L'obstruction politique viole les droits des survivants de l'explosion du port de Beyrouth

Plus de deux ans après l'explosion du port de Beyrouth qui a dévasté la capitale, l'enquête officielle est au point mort à cause de luttes politiques intenses et d'affirmations selon lesquelles des responsables corrompus sont protégés des poursuites (Photo, AFP).
Plus de deux ans après l'explosion du port de Beyrouth qui a dévasté la capitale, l'enquête officielle est au point mort à cause de luttes politiques intenses et d'affirmations selon lesquelles des responsables corrompus sont protégés des poursuites (Photo, AFP).
Des silos à grains moyens du port de Beyrouth (Photo, AFP).
Des silos à grains moyens du port de Beyrouth (Photo, AFP).
Des proches de victimes de l'explosion du port de Beyrouth en 2020 affrontent la police anti-émeute lors d'un rassemblement le 26 janvier 2023 pour soutenir le juge Tarek Bitar dans l'enquête sur la catastrophe (Photo, AFP).
Des proches de victimes de l'explosion du port de Beyrouth en 2020 affrontent la police anti-émeute lors d'un rassemblement le 26 janvier 2023 pour soutenir le juge Tarek Bitar dans l'enquête sur la catastrophe (Photo, AFP).
Des proches de victimes de l'explosion du port de Beyrouth en 2020 affrontent la police anti-émeute lors d'un rassemblement le 26 janvier 2023 pour soutenir le juge Tarek Bitar dans l'enquête sur la catastrophe (Photo, AFP).
Des proches de victimes de l'explosion du port de Beyrouth en 2020 affrontent la police anti-émeute lors d'un rassemblement le 26 janvier 2023 pour soutenir le juge Tarek Bitar dans l'enquête sur la catastrophe (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 06 février 2023

L'obstruction politique viole les droits des survivants de l'explosion du port de Beyrouth

  • Le pouvoir judiciaire et les politiciens ont accusé Tarek Bitar d'insubordination pour avoir repris son enquête après une interruption de 13 mois
  • Pour les survivants et les familles des victimes de l'explosion, la nouvelle démarche du juge Bitar offre une lueur d'espoir

DUBAÏ: Lorsqu'une explosion massive a ravagé le port de Beyrouth le 4 août 2020, tuant plus de 215 personnes, les responsables libanais ont promis une enquête rapide qui permettrait de traduire les coupables en justice en quelques jours.

Depuis lors, l'enquête a été bloquée à plusieurs reprises, son enquêteur principal Tarek Bitar étant accusé d'insubordination pour avoir repris son enquête sur l'explosion et inculpé plusieurs hauts responsables.

L'explosion, qui a dévasté le port et les quartiers environnants, faisant plus de 6 500 blessés et quelque 300 000 déplacés, s'est produite lorsqu'une grande quantité d'engrais à base de nitrate d'ammonium, mal stockée dans un entrepôt depuis 2014, a curieusement pris feu.

Les survivants, les proches des victimes et les groupes de défense des droits ont imputé la catastrophe à une classe politique largement considérée comme corrompue et inepte. À ce jour, aucun responsable n'a été tenu pour responsable.

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Des proches des victimes de l'explosion du port de Beyrouth se heurtent à la police devant le Palais de justice de Beyrouth (Photo, AFP).

«Le retardement de l'enquête sur l'explosion du port de Beyrouth en 2020 avait déjà démontré que le système judiciaire était un jouet entre les mains de personnalités puissantes, qui pouvaient joyeusement mettre des bâtons dans les roues de la justice afin de paralyser les procédures indéfiniment», a déclaré la présentatrice et commentatrice politique Baria Alamuddin dans une récente tribune pour Arab News.

L'enquête de Bitar a été initialement interrompue en décembre 2021 en raison d'un arrêt de la Cour de cassation. Trois anciens ministres avaient déposé des ordonnances judiciaires contre lui, tandis que des groupes opposés à l'enquête, dont le Hezbollah soutenu par l'Iran, l'accusaient de partialité.

Bitar était déjà le deuxième juge à diriger l'enquête après la révocation du juge Fadi Sawan. En décembre 2020, Sawan avait inculpé l'ancien Premier ministre Hassan Diab — qui avait démissionné au lendemain de l'explosion — et trois anciens ministres pour négligence.

Cependant, Sawan a été retiré de l'affaire après une pression politique croissante et l'enquête a été suspendue.

