Aux assises, «l'obsession» syrienne d'une ex-djihadiste en quête de «liberté»

Radicalisée, ou selon ses propres mots «auto-embrigadée», Douha Mounib s'installe en 2013 au Maroc, avec un «seul objectif: partir en Syrie» (Photo, AFP).
Radicalisée, ou selon ses propres mots «auto-embrigadée», Douha Mounib s'installe en 2013 au Maroc, avec un «seul objectif: partir en Syrie» (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 01 mars 2023

Aux assises, «l'obsession» syrienne d'une ex-djihadiste en quête de «liberté»

  • L'accusée de 32 ans comparaît depuis lundi devant la cour d'assises spéciale pour association de malfaiteurs terroriste (AMT) criminelle
  • Elle avait été arrêtée par les Turcs en mars 2017 alors qu'elle passait la frontière avec sa fille âgée de quelques mois et son beau-fils

PARIS: "Il n'y avait rien d'autre qui comptait pour moi". Jugée à Paris pour avoir rejoint les rangs du groupe Etat islamique (EI), une "revenante" est longuement revenue mardi sur son "obsession" de partir vivre en Syrie, mue par une envie de "liberté".

Silhouette longiligne, les bras appuyés sur le box vitré, Douha Mounib "dit les choses 'cash'", s'engluant parfois dans les détails, et cette certaine franchise contraste avec beaucoup d'autres affaires de terrorisme.

L'accusée de 32 ans comparaît depuis lundi devant la cour d'assises spéciale pour association de malfaiteurs terroriste (AMT) criminelle, pour deux séjours en zone irako-syrienne entre 2013 et 2017, entrecoupés de tentatives répétées de rallier de nouveau ce théâtre de guerre.

Douha Mounib change radicalement fin 2012. Après une soirée avec des amis à parler de religion, elle s'abreuve de vidéos sur l'islam, commence à porter le voile, et arrête assez rapidement ses études de sage-femme.

Pour l'ex-étudiante brillante, c'est la fin de la "soumission" à sa famille "déstructurée" et à "l'emprise" de sa belle-mère "toxique", et le début de "l'émancipation", d'une "liberté".

Radicalisée, ou selon ses propres mots "auto-embrigadée", Douha Mounib s'installe en 2013 au Maroc, avec un "seul objectif: partir en Syrie".

Sans l'amie qu'elle n'a pas réussi à retrouver en Espagne, elle poursuit son périple jusqu'en Turquie. On lui propose un passeur en mariage, elle accepte, mais à une "condition: aller en Syrie", martèle Douha Mounib.

Celle qui rêvait d'"intégrer un camp d'entraînement pour femmes" se contentera d'un rôle moins "actif", rester "à la maison", alors située à Atma, ville proche de la frontière turque, gagnée par des conflits entre deux groupes djihadistes devenus rivaux, le Front al-Nosra et l'EIIL, devenu Etat islamique.

Après deux mois, Douha Mounib quitte, "déçue" et enceinte la Syrie, et rentre en Turquie avec son mari. Elle accouche en mai 2014 en France de son premier enfant, qui meurt à la naissance.

«Objectif»

Séjournant tour à tour en Mauritanie, au Maroc et en Macédoine, et toujours déterminée à regagner la Syrie, elle sera refoulée à plusieurs reprises par les autorités turques.

"Je me sentais enfermée du fait de ne pas arriver à cet objectif", relate l'accusée, son haut de survêtement bariolé zippé jusqu'au cou.

Elle divorce de son premier mari turc, épouse un second, tunisien, dont elle est tombée "follement amoureuse" sur Internet. Elle partira à l'été 2015 en Syrie avec ce compagnon et le fils de ce dernier âgé de moins de 2 ans, pour qui elle sera jusqu'à leur retour en France fin 2017 sa "maman".

Là encore, Douha Mounib affirme avoir été le "moteur" de ce nouveau départ, qui était son "projet personnel".

"Je voulais rejoindre l'Etat islamique, (...) il n'y avait rien d'autre qui comptait pour moi", assène l'accusée.

Le récit qu'elle livre ensuite de ce second séjour syro-irakien d'une quinzaine de mois, le plus incriminant, laisse au mieux "sur sa faim" le président de la cour Laurent Raviot et pleine d'"interrogations" circonspectes l'avocate générale Alexa Dubourg.

