Aux assises de Paris, la «haine» et la «honte» d'une «revenante» de Syrie

Des femmes avec des enfants avant leur départ du camp kurde d'Al-Hol, qui abrite des proches de l'État islamique (Photo, AFP).
Des femmes avec des enfants avant leur départ du camp kurde d'Al-Hol, qui abrite des proches de l'État islamique (Photo, AFP).
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Publié le Samedi 04 mars 2023

Aux assises de Paris, la «haine» et la «honte» d'une «revenante» de Syrie

  • «Pour mourir en martyre. Je pensais que c'était la meilleure adoration»
  • Celle qui a été un peu mannequin, un peu vendeuse et beaucoup fêtarde se radicalise rapidement.

PARIS: La cour d'assises spéciale a condamné vendredi à dix ans de réclusion criminelle la "revenante" de Syrie Amandine Le Coz, qui a passé cinq années en territoire du groupe Etat islamique (EI) et reconnu avoir envisagé de "mourir en martyre".

La cour a assorti la peine d'un suivi socio-judiciaire de sept ans. "Vous avez fait des efforts" mais "vous avez encore besoin d'être accompagnée", lui dit le président de la cour Laurent Raviot.

"Effectivement", "merci Monsieur", répond Amandine Le Coz, longs cheveux châtains et marinière.

L'accusée, originaire du Val-d'Oise, était jugée depuis jeudi pour association de malfaiteurs terroriste (AMT) criminelle.

A l'audience, la jeune femme de 32 ans a reconnu pour la première fois vendredi avoir envisagé de se "faire exploser". "Je voulais mourir en martyre, oui c'est vrai, parce que j'avais peur de l'enfer", dit-elle.

Sur les photos de son époque syrienne - elle y est arrivée en septembre 2014 - que fait défiler l'avocat général Benjamin Chambre, on voit des armes, les drapeaux noirs de l'EI, trois silhouettes en niqab - Amandine Le Coz est au milieu, à côté de celle qui brandit une kalachnikov.

Sur un cliché apparaît son premier mari, tout sourire, ceinture explosive sur le dos.

"C'est vous qui la lui avez mise ?", cette ceinture, demande l'avocat général. Nouvelle révélation: "non, mais j'en ai déjà porté une", répond Amandine Le Coz. "Pour mourir en martyre. Je pensais que c'était la meilleure adoration".

«Dans la haine»

"On est un peu plus que dans la radicalisation, là... On est dans le djihad", observe le magistrat, qui requiert à son encontre onze ans de réclusion.

Amandine Le Coz s'est convertie à l'islam à 23 ans, et ses parents l'ont mise dehors. À cause de ce rejet, celle qui a été un peu mannequin, un peu vendeuse et beaucoup fêtarde se radicalise rapidement.

"J'étais dans la haine", justifiera-t-elle du box vitré.

Elle se cherche un mari sur internet. Le premier candidat est un certain "Abou Merguez". "Vous l'aviez rencontré comment ?", demande le président Laurent Raviot. "J'avais tapé Abou...+ sur Facebook", répond Amandine Le Coz, "candide", "naïve" selon l'experte psychologue.

A l'été 2014, sur internet, elle trouve finalement à épouser un combattant de l'EI. Pourquoi lui ? "Parce que je le trouvais beau", murmure Amandine Le Coz, qui a "honte". Dans la foulée, elle le rejoint à Raqqa (nord de la Syrie).

Battue par ce premier mari, elle obtient le droit de divorcer. Et se remarie avec un autre combattant, avec qui elle a un enfant.

Sur les réseaux sociaux, elle tente de convaincre au moins deux femmes, dont une mineure, de rejoindre la Syrie. "C'est à cause d'idiotes comme moi que des filles" sont parties en  Syrie se faire "battre, violer, tuer", sanglote-t-elle, s'excusant à nouveau.

«Ambiguïté»

Chez les Françaises de l'EI, on la dit tantôt "grosse chienne" - "elle draguait sur internet alors qu'elle était mariée", rapporte l'une d'elles entendue pendant l'enquête - ou "grande gueule".