Son successeur, Bitar, a également convoqué Diab pour l'interroger et a demandé au Parlement de lever l'immunité des législateurs qui avaient été ministres, mais en vain. Le ministère de l'Intérieur a également refusé d'exécuter les mandats d'arrêt, compromettant encore davantage la quête de responsabilisation adressée par Bitar.

 

EN BREF

 

L'explosion de Beyrouth du 4 août 2020 a fait plus de 215 morts, 6 500 blessés et au moins 300 000 déplacés.

 

Le juge Fadi Sawan a lancé l'enquête initiale sur l'explosion, mais s'est retiré après une opposition politique et judiciaire.

 

Son successeur Tarek Bitar a interrompu son enquête en décembre 2021 à cause d'une décision de la cour de cassation.

 

Bitar a repris son enquête le 23 janvier, inculpant huit nouveaux suspects, dont le procureur général, Ghassan Oueidat.

 

En octobre 2021, des manifestations appelant à la destitution de Bitar ont été organisées par le Hezbollah et le Mouvement Amal, un parti politique chiite dirigé par Nabih Berri, dans le quartier de Tayouneh à Beyrouth, marqué par la guerre civile.

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Un partisan du Hezbollah et des mouvements Amal porte un portrait du juge Tarek Bitar lors d'un rassemblement à Beyrouth le 14 octobre 2021 (Photo, AFP).

Les manifestations ont rapidement pris une tournure mortelle lorsque des tireurs d'élite non identifiés ont ouvert le feu sur la foule, tuant sept civils et en blessant des dizaines, dans des échos de la période de la guerre civile de 1975 à 1990. Les tireurs étaient soupçonnés d'être des membres des Forces libanaises, un parti chrétien de droite.

Compte tenu de ces tensions et de ces obstacles, beaucoup ont été surpris lorsque Bitar a repris son enquête le 23 janvier, après une interruption de 13 mois, en inculpant huit nouveaux suspects, dont de hauts responsables de la sécurité et le procureur général du Liban, Ghassan Oueidat.

Bitar a également inculpé l'ancien Premier ministre Diab, le parlementaire Ghazi Zaiter, l'ancien ministre de l'Intérieur Nouhad Machnouk, le général de division Abbas Ibrahim, l'ancien commandant de l'armée Jean Kahwaji et le général de division Tony Saliba.

Oweidat a réagi en émettant une interdiction de voyager à l'encontre de Bitar, l'accusant d’«insurrection», d'«agir sans mandat», et de «rébellion contre le pouvoir judiciaire». Il a également émis un ordre de libération de 17 suspects placés en détention provisoire.

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Manifestation libanaise à Beyrouth le 28 janvier 2023 pour exiger la destitution et la poursuite du procureur en chef Ghassan Oueidat (Photo, AFP).

«Le système judiciaire libanais est devenu un objet de dérision, car les juges ont lancé des accusations de représailles les uns contre les autres et ont ordonné arbitrairement la libération de détenus», a indiqué la chroniqueuse Alamuddin.

«En déposant des accusations contre de hauts responsables, Bitar n'est pas un juge hors de contrôle. Au contraire, il indique que l'ensemble des dirigeants complices et corrompus méritent de rendre des comptes», a -t-elle révélé.

La querelle entre le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire est un nouveau test pour les institutions libanaises qui s'effritent. Détruite par la crise financière et la paralysie politique, sa monnaie est en chute libre et des milliers de professionnels et de jeunes gens fuient le pays et les attentes sont faibles.

Michael Young, rédacteur en chef de Diwan, un blog du programme Moyen-Orient de la Dotation Carnegie pour la paix internationale et auteur de «Ghosts of Martyrs Square», est convaincu que Bitar ne sera pas autorisé à faire son travail correctement.

«Nous devons comprendre qu'il y a deux étapes dans ce processus», a-t-il déclaré à Arab News. «Si Bitar convoque quelqu'un, il lui sera très difficile, voire impossible, de forcer les personnes sur lesquelles il veut enquêter à se présenter à leurs interrogatoires.

«La police ne fera rien à ce sujet parce que le ministère de l'Intérieur, à son tour, ne mettra rien en œuvre. La police judiciaire est contrôlée par le procureur général Oueidat et il a clairement fait savoir qu'il n'ordonnerait pas l'application d'une quelconque décision», a ajouté Young.