Premier étonnement: à Mossoul, puis Raqqa, où l'EI mettait particulièrement "en scène la terreur", Douha Mounib n'a-t-elle vraiment vu ni "exécution publique" ni "cadavre" ? Droite dans le box, l'accusée maintient que non.

"Vous devez comprendre que, pour nous, c'est difficilement audible", la tance l'avocate générale.

De même, pour la magistrate, il paraît incongru que le mari de Douha Mounib, dont elle continue d'affirmer qu'il n'a jamais combattu pour l'EI, ait pu "se maintenir sur zone" si longtemps "sans être inquiété".

L'accusée elle-même avait pratiqué plusieurs accouchements pendant son séjour - "six, sept" tout au plus - mais, assure-t-elle, "pas pour servir les desseins" natalistes de l'EI, "juste exercer (son) métier" de sage-femme.

Douha Mounib avait finalement quitté fin 2016 les territoires contrôlés par l'organisation Etat islamique, "en colère contre les injustices sur place", soutient-elle après près de cinq heures d'interrogatoire.

Elle avait été arrêtée par les Turcs en mars 2017 alors qu'elle passait la frontière avec sa fille âgée de quelques mois et son beau-fils.

Verdict attendu mercredi soir.


Dix passeurs présumés jugés pour un naufrage meurtrier dans la Manche

Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
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  • Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés
  • La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche

LILLE: Dix hommes, dont huit Afghans, sont jugés à partir de lundi à Lille pour leur rôle présumé de passeurs dans le naufrage d'une embarcation clandestine qui avait fait quatre morts et quatre disparus dans la Manche en décembre 2022.

Parti entre 1H00 et 1H30 du matin dans la nuit du 13 au 14 décembre 2022, le canot, qui transportait en majorité des migrants afghans, avait fait naufrage à quelques kilomètres des côtes anglaises.

Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés.

La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche.

Selon les éléments de l'enquête, alors que les migrants gonflaient le bateau avant le départ, plusieurs ont entendu une détonation, synonyme selon eux de crevaison. Les passeurs leur ont dit de ne pas s'en faire et qu'il s'agissait du seul bateau disponible pour eux.

D'après les témoignages des rescapés, il n'y avait pas assez de gilets de sauvetage pour tout le monde et aucune des personnes décédées n'en portait un. La température était glaciale et la mer très agitée.

Après une ou deux heures de traversée, un boudin a commencé à se dégonfler et l'eau à entrer dans l'embarcation, jusqu'à atteindre les genoux des passagers. Paniqués, ils se sont mis debout pour tenter de faire signe à un bateau. Mais le fond du canot, peu solide, a ployé sous leur poids et celui de l'eau, et tous se sont retrouvés à l'eau.

Neuf des prévenus sont jugés, jusqu'à vendredi, pour homicide involontaire par violation d'une obligation de sécurité, deux d'entre eux le sont pour blanchiment, tous pour aide au séjour irrégulier. Huit sont afghans, un syrien, un irakien.

Certains des prévenus sont soupçonnés d'avoir recruté des passeurs et assuré la logistique auprès des passagers, d'autres d'avoir géré l'organisation sur le camp de migrants de Loon-Plage (Nord), où vivaient les migrants avant leur tentative de traversée, toujours selon les éléments de l'enquête. D'autres encore sont jugés pour s'être occupés du transport des migrants vers la plage et de la mise à l'eau du canot, et deux pour avoir collecté une partie des paiements.

Le mineur sénégalais qui pilotait le canot est, lui, inculpé dans le cadre d'une procédure au Royaume-Uni.

Apparu en 2018, le phénomène des traversées de la Manche en petites embarcations est à l'origine de nombreux naufrages, le plus meurtrier ayant coûté la vie à 27 personnes en novembre 2021.

Depuis le début de l'année, au moins 15 migrants sont morts dans la Manche, bras de mer parmi les plus fréquentés du monde et où les conditions météorologiques sont souvent difficiles, selon un décompte de l'AFP à partir de chiffres officiels. En 2024, 78 étaient morts ainsi, un record.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».