Licenciements en série dans les médias américains, sur fond de morosité économique

Tenoch Huerta prend la parole sur scène lors de la 16e édition annuelle de CNN Heroes : An All-Star Tribute au Musée américain d'histoire naturelle, le 11 décembre 2022 à New York. (Photo par Mike Coppola / Getty Images North America / Getty Images via AFP)
Tenoch Huerta prend la parole sur scène lors de la 16e édition annuelle de CNN Heroes : An All-Star Tribute au Musée américain d'histoire naturelle, le 11 décembre 2022 à New York. (Photo par Mike Coppola / Getty Images North America / Getty Images via AFP)
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Publié le Dimanche 22 janvier 2023

Licenciements en série dans les médias américains, sur fond de morosité économique

  • L'emploi dans les salles de rédaction a subi un long déclin aux Etats-Unis, passant de 114.000 à 85.000 journalistes entre 2008 et 2020, selon une étude du Pew Research Center en 2021
  • Une annonce est redoutée au Washington Post, où le directeur de la publication Fred Ryan a prévenu mi-décembre que des suppressions de postes auraient lieu durant le premier trimestre 2023

NEW YORK : CNN, Vox Media, Washington Post... l'hiver est marqué par une nouvelle série de licenciements dans les médias américains, une tendance qui se poursuit sur fond de climat économique morose.

«Je fais partie du groupe licencié par @NBCInvestigates (NBC) (...) Ça va me manquer, mais je suis reconnaissante du temps passé ici.»

Comme Emily Siegel, qui n'a pas souhaité s'exprimer en détail après ce tweet mercredi, plusieurs journalistes des rédactions de NBC, de la chaîne du même groupe MSNBC, ou encore de CNN, ont pris les devants et annoncé sur les réseaux sociaux leur licenciement depuis décembre.

Vendredi, c'est chez Vox Media, propriétaire des sites Vox, The Verge, SBNation et depuis 2019 du prestigieux New York Magazine, que les employés ont reçu un même courriel de leur patron, Jim Bankoff, leur annonçant «la décision difficile de supprimer environ 7% de notre personnel dans tous les départements», dont l'éditorial, «en raison d'un environnement économique difficile».

- «15 minutes» -

Les salariés concernés, environ 130 sur 1.900, ont été notifiés par un second message «dans les 15 minutes suivantes», d'après ce courriel.

Plusieurs d'entre eux ont témoigné sur les réseaux sociaux de leur colère ou désarroi, comme Meghan McCarron, journaliste depuis «neuf ans et demi» sur le site spécialisé dans la restauration Eater, et licenciée à «37 semaines» de grossesse. Vox Media a répondu à l'AFP que le groupe offrait des «indemnités de départ compétitives», dont des semaines d'indemnité supplémentaires dans le cas d'un congé parental proche.

Si les licenciements n'ont pas l'envergure des plans sociaux de grands groupes de la tech comme Google vendredi (12.000 postes supprimés), les médias américains sont eux aussi affectés par «la baisse des revenus publicitaires et le ralentissement de l'économie», explique à l'AFP Chris Roush, professeur de journalisme et doyen de l'école de communication de l'université Quinnipiac (Connecticut).

«Beaucoup d'entre eux ont grandi et se sont développés dans l'espoir d'augmenter leurs audiences jusqu'à un certain niveau. Cela ne s'est pas produit et a peu de chances de se produire vu le contexte économique», ajoute-t-il.

- Moins de journalistes -

L'emploi dans les salles de rédaction a subi un long déclin aux Etats-Unis, passant de 114.000 à 85.000 journalistes entre 2008 et 2020, selon une étude du Pew Research Center en 2021. Avec une baisse plus marquée dans la presse locale.

«Le journalisme est depuis longtemps sous pression et un certain nombre d'entreprises semblent penser que c'est le moment opportun pour réduire leurs coûts de main-d'œuvre», a déploré le syndicat Writers Guild of America East, qui chapeaute les syndicats de NBC et MSNBC. Au sein des deux médias, qui n'ont pas répondu à l'AFP, 75 employés auraient été licenciés, selon les médias américains.

Une annonce est également redoutée au Washington Post, où le directeur de la publication Fred Ryan a prévenu mi-décembre que des suppressions de postes auraient lieu durant le premier trimestre 2023, représentant «un pourcentage à un chiffre» des 2.500 employés, mais sans «réduction nette d'effectifs».

La rédaction du quotidien racheté en 2013 par Jeff Bezos avait déjà appris la fin pour Noël 2022 du supplément magazine du dimanche, vainqueur de deux prix Pulitzer en 2008 et 2010.

- Concurrence -

Chez CNN, le total des licenciements en décembre aurait atteint plusieurs centaines d'employés selon des médias américains (sur plus de 4.000), des chiffres non confirmés par la chaîne. Ils ont eu lieu dans le cadre d'une réorganisation après la fusion entre WarnerMedia (CNN, HBO Max) et Discovery, qui a formé le géant des médias et du streaming Warner Bros. Discovery.

Témoin des remous stratégiques, en avril, le groupe avait abandonné son service de streaming payant CNN+, seulement un mois après son lancement.

Avec des téléspectateurs et des abonnés au câble payant en déclin depuis des années et la concurrence des plateformes comme Netflix, «c'est une lutte constante pour ces entreprises de tenir», relève aussi Naveen Sarma, directeur des médias et télécoms américains chez S&P Global Ratings.

