Retraites: L'exécutif cherche une voie de sortie dans un climat électrique

Le président français Emmanuel Macron (Photo, AFP).
Le président français Emmanuel Macron (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 27 mars 2023

Retraites: L'exécutif cherche une voie de sortie dans un climat électrique

  • Le chef de l'État et ses ministres ont pourtant répété à l'envi leur souhait d'aplanir la situation
  • La Première ministre doit aussi rencontrer dans l'après-midi les présidents de commission à l'Assemblée

PARIS: A la veille d'une dixième journée de mobilisation contre la réforme des retraites, l'exécutif tente de reprendre la main en clamant sa volonté d'"apaisement" et en dessinant une feuille de route tournée vers l'avenir, dans une atmosphère de plus en plus tendue.

Inflexible sur le fond de la réforme, qui recule notamment l'âge de départ de 62 à 64 ans, Emmanuel Macron n'a toujours pas trouvé les clés pour éteindre la colère de la rue.

Le chef de l'État et ses ministres ont pourtant répété à l'envi leur souhait d'aplanir la situation, à l'image d'Elisabeth Borne dimanche soir.

"Il y a de la tension forcément en lien avec la réforme. Il faut être à l’écoute de cela", a-t-elle reconnu auprès de l'AFP. La Première ministre s'est ainsi fixé deux objectifs : "apaiser le pays face à ces tensions et accélérer les réponses aux attentes des Français."

Pour ce faire, Mme Borne va ouvrir lundi une vaste séquence de consultations étalées sur trois semaines, avec les parlementaires, les partis politiques, les représentants d'élus locaux et les partenaires sociaux s'ils le souhaitent. Ce "plan d'action" sera d'abord détaillé à midi à Emmanuel Macron, puis, toujours à l'Élysée, aux cadres de la majorité, parmi lesquels les patrons de groupes parlementaires, les chefs de partis et quelques membres de gouvernement.

La Première ministre doit aussi rencontrer dans l'après-midi les présidents de commission à l'Assemblée, puis enchaînera mardi avec les présidents du Sénat Gérard Larcher et de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet. En jeu : esquisser un "programme législatif" de textes en s'assurant de bâtir dessus "des majorités en amont" et ainsi éviter le recours à un nouveau 49.3.

Une mobilisation crescendo ? 

"A-t-on besoin d'apaisement ? Évidemment et il y a une manière très simple de l'obtenir, c'est de retirer le texte", a de son côté estimé l'Insoumis Jean-Luc Mélenchon, en appelant aussi au départ de Mme Borne.

Aux syndicats, qui demandent le retrait ou, tout du moins, la suspension de la réforme, Mme Borne propose de "reprendre le travail" sur différents chantiers, de la pénibilité à l'emploi des seniors, en passant par les reconversions.

Cela suffira-t-il à les amadouer, alors que le patron de la CFDT Laurent Berger fustigeait encore ce week-end dans un entretien à la revue Le Grand continent "l’absence de dialogue, l’injustice de la mesure et l’incompréhension d'une mobilisation sociale de ces deux mois et demi" ?

Jusqu'au matin de la précédente journée d'action jeudi dernier, l'exécutif tablait sur une décrue de la contestation, à l'image de ce ministre de premier plan : "le scénario le plus probable est que le Conseil constitutionnel valide le texte et la grogne sociale se calme". La mobilisation s'en est finalement allée crescendo, entre 1,09 million (Beauvau) et 3,5 millions (CGT) de participants.

Ce rebond s'est aussi accompagné de violences en marge des cortèges, avec 457 interpellations et 441 policiers et gendarmes blessés, dans un climat général électrique. Le terrain des affrontements s'est déplacé samedi à Sainte-Soline dans les Deux-Sèvres, où une manifestation contre les bassines a fait des dizaines de blessés du côté des forces de l'ordre comme des manifestants, avec un membre du cortège entre la vie et la mort dimanche.

L'IGPN saisie 

La polémique enfle aussi autour d'un "usage excessif de la force", selon les mots du Conseil de l'Europe. Au total, l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) a été saisie de 17 enquêtes judiciaires depuis la première journée nationale de mobilisation contre la réforme des retraites en janvier, a indiqué dimanche sa directrice.