Il a estimé: «La capacité de Bitar à faire son travail correctement va être, à mon avis, impossible. Son enquête est techniquement bloquée.»

La raison pour laquelle Bitar a choisi de reprendre son enquête maintenant reste obscure. Mais pour les survivants et les familles des victimes de l'explosion, son retour offre une lueur d'espoir.

«Il était temps que le juge Bitar reprenne son travail. La vérité doit éclater à un moment donné et je pense que ce que le juge Ghassan Oueidat a fait en défiant le juge Bitar renforce sa volonté de découvrir la vérité», a déclaré à Arab News Tatiana Hasrouty, qui a perdu son père Ghassan Hasrouty dans l'explosion.

Elle a poursuivi: «J’ai confiance en le juge Bitar, non pas en tant que personne, mais plutôt en tant que juge chargé d'enquêter sur ce crime et qui s'efforce de découvrir la vérité et de faire respecter l'État de droit. Il remet en question la culture de l'impunité dont nous, Libanais, avons hérité, en assignant des hommes politiques et des hauts fonctionnaires.»

Bitar, qui a été nommé enquêteur principal pour la première fois en février 2021, était considéré par de nombreux Libanais comme un juge impartial et honnête.

Ce chrétien de 49 ans, originaire du nord du pays, apparaît rarement en public ou s’adresse peu à la presse. Il est connu pour avoir une réputation irréprochable et n'avoir aucune affiliation politique, ce qui est rare dans un pays aussi profondément sectaire.

«Bitar est dérangeant pour les classes dirigeantes corrompues parce qu'il ne suit pas leurs règles», a expliqué Alamuddin dans sa tribune d'Arab News. «Il décline les invitations à des occasions sociales pour éviter les perceptions d'influence et n'accepte pas les appels de ceux qui cherchent des faveurs.»

Dans un récent sermon, l'influent patriarche maronite Bechara al-Rahi a exprimé son soutien à Bitar, l'exhortant à «poursuivre son travail», en dépit d'un repli judiciaire et politique «inacceptable».

«Les réunions des instances judiciaires sont marquées par l'absence de quorum, les juges et les procureurs défiant le Conseil supérieur de la magistrature et son chef et s'abstenant d'assister aux réunions», a-t-il signalé.

Al-Rahi a prévenu: «Nous ne laisserons pas le crime du port sans punition, peu importe le temps qui passe et le nombre de dirigeants qui changent.»

Al-Rahi, qui est le patriarche de la plus grande communauté chrétienne du pays, a également appelé Bitar à demander l'aide et l'assistance de toute autorité internationale susceptible de l'aider à découvrir la vérité.

Human Rights Watch et Amnesty International ont appelé le Conseil des droits de l'homme des Nations unies à «adopter de toute urgence une résolution visant à créer une mission d'enquête impartiale» sur l'explosion du port de Beyrouth.

«Les autorités libanaises ont fait obstacle à plusieurs reprises à l'enquête nationale sur l'explosion», ont déclaré les deux organisations dans un communiqué commun.

Dans le climat politique tendu du Liban, les chances d'obtenir justice pour les survivants de l'explosion du port et les familles des victimes semblent faibles.

«Nous avons compris dès le début que la classe politique ne veut pas que l'enquête aille jusqu'au bout, au point qu'elle est même prête — comme nous l'avons vu dans l'incident de Tayouneh il y a plus d'un an — à risquer un conflit sectaire», a déclaré Young, rédacteur en chef de Diwan, à Arab News

Il a ajouté: «Ils ne mettront pas en œuvre l'État de droit. Cela fait de toute façon défaut au Liban aujourd'hui. Ils ne se soucient pas des conséquences de l'absence d'un État de droit.»

Cependant, Hasrouty, qui a utilisé les médias sociaux pour exprimer son chagrin et sa colère face à la perte de son père, affirme que, quoi que fassent les politiciens et les responsables libanais, elle ne perdra pas espoir.

«La vérité fait peur à l'élite dirigeante et c'est pourquoi nous la poursuivrons jusqu'au bout», a-t-elle soutenu. «Les politiciens ont peur du pouvoir que détiennent désormais les familles et le public.»

