Hamas -- qu'il considère comme une organisation terroriste de même que les Etats-Unis et l'Union européenne -- et lancé une offensive qui a fait à 32.623 morts, majoritairement des femmes et des enfants, selon un dernier bilan vendredi du ministère de la Santé du Hamas.

Entrer à Rafah

L'armée israélienne, qui accuse les combattants du Hamas de se cacher dans les hôpitaux, a dit vendredi poursuivre ses opérations dans le complexe hospitalier al-Chifa, dans la ville de Gaza (nord), disant avoir "éliminé environ 200 terroristes" dans le secteur depuis le 18 mars.

Elle a souligné s'assurer de "prévenir toute atteinte aux civils, patients, équipes médicales et matériel".

Dans le centre de la bande de Gaza, l'armée a dit avoir "détruit de nombreuses roquettes destinées à être tirées vers Israël", et éliminé des "terroristes".

Des opérations se poursuivent également à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, dans les secteurs d’Al-Amal et Al Qarara, où des combattants palestiniens ont aussi été tués, selon elle.

A Khan Younès, plusieurs blessés ont été transportés en ambulance à l’hôpital européen dans la nuit, selon des images de l’AFP. Certaines victimes, dont des enfants, étaient soignées à même le sol.

"Rien n'a changé"

A Rafah, plus au sud, des dizaines d’hommes œuvraient à dégager des décombres d’un bâtiment bombardé des blessés et des corps, d’où a notamment été extrait un jeune garçon.

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyhau a réaffirmé jeudi sa détermination à lancer une offensive terrestre à Rafah en dépit des pressions internationales, y compris des Etats-Unis.

"Nous tenons le nord de la bande de Gaza ainsi que Khan Younès (sud). Nous avons coupé en deux la bande de Gaza et on se prépare à entrer à Rafah", a-t-il dit.

Les Etats-Unis, principal allié d'Israël qui redoute le bilan humain d'une telle opération, a récemment demandé l'envoi d'une délégation israélienne à Washington pour discuter de ce projet.

En parallèle, le Qatar - un médiateur avec l'Egypte et les Etats-Unis - a été l'hôte cette semaine de négociations indirectes entre Israël et le Hamas sur un projet de trêve de plusieurs semaines doublée d'un échange d'otages israéliens et de prisonniers palestiniens.

Une résolution à l'ONU réclamant un "cessez-le-feu immédiat" a été adoptée lundi après l'abstention des Etats-Unis, mais "rien n'a changé" sur le terrain depuis, a déploré le président international de Médecins sans frontières Christos Christou.

 


Netanyahu donne son feu vert à un nouveau cycle de pourparlers en vue d'une trêve à Gaza

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a approuvé une nouvelle série de pourparlers sur le cessez-le-feu à Gaza qui doivent se tenir à Doha et au Caire, a déclaré son bureau vendredi, quelques jours après que les négociations aient semblé dans l'impasse. (Reuters)
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a approuvé une nouvelle série de pourparlers sur le cessez-le-feu à Gaza qui doivent se tenir à Doha et au Caire, a déclaré son bureau vendredi, quelques jours après que les négociations aient semblé dans l'impasse. (Reuters)
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  • Le bureau de M. Netanyahu a ajouté que le Premier ministre s'était entretenu avec le chef du Mossad, David Barnea, au sujet des négociations
  • Le Qatar, pays médiateur, a indiqué mardi que les négociations entre le Hamas et Israël sur une trêve à Gaza et la libération des otages se poursuivaient

JÉRUSALEM: Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a donné son feu vert à un nouveau cycle de pourparlers à Doha et au Caire, en vue d'une trêve à Gaza, a indiqué vendredi son bureau, après que les négociations semblaient dans l'impasse.

"Benjamin Netanyahu s'est entretenu avec le directeur du Mossad (services extérieurs israéliens) et le directeur du Shin bet (renseignement intérieur), et a approuvé un nouveau cycle de négociations dans les prochains jours, à Doha et au Caire", a précisé son bureau dans un communiqué.

Depuis l'adoption par le Conseil de sécurité des Nations unies lundi d'une résolution exigeant un "cessez-le-feu immédiat", Israël et le Hamas se renvoient la responsabilité de leur incapacité à trouver un accord sur une trêve, après bientôt six mois de guerre entre l'armée israélienne et le mouvement islamiste palestinien dans la bande de Gaza.

