Le Liban «est l’otage du droit de veto» du Hezbollah, selon l’économiste libanais Nadim Shehadi

L’économiste libanais Nadim Shehadi sur «Frankly Speaking», le talk-show d’actualité d’Arab News qui accueille des décideurs politiques de premier plan et des chefs d’entreprise. (Capture d'écran)
L’économiste libanais Nadim Shehadi sur «Frankly Speaking», le talk-show d’actualité d’Arab News qui accueille des décideurs politiques de premier plan et des chefs d’entreprise. (Capture d'écran)
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Publié le Lundi 20 février 2023

Le Liban «est l’otage du droit de veto» du Hezbollah, selon l’économiste libanais Nadim Shehadi

  • La crise libanaise fait partie d’un «problème régional plus large, qui doit être traité comme tel»
  • Les lacunes de la classe politique ne justifient pas les appels à l’abolition de tout le système

DUBAÏ: Il y a dix-huit ans ce mois-ci, Rafic Hariri, un éminent homme politique et ancien Premier ministre du Liban, a été assassiné lors d’un attentat à la voiture piégée à Beyrouth. Philanthrope avant son engagement en politique, M. Hariri, qui avait fait fortune dans la construction, a fait don de millions de dollars aux victimes de la guerre et du conflit au Liban. Par la suite, il a joué un rôle majeur dans la fin de la guerre civile et la reconstruction de la capitale.

L’assassinat de M. Hariri a marqué le début d’un changement politique considérable et de mouvements appelant à la démocratie au Liban. Pendant des années après son assassinat, des politiciens et autres personnalités importantes opposées à l’influence de la Syrie et du Hezbollah dans le pays ont été pris pour cible.

Bien qu’un tribunal international ait reconnu des membres du Hezbollah coupables de l’assassinat de M. Hariri après d’ardents appels pour mener une enquête sur sa mort, la milice soutenue par l’Iran n’a fait que resserrer son emprise sur le Liban, conservant le pays dans un état désastreux.

«M. Hariri a été tué il y a dix-huit ans et il a fallu environ quinze ans pour détruire tout le pays après tout ce qu’il a essayé de construire», déclare l’économiste libanais Nadim Shehadi à «Frankly Speaking», le talk-show d’actualité d’Arab News qui accueille des décideurs politiques de premier plan et des chefs d’entreprise.

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Nadim Shehadi s'entretient avec l'animatrice de Frankly Speaking, Katie Jensen. (Photo fournie)

«Le Tribunal spécial pour le Liban et la commission d’enquête internationale indépendante sont venus au Liban. Il leur a fallu environ quinze ans pour parvenir à des conclusions. Et, pour la première fois dans l’histoire du Liban, où plusieurs assassinats ont eu lieu, des personnes ont été condamnées», soutient M. Shehadi

Mais, selon lui, malgré une condamnation dans l’affaire Rafic Hariri, l’influence du Hezbollah sur le Liban signifie que les véritables auteurs de l’assassinat resteront impunis et que le groupe continuera de tenir le pays en otage.

Les différentes crises politiques et économiques du Liban se sont intensifiées ces dernières années, l’inflation dans le pays a atteint le niveau le plus élevé du monde en 2021 et la valeur de la livre libanaise a considérablement chuté.

L’année dernière, une série de braquages bancaires par des clients armés cherchant à retirer leurs dépôts bloqués ont eu lieu. Dans un pays dont la capitale était autrefois appelée le «Paris du Moyen-Orient», les deux tiers de la population souffrent désormais de la pauvreté, avec des coupures d’électricité régulières et des pénuries de produits de première nécessité comme les médicaments et l’eau sont de plus en plus courantes.

L’instabilité chronique du pays s’est intensifiée ces dernières années à la suite de la pandémie du Covid-19 et de l’explosion du port de Beyrouth, en 2020, qui a tué des centaines de personnes. Elle a par ailleurs laissé des centaines de milliers de personnes sans abri et endommagé plus de la moitié de la ville tout en entraînant des pertes économiques massives.