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Soudan: craintes de la poursuite des exactions à El-Facher

Des enfants et des familles déplacés d'El-Fasher dans un camp où ils se sont réfugiés pour échapper aux combats entre les forces gouvernementales et le RSF, à Tawila, dans la région du Darfour. (UNICEF via AP)
Des enfants et des familles déplacés d'El-Fasher dans un camp où ils se sont réfugiés pour échapper aux combats entre les forces gouvernementales et le RSF, à Tawila, dans la région du Darfour. (UNICEF via AP)
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  • Des massacres se poursuivent à El-Facher, dernière grande ville du Darfour tombée aux mains des Forces de soutien rapides (FSR) après 18 mois de siège
  • La situation est décrite comme « apocalyptique » par les diplomaties allemande et britannique, tandis que l’ONU réclame des enquêtes rapides sur les atrocités et que plus de 65 000 civils ont fui la ville, désormais en ruines

Port-Soudan: De nouvelles images satellites et l'ONG Médecins sans frontières (MSF) suggèrent samedi la poursuite des massacres dans la ville soudanaise d'El-Facher, près d'une semaine après sa prise par les paramilitaires.

Alors que les informations sur des violences contre les civils se multiplient, les chefs de la diplomatie allemande et britannique ont alerté sur une situation "absolument apocalyptique" et "véritablement terrifiante" sur le terrain.

Après 18 mois de siège, les Forces de soutien rapides (FSR, paramilitaires) de Mohamed Daglo ont pris dimanche El-Facher, dernière grande ville du Darfour (ouest) qui échappait encore à leur contrôle dans leur guerre contre l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane.

Selon le Laboratoire de recherche humanitaire de l'université de Yale, qui analyse des vidéos et des images satellites, les dernières images datant de vendredi ne "montrent aucun mouvement à grande échelle" à El-Facher, ce qui suggère que la majorité de sa population est "morte, capturée ou cachée".

Le laboratoire a identifié au moins 31 groupes d'objets correspondant à des corps humains entre lundi et vendredi, dans différents quartiers, sur des sites universitaires et des sites militaires. "Les indices montrant que les massacres se poursuivent sont clairement visibles", conclut-il.

- "Tuées, retenues, pourchassées" -

MSF a lui aussi dit craindre samedi qu'un "grand nombre de personnes" y soient toujours "en grave danger de mort" et que les civils soient empêchés par les FSR et leurs alliés "d'atteindre des zones plus sûres" comme Tawila.

Des milliers de personnes ont déjà fui El-Facher pour cette ville située à environ 70 km à l'ouest, et où les équipes de MSF se sont préparées à faire face à un afflux massif de déplacés et de blessés.

Des survivants ont raconté à l'ONG que les personnes ont été séparées selon leur sexe, âge ou identité ethnique présumée, et que beaucoup sont toujours détenues contre rançon. Un survivant a rapporté des "scènes horribles" où des combattants écrasaient des prisonniers avec leurs véhicules.

"Le nombre de personnes arrivées à Tawila est très faible (...) Où sont toutes les personnes manquantes, qui ont déjà survécu à des mois de famine et de violence à El-Facher?" s'interroge Michel-Olivier Lacharité, responsable des opérations d'urgence chez MSF. "D'après ce que nous disent les patients, la réponse la plus probable, bien qu'effrayante, est qu'elles sont tuées, retenues et pourchassées lorsqu'elles tentent de fuir", relate-t-il.

Au total, plus de 65.000 civils ont fui El-Facher, où des dizaines de milliers de personnes sont encore piégées, selon l'ONU. Avant l'assaut final des paramilitaires, la ville comptait environ 260.000 habitants.

- "Apocalyptique" -

Depuis dimanche, plusieurs vidéos sur les réseaux sociaux montrent des hommes en uniforme des FSR procédant à des exécutions sommaires à El-Facher, les paramilitaires affirmant que plusieurs de ces enregistrements ont été "fabriqués" par des sites liés à l'armée.

Les paramilitaires ont affirmé jeudi avoir arrêté plusieurs de leurs combattants soupçonnés d'exactions lors de la prise d'El-Facher, l'ONU réclamant vendredi des enquêtes "rapides et transparentes" après des "témoignages effroyables" d'atrocités dans cette localité.

S'exprimant en marge d'une conférence à Bahreïn, le ministre allemand des Affaires étrangères, Johann Wadephul, a décrit samedi la situation à El-Facher comme "absolument apocalyptique", évoquant comme l'ONU la "pire crise humanitaire du monde". "Les FSR se sont publiquement engagés à protéger les civils et devront rendre compte de leurs actions", a-t-il ajouté.