Le Qatar, pays médiateur, a indiqué mardi que les négociations entre le Hamas et Israël sur une trêve à Gaza et la libération des otages se poursuivaient, mais peu d'informations avaient été communiquées depuis par les différentes parties.

Le bureau de M. Netanyahu a ajouté que le Premier ministre s'était entretenu avec le chef du Mossad, David Barnea, au sujet des négociations, mais n'a pas précisé si M. Barnea se rendrait à Doha ou au Caire pour les pourparlers.

La guerre a été déclenchée par une attaque sans précédent menée depuis la bande de Gaza par le Hamas le 7 octobre en Israël qui a entraîné la mort d'au moins 1.160 personnes, essentiellement des civils, selon un décompte de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes.

D'après Israël, environ 250 personnes ont également été enlevées et 130 d'entre elles sont toujours otages à Gaza, dont 34 sont mortes.

En représailles, Israël a juré d'anéantir le Hamas, qu'il considère comme une organisation terroriste de même que les Etats-Unis et l'Union européenne, et lancé une offensive qui a fait 32.623 morts, majoritairement des femmes et des enfants, selon un dernier bilan vendredi du ministère de la Santé du Hamas.

 


L'armée israélienne dit avoir éliminé un chef du Hezbollah au Liban

Le Hezbollah, allié du groupe militant palestinien Hamas, échange presque quotidiennement des tirs transfrontaliers avec l'armée israélienne depuis que les hommes armés du Hamas ont lancé une attaque sans précédent contre le sud d'Israël le 7 octobre, déclenchant une guerre à Gaza. (AFP)
Le Hezbollah, allié du groupe militant palestinien Hamas, échange presque quotidiennement des tirs transfrontaliers avec l'armée israélienne depuis que les hommes armés du Hamas ont lancé une attaque sans précédent contre le sud d'Israël le 7 octobre, déclenchant une guerre à Gaza. (AFP)
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  • Vendredi, l'agence de presse officielle libanaise ANI a rapporté un «raid ciblé mené par un drone ennemi sur une voiture» à Bazouriyé, près de la ville côtière de Tyr, faisant état d'au moins un mort
  • Le mouvement libanais n'a pas commenté l'attaque dans l'immédiat mais il a dit avoir tiré vendredi sur des positions militaires israéliennes à la frontière entre Israël et le Liban

BEYROUTH: Un "important responsable" du Hezbollah libanais a été tué vendredi dans une frappe sur sa voiture dans le sud du Liban, a indiqué une source militaire libanaise en accusant Israël.

Depuis près de six mois, les violences opposent quotidiennement à la frontière israélo-libanaise l'armée israélienne au Hezbollah qui affirme vouloir soutenir le mouvement islamiste palestinien Hamas dans sa guerre contre Israël dans la bande de Gaza.

Le mouvement armé pro-iranien vise des positions militaires et des localités proches de la frontière, et Israël riposte en bombardant de plus en plus en profondeur le territoire libanais, menant notamment des attaques ciblées contre des responsables du Hezbollah et du Hamas.

Vendredi, l'agence de presse officielle libanaise ANI a rapporté un "raid ciblé mené par un drone ennemi (israélien, ndlr) sur une voiture" à Bazouriyé, près de la ville côtière de Tyr, faisant état d'au moins un mort.

S'exprimant sous couvert d'anonymat, une source militaire libanaise a précisé que la victime était "un important responsable du Hezbollah", bête noire d'Israël.

Le mouvement libanais n'a pas commenté l'attaque dans l'immédiat mais il a dit avoir tiré vendredi sur des positions militaires israéliennes à la frontière entre Israël et le Liban.

Selon un correspondant de l'AFP sur place, la voiture ciblée a été détruite et des débris étaient éparpillés tout autour. Les autorités ont bouclé la zone.

Les violences transfrontalières se sont intensifiées cette semaine, suscitant des craintes d'un conflit généralisé entre Israël et le Hezbollah, qui se sont livré une guerre dévastatrice en 2006.

La Maison Blanche a estimé jeudi qu'un retour au calme à la frontière israélo-libanaise devait être "la plus haute priorité".

Mercredi, onze civils dont dix secouristes ont été tués du côté libanais de la frontière par des frappes attribuées à Israël, et un civil a péri du côté israélien dans des bombardements revendiqués par le Hezbollah.

Depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas le 7 octobre, au moins 347 personnes ont été tuées au Liban -des combattants du Hezbollah pour la plupart, mais aussi au moins 68 civils-, selon un décompte de l'AFP.

Côté israélien, dix soldats et huit civils ont été tués selon l'armée.