Human Rights Watch et Amnesty International, les deux organisations internationales qui militent contre l’injustice et l’inégalité, ont qualifié de «farce» l’enquête sur l’explosion.

M. Shehadi affirme qu’en dépit d'un système judiciaire libanais historiquement «très sain et fonctionnel», le Hezbollah a interféré dans l’enquête.

Cette série de catastrophes a poussé de nombreux Libanais à demander le démantèlement de toute la classe politique, ce que M. Shehadi considère comme une «demande ridicule».

Selon lui, le système politique libanais n’est pas «sectaire», comme l’affirment certains observateurs, mais plutôt «un système politique basé sur un contrat social entre les communautés et qui a préservé le pays… avant même la création de l’État».

«Nous avons un système bancaire qui était le centre bancaire de la région. Nous avons des partis politiques. Ce sont des piliers qui distinguent le Liban… et la révolution demande presque le démantèlement de tous ces piliers», déclare-t-il à Katie Jensen, l’animatrice de «Frankly Speaking».

Bien que M. Shehadi reconnaisse les problèmes incontestables de la classe politique libanaise, qui, selon lui, a été compromise par quinze ans d’occupation et d’infiltration politique par le régime syrien, «cela ne justifie pas l’appel à l’abolition de tout le système».

Huit mois après les élections générales au pays, le Liban n’est toujours pas parvenu à un consensus concernant son président ou à un parlement fonctionnel.

Des réformes politiques urgentes sont nécessaires pour débloquer les trois milliards de dollars (1 dollar = 0,93 euro) de fonds d’urgence du Fonds monétaire international, mais avec le système politique libanais en lambeaux et ses parlementaires organisant régulièrement des débrayages, l’accès à ces fonds semble peu probable.

M. Shehadi ne s’oppose pas à l’idée d’un parlement «fragmenté» avec des opinions politiques diverses. «Ce que nous avons n’est pas un parlement fragmenté, mais une paralysie de toutes les institutions qui prend forme depuis quinze ans, voire dix-sept.»

Il ajoute que le Liban et ses institutions sont «l’otage du pouvoir de veto» du Hezbollah, qui a pris pied au Liban au moyen d’assassinats et de  mise en place d’alliances politiques.

M. Shehadi compare l’infiltration progressive du Hezbollah dans les institutions étatiques au Liban au comportement des cartels de la drogue au pouvoir dans les narco-États d’Amérique latine.

«Ils soudoient les politiciens, la justice, la police, l’armée. Il y a ceux qui ne peuvent être corrompus et qui sont probablement morts et ceux qui peuvent être soumis à un chantage – c’est ainsi que les organisations criminelles gagnent en puissance dans un pays», précise-t-il.

Le parlement libanais a tenu onze sessions électorales pour tenter d’élire un président depuis le 29 septembre de l’année dernière, mais sans succès jusque-là.

Ces derniers jours, Joseph Aoun, commandant des Forces armées libanaises, apparaît comme un candidat potentiel. Cependant, cela nécessiterait un amendement constitutionnel et un consensus au parlement, actuellement dirigé par le président Nabih Berri. Bien qu’il appelle Berri «un opérateur brillant» qui connaît les tenants et les aboutissants de la toile politique emmêlée du Liban, M. Shehadi dit que Berri est «lui-même un otage».

Nabih Berri est le chef du mouvement Amal, qui s’est engagé dans une guerre de plusieurs années avec le Hezbollah dans les années 1980 – une guerre qui a fait des milliers de morts.

«Ils ont fini par signer un accord, parrainé par l’Iran et la Syrie. Ils ont essentiellement formé un bloc au parlement et une même liste. Ils n’ont pas le monopole du soutien chiite, mais celui de la représentation chiite en raison de la façon dont ils manipulent les listes dans leurs régions», précise M. Shehadi.

Au cours de plusieurs sessions électorales s’étendant de septembre 2022 à janvier de cette année, de nombreux députés ont voté blanc. Lors des premières sessions, certains ont mis les mots suivants dans l’urne: «Pour le Liban», «Dictateur juste» et «Personne».