Samedi, les défilés qui ont réuni quelques centaines de personnes dans plusieurs villes n'ont pas donné lieu à des débordements majeurs, et les regards seront braqués sur ceux de mardi, avec notamment un cortège parisien qui défilera de la place de la République à Nation.

Sur le terrain en Ile-de-France, le trafic des RER s'annonce "très perturbé" mardi, avec un train sur deux sur les lignes A et B, selon la RATP. Dans le métro, les fréquences de passage seront réduites sur la plupart des lignes, dont certaines fermeront plus tôt que d'habitude. Les prévisions de circulation à la SNCF seront connues lundi.

Dans la capitale, où des éboueurs sont en grève depuis plus de 20 jours, le volume de déchets non ramassés était en baisse dimanche avec 7.828 tonnes toujours en souffrance.

Et la Direction générale de l'aviation civile a aussi demandé aux compagnies d'annuler 20% de leurs vols à Paris-Orly, Marseille, Toulouse et Bordeaux mardi et mercredi.


Macron met en garde contre la mort de l'Europe

Le président français Emmanuel Macron prononce un discours sur l'Europe, devant un slogan qui dit "La fin d'une Europe compliquée" dans un amphithéâtre de la Sorbonne à Paris, le 25 avril 2024 (Photo, AFP).
Le président français Emmanuel Macron prononce un discours sur l'Europe, devant un slogan qui dit "La fin d'une Europe compliquée" dans un amphithéâtre de la Sorbonne à Paris, le 25 avril 2024 (Photo, AFP).
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  • Le président français a évoqué une Europe «dans une situation d'encerclement» face aux grandes puissances régionales
  • Dans un contexte géopolitique alourdi par la guerre en Ukraine, il a appelé l'UE à renforcer encore sa défense au sein de l'Otan

PARIS: "Notre Europe est mortelle, elle peut mourir". Emmanuel Macron a dressé jeudi un portrait alarmiste à un mois et demi d'élections européennes compliquées pour son camp, en exhortant à un sursaut des Vingt-Sept pour bâtir une "Europe puissance" et une défense "crédible".

"Cela dépend uniquement de nos choix mais ces choix sont à faire maintenant" car "à l'horizon de la prochaine décennie, (...) le risque est immense d'être fragilisé, voire relégué", a-t-il asséné devant 500 invités, dont les ambassadeurs des 26 autres Etats membres de l'UE, des étudiants, des chercheurs et le gouvernement au complet.

Le président français a évoqué dans un discours-fleuve une Europe "dans une situation d'encerclement" face aux grandes puissances régionales et a jugé que les valeurs de la "démocratie libérale" étaient "de plus en plus critiquées" et "contestées".

"Le risque, c'est que l'Europe connaisse le décrochage et cela, nous commençons déjà à le voir malgré tous nos efforts", a averti le chef de l'Etat, en plaidant pour une "Europe puissante", qui "se fait respecter", "assure sa sécurité" et reprend "son autonomie stratégique".

Dans un contexte géopolitique alourdi par la guerre en Ukraine, il a annoncé qu'il inviterait les Européens à se doter d'un "concept stratégique" de "défense européenne crédible", en évoquant la possibilité pour elle de se doter d'un bouclier antimissiles.

Il a aussi appelé l'Europe à renforcer son industrie de défense et plaidé pour un "emprunt européen", sujet tabou notamment en Allemagne, pour investir dans l'armement en appliquant le principe de "préférence européenne".

Entrée en campagne

Face aux débats sur l'immigration portés par la droite et l'extrême droite, il a affirmé que l'UE devait "retrouver la maîtrise" de ses "frontières" et "l'assumer", proposant "une structure politique" continentale pour prendre des décisions sur les sujets de migration, de criminalité et de terrorisme.

Sur le plan économique, pour aboutir à une "Europe de prospérité", Emmanuel Macron a défendu un "choc d'investissements commun", en doublant la capacité financière de l'UE pour faire face aux défis de défense, climatique, numérique et industriel.

Devant les pratiques commerciales chinoises et américaines, le président français a également demandé une "révision" de la politique européenne "en défendant nos intérêts".