Pour Chris Roush, CNN ou le Washington Post, «ceux-là ne s'en iront pas, mais une entreprise plus petite aura plus de problèmes, parce qu'elle est plus petite et pas aussi bien établie en tant que marque de média», explique-t-il. Il cite notamment Buzzfeed, qui a licencié 12% de ses employés en décembre, ou Vice Media, dont la directrice générale Nancy Dubuc a annoncé vendredi à ses salariés envisager de vendre le groupe.

Lancement de la plate-forme CNN Business Arabic
Par Arab News -
L'hypocrisie du Washington Post
Par Tariq Al-Homayed -

La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".


La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, alerte le Secours populaire

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
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  • "La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire
  • "La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg

PARIS: La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, touchant tous les aspects de la vie des plus fragiles, alerte jeudi le Secours Populaire, qui publie un baromètre témoignant de cette situation jugée préoccupante.

"La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire.

L'association publie un baromètre qui indique qu'un tiers des Français (31%) rencontrent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine permettant de faire trois repas par jour. De même 39% ont du mal à payer leurs dépenses d'électricité et 49% à partir en vacances au moins une fois par an, selon ce sondage réalisé par l'Institut Ipsos, auprès d'un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

"La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg.

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier.

Malgré un "léger mieux" constaté sur certains indicateurs lié au "ralentissement de l'inflation", ce baromètre révèle "une situation sociale toujours très préoccupante", selon le Secours populaire.

En début de semaine, la déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a évoqué des "difficultés" rencontrées par l'Etat pour résorber un taux de pauvreté qui a atteint un niveau record en 2023 en France métropolitaine.

Face à cette situation, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a appelé mardi à une "mobilisation collective" pour "débloquer la lutte contre la précarité".

Au niveau européen, 28% de la population déclare se trouver en situation précaire, également selon ce baromètre du Secours Populaire, qui s'appuie aussi sur des échantillons de 1.000 personnes représentatifs de neuf autres pays (Allemagne, Grèce, Italie, Pologne, Royaume-Uni, Moldavie, Portugal, Roumanie, Serbie).

La part des personnes se considérant comme précaires demeure à un niveau "très alarmant" en Grèce (46%) et en Moldavie (45%), pointe le baromètre.

En 2024, le Secours populaire a soutenu 3,7 millions de personnes en France. L'association fournit notamment de l'aide alimentaire et organise des activités pour différents publics pour rompre l'isolement.


Face à l'explosion des dépenses militaires, l'ONU appelle à «repenser les priorités»

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté. (AFP)
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté. (AFP)
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  • "Aujourd'hui, nous publions un rapport qui révèle une réalité saisissante: le monde dépense bien plus à faire la guerre qu'à construire la paix", a-t-il déclaré Antonio Guterres
  • Selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), les dépenses militaires mondiales ont atteint en 2024 près de 2.700 milliards de dollars, en hausse de plus de 9% sur un an

NATIONS-UNIES: Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté.

"Aujourd'hui, nous publions un rapport qui révèle une réalité saisissante: le monde dépense bien plus à faire la guerre qu'à construire la paix", a-t-il déclaré Antonio Guterres.

Selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), les dépenses militaires mondiales ont atteint en 2024 près de 2.700 milliards de dollars, en hausse de plus de 9% sur un an.

C'est "l'équivalent de 334 dollars par habitant de la planète", "près de 13 fois le montant de l'aide publique au développement des pays les plus riches et 750 fois le budget ordinaire de l'ONU", a noté Antonio Guterres.

Et en parallèle, la majorité des Objectifs de développement durables (ODD) visant à améliorer le sort de l'humanité d'ici 2030 (éradication de l'extrême pauvreté, égalité hommes-femmes, éducation...) ne sont pas sur la bonne voie.

Pourtant, mettre un terme à la faim dans le monde d'ici 2030 nécessiterait seulement 93 milliards de dollars par an, soit 4% des dépenses militaires de 2024, et faire en sorte que chaque enfant soit totalement vacciné coûterait entre 100 et 285 milliards par an, note le rapport demandé par les Etats membres.

Au total, l'ONU estime aujourd'hui à 4.000 milliards de dollars les investissements supplémentaires nécessaires chaque année pour atteindre l'ensemble des ODD, un montant qui pourrait grimper à 6.400 milliards dans les prochaines années.

Alors le secrétaire général de l'ONU a lancé un "appel à l'action, un appel à repenser les priorités, un appel à rééquilibrer les investissements mondiaux vers la sécurité dont le monde a vraiment besoin".

"Des dépenses militaires excessives ne garantissent pas la paix, souvent elles la sapent, encourageant la course aux armements, renforçant la méfiance et détournant des ressources de ce qui représentent les bases de la stabilité", a-t-il ajouté. "Un monde plus sûr commence par investir au moins autant pour lutter contre la pauvreté que nous le faisons pour faire la guerre".

"Rediriger même une fraction des dépenses militaires actuelles pourraient combler des écarts vitaux, envoyer des enfants à l'école, renforcer les soins de santé de base, développer les énergies propres et des infrastructures résistantes, et protéger les plus vulnérables", a-t-il plaidé.