"C'est vrai que je faisais ma belle", admet la jeune femme. "Je disais ne pas avoir peur des bombardements alors que j'étais pétrifiée".

Amandine Le Coz "c'est tout et son contraire", résume son avocate Marie Dosé, plaidant pour une peine permettant à celle qui "ne s'est jamais posée en victime" de continuer à "progresser".

Le président Raviot avait souligné l'"ambiguïté" de la jeune femme: elle a plusieurs fois tenté de quitter l'EI, avant de changer d'avis.

"J'avais peur d'être une mécréante, j'avais peur des flammes de l'enfer, je croyais" en l'EI, dit-elle. "D'un autre côté je voulais revoir ma famille, avoir une vie normale, être heureuse".

C'est finalement, selon elle, pour l'avenir de son fils qu'elle décide de se rendre aux forces kurdes en 2018. Retenue 18 mois dans les camps de Roj et d'Aïn Issa, elle sera expulsée vers la France fin 2019.

"J'entends la fragilité, la vulnérabilité", a dit l'avocat général. Mais "je crois aussi qu'il y a eu une vraie détermination, et pour y aller, et pour rester".

"J'ai appris à réfléchir", a elle-même résumé Amandine Le Coz. "Je suis sur la voie de la guérison, mais pas encore guérie".


Dix passeurs présumés jugés pour un naufrage meurtrier dans la Manche

Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
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  • Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés
  • La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche

LILLE: Dix hommes, dont huit Afghans, sont jugés à partir de lundi à Lille pour leur rôle présumé de passeurs dans le naufrage d'une embarcation clandestine qui avait fait quatre morts et quatre disparus dans la Manche en décembre 2022.

Parti entre 1H00 et 1H30 du matin dans la nuit du 13 au 14 décembre 2022, le canot, qui transportait en majorité des migrants afghans, avait fait naufrage à quelques kilomètres des côtes anglaises.

Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés.

La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche.

Selon les éléments de l'enquête, alors que les migrants gonflaient le bateau avant le départ, plusieurs ont entendu une détonation, synonyme selon eux de crevaison. Les passeurs leur ont dit de ne pas s'en faire et qu'il s'agissait du seul bateau disponible pour eux.

D'après les témoignages des rescapés, il n'y avait pas assez de gilets de sauvetage pour tout le monde et aucune des personnes décédées n'en portait un. La température était glaciale et la mer très agitée.

Après une ou deux heures de traversée, un boudin a commencé à se dégonfler et l'eau à entrer dans l'embarcation, jusqu'à atteindre les genoux des passagers. Paniqués, ils se sont mis debout pour tenter de faire signe à un bateau. Mais le fond du canot, peu solide, a ployé sous leur poids et celui de l'eau, et tous se sont retrouvés à l'eau.

Neuf des prévenus sont jugés, jusqu'à vendredi, pour homicide involontaire par violation d'une obligation de sécurité, deux d'entre eux le sont pour blanchiment, tous pour aide au séjour irrégulier. Huit sont afghans, un syrien, un irakien.

Certains des prévenus sont soupçonnés d'avoir recruté des passeurs et assuré la logistique auprès des passagers, d'autres d'avoir géré l'organisation sur le camp de migrants de Loon-Plage (Nord), où vivaient les migrants avant leur tentative de traversée, toujours selon les éléments de l'enquête. D'autres encore sont jugés pour s'être occupés du transport des migrants vers la plage et de la mise à l'eau du canot, et deux pour avoir collecté une partie des paiements.

Le mineur sénégalais qui pilotait le canot est, lui, inculpé dans le cadre d'une procédure au Royaume-Uni.

Apparu en 2018, le phénomène des traversées de la Manche en petites embarcations est à l'origine de nombreux naufrages, le plus meurtrier ayant coûté la vie à 27 personnes en novembre 2021.

Depuis le début de l'année, au moins 15 migrants sont morts dans la Manche, bras de mer parmi les plus fréquentés du monde et où les conditions météorologiques sont souvent difficiles, selon un décompte de l'AFP à partir de chiffres officiels. En 2024, 78 étaient morts ainsi, un record.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».