"Ca ne peut pas marcher si on est les seuls au monde à respecter les règles du commerce telles qu'elles avaient été écrites il y a 15 ans, si les Chinois, les Américains, ne les respectent plus en subventionnant les secteurs critiques", a-t-il déclaré.

Réagissant peu après, le chancelier allemand Olaf Scholz, pas toujours sur la même longueur d'ondes que son homologue, a salué les "bonnes impulsions" du discours pour que "l'Europe reste forte" et promis de continuer à la "faire avancer ensemble".

Le discours d'Emmanuel Macron est largement considéré comme une entrée en campagne du chef de l'Etat français, alors que son camp patine à six semaines des élections européennes du 9 juin, pour lesquelles le Rassemblement national (RN, extrême droite) fait largement course en tête.

Selon un récent sondage Opinionway, la liste de la majorité présidentielle, à 19%, se situait toujours loin derrière celle du RN (29%), mais gardait une nette avance sur celle des socialistes (12%).

"Sur la scène européenne, cela fait sept ans qu'Emmanuel Macron confond ses incantations et ses gesticulations avec des réalisations", a ironisé Marine Le Pen, cheffe de file des députés du RN, sur X, accusant le chef de l'Etat de "brader des pans entiers de souveraineté" nationale.

Le palais présidentiel de l'Elysée a réfuté toute tactique électoraliste et affirmé que M. Macron ambitionnait d'"influer sur l'agenda" de la prochaine Commission européenne à l'issue des élections de juin.

Une légitimité qui sera mesurée à l'aune des réactions européennes. Et aux retours des Français, qui estiment à 57% que le président n'a pas eu "d'influence réelle" sur l'UE depuis 2017, selon un sondage Elabe publié jeudi.

Vendredi, le président prendra aussi la température lors d'un échange avec des étudiants à Strasbourg (Est), où il signera un nouveau contrat triennal pour conforter la stature européenne de la capitale alsacienne qui accueille le parlement européen.

 

 


UE: une majorité de Français doute de l'influence réelle de Macron, selon un sondage

Le président français Emmanuel Macron arrive pour une conférence de presse à la fin du sommet du Conseil européen au siège de l'UE à Bruxelles, le 18 avril 2024. (Photo de Ludovic MARIN / AFP)
Le président français Emmanuel Macron arrive pour une conférence de presse à la fin du sommet du Conseil européen au siège de l'UE à Bruxelles, le 18 avril 2024. (Photo de Ludovic MARIN / AFP)
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  • 66% des Français estiment qu'Emmanuel Macron ne doit pas «s'impliquer davantage dans la campagne» car «ce n'est pas son rôle en tant que président de la République»
  • Pour autant 61% des Français jugent qu'une «défaite nette» de la liste Renaissance serait un «échec personnel» pour le président

PARIS: Une majorité de Français (57%) doute de l'influence réelle d'Emmanuel Macron sur le fonctionnement et les décisions prises par l'Union européenne depuis 2017, selon un sondage Elabe publié jeudi pour BFMTV.

Alors qu'Emmanuel Macron va mettre en avant son bilan européen lors d'un discours jeudi matin à la Sorbonne, seuls 42% des Français estiment que le chef de l'État a eu "une influence réelle sur le fonctionnement et les décisions prises par l’Union européenne" depuis 2017.

L'électorat d’Emmanuel Macron porte un regard très positif sur son rôle (70%), alors que la majorité des électeurs de gauche (56%) et d'extrême droite (68%) sont plutôt négatifs.

A un mois et demi des européennes, 66% des Français estiment qu'Emmanuel Macron ne doit pas "s'impliquer davantage dans la campagne" car "ce n'est pas son rôle en tant que président de la République".

Pour autant 61% des Français jugent qu'une "défaite nette" de la liste Renaissance serait un "échec personnel" pour le président.

En cas de large défaite du camp présidentiel, une majorité (61%) souhaite qu'Emmanuel Macron "change significativement d'orientation politique", une opinion partagée par 43% des électeurs du président au premier tour de l'élection présidentielle en 2022.