M. Shehadi soutient que les principales décisions et nominations au sein de l’administration libanaise doivent être prises par consensus et avec la signature du président, du chef du parlement et du Premier ministre. Cela signifie, à la lumière du vide politique actuel, que le gouvernement libanais a pratiquement cessé de fonctionner.

«Nous avons vécu cela pendant vingt-neuf mois, sans président, sans parlement et sans gouvernement fonctionnel. Nous avons eu un gouvernement intérimaire, jusqu’à ce que nos politiciens fassent une sorte de compromis et acceptent d’élire le candidat préféré du Hezbollah. Donc, nous sommes dans la même position difficile puisque plus nous résistons longtemps, plus il y a de dégâts, et je pense que notre effondrement économique est principalement causé par la paralysie», dit M. Shehadi.

«La priorité est maintenant d’avoir un président, un parlement et un gouvernement qui fonctionnent afin que les institutions de l'État ne s’effondrent pas davantage.»

M. Shehadi ajoute que bien qu’il y ait des candidats crédibles, le parlement est «pris en otage, ainsi que tout le système, parce qu’il faut une certaine majorité pour lancer le processus des élections. Vous avez besoin d’une majorité des deux tiers plus un, ce qui signifie qu’un tiers du parlement peut faire échouer le processus».

Même si cette série de défis politiques est surmontée et que le Liban parvient à recevoir l’aide du FMI, M. Shehadi souligne que les fonds du FMI ne constitueraient pas de solution à tous les problèmes financiers du Liban. Cependant, il dit que «l’engagement auprès du FMI est crucial».

«Il est très important de suivre les recommandations du FMI, notamment en matière de politique budgétaire et monétaire. Il y a beaucoup d’opposition à certaines des réformes du FMI, ce que je comprends», reconnaît-il, ajoutant que de nombreux observateurs affirment que trois milliards de dollars de fonds ne feront pas grand-chose pour atténuer le déficit de 90 milliards de dollars du pays.

«Mais je pense qu’il est plus important de rester engagé. Le pays est paralysé et isolé de l’Occident, des pays arabes. Et, maintenant, il sera également isolé des institutions internationales, comme le FMI, la Banque mondiale, l’ONU, etc. C'est très préjudiciable d’ignorer la voie du FMI.»

M. Shehadi est d’accord avec l’évaluation de la Banque mondiale qui considère l’effondrement au Liban comme l’une des pires crises modernes de l’histoire récente. Mais lorsqu’on lui demande s’il y aurait moyen de sortir du bourbier, il répond: «Oui, mais je ne le vois pas seulement pour le Liban. Toute la région souffre du même problème. Le cas libanais est similaire à ce qui se passe en Palestine, en Syrie, en Irak, au Yémen, et cela pourrait s’étendre à d’autres pays de la région qui pourraient être vulnérables.»

Il poursuit: «Cela devrait être traité comme un phénomène régional, ce qui est, fondamentalement, le rôle du Corps des gardiens de la révolution islamique d’Iran. Le CGRI, en tant qu’acteur paramilitaire non étatique, a pris le contrôle de l’État et de la société en Iran de la même manière que le Hezbollah agit au Liban, que les milices parrainées par l’Iran en Irak et que le Hamas dans sa paralysie de l’ensemble du processus de paix en Palestine.»

Dans ces circonstances, M. Shehadi indique que la crise multidimensionnelle au Liban fait partie d’un «problème régional plus large qui doit être traité comme tel. Le Liban est la ligne de faille ou le point le plus faible. Beaucoup de maux ou de problèmes de la région apparaissent d’abord au Liban.»

Pour cette raison, ajoute M. Shehadi, l’engagement et la coopération internationaux et régionaux sont des éléments cruciaux pour résoudre la crise libanaise. La communauté internationale doit s’abstenir de considérer le Liban comme un cas désespéré.