"Les informations qui nous parviennent du Darfour ces derniers jours sont véritablement terrifiantes", a déclaré son homologue britannique Yvette Cooper, évoquant les "atrocités commises, exécutions de masse, famine et le viol comme arme de guerre".

Le Soudan est déchiré depuis avril 2023 par une guerre opposant l'armée, qui contrôle l'est et le nord du pays, et les FSR, désormais maîtres de l'ensemble du Darfour, une région vaste comme la France métropolitaine.

Les pourparlers en vue d'une trêve, menés depuis plusieurs mois par un groupe réunissant les Etats-Unis, l'Egypte, les Emirats arabes unis et l'Arabie saoudite, sont dans l'impasse, selon un responsable proche des négociations.

Les FSR ont reçu armes et drones des Emirats arabes unis, selon des rapports de l'ONU, tandis que l'armée bénéficie de l'appui de l'Egypte, de l'Arabie saoudite, de l'Iran et de la Turquie, selon des observateurs. Tous nient toute implication.


Le président libanais accuse Israël de répondre à son offre de négociations en intensifiant ses attaques

Le président libanais Joseph Aoun a accusé vendredi Israël de répondre à son offre de négociation en intensifiant ses frappes aériennes, dont la dernière a tué un homme à moto dans le sud du Liban. (Reuters/File)
Le président libanais Joseph Aoun a accusé vendredi Israël de répondre à son offre de négociation en intensifiant ses frappes aériennes, dont la dernière a tué un homme à moto dans le sud du Liban. (Reuters/File)
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  • Le président libanais Joseph Aoun accuse Israël d’avoir répondu à son offre de négociations par une intensification des frappes, qui ont tué deux personnes dans le sud du Liban
  • En visite à Beyrouth, le ministre allemand Johann Wadephul appelle à un retrait israélien du sud du Liban et à un désarmement du Hezbollah, condition jugée essentielle pour la reprise du dialogue

BEYROUTH: Le président libanais, Joseph Aoun, a accusé Israël de répondre à l'offre de négociations du Liban par une intensification de ses frappes, les dernières ayant tué vendredi deux hommes dans le sud du pays selon Beyrouth.

"Le Liban est prêt à des négociations pour mettre fin à l'occupation israélienne, mais toute négociation (...) a besoin d'une volonté réciproque, ce qui n'est pas le cas", a affirmé M. Aoun à l'issue d'un entretien avec le ministre allemand des Affaires étrangères, Johann Wadephul.

Le chef de l'Etat s'était déjà prononcé le 13 octobre pour des négociations entre les deux pays voisins, toujours formellement en état de guerre, et qui ont émergé en novembre dernier d'un an de conflit meurtrier entre Israël et le Hezbollah libanais.

Israël "répond à cette option en menant davantage d'attaques contre le Liban (...) et en intensifiant la tension", a déploré M. Aoun

Selon le ministère de la Santé libanais, deux personnes ont été tuées vendredi lors de deux frappes israéliennes dans le sud du pays.

L'Agence nationale d'information libanaise (Ani, officielle) a indiqué qu'un drone avait notamment visé un homme à moto dans le village de Kounine.

L'armée israélienne a affirmé avoir tué un "responsable de la maintenance du Hezbollah", qui oeuvrait selon elle à rétablir des infrastructures du mouvement pro-iranien.

La veille, une unité israélienne s'était introduite dans le village frontalier de Blida, où les soldats ont tué un employé municipal.

M. Aoun a demandé à l'armée de "faire face" à toute nouvelle incursion israélienne en territoire libanais.

- "Condition sine qua non" -

Malgré le cessez-le-feu ayant mis fin en novembre 2024 à la guerre entre le Hezbollah et Israël, ce dernier continue de mener des frappes régulières au Liban disant viser des cibles du mouvement chiite, et a intensifié ses raids ces derniers jours.

L'armée israélienne se maintient aussi dans cinq positions dans le sud du Liban.

Selon un bilan de l'AFP basé sur des données du ministère de la Santé, au moins 25 personnes, dont un Syrien, ont été tuées en octobre.

L'ONU avait indiqué mardi que 111 civils avaient été tués au Liban par les forces israéliennes depuis la fin de la guerre.