Pour autant, seule une minorité de Français (46% contre 54%) réclame une dissolution de l’Assemblée nationale et l'organisation d'élections législatives anticipées. Encore moins (39% contre 61%) souhaitent un changement de Premier ministre.

Si 58% des sondés déclarent tenir compte avant tout d'enjeux de politique européenne dans leur décision de vote, 41% concèdent qu'ils feront leur choix avant tout sur des enjeux nationaux, surtout parmi les électeurs RN (61%).

Ce sondage a été réalisé par internet du 23 au 24 avril à partir d'un échantillon de 1.001 personnes, représentatif des résidents de France métropolitaine âgés de 18 ans et plus. Selon les résultats, la marge d'erreur est comprise entre +/- 1,4 point et +/-3,1 points.


Evénements climatiques extrêmes: la Croix-Rouge souhaite un sac d'urgence par Français

Cette photographie prise le 5 avril 2024 montre une enseigne de pharmacie affichant une température de 31 degrés Celsius à Bordeaux, dans le sud-ouest de la France. (AFP)
Cette photographie prise le 5 avril 2024 montre une enseigne de pharmacie affichant une température de 31 degrés Celsius à Bordeaux, dans le sud-ouest de la France. (AFP)
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  • Le dérèglement climatique fait déjà partie du quotidien des Français mais ils ne sont pas prêts y répondre, estime une étude de la Croix-Rouge
  • «75% (des Français) ne se sentent pas préparés face aux inondations, 73% face aux incendies de forêt, 59% face à la canicule», selon un sondage OpinionWay

PARIS: Un "sac d’urgence" pour chaque Français en cas d’évacuation face aux événements climatiques extrêmes: c’est l’une des préconisations de la Croix-Rouge française dans un rapport sur la résilience de la société française, qui fait état d'un manque de préparation.

Canicule, sécheresse, incendies de forêt, inondations: le dérèglement climatique fait déjà partie du quotidien des Français mais ils ne sont pas prêts y répondre, estime une étude de la Croix-Rouge, en collaboration avec le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Crédoc), publiée jeudi.

"75% (des Français) ne se sentent pas préparés face aux inondations, 73% face aux incendies de forêt, 59% face à la canicule", selon un sondage OpinionWay pour la Croix-Rouge française.

"La préparation face aux crises est l'affaire de tous. Elle concerne bien entendu les pouvoirs publics, mais aussi les acteurs associatifs et privés, ainsi que les citoyens", déclare à l'AFP Philippe Da Costa, président de la Croix-Rouge française.

Pour affronter "l’inévitable", l’association a dix recommandations. Dont la constitution du "Catakit", un sac d'urgence par personne, prêt en cas d'évacuation et comprenant par exemple de la nourriture non périssable, de l'eau, une trousse de secours, des vêtements et une lampe torche, pour attendre l'arrivée de l'aide.

"Seuls 11% des Français disposent d’un sac d’urgence prêt, et moins de la moitié connaît les objets indispensables qu’il faut y glisser", détaille le sondage OpinionWay.

Autre recommandation: la formation aux gestes et aux comportements qui sauvent. "On estime aujourd’hui à seulement 40% le nombre de Français ayant récemment suivi une formation aux gestes qui sauvent, contre 95% Norvège ou 80% en Allemagne", note le rapport.

Or, rappelle la Croix-Rouge, "si les individus sont informés et formés, l’impact des événements climatiques extrêmes sur les populations sera moindre et les dégâts matériels réduits".

L'association suggère que chaque Français ait a minima connaissance des réflexes vitaux: "savoir identifier les alertes sonores, avoir les bons comportements en cas de catastrophes" en plus de la maîtrise des gestes qui sauvent.

"Les événements climatiques extrêmes se manifestent de manière plus fréquente, plus intense, plus longue, et plus étendue géographiquement, rappelle Philippe Da Costa. "Tous les territoires de l'Hexagone et d’Outre-mer sont concernés".

Pour la Croix-Rouge, "il n’y a pas de fatalité". "Se préparer pour savoir comment agir avant les crises et comment réagir pendant les crises" pourra limiter l'impact des évènements climatiques extrêmes sur les populations.