«Nous sommes certes des otages, mais nous avons toujours notre mot à dire dans le pays et nous avons besoin d’un soutien international pour nous débarrasser de l’emprise du Hezbollah. Et là encore, l’emprise est régionale. Ainsi, notre sort est similaire à celui de l’Irak, de la Palestine, de la Syrie et du Yémen», insiste-t-il.

«Je ne pense pas qu’on puisse le voir de manière fragmentée. Et c’est mauvais d’abandonner un pays simplement parce qu’il est considéré comme perdu. Le Liban n’est pas une cause perdue.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Vision 2030: le Cabinet remercie les agences impliquées

Le prince héritier d'Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, assiste à la session du Cabinet, mardi. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, assiste à la session du Cabinet, mardi. (SPA)
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  • Le Conseil des ministres a souligné que la sécurité du Moyen-Orient exigeait d'accélérer la recherche d'une solution juste et globale à la question palestinienne
  • Le Conseil a affirmé que le Royaume poursuivait ses efforts pour accélérer le redressement économique de la République arabe syrienne

RIYAD: Le Conseil des ministres a salué les efforts des agences gouvernementales ayant contribué aux avancées réalisées dans le cadre de la Vision saoudienne 2030, alors que le Royaume se rapproche de l’atteinte de ses objectifs clés, a rapporté mardi l’Agence de presse saoudienne (SPA).

D’après le rapport annuel 2024 de la Vision, 93% des principaux indicateurs de performance ont été entièrement ou partiellement atteints depuis le lancement de l’initiative il y a neuf ans.

Le ministre des Médias, Salman al-Dosari, a précisé que le cabinet avait discuté de la troisième et dernière phase de la Vision 2030, qui débutera en 2026. Cette phase visera à pérenniser l’impact des transformations déjà engagées tout en exploitant de nouvelles opportunités de croissance.

Le Conseil des ministres a également salué le don généreux d’un milliard de riyals saoudiens (266,6 millions de dollars; 1 dollar = 0,88 euro) effectué par le prince héritier Mohammed ben Salmane, destiné à soutenir des projets de logement pour les bénéficiaires saoudiens éligibles et les familles dans le besoin.

Le cabinet a souligné que ce don illustre l’engagement constant du prince héritier à améliorer la qualité de vie des citoyens, ainsi que son intérêt soutenu pour le secteur du logement et les initiatives visant à offrir des logements décents aux familles méritantes à travers le Royaume.

Le prince Mohammed a également informé le Conseil de sa rencontre avec le roi Abdallah II de Jordanie, ainsi que de ses échanges avec le Premier ministre indien Narendra Modi.

Le cabinet a salué les résultats de la deuxième réunion du Conseil de partenariat stratégique saoudo-indien, soulignant le développement continu des relations économiques, commerciales et d’investissement entre les deux pays.

Le Conseil des ministres a souligné que la sécurité du Moyen-Orient exigeait d'accélérer la recherche d'une solution juste et globale à la question palestinienne, conformément aux résolutions de la légitimité internationale, à l'initiative de paix arabe et à la création d'un État palestinien indépendant le long des frontières de 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale.

Le Conseil a affirmé que le Royaume poursuivait ses efforts pour accélérer le redressement économique de la République arabe syrienne et a renouvelé son appel aux institutions financières régionales et internationales pour qu'elles reprennent et étendent leurs opérations dans le pays.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L'Arabie saoudite condamne les actions d'Israël à Gaza devant la CIJ

 Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
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  • Tel-Aviv "continue d'ignorer" les décisions de la Cour internationale de justice, déclare le représentant du Royaume
  • M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

DUBAI : L'Arabie saoudite a condamné mardi devant la Cour internationale de justice la campagne militaire israélienne en cours à Gaza, l'accusant de défier les décisions internationales et de commettre de graves violations des droits de l'homme.

S'exprimant devant la Cour, le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, a déclaré qu'Israël "continue d'ignorer les ordres de la Cour" et a insisté sur le fait que "rien ne justifie les violations commises par Israël à Gaza".

M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

Ses remarques ont été formulées au deuxième jour des audiences de la CIJ sur les obligations humanitaires d'Israël à l'égard des Palestiniens, qui se déroulent dans le cadre d'un blocus israélien total de l'aide à la bande de Gaza, qui dure depuis plus de 50 jours.