Le chef de la diplomatie allemande a apporté son soutien au président libanais, affirmant qu'il exhorterait son homologue israélien, Gideon Saar, à retirer l'armée israélienne du sud du Liban.

"Il doit y avoir un retrait des troupes israéliennes. Je comprends qu'Israël ait besoin de sécurité (...) Mais nous avons maintenant besoin d'un processus de confiance mutuelle. Et je m'engage à ce que les deux parties se parlent", a dit le ministre allemand.

Il a également "encouragé le gouvernement libanais à veiller à ce qu'un processus crédible, compréhensible et rapide de désarmement du Hezbollah soit mis en place", une "tâche colossale" mais, a-t-il estimé, "la condition sine qua non" pour régler les relations avec Israël.

Le Hezbollah est sorti très affaibli du conflit et les Etats-Unis exercent une intense pression sur le gouvernement libanais pour que le mouvement chiite livre ses armes à l'armée nationale, ce qu'il refuse jusqu'à présent.


Israël a rendu à Gaza 30 corps de Palestiniens en échange de deux dépouilles d'otages 

Israël a rendu vendredi à l'hôpital Nasser les corps de 30 Palestiniens en échange de deux dépouilles d'otages israéliens restituées la veille par le mouvement islamiste palestinien Hamas, a indiqué à l'AFP cet établissement du sud de la bande de Gaza. (AFP)
Israël a rendu vendredi à l'hôpital Nasser les corps de 30 Palestiniens en échange de deux dépouilles d'otages israéliens restituées la veille par le mouvement islamiste palestinien Hamas, a indiqué à l'AFP cet établissement du sud de la bande de Gaza. (AFP)
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  • "Les corps de 30 prisonniers palestiniens ont été reçus de la partie israélienne dans le cadre de l'accord d'échange", a précisé l'hôpital, situé à Khan Younès
  • Au total, en échange de 15 dépouilles d'Israéliens, 225 dépouilles de Palestiniens ont été rendues conformément aux termes de l'accord de cessez-le feu en vigueur depuis le 10 octobre

GAZA: Israël a rendu vendredi à l'hôpital Nasser les corps de 30 Palestiniens en échange de deux dépouilles d'otages israéliens restituées la veille par le mouvement islamiste palestinien Hamas, a indiqué à l'AFP cet établissement du sud de la bande de Gaza.

"Les corps de 30 prisonniers palestiniens ont été reçus de la partie israélienne dans le cadre de l'accord d'échange", a précisé l'hôpital, situé à Khan Younès.

Les otages avaient été enlevés lors de l'attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre 2023, qui avait déclenché la guerre dans la bande Gaza.

Au total, en échange de 15 dépouilles d'Israéliens, 225 dépouilles de Palestiniens ont été rendues conformément aux termes de l'accord de cessez-le feu en vigueur depuis le 10 octobre.

Depuis cette date, le Hamas a également rendu deux dépouilles d'otages non-israéliens, un Thaïlandais et un Népalais.

Le mouvement islamiste a jusqu'à présent restitué les restes de 17 des 28 corps qui se trouvaient encore à Gaza et auraient dû être rendus au début de la trêve, assurant que localiser les autres dépouilles est "complexe" dans le territoire dévasté par deux ans de guerre.

Des équipes égyptiennes autorisées à entrer dans le territoire palestinien par Israël participent aux recherches avec des engins de chantiers.

Lundi soir, le Hamas avait rendu à Israël les restes d'un otage, identifié comme étant ceux d'Ofir Tzarfati, dont une partie de la dépouille avait déjà été récupérée en deux fois.

Les retards successifs dans la remise des corps des otages ont provoqué la colère du gouvernement israélien, qui a accusé le Hamas de violer l'accord de trêve. Et les familles des otages ont exigé des mesures plus sévères pour contraindre le groupe palestinien à se conformer à l'accord.

Dix corps d'otages du 7-Octobre seraient encore à Gaza, ainsi que celui d'un soldat mort durant une guerre en 2014. Tous sont israéliens sauf un Tanzanien et un Thaïlandais.

Par ailleurs, à deux reprises depuis le 10 octobre, Israël a mené des bombardements massifs sur Gaza en représailles à des tirs qui ont tué trois de ses soldats. Le 19 octobre, les bombardements israéliens avaient fait au moins 45 morts et mardi 104.

Le Hamas, qui dément avoir tiré sur les soldats israéliens, a accusé Israël de violer le cessez-le-feu.