Ces audiences s'inscrivent dans le cadre d'efforts plus larges visant à déterminer si Israël a respecté les responsabilités juridiques internationales dans sa conduite lors de la guerre contre Gaza.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


Syrie: neuf morts dans des affrontements entre forces de sécurité et combattants druzes près de Damas

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
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  • Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité "
  • "La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué

DAMAS: Neuf personnes ont été tuées dans des affrontements entre les forces de sécurité syriennes et des combattants de la minorité druze à Jaramana, dans la banlieue de Damas, sur fond de tension confessionnelle, selon un nouveau bilan mardi d'une ONG.

Ces violences interviennent un mois après des massacres qui ont visé la minorité alaouite, faisant des centaines de morts, dans le pays où la coalition islamiste qui a pris le pouvoir en décembre est scrutée par la communauté internationale.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), "les forces de sécurité ont lancé un assaut" contre la banlieue à majorité druze de Jaramana, après la publication sur les réseaux sociaux d'un message vocal attribué à un druze et jugé blasphématoire envers l'islam.

L'OSDH, basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un solide réseau de sources en Syrie, a précisé que six combattants locaux de Jaramana et trois "assaillants" avaient été tués.

Plusieurs habitants de Jaramana joints au téléphone par l'AFP ont indiqué avoir entendu des échanges de tirs dans la nuit.

"Nous ne savons pas ce qui se passe, nous avons peur que Jaramana devienne un théâtre de guerre", a affirmé Riham Waqaf, une employée d'une ONG terrée à la maison avec son mari et ses enfants.

"On devait emmener ma mère à l'hôpital pour un traitement, mais nous n'avons pas pu" sortir, a ajouté cette femme de 33 ans.

Des combattants locaux se sont déployés dans les rues et aux entrées de la localité, demandant aux habitants de rester chez eux, a dit à l'AFP l'un de ces hommes armés, Jamal, qui n'a pas donné son nom de famille.

"Jaramana n'a rien connu de tel depuis des années". La ville est d'habitude bondée, mais elle est morte aujourd'hui, tout le monde est à la maison", a-t-il ajouté.

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants.

 "Respecter l'ordre public" 

Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité de ce qui s'est produit et de toute aggravation de la situation".

"La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué.

Il a dénoncé dans le même temps "toute atteinte au prophète Mahomet" et assuré que le message vocal était fabriqué "pour provoquer la sédition".

Le ministère de l'Intérieur a souligné mardi "l'importance de respecter l'ordre public et de ne pas se laisser entraîner dans des actions qui perturberaient l'ordre public".

Il a ajouté qu'il enquêtait sur le message "blasphématoire à l'égard du prophète" Mahomet pour identifier l'auteur et le traduire en justice.

Les druzes, une minorité ésotérique issue de l'islam, sont répartis notamment entre le Liban, la Syrie et Israël.

Dès la chute du pouvoir de Bachar al-Assad le 8 décembre en Syrie, après plus de 13 ans de guerre civile, Israël multiplié les gestes d'ouverture envers cette communauté.

Début mars, à la suite d'escarmouches à Jaramana, Israël avait menacé d'une intervention militaire si les nouvelles autorités syriennes s'en prenaient aux druzes.

Ces propos ont été immédiatement rejetés par les dignitaires druzes, qui ont réaffirmé leur attachement à l'unité de la Syrie. Leurs représentants sont en négociation avec le pouvoir central à Damas pour parvenir à un accord qui permettrait l'intégration de leurs groupes armés dans la future armée nationale.

Depuis que la coalition islamiste dirigée par Ahmad al-Chareh, qui a été proclamé président intérimaire, a pris le pouvoir, la communauté internationale multiplie les appels à protéger les minorités.

Début mars, les régions du littoral dans l'ouest de la Syrie ont été le théâtre de massacres qui ont fait plus de 1.700 tués civils, en grande majorité des alaouites, selon l'